Devoir de Philosophie

Contes de la bécasse "J' te dis qu'ça : qu'i z'y viennent !

Publié le 11/04/2014

Extrait du document

Contes de la bécasse "J' te dis qu'ça : qu'i z'y viennent !" Alors ce fut une pluie de polissonneries à double sens qui faisaient un peu rougir la mariée, toute frémissante d'attente. Puis, quand on eut bu des barils d'eau-de-vie, chacun partit se coucher : et les jeunes époux entrèrent en leur chambre, située au rez-de-chaussée, comme toutes les chambres de ferme ; et, comme il y faisait un peu chaud, ils ouvrirent la fenêtre et fermèrent l'auvent. Une petite lampe de mauvais goût, cadeau du père de la femme, brûlait sur la commode ; et le lit était prêt à recevoir le couple nouveau, qui ne mettait point à son premier embrassement tout le cérémonial des bourgeois dans les villes. Déjà la jeune femme avait enlevé sa coiffure et sa robe, et elle demeurait en jupon, délaçant ses bottines, tandis que Jean achevait un cigare en regardant de coin sa compagne. Il la guettait d'un oeil luisant, plus sensuel que tendre ; car il la désirait plutôt qu'il ne l'aimait ; et, soudain, d'un mouvement brusque, comme un homme qui va se mettre à l'ouvrage, il enleva son habit. Elle avait défait ses bottines, et maintenant elle retirait ses bas, puis elle lui dit, le tutoyant depuis l'enfance : "Va te cacher là-bas, derrière les rideaux, que j' me mette au lit." Il fit mine de refuser, puis il y alla d'un air sournois, et se dissimula, sauf la tête. Elle riait, voulait envelopper ses yeux, et ils jouaient d'une façon amoureuse et gaie, sans pudeur apprise et sans gêne. Pour finir il céda ; alors, en une seconde, elle dénoua son dernier jupon, qui glissa le long de ses jambes, tomba autour de ses pieds et s'aplatit en rond par terre. Elle l'y laissa, l'enjamba, nue sous la chemise flottante et elle se glissa dans le lit dont les ressorts chantèrent sous son poids. Aussitôt il arriva, déchaussé lui-même, en pantalon, et il se courbait vers sa femme, cherchant ses lèvres qu'elle cachait dans l'oreiller, quand un coup de feu retentit au loin, dans la direction du bois des Râpées, lui sembla-t-il. Il se redressa inquiet, le coeur crispé, et, courant à la fenêtre, il décrocha l'auvent. La pleine lune baignait la cour d'une lumière jaune. L'ombre des pommiers faisait des taches sombres à leur pied ; et, au loin, la campagne, couverte de moissons mûres, luisait. Comme Jean s'était penché au-dehors, épiant toutes les rumeurs de la nuit, deux bras nus vinrent se nouer sous son cou, et sa femme, le tirant en arrière, murmura : "Laisse donc, qu'est-ce que ca fait, viens-t'en." Il se retourna, la saisit, l'étreignit, la palpant sous la toile légère ; et l'enlevant dans ses bras robustes, il l'emporta vers leur couche. Au moment où il la posait sur le lit, qui plia sous le poids, une nouvelle détonation, plus proche celle-là, retentit. Alors Jean, secoué d'une colère tumultueuse, jura : "Nom de D... ! ils croient que je ne sortirai pas à cause de toi ?... Attends, attends !" Il se chaussa, décrocha son fusil toujours pendu à portée de sa main, et, comme sa femme se traînait à ses genoux et le suppliait, éperdue, il se dégagea vivement, courut à la fenêtre et sauta dans la cour. Contes de la bécasse 25 Contes de la bécasse Elle attendit une heure, deux heures, jusqu'au jour. Son mari ne rentra pas. Alors elle perdit la tête, appela, raconta la fureur de Jean et sa course après les braconniers. Aussitôt les valets, les charretiers, les gars partirent à la recherche du maître. On le retrouva à deux lieues de la ferme, ficelé des pieds à la tête, à moitié mort de fureur, son fusil tordu, sa culotte à l'envers, avec trois lièvres trépassés autour du cou et une pancarte sur la poitrine : "Qui va à la chasse, perd sa place." Et, plus tard, quand il racontait cette nuit d'épousailles, il ajoutait : "Oh ! pour une farce c'était une bonne farce. Ils m'ont pris dans un collet comme un lapin, les salauds, et ils m'ont caché la tête dans un sac. Mais si je les tâte un jour, gare à eux !" Et voilà comment on s'amuse, les jours de noce, au pays normand. ******************************** LES SABOTS A Léon Fontaine. Le vieux curé bredouillait les derniers mots de son sermon au-dessus des bonnets blancs des paysannes et des cheveux rudes ou pommadés des paysans. Les grands paniers des fermières venues de loin pour la messe étaient posés à terre à côté d'elles ; et la lourde chaleur d'un jour de juillet dégageait de tout le monde une odeur de bétail, un fumet de troupeau. Les voix des coqs entraient par la grande porte ouverte, et aussi les meuglements des vaches couchées dans un champ voisin. Parfois un souffle d'air chargé d'arômes des champs s'engouffrait sous le portail et, en soulevant sur son passage les longs rubans des coiffures, il allait faire vaciller sur l'autel les petites flammes jaunes au bout des cierges... "Comme le désire le Bon Dieu. Ainsi soit-il !" prononçait le prêtre. Puis il se tut, ouvrit un livre et se mit, comme chaque semaine, à recommander à ses ouailles les petites affaires intimes de la commune. C'était un vieil homme à cheveux blancs qui administrait la paroisse depuis bientôt quarante ans, et le prône lui servait pour communiquer familièrement avec tout son monde. Il reprit : "Je recommande à vos prières Désiré Vallin, qu'est bien malade et aussi la Paumelle qui ne se remet pas vite de ses couches." Il ne savait plus ; il cherchait les bouts de papier posés dans un bréviaire. Il en retrouva deux enfin, et continua : "Il ne faut pas que les garçons et les filles viennent comme ça, le soir, dans le cimetière, ou bien je préviendrai le garde champêtre.M. Césaire Omont voudrait bien trouver une jeune fille honnête comme servante." Il réfléchit encore quelques secondes, puis ajouta : "C'est tout, mes frères, c'est la grâce que je vous souhaite, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit." Et il descendit de la chaire pour terminer sa messe. Quand les Malandain furent rentrés dans leur chaumière, la dernière du hameau de la Sablière, sur la route de Fourville, le père, un vieux petit paysan sec et ridé, s'assit devant la table, pendant que sa femme décrochait la marmite et que sa fille Adélaïde prenait dans le buffet les verres et les assiettes, et il dit : "Ça s'rait p't-être bon, c'te place chez maîtr' Omont, vu que le v'là veuf, que sa bru l'aime pas, qu'il est seul et qu'il a d' quoi. J' ferions p't-être ben d'y envoyer Adélaïde." Contes de la bécasse 26

