1 :« C’est d’abord à l’injustice que nous sommes sensibles : « Injuste ! Quelle injustice ! nous écrions-nous. C’est bien sur le mode de la plainte que nous pénétrons dans le champ de l’injuste et du juste. Et même au plan de la justice instituée, devant les cours de justice, nous continuons de nous comporter en « plaignants « et de « porter plainte «. Or le sens de l’injustice n’est pas seulement plus poignant mais plus perspicace que le sens de la justice : car la justice est le plus souvent ce qui manque et l’injustice ce qui règne. Et les hommes ont une vision plus claire de ce qui manque aux relations humaines que de la manière droite de les organiser. « (Ricœur, Soi-même comme un autre)
2 : « Le juste est en quelque sorte une proportion « (Aristote, EN, V)
3 : « A vrai dire, je crois qu’il est rare que les délibérations des Athéniens et des autres Grecs aient pour fin de déterminer quel est le parti le plus juste ou le plus injuste, car ils pensent qu’il s’agit là de notions claires. « (Platon, Alcibiade Majeur)
4 : « J’essaierais de montrer comment des premiers mouvements du cœur s’élèvent les premières voix de la conscience et comment des sentiments d’amour et de haine s’’élèvent les premières notions du bien et du mal. Je ferais voir que justice et bonté ne sont point seulement des mots abstraits, de purs êtres moraux formés par l’entendement, mais de véritables affections de l’âme éclairée par la raison et qui ne sont qu’un progrès ordonné de nos affections primitives «, « l’amour des hommes dérivé de l’amour de soi est le principe de la justice humaine « (Rousseau, Emile, IV), (« étendons l’amour propre sur les autres êtres, nous le transformerons en vertu « (Ibidem))
5 : « Souvent pendant ton enfance, je t’ai entendu à l’école et ailleurs, lorsque tu jouais aux osselets ou à quelque autre jeu : or tu ne marquais point d’embarras sur le juste et l’injuste, mais tu disais, le verbe haut et crânement, de tel qui se trouvait parmi tes petits camarades qu’il était méchant, injuste, qu’il te faisait du tort. « (Platon, Alcibiade)
6 : « que des vices déguisés « (La Rochefoucauld, Maximes), « l’intérêt parle toutes sortes de langues et joue toutes sortes de personnages, même celui de désintéressé « (Ibidem)
7 : « le juste, donc, est ce qui est conforme à la loi et ce qui respecte l’égalité, et l’injuste ce qui est contraire à la loi et ce qui manque à l’égalité «. (Aristote, Ethique à Nicomaque, V, 2)
8 : « Si veult le Roy, si veult la loi «
9 : « plus constante manière de raisonner est d’établir toujours le droit par le fait « « favorable aux tyrans « (Rousseau, Contrat social, I, 2)
10 : « L’office de la loi est de fixer par de grandes vues les maximes générales du droit, d’établir des principes féconds en conséquences et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque matière « (Portalis, rédacteur du Code Napoléon)
11 : « Quand la loi pose une règle générale, et que là-dessus survient un cas en dehors de la règle générale, on est alors en droit, là où le législateur a omis de prévoir le cas et a péché par excès de simplification de corriger l’omission et de se faire l’interprète de ce qu’eût dit le législateur lui-même s’il avait été présent à ce moment, et de ce qu’il aurait porté dans sa loi s’il avait connu le cas en question. « (Aristote, EN, V, 14).
12 : « Aller devant le juge, c’est aller devant la justice car le juge tend à être comme une justice vivante «. (A, EN, V)
13 : « La justice est le doute sur le droit qui sauve le droit. « (Alain).
14« Nous observons que tout le monde entend signifier par justice cette sorte de disposition qui rend les hommes aptes à accomplir les actions justes et qui les fait agir justement et vouloir les choses justes. « (Aristote, EN, V, 1).
15 : « toutes celles qui tendent à produire ou à conserver le bonheur avec les éléments qui le composent pour la communauté politique « (A, EN, V, 3).
16 : « La justice, seule de toutes les vertus est considérée comme un bien étranger, parce qu’elle a rapport à autrui : elle accomplit ce qui est avantageux à un autre, soit à un chef soit à un membre de la communauté « (A, EN, V)
17 : « c’est surtout à cause de la justice que les hommes sont appelés bons « (Cicéron, Des devoirs, II, 6)
18 : « De cette manière les actes de toutes les vertus peuvent relever de la justice en ce sens que celle-ci ordonne l’homme au bien commun « (Thomas d’Aquin, ST, II)
19 : « vertu qui rend à chacun ce qui lui appartient « (Saint Augustin, Cité de Dieu),
20 : « égaler objet à objet, de telle façon que tout ce que l’un a reçu en plus en prenant ce qui est à l’autre, il le lui restitue en égale quantité « (Thomas d’Aquin, ST, II) ; « on rend à une personne particulière quelque chose en remplacement de ce que l’on a reçu d’elle «.
