La pratique du contrepoint dans « Une partie de campagne »
Publié le 02/08/2014
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La pratique du contrepoint
Dans « Une partie de campagne «, le pessimiste Maupassant adapte ]a technique du contrepoint, exploitée par Flaubert. Dans Madame Bovarv, l'auteur intercale la déclaration d'amour d'Emma et de son amant avec les tirades des officiels décernant des prix aux paysans lors des comices agri¬coles. Le contrepoint permet de briser l'illusion romanesque dans le cadre d'une intrigue réaliste. Dans « Une partie de campagne «, la narration met en place un système d'allusions à la fois externes et internes à l'oeuvre de Maupassant et contribue à ridiculiser les personnages par l'exploitation du décalage entre la situation et les personnages. En outre, l'auteur pratique des effets de contrastes en multipliant les couples antithétiques. Le pro¬cédé suggère l'absence de communication entre les protagonistes.
«
E X P 0 S É S F C H E S
~ Il -LE PRINCIPE DE LA RÉPÉTITION
Le contraste de la mère et la fille
La narration juxtapose de manière constante les évolutions de la mère et de la
fille.
Mn1e Dufour fournit un contrepoint grotesque à J"esthétique triomphante de
sa fille -peut-être l'auteur suggère-t-il par là le destin inéluctable de la beauté ra
vagée par
le temps.
Ainsi.
les mouve111ents des deux femmes entrent dans un sys
tème d'échos dévalorisant.
La mère descend lourdcn1cnt de la voiture alors que la
fille en saute avec légèreté
; celle-ci se donne de l'élan ~ur la balançoire tandis que
son père doit fournir un réel travail pour ébranler la masse de son épouse.
Un refus du sentimentalisme
La pudeur et le sentimentalisme de la jeune fille contrastent avec le manque de
retenue de sa mère.
vautrée sur
l'herbe - et gigotant à cause des fourmis.
Son corps
apparaît comme une
traduction vulgaire de l'érotisme dégagé par Henriette.
Mais, en tant que tel, il rend visible la signification réelle de l'attirance née du
désir.
En fait, la mère incarne la version grotesque, mais aussi naturelle, du corps et
de la pulsion (même schéma dans« Yvette»).
Les deux promenades
Seule la promenade d'Henrielle est réellement décrite par la narration qui, ce
pendant, ne s'interdit pas d'évoquer, en contrepoint, les évolutions de la mère.
Le
texte.
lapidaire,
se contente de signaler le dévouement du canotier qui se sacrifie en
partant avec Mme Dufour.
Dans le silence des bosquets, les jeunes gens entendent
les petits cris émis par la grosse dame.
~Ill -L'ABSENCE DE COMMUNICATION
Le maniement du langage
Au cours du déjeuner, Maupassant pratique le contrepoint en juxtaposant les des
criptions des personnages masculins.
Les canotiers fournissent un contraste à l'évo
cation du père et de l'apprenti aux cheveux jaunes
-l'épithète en dit long sur les in tentions ironiques de l'auteur.
Cette présence bestiale s'impose comme une parfaite
caricature, construite en opposition avec
le stéréotype du canotier sportif et beau parleur.
Toujours vu de \'extérieur et privé de parole, l'employé se manifeste au tra
vers
de ses attitudes: il dévore en silence, tousse sur sa patronne, hoche« sa tignasse
de
lin» et s'enivre; il donnera la conclusion du récit en bâillant.
Jusque-là prolixe et
vantard,
le père boude.
Le dialogue est monopolisé par la mère, bonne commerçante
et femme curieuse.
ainsi que par les canotiers, habiles à
se faire valoir.
Conclusion: Au dénouement, la présence d'un mari semblable à une brute
aux côtés d'Henriette équivaut à une
usurpation : sur un mode dévalué,
elle évoque
l'étreinte passionnée sous le bosquet.
Le mari n'est pas dans le
ton : il
manque de justesse.
Alors que la mère représente une caricature de sa fille, ]'employé entre en
totale opposition avec Henri.
L'auteur
s'interdit tout jugement moral sur
l'attitude des deux femmes, totalement justifiée, semble-t-il, par la médio
crité de leurs lamentables compagnons..
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