Le respect ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
Le respect est la perception
d'une espèce de « distance » entre moi et autrui. Cette distance (qui est déjà
dans l'expression « tenir en respect ») peut être le signe d'un recul devant la
force brutale, une reconnaissance de la supériorité physique ; elle peut être
sociale, et marquer une distance hiérarchique (dans ce cas le personnage
respecté apparaît investi d'une autorité sociale supérieure : c'est le cas des
différences de grades dans l'armée et des « marques extérieures de respect » des
subordonnés à l'égard de leurs supérieurs) ; elle peut être temporelle (respect
des jeunes pour les vieillards) ; elle peut enfin être due à une différence de
valeur personnelle. Cette valeur, que le sujet respecte à travers son attitude
déférente envers l'autre, peut elle-même être de nature variable : ce peut être
la science, la compétence, le talent, le génie, artistique, ou des valeurs
humaines (respect de la personne humaine, ou d'un sentiment humain) ou une
valeur morale incarnée par un homme.
L'autorité et le prestige de celui que l'on respecte n'ont plus dans ce cas de
répondants sociaux : le saint du désert peut être plus respecté qu'un chef
d'État.
A mesure qu'on approfondit le respect, la valeur morale paraît en être la
véritable source. C'est la valeur qu'on respecte, la valeur qu'on apprécie,
qu'on voudrait incarner et qui paraît la plus digne de la personne humaine
(cette valeur peut être aussi bien une excellence particulière de la raison, du
sentiment ou du vouloir). Dans ses dégradations successives, le respect envers
tel ou tel personnage implique une sorte de crédit a priori dotant ce personnage
d'une certaine valeur morale sur la foi des conditions perceptibles de sa
respectabilité. Et il suffit que l'on sache que tel grand personnage social est
malhonnête ou que tel médecin a manqué de sens moral pour que le respect ancien
s'étiole, même si l'un a gardé son autorité et l'autre sa compétence. A la
limite inférieure, le respect a disparu pour faire place à son ombre, la
crainte. « Le respect », dit Kant dans « Critique de la raison pratique »
(1788), s'applique toujours uniquement aux personnes, jamais aux choses.
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