21 : « le juste milieu vertueux ne se détermine pas par une égalité de chose à chose mais selon une proportion des choses aux personnes : de telle sorte que si une personne est supérieure à une autre, ce qui lui est donné doit dépasser ce qui est donné à l’autre « (ST, II)
22 : « Tous les hommes reconnaissent que la justice dans la distribution doit se fonder sur un mérite de quelque sorte, bien que tous ne désignent pas le même mérite : les démocrates le font consister dans une condition libre, les partisans de l’oligarchie soit dans la richesse soit dans la noblesse de race, et les défenseurs de l’aristocratie dans la vertu « (EN, V)
23 : « ce qui égale s’ajuste dit-on communément « (ST, II)
24 : « un juste milieu entre l’injustice commise et l’injustice subie, l’une consistant à avoir trop, et l’autre trop peu. « (EN, V, 9)
25 : « Le juste n’est autre que l’avantageux au plus fort « (Platon, République, I)
« la nature révèle que ce qui est juste, c’est que celui qui vaut plus ait le dessus sur celui qui vaut moins. « (Ibidem)
26 : « l’essence moyenne entre ce qui est le meilleur : commettre l’injustice sans avoir à en payer la peine, et ce qui est le pire : avoir été victime de l’injustice sans être capable d’en obtenir réparation « (République, 359)
27 : « en train d’aller au même but que l’injuste en raison de la convoitise du plus, de cette fin qu’il est naturel à tout être de poursuivre comme un bien, tandis que par la contrainte la loi l’en détourne vers le grand cas qu’il doit faire de l’égalité ! « (Rép).
28 : « pour avoir le courage de ne pas toucher au bien d’autrui, alors qu’il pourrait prendre sans crainte ce qu’il voudrait sur l’agora, s’introduire dans les maisons pour s’unir à qui lui plairait, tuer les uns, briser les fers des autres, et faire tout à son gré, devenu l’égal d’un dieu parmi les hommes « (Rép)
29 : « sera fouetté, mis à la torture, chargé de chaînes, on lui brûlera les yeux, enfin, ayant souffert tous les maux, il sera crucifié et connaîtra qu’il ne faut point vouloir être juste mais le paraître « (Rép)
30 : « personne n’est juste volontairement, mais par contrainte, la justice n’étant pas un bien individuel puisque celui qui se croit capable de commettre l’injustice la commet. Tout homme en effet pense que l’injustice est individuellement plus profitable que la justice. « (Rép).
31 : « faute d’avoir un naturel divin, qui ne peut supporter de commettre l’injustice, ou faute d’avoir acquis une connaissance qui nous en détourne, autrement, il n’y a personne en vérité pour être volontairement juste «. (Rép)
32 : « Je crois que dans la Cité, le complément des vertus que nous avons examinées, tempérance, courage et sagesse, est cet élément qui leur a donné à toutes le pouvoir de naître, et après leur naissance, les sauvegarde autant qu’il est présent. « (Rép)
33 : « Une cité, une armée, une bande de brigands ou de voleurs, ou toute autre société qui poursuit en commun un but injuste pourrait-elle mener à bien quelque entreprise si ses membres violaient entre eux les règles de la justice ? « (Rép)
34 : « ce principe qui ordonne à chacun de remplir sa propre fonction pourrait bien être en quelque manière la justice « (Platon, Rép)
35 : « Si les hommes étaient ainsi disposés par la Nature qu’ils n’eussent de désirs que pour ce qu’enseigne la vraie raison, certes la société n’aurait besoin d’aucune loi, il suffirait simplement d’éclairer les hommes par des enseignements moraux pour qu’ils fissent d’eux-mêmes et d’une âme libre ce qui est vraiment utile. « (Spinoza, Traité théologico-politique)
36 : « De là vient que nulle société ne peut subsister sans un pouvoir de commandement et une force, et par suite sans des lois qui modèrent et contraignent l’appétit du plaisir et les passions sans frein. « (Ibidem).
37 : « il est évident qu’il est parfaitement sensé et parfois même nécessaire de parler de lois ou de décisions injustes «. « En passant de tels jugements, nous impliquons qu’il y a un étalon du juste et de l’injuste qui est indépendant du droit positif et lui est supérieur : un étalon grâce auquel nous sommes capables de juger le droit positif. « (Léo Strauss, Droit naturel et histoire).
