LE JUGEMENT.
Publié le 06/04/2014
Extrait du document
De ces cinq raisons, que lon peut en fait résumer dans les trois
premières, c'est sans doute le constat des limites intrinsèques de toute
démonstration qui a préoccupé le plus les philosophes. Déjà, Platon
signalait dans le Livre II de la République les limites de toute pensée
discursive (dianoïa) dans la mesure où elle reste assujettie à la validité
du point de départ. Le caractère hypothétique de toute démonstration
impliquait, selon lui, la recherche d'un principe an-hypothétique, inconditionné,
qui serait à la fois fondement irrécusable et principe suprême
d'intelligibilité. La philosophie classique, elle aussi, s'est efforcée de
résoudre ce problème en donnant un statut inébranlable aux « principes
premiers «, aux « semences de vérité «, aux « vérités premières « qu'il
appartient à la pensée discursive de « travailler « mais pas d'inventer.
De même, chez Pascal, les deux facteurs fondamentaux de tout processus
de connaissance sont d'une part les principes premiers, saisissables
immédiatement (c'est-à-dire sans médiation d'une argumentation). et
d'autre part la déduction logique propre au raisonnement.
«
méthodique »L méthode positive d'invention et de raisonnement : rien
ne manque à l'homme pour trouver le vrai.] Mais la question de savoir si le jugement est bien un acte de la volonté statuant sur les « contenus » que lui propose l'entendement allait diviser les héritiers de Descartes.
[Pour Spinoza.
il y a un jugement virtuel dans toute idée, et I' oppo sition cartésienne entre entendement et volonté perd toute signification (puisque chaque idée enveloppe un pouvoir d'affirmation ou de néga tion).
La valeur d'un «jugement » dépend donc des représentations plus ou moins adéquates que l'homme se fait des choses.] • Peut-on cependant définir rigoureusement le jugement si lon ne prête attention à la nature logique de lopération mentale qu'il consti tue ? L'analyse des conditions de possibilité de cet acte mental (attri bution d'un prédicat à un sujet dans la proposition élémentaire S est P) a fait lobjet de réflexions diverses dans l'histoire de la philosophie.
On doit à Aristote d'avoir mis au point une théorie complète de la proposition et des enchaÎnements de propositions que constituent les raisonnements (cf.
syllogismes).
Kant a repris ce fil conducteur de la logique pour définir les conditions à partir desquelles lentendement ordonne et structure une expérience par ailleurs inscrite dans les cadres a priori de la sensibilité (cf.
plus haut, U.I.
perception).
• Voici quelques points de vue permettant de préciser les questions évoquées : a) Problématisation du jugement.
Deux variantes philosophiques d'une recherche affirmant l'autonomie du sujet humain : • le doute méthodique comme suspension provisoire du jugement.
Cf.
Descartes.
• le doute sceptique comme abstention reposant sur une relativisa- tion intégrale des possibilités de connaissance objective.
b) Distinction critique entre deux types de jugements : • les opinions, véhicules des préjugés et des faux-semblants ; • les propositions résultant d'une réélaboration critique, et attestant une pensée maîtrisée, c'est-à-dire intégrant dans son exercice des exi gences conscientes de rigueur.
c) Repérage des obstacles et jugement maîtrisé.
La recherche des conditions qui peuvent prémunir le jugement contre les apparences, les faux-semblants et les illusions, conduit à trois types d'approche critique : • problématisation de /'évidence; • approche critique des généralisations abusives ; • remise en question des formes de représentation collective, des idées reçues, des préjugés les plus répandus.
• L'objection sceptique (nécessité de suspendre tout jugement) et sa prise en charge par les philosophes (premier approfondisse ment).
L'affirmation que la vérité existe, et que celle-ci peut être décou verte par une recherche méthodique, exposée dans un discours rigou-
91.
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