«Dans la mémoire des Français, le XVIIe siècle joue un peu le rôle d'une référence par rapport à laquelle on juge tout le reste, comme, avant le classicisme, on jugeait tout par rapport à l'antiquité. Cela tient peut-être au fait que ; par rapport aux siècles qui l'on précédé, il inaugure les temps modernes. Mais on peut croire aussi qu'en dépit des luttes qui ont marqué son histoire il évoque la pensée d'une certaine cohésion : l'approche, par différentes avenues, d'un commun idéal de perfection. Le désenchantement de la fin du règne, c'est un peu le sentiment qu'on est arrivé au but, que le chemin ne va pas plus loin. Pour aller de l'avant il a fallu inventer d'autres préoccupations et une autre manière. En un mot, il a fallu se révolter contre le «grand siècle». Ses meilleures qualités lui ont attiré autant de rancune que d'admiration. Comme les bons maîtres, il instruit et il irrite, il donne le moyen et l'envie de faire autre chose. Est-ce une raison suffisante pour ne le voir - comme il arrive trop souvent - que dans ce rôle de père noble ou de Mentor ? En vérité, c'est lui faire payer un peu cher le mérite, singulier dans l'histoire de nos lettres, d'avoir su aller au bout de son talent.» (J.-CI. Tournand, Introduction à la vie littéraire du XIIe siècle, Bordas, 1970.) A la lumière de ces lignes, vous vous demanderez s'il est bon de se référer au XVIIe siècle classique comme à un idéal de perfection.
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«Dans la mémoire des Français, le XVIIe siècle joue un peu le rôle d'une référence par rapport à laquelle on juge tout le reste, comme, avant le classicisme, on jugeait tout par rapport à l'antiquité. Cela tient peut-être au fait que ; par rapport aux siècles qui l'on précédé, il inaugure les temps modernes. Mais on peut croire aussi qu'en dépit des luttes qui ont marqué son histoire il évoque la pensée d'une certaine cohésion : l'approche, par différentes avenues, d'un commun idéal de perfection. Le désenchantement de la fin du règne, c'est un peu le sentiment qu'on est arrivé au but, que le chemin ne va pas plus loin. Pour aller de l'avant il a fallu inventer d'autres préoccupations et une autre manière. En un mot, il a fallu se révolter contre le «grand siècle«. Ses meilleures qualités lui ont attiré autant de rancune que d'admiration. Comme les bons maîtres, il instruit et il irrite, il donne le moyen et l'envie de faire autre chose. Est-ce une raison suffisante pour ne le voir - comme il arrive trop souvent - que dans ce rôle de père noble ou de Mentor ? En vérité, c'est lui faire payer un peu cher le mérite, singulier dans l'histoire de nos lettres, d'avoir su aller au bout de son talent.« (J.-CI. Tournand, Introduction à la vie littéraire du XIIe siècle, Bordas, 1970.) A la lumière de ces lignes, vous vous demanderez s'il est bon de se référer au XVIIe siècle classique comme à un idéal de perfection.
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- Jean-Claude Tournand écrit : «Il a fallu que s'élaborent au moyen d'une longue expérience les règles de chaque genre, que les écrivains apprennent à en dominer les contraintes et à conquérir à travers elles l'art de communiquer leurs plus intimes pensées. L'idéal classique exige à la fois une idée suffisamment claire pour être totalement communicable, et un langage suffisamment précis pour communiquer cette idée et elle seule : l'idée ne doit pas échapper au langage, mais le langage doit rendre toute la singularité de l'idée. Cet accord profond qui supprime toute dualité entre la vérité d'une pensée et la justesse de son expression ne se distingue pas de la beauté. (...) C'est déjà par le moyen d'un discours bien lié que Descartes prétendait devenir «maître et possesseur de la nature», et il est bien, en cela, le premier des classiques. Sa méthode ne consiste-t-elle pas à réduire toute difficulté en un langage clair qui est analyse, mise en ordre, de telle sorte que la vérité apparaisse comme d'elle-même ? Aucune idée n'est admise pour vraie ni aucune œuvre admise pour belle si le langage n'élimine pas toutes les ombres, de manière à garantir que l'on n'a pas triché avec la réalité. Les Pensées de Pascal témoignent d'un vaste effort pour expliciter la mystérieuse action de la foi, et, lorsqu'on veut désavouer la raison, c'est à la raison que l'on demande ce désaveu. L'art de plaire lui-même doit pouvoir s'exprimer logiquement. Toute l'esthétique classique se réduit à chercher, toujours plus loin dans la complexité vivante d'une réalité - visage, idée, sentiment -, l'ordre qui permet de la saisir, à inventer entre les ressources du langage l'équilibre qui correspond seul à cette réalité-là, et à n'admettre dans l'œuvre aucun élément qui ne participe pas à cette correspondance.» (Introduction à la vie littéraire du XVIIe siècle, Bordas, 1970.) Acceptez-vous cette vision du classicisme ?
- Paul Valéry écrit dans le Préambule pour le Catalogue
- Que pensez-vous de ce bilan du classicisme français : «La réussite classique fut bien une conquête, l'équilibre classique non le produit d'une sagesse rassise, d'une prudence habile à ménager le pour et le contre, mais l'expression d'un élan, d'une poussée vers l'avant. Ce qui distingue Racine de Corneille, en 1665, c'est sa nouveauté, son modernisme. Ce qui, dans les traités ou les dictionnaires du temps, condamne un mot ou un tour, c'est qu'il est «vieux», et rien ne caractérise mieux un état d'esprit général à l'époque. S'inspirer des Anciens - avec quelle liberté -, tenir compte de certaines règles - avec quelle souplesse -, équilibrer les détails et l'ensemble, la passion et la raison, la réalité et l'idéal, c'est, pour un classique, sa manière à lui d'être lui-même, c'est-à-dire d'être moderne, d'être jeune, ou comme disait Stendhal, d'être romantique.» (Th. Aron, Histoire littéraire de la France, t. Il, éd. sociales, 1966.)
- On pouvait lire dans Les Lettres françaises du 25 février 1954 (Gallimard) ces lignes de Thomas Mann : «Le classicisme, ce n'est pas quelque chose d'exemplaire ; en général, et hors du temps, même s'il a beaucoup et tout à faire avec les deux idées implicites ici, celle d'une forme, et celle de la précellence de cette forme. Bien loin de là, le classicisme est plutôt cet exemple tel qu'il a été réalisé, la première création d'une forme de vie spirituelle se manifestant dans la vie individuelle, ce qui a autrefois modelé un type originel, où la vie ultérieure se reconnaît, dans la perspective duquel elle se développe ; il s'agit donc d'un mythe, car le type est un mythe, et l'être est retour, absence du temps, éternellement présent. En ce sens seulement, le classicisme a valeur d'exemple, non quand il désigne simplement une forme vide. L'époque classique est celle des patriarches, du mythe, de la première création de ce qui a modelé notre vie nationale.» Vous expliquerez et discuterez cette conception du classicisme en vous appuyant sur des exemples précis tirés de la littérature française ou des littératures anciennes ou des littératures étrangères, à votre gré.
- «Un long avenir se préparait pour (la culture française) du XVIIe (siècle). Même encore au temps du romantisme, les œuvres classiques continuent à bénéficier d'une audience considérable ; l'époque qui les a vu naître bénéficie au premier chef du progrès des études historiques ; l'esprit qui anime ses écrivains, curiosité pour l'homme, goût d'une beauté harmonieuse et rationnelle, continue à inspirer les créatures. Avec cette esthétique une autre ne pourra véritablement entrer en concurrence qu'au temps de Baudelaire et de Rimbaud, par le retour à une vision symbolique de l'univers, par l'invasion des images et par la conception d'une beauté tourmentée. Une réaction plus vive paraîtra se dessiner au derniers tiers du XXe siècle, par un besoin accru de modernité, par le progrès de l'irrationnel, notamment dans l'image de l'homme, par l'affaiblissement de la conscience religieuse. Mais ne serait-ce que pour faire contrepoids à ces tendances, la culture du XVIIe siècle, unissant les valeurs de la pensée et celles de l'art, garde d'irremplaçables vertus.» (J. Mesnard, Précis de littérature française du XVIIe siècle, PUF, 1990.) Êtes-vous d'accord avec ce critique pour voir ainsi la survivance du classicisme français du XVIIe siècle ?