38 : « A : Tes ordres, à ce que je pense ont moins d’autorité que les lois non écrites et imprescriptibles de Dieu. Tous ceux qui sont ici m’approuvent, Ils le diraient si la crainte ne leur fermait la bouche. / C : L’un attaquait sa patrie, l’autre la défendait. Faut-il traiter de la même manière l’honnête homme et le coupable ? / A : Qui sait si ces distinctions sont valables chez les morts ?/ C : Un ennemi, même lorsqu’il est mort, ne devient pas pour cela un ami. / A : Je ne suis pas née pour partager la haine, mais l’amour «
« ce n’est pas Zeus qui l’a proclamée ! Ce n’est pas la Justice, assise aux côtés des dieux infernaux ; non, ce ne sont pas là les lois qu’ils ont jamais fixées aux hommes, et je ne pensais pas que tes défenses à toi fussent assez puissantes pour permettre à un mortel de passer outre à d’autres lois, aux lois non écrites, inébranlables, des dieux ! Elles ne datent, celles-là, ni d’aujourd’hui ni d’hier et nul ne sait le jour où elles ont paru. « (Sophocle, Antigone)
39 : « Il existe une loi vraie, c’est la droite raison, conforme à la nature, répandue dans tous les êtres, toujours d’accord avec elle-même, non sujette à périr, qui nous appelle impérieusement à remplir notre fonction, nous interdit la fraude et nous en détourne. Ni le Sénat ni le peuple ne peuvent nous dispenser de lui obéir. Cette loi n’est pas autre à Athènes, autre à Rome, autre aujourd’hui, autre demain, c’est une seule et même loi, éternelle et immuable, qui régit toutes les nations et en tout temps. ; il y a pour l’enseigner et la prescrire à tous un dieu unique. Qui n’obéit pas à cette loi s’ignore lui-même et, parce qu’il aura méconnu la nature humaine, il subira par cela même le plus grand châtiment, même s’il échappe aux autres supplices. « (Cicéron, De Republica, III)
40 : « Car il existe par nature - tous les hommes le savent comme par divination - une justice et injustice communes, même en l’absence de toute vie sociale et de toute convention mutuelle. C’est d’elle, bien évidemment que parle l’Antigone de Sophocle quand elle dit qu’il était juste d’ensevelir Polynice malgré l’interdiction, car c’était là justice selon la nature. « (Aristote, Rhétorique, I)
41 : « Il n’est chose en quoi le monde soit si divers qu’en coutumes et lois « (Montaigne, Essais, II, XII)
42 : « Certainement s’il la connaissait (la justice véritable) il n’aurait pas établi cette maxime, la plus générale de toutes celles qui sont parmi les hommes, que chacun suive les mœurs de son pays ; l’éclat de la véritable équité aurait assujetti tous les peuples, et les législateurs n’auraient pas pris pour modèle au lieu de cette justice constante les fantaisies et les caprices des Perses et des Allemands (…) On ne voit rien de juste ou d’injuste qui ne change de qualité en changeant de climat. Trois degrés d’élévation du pôle renversent toute la jurisprudence (…) Plaisante justice qu’une rivière borne ! Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà. Ils confessent que la justice n’est pas dans ces coutumes, mais qu’elle réside dans les lois naturelles, connues en tout pays. Certainement ils le soutiendraient opiniâtrement, si la témérité du hasard qui a semé les lois humaines en avait rencontré au moins une qui fût universelle ; mais la plaisanterie est telle que le caprice des hommes s’est si bien diversifié, qu’il n’y en a point. « (Pascal, Pensée 60).
43 : « Il y a sans doute des lois naturelles, mais cette belle raison corrompue a tout corrompu. « (Ibidem)
44 : « Ce qui est bien et conforme à l’ordre est tel par la nature des choses et indépendamment des conventions humaines. Toute justice vient de Dieu, lui seul en est la source ; mais si nous savions la recevoir de si haut, nous n’aurions besoin ni de gouvernements ni de lois. « (Rousseau, Contrat social, II, 6)
45 : « l’impulsion du seul appétit est esclavage, l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté. « (CS, I, 8)
46 : « Est juste toute action qui permet ou dont la maxime permet à la liberté de l’arbitre de tout un chacun de coexister avec la liberté de tout autre selon une loi universelle. « (Kant, Métaphysique des mœurs)
47 : « les principes mêmes que des personnes libres et rationnelles, désireuses de favoriser leurs propres intérêts et placées dans une position initiale d’égalité accepteraient et qui selon elles définiraient les termes fondamentaux de leur association « (Rawls, Théorie de la justice).
48 : « être rationnels ayant leurs propres système de fins et capables d’un sens de la justice « (Ibidem)
49 : « chaque personne doit avoir un droit égal au système le plus étendu de libertés de base égales pour tous qui soit compatible avec le même système pour les autres. « (Ibidem)
50 : « L’injustice est alors simplement constituée par les inégalités qui ne profitent pas à tous.« (Ibidem)