« Elle attendit une heure, deux heures, jusqu'au jour.

Son mari ne rentra pas.

Alors elle perdit la tête, appela, raconta la fureur de Jean et sa course après les braconniers.

Aussitôt les valets, les charretiers, les gars partirent à la recherche du maître.

On le retrouva à deux lieues de la ferme, ficelé des pieds à la tête, à moitié mort de fureur, son fusil tordu, sa culotte à l'envers, avec trois lièvres trépassés autour du cou et une pancarte sur la poitrine : "Qui va à la chasse, perd sa place." Et, plus tard, quand il racontait cette nuit d'épousailles, il ajoutait : "Oh ! pour une farce c'était une bonne farce.

Ils m'ont pris dans un collet comme un lapin, les salauds, et ils m'ont caché la tête dans un sac.

Mais si je les tâte un jour, gare à eux !" Et voilà comment on s'amuse, les jours de noce, au pays normand.

******************************** LES SABOTS A Léon Fontaine.

Le vieux curé bredouillait les derniers mots de son sermon au-dessus des bonnets blancs des paysannes et des cheveux rudes ou pommadés des paysans.

Les grands paniers des fermières venues de loin pour la messe étaient posés à terre à côté d'elles ; et la lourde chaleur d'un jour de juillet dégageait de tout le monde une odeur de bétail, un fumet de troupeau.

Les voix des coqs entraient par la grande porte ouverte, et aussi les meuglements des vaches couchées dans un champ voisin.

Parfois un souffle d'air chargé d'arômes des champs s'engouffrait sous le portail et, en soulevant sur son passage les longs rubans des coiffures, il allait faire vaciller sur l'autel les petites flammes jaunes au bout des cierges...

"Comme le désire le Bon Dieu.

Ainsi soit-il !" prononçait le prêtre.

Puis il se tut, ouvrit un livre et se mit, comme chaque semaine, à recommander à ses ouailles les petites affaires intimes de la commune.

C'était un vieil homme à cheveux blancs qui administrait la paroisse depuis bientôt quarante ans, et le prône lui servait pour communiquer familièrement avec tout son monde.

Il reprit : "Je recommande à vos prières Désiré Vallin, qu'est bien malade et aussi la Paumelle qui ne se remet pas vite de ses couches." Il ne savait plus ; il cherchait les bouts de papier posés dans un bréviaire.

Il en retrouva deux enfin, et continua : "Il ne faut pas que les garçons et les filles viennent comme ça, le soir, dans le cimetière, ou bien je préviendrai le garde champêtre.\24\24M.

Césaire Omont voudrait bien trouver une jeune fille honnête comme servante." Il réfléchit encore quelques secondes, puis ajouta : "C'est tout, mes frères, c'est la grâce que je vous souhaite, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit." Et il descendit de la chaire pour terminer sa messe.

Quand les Malandain furent rentrés dans leur chaumière, la dernière du hameau de la Sablière, sur la route de Fourville, le père, un vieux petit paysan sec et ridé, s'assit devant la table, pendant que sa femme décrochait la marmite et que sa fille Adélaïde prenait dans le buffet les verres et les assiettes, et il dit : "Ça s'rait p't-être bon, c'te place chez maîtr' Omont, vu que le v'là veuf, que sa bru l'aime pas, qu'il est seul et qu'il a d' quoi.

J' ferions p't-être ben d'y envoyer Adélaïde." Contes de la bécasse Contes de la bécasse 26. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles