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- Approche, dit Kate.

Publié le 30/10/2013

Extrait du document

- Approche, dit Kate. Et pendant que la fille attendait à côté du bureau, Kate écrivit une adresse sur l'enveloppe et la timbra.) Je voudrais que tu me fasses une petite course. Va chez Bell acheter une boîte de cinq livres de crottes de chocolat et une autre d'une livre. La plus grosse sera pour toi et tes camarades. Puis, tu iras chez Krough m'acheter deux brosses à dents et un tube de pâte dentifrice. « Thérèse était nettement soulagée. « Tu es une bonne petite, continua Kate. Je t'ai observée. Je suis malade, Thérèse. Si tu te tiens bien, tu me remplaceras pendant que je serai à l'hôpital. - Vous... vous allez aller à l'hôpital ? - Je ne sais pas encore, ma chérie. Mais j'aurai besoin de toi. Voici de l'argent pour les chocolats. Et n'oublie pas les brosses à dents. - Oui, madame. Merci. J'y vais tout de suite ? - Oui. Et sors sans faire de bruit. Il faut que les chocolats soient une surprise. - Je vais sortir par-derrière. « Elle se dirigea vers la porte. Kate la rappela. « Ah ! J'oubliais. Tu veux me jeter ça dans une boîte ? - Mais oui, madame. Sûrement. Rien d'autre ? - Non, c'est tout, chérie. « Lorsque la fille fut sortie, Kate posa ses bras et ses mains sur le bureau de façon que chacun des doigts tordus fût soutenu. Le moment était venu. Peut-être l'avait-elle toujours su. Sans doute. Mais ce n'était pas la peine d'y penser tout de suite. Elle y reviendrait. On allait emmener Joe, mais il y aurait quelqu'un d'autre, et puis Ethel existait toujours. Tôt ou tard, tôt ou tard... Inutile d'y penser tout de suite. Elle épia un feu follet qui apparaissait et se cachait. C'était lorsqu'elle avait pensé à son fils aux cheveux blonds que l'image s'était dessinée. C'était ce visage blessé, étonné, désespéré, qui avait réveillé le souvenir. Elle était une toute petite fille avec un visage aussi joli et aussi frais que celui de son fils... une toute petite fille. Elle savait déjà qu'elle était plus jolie et plus intelligente que les autres. Mais il arrivait qu'une terreur l'enveloppât, car elle se croyait entourée par une forêt d'ennemis hauts comme des arbres. À ces moments-là, chaque pensée, chaque mot, chaque regard était destiné à la blesser, et elle n'avait nulle part ou se cacher. Alors, elle pleurait de terreur car il n'y avait pas d'issue. Puis, un jour, elle lut un livre - elle savait déjà lire à cinq ans. Elle se rappelait la couverture marron, déchirée, le titre en lettres d'argent, et les pages sales. C'était Alice au pays des Merveilles. Kate bougea lentement les mains et se souleva légèrement pour soulager ses bras. Elle se rappelait les illustrations, Alice avait des longs cheveux. Mais ce qui avait changé sa vie, c'était la bouteille sur laquelle était écrit : « Bois-moi. « C'était Alice qui lui avait appris cela. Lorsque la forêt de ses ennemis l'encerclait, elle n'était pas prise au dépourvu. Dans sa poche, elle avait une bouteille d'eau sucrée, et, sur l'étiquette bordée de rouge, était écrit : « Bois-moi. « Si elle en buvait une gorgée, elle devenait de plus en plus petite. Ses ennemis pouvaient toujours la chercher. Cathy était sous une feuille, ou cachée dans une fourmilière. Et elle riait. Ils ne pouvaient pas la trouver. Nulle porte ne pouvait l'enfermer, nulle porte ne pouvait l'empêcher d'entrer, car elle pouvait passer sous les portes. Et, toujours, Alice était là, compagne de jeu, Alice qui l'aimait et avait confiance en elle. Alice était son amie, toujours prête à la recevoir dans le royaume du minuscule. C'était si agréable... si agréable que cela valait presque la peine d'être malheureux. Et puis, il y avait toujours autre chose en réserve. Une menace et une sécurité. Si elle buvait toute la bouteille, elle s'évaporerait, disparaîtrait, et cesserait d'exister. Et mieux que tout, lorsqu'elle cesserait d'être, elle n'aurait jamais été. Oh ! La douce sécurité. Parfois, dans son lit, elle buvait assez de « Bois-moi « pour atteindre la taille d'une puce. Mais elle n'avait jamais disparu - elle n'en avait pas eu besoin. C'était son issue, ignorée de tous. Kate secoua tristement la tête en se rappelant la petite fille. Elle se demanda pourquoi elle n'empruntait plus le couloir secret. Cela l'avait sauvée de bien des désastres. Comme la lumière était jolie, qui filtrait sous les feuilles d'un trèfle. Cathy et Alice marchaient en se tenant par la taille parmi les herbes, grandes comme des tours... les meilleures amies du monde. Et Cathy n'avait jamais été forcée de boire tout le « Bois-moi «, car elle avait Alice. Kate posa son front sur le buvard, entre ses mains déformées. Elle avait froid, elle était seule, désolée. Quoi qu'elle eût pu faire, elle y avait été forcée. Elle était différente. Elle avait quelque chose de plus que les autres. Elle releva la tête et ne tenta même pas d'essuyer les larmes qui inondaient ses joues. C'était vrai. Elle était plus forte que les autres. Elle avait quelque chose qu'ils n'avaient pas. Le visage sombre de Cal flotta dans l'air, devant elle, et ses lèvres avaient un sourire cruel. Un poids l'écrasait, appuyant sur ses poumons. Ils avaient quelque chose qu'elle n'avait pas. Et elle ne savait pas ce que c'était. Lorsqu'elle eut compris cela, elle fut prête. Elle comprit qu'elle était prête depuis longtemps, peut-être depuis toujours. Son cerveau fonctionnait comme un cerveau de bois, son corps se mouvait par saccades, comme une marionnette mal actionnée, mais elle fit tout ce qu'elle avait à faire. Il était midi, car les filles chahutaient dans la salle à manger. Ces fainéantes venaient juste de se lever. Kate s'acharna après la poignée de la porte et dut finalement la tourner en la roulant entre ses paumes. Les filles s'étranglèrent au milieu de leurs rires et la regardèrent. Le cuisinier entra à son tour. Kate était un fantôme malade, difforme, et assez horrible. Elle s'appuya contre le mur de la salle à manger et sourit. Ce qui effraya un peu plus les filles, car les lèvres de Kate semblaient ouvertes pour pousser un cri. « Où est Joe ? demanda-t-elle. - Il est sorti, madame. - Ecoutez, dit-elle. Je n'ai pas dormi depuis longtemps. Je vais prendre un somnifère. Je ne veux pas être dérangée. Que l'on ne m'apporte pas de dîner. Je veux faire le tour du cadran. Dites à Joe que je ne veux voir personne sous aucun prétexte avant demain matin. Compris ? - Oui, madame. - Bonne nuit. Je sais que c'est l'après-midi, mais je peux bien dire bonne nuit. - Bonne nuit, madame «, répondit le choeur obéissant. Kate se retourna et marcha jusqu'à sa chambre, se déplaçant comme un crabe. Elle ferma sa porte, jeta un coup d'oeil autour d'elle, puis s'assit à son bureau. Cette fois, malgré la douleur, elle força sa main à écrire en lettres bien formées : Je lègue tout ce que je possède à mon fils Aron Trask. Elle data, et signa : Catherine Trask. Ses doigts retombèrent, elle se leva et laissa son testament bien en vue sur le bureau. Elle emplit une tasse de thé froid, l'emporta dans la chambre grise, et la posa sur la table de lecture. Puis elle alla à sa coiffeuse, peigna ses cheveux, frotta un peu de rouge sur tout son visage, mit une légère couche de poudre, et maquilla ses lèvres avec son rouge pâle habituel. Puis elle se nettoya les ongles et les lima. Lorsqu'elle eut refermé la porte de la chambre grise, la lumière extérieure disparut, et il ne resta que la lampe de lecture qui projetait son cône sur la table. Elle arrangea ses oreillers et s'assit. Elle cala sa tête dans une position confortable. Elle se sentait gaie comme si elle allait à une fête. Elle souleva la chaîne, dévissa le petit tube, et le secoua. La capsule tomba dans sa main. Elle lui sourit. « Mange-moi «, dit-elle.

