Commentez cette analyse de la «raison» au XVIIIe siècle par J.-M. Goulemot...
Publié le 27/09/2014
Extrait du document
Commentez cette analyse de la «raison« au XVIIIe siècle par J.-M. Goulemot (La Littérature des lumières, en toutes lettres, Bordas, 1989) : «La raison est essentielle dans la définition du philosophe et de sa pratique. Elle est la norme - on n'accepte que ce qui est rationnel - et le moyen d'accéder à la vérité par le raisonnement. On a là un transfert tout à fait essentiel. Les Lumières étaient traditionnellement liées à la grâce divine dont elles constituaient l'effet, elles apparaissent dès lors comme le fruit de la raison et de l'activité intellectuelle de l'être humain. La raison a donc une fonction critique : à son aune on mesure les croyances, les institutions. Pour le philosophe plus de domaine interdit ou réservé, à la différence de Descartes qui exceptait Dieu de son doute méthodique. L'histoire elle-même, que Descartes jugeait comme trop incertaine, est soumise à l'examen critique de la raison, qui envahit tous les domaines : de la croyance (religieuse, morale, politique), du savoir et des pratiques. Rien n'est épargné. Tout est remis en question. Le philosophe est d'abord un juge, un regard d'une extrême et pertinente lucidité. [...] Le philosophe est un être désaliéné, dont la volontaire étrangeté aux habitudes sociales et aux croyances communes permet l'exercice de l'esprit critique. Sa fonction est donc d'abord de démystifier. Il est à rapprocher du fou médiéval, chargé de dire la vérité au prince isolé par le pouvoir et le mensonge. Mais la raison du philosophe a aussi une fonction positive. Sur le plan individuel elle régit la vie du philosophe lui-même, le philosophe est vertueux non par crainte de l'enfer ou même d'un châtiment social mais par choix rationnel. [...] Au-delà d'une possible gestion de soi qui fait du philosophe un homme libre, et de sa fonction critique, la raison est le moyen de changer le monde. [...] Au hasard des textes, de Fontenelle à Condillac, en passant par Buffon, Voltaire, Montesquieu, Diderot et toute la cohorte du mouvement philosophique, c'est à un éloge de la raison et de l'expérience que le siècle se livre. Car pour éviter les pièges d'une raison abstraite, coupée du réel, les philosophes unissent dans une seule et même pratique expérience, observation et mise en oeuvre de la raison.«
Liens utiles
- ART DU XVIIIe SIÈCLE (L’). des frères Edmond(résumé & analyse)
- PORTRAITS INTIMES DU XVIIIe SIÈCLE. de Goncourt (résumé et analyse de l’oeuvre)
- LA RAISON. LES LUMIÈRES AU XVIIIe siècle
- L'auteur anglais Horace Walpole (XVIIIe siècle) a écrit: « Le monde est une comédie pour celui qui pense et une tragédie pour celui qui sent. » En prenant des exemples aussi bien dans votre expérience personnelle que chez les écrivains ou artistes que vous connaissez, vous expliquerez et illustrerez cette opposition entre raison et sensibilité, et vous donnerez votre opinion sur la question.
- Jean-Claude Tournand écrit : «Il a fallu que s'élaborent au moyen d'une longue expérience les règles de chaque genre, que les écrivains apprennent à en dominer les contraintes et à conquérir à travers elles l'art de communiquer leurs plus intimes pensées. L'idéal classique exige à la fois une idée suffisamment claire pour être totalement communicable, et un langage suffisamment précis pour communiquer cette idée et elle seule : l'idée ne doit pas échapper au langage, mais le langage do