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Jean JOUBERT. Les Sabots rouges.

Publié le 22/03/2011

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   J. Joubert, professeur, romancier, poète, mène une vie retirée dans le Languedoc. Pour lui, l'homme et les éléments de l'univers se rejoignent, car ils sont tous soumis au chaos, à l'instabilité, à la contradiction. Cet état est source d'anxiété pour l'homme, mais le poète peut en saisir l'unité. Le style de J. Joubert est empreint de lyrisme et d'une expressivité nuancée ; la forme de sa poésie est assez traditionnelle. Parmi ses œuvres : L'Homme de sable, Le Sphynx et autres récits, et plusieurs recueils de poèmes.    Dans un récit autobiographique, l'auteur évoque ses rapports d'enfant taciturne avec son père.    Au fond, je crois que c'est dans le jardin et la forêt que nous nous entendions le mieux, même si nous n'y étions guère plus bavards. Ces lieux d'arbres et de feuilles, les gestes rituels de sarcler, de tailler, de ramasser les champignons ressuscitaient les jours de l'enfance, et nous retrouvions une sorte de complicité. Nous partagions l'amour d'un monde proche que nous pouvions toucher, respirer et il nous servait de langage. Alors le silence devenait transparent, et les idées qui, je le sais maintenant, sont peu de chose, n'avaient plus de poids. Instants rares cependant, et qui n'effacent pas tant d'heures où la distance tirait entre nous ses brouillards.    Du moins ai-je appris, avec le temps, ce que j'ignorais alors : entre les êtres, l'essentiel se joue au-delà des paroles ; c'est le son de la voix qui importe, une inflexion, un soupir, et aussi les gestes, les regards, une main posée sur une main, tant d'autres signes qui, plus que les mots trop souvent masqués et menteurs, sont le vrai langage de ceux qui s'aiment. Lorsque j'y songe, il me semble avoir longtemps vécu dans un futile monde de bruit. A Paris, le soir, dans les chambres et les cafés, combien d'heures n'ai-je pas perdues à écouter ceux qui s'enivrent de mots comme d'autres s'enivrent d'alcool. Les uns brodaient inlassablement sur leurs obsessions. D'autres, pires encore, jonglaient avec les idées, pour le plaisir de jouer. Je les enviais, je crois. J'essayais maladroitement de les imiter. J'en oubliais de regarder les yeux des femmes, le crépuscule et la couleur du ciel. Ce qui reste, trente ans plus tard, c'est tel visage entrevu à travers la buée d'une vitre, ou bien la silhouette d'un enfant qui saute à cloche-pied sur le trottoir, un arbre nu luisant sous la pluie. Les images subsistent, et les émotions qu'elles suscitaient, mais les idées, les paroles se sont évaporées. Si je ne m'imagine pas cessant d'écrire, je me vois en revanche devenir de plus en plus silencieux.    Dans un commentaire composé, vous pourrez, par exemple, réfléchir à ce que révèlent de la personnalité profonde de l'auteur les rapports qu 'il évoque entre le fils et le père, et l'importance qu 'il accorde au jeu des silences et des gestes.

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