« elle n’avait jamaisdisparu –elle n’en avait paseubesoin.

C’étaitsonissue, ignorée de tous.

Kate secoua tristement latête enserappelant lapetite fille.Ellesedemanda pourquoi elle n’empruntait pluslecouloir secret.Celal’avait sauvée debien desdésastres.

Comme la lumière étaitjolie, quifiltrait souslesfeuilles d’untrèfle.

CathyetAlice marchaient en se tenant parlataille parmi lesherbes, grandes commedestours… lesmeilleures amies du monde.

EtCathy n’avait jamaisétéforcée deboire toutle« Bois-moi », carelle avait Alice.

Kate posa sonfront surlebuvard, entresesmains déformées.

Elleavait froid, elleétait seule, désolée.

Quoiqu’elle eûtpufaire, elleyavait étéforcée.

Elleétait différente.

Elle avait quelque chosedeplus quelesautres.

Ellereleva latête etne tenta même pas d’essuyer leslarmes quiinondaient sesjoues.

C’était vrai.Elleétait plusforte queles autres.

Elleavait quelque chosequ’ilsn’avaient pas. Le visage sombre deCal flotta dansl’air,devant elle,etses lèvres avaient unsourire cruel.

Unpoids l’écrasait, appuyantsursespoumons. Ils avaient quelque chosequ’elle n’avait pas.Etelle nesavait pasceque c’était. Lorsqu’elle eutcompris cela,ellefutprête.

Ellecomprit qu’elleétaitprête depuis longtemps, peut-êtredepuistoujours.

Soncerveau fonctionnait commeuncerveau de bois, soncorps semouvait parsaccades, commeunemarionnette malactionnée, mais elle fittout cequ’elle avaitàfaire. Il était midi, carlesfilles chahutaient danslasalle àmanger.

Cesfainéantes venaient juste deselever. Kate s’acharna aprèslapoignée delaporte etdut finalement latourner enlaroulant entre sespaumes. Les filles s’étranglèrent aumilieu deleurs riresetlaregardèrent.

Lecuisinier entraàson tour. Kate étaitunfantôme malade,difforme, etassez horrible.

Elles’appuya contrelemur de la salle àmanger etsourit.

Cequi effraya unpeu plus lesfilles, carleslèvres deKate semblaient ouvertespourpousser uncri. « Où estJoe ? demanda-t-elle. – Il estsorti, madame. – Ecoutez, dit-elle.Jen’ai pasdormi depuis longtemps.

Jevais prendre unsomnifère.

Je ne veux pasêtre dérangée.

Quel’onnem’apporte pasdedîner.

Jeveux faireletour du cadran.

DitesàJoe que jene veux voirpersonne sousaucun prétexte avantdemain matin.

Compris ? – Oui, madame. – Bonne nuit.Jesais quec’est l’après-midi, maisjepeux biendirebonne nuit. – Bonne nuit,madame », réponditlechœur obéissant. Kate seretourna etmarcha jusqu’àsachambre, sedéplaçant commeuncrabe. Elle ferma saporte, jetauncoup d’œil autour d’elle,puiss’assit àson bureau.

Cettefois, malgré ladouleur, elleforça samain àécrire enlettres bienformées : Je lègue toutce que jepossède àmon filsAron Trask.

Elle data, etsigna : Catherine Trask.

Ses doigts retombèrent, elleseleva etlaissa sontestament bienenvue surlebureau. Elle emplit unetasse dethé froid, l’emporta danslachambre grise,etlaposa surlatable de lecture.

Puisellealla àsa coiffeuse, peignasescheveux, frottaunpeu derouge sur tout sonvisage, mitune légère couche depoudre, etmaquilla seslèvres avecsonrouge pâle habituel.

Puisellesenettoya lesongles etles lima. Lorsqu’elle eutrefermé laporte delachambre grise,lalumière extérieure disparut,etil ne resta quelalampe delecture quiprojetait soncône surlatable.

Ellearrangea ses oreillers ets’assit.

Ellecala satête dans uneposition confortable.

Ellesesentait gaie comme sielle allait àune fête.

Ellesouleva lachaîne, dévissa lepetit tube, etlesecoua. La capsule tombadanssamain.

Elleluisourit. « Mange-moi », dit-elle.. »

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