Devoir de Philosophie

l'avoue, dans ma douleur, que dans la honte de ne m'être pas vengée.

Publié le 04/11/2013

Extrait du document

l'avoue, dans ma douleur, que dans la honte de ne m'être pas vengée. « Il me tint parole. Toute la journée, toute la nuit du lendemain s'écoulèrent sans que je le revisse. Mais moi aussi je lui tins parole, et je ne mangeai ni ne bus ; j'étais, comme je le lui avais dit, résolue à me laisser mourir de faim. « Je passai le jour et la nuit en prière, car j'espérais que Dieu me pardonnerait mon suicide. « La seconde nuit la porte s'ouvrit ; j'étais couchée à terre sur le parquet, les forces commençaient à m'abandonner. « Au bruit je me relevai sur une main. « Eh bien, me dit une voix qui vibrait d'une façon trop terrible à mon oreille pour que je ne la reconnusse pas, eh bien ! sommes-nous un peu adoucie et paierons nous notre liberté d'une seule promesse de silence ? « Tenez, moi, je suis bon prince, ajouta-t-il, et, quoique je n'aime pas les puritains, je leur rends justice, ainsi qu'aux puritaines, quand elles sont jolies. Allons, faites-moi un petit serment sur la croix, je ne vous en demande pas davantage. « - Sur la croix ! m'écriai-je en me relevant, car à cette voix abhorrée j'avais retrouvé toutes mes forces ; sur la croix ! je jure que nulle promesse, nulle menace, nulle torture ne me fermera la bouche ; sur la croix ! je jure de vous dénoncer partout comme un meurtrier, comme un larron d'honneur, comme un lâche ; sur la croix ! je jure, si jamais je parviens à sortir d'ici, de demander vengeance contre vous au genre humain entier. « - Prenez garde ! dit la voix avec un accent de menace que je n'avais pas encore entendu, j'ai un moyen suprême, que je n'emploierai qu'à la dernière extrémité, de vous fermer la bouche ou du moins d'empêcher qu'on ne croie à un seul mot de ce que vous direz. « « Je rassemblai toutes mes forces pour répondre par un éclat de rire. « Il vit que c'était entre nous désormais une guerre éternelle, une guerre à mort. « Écoutez, dit-il, je vous donne encore le reste de cette nuit et la journée de demain ; réfléchissez : promettez de vous taire, la richesse, la considération, les honneurs mêmes vous entoureront ; menacez de parler, et je vous condamne à l'infamie. « - Vous ! m'écriai-je, vous ! « - À l'infamie éternelle, ineffaçable ! « - Vous ! « répétai-je. Oh ! je vous le dis, Felton, je le croyais insensé ! « Oui, moi ! reprit-il. « - Ah ! laissez-moi, lui dis-je, sortez, si vous ne voulez pas qu'à vos yeux je me brise la tête contre la muraille ! « - C'est bien, reprit-il, vous le voulez, à demain soir ! « - À demain soir, répondis-je en me laissant tomber et en mordant le tapis de rage... « Felton s'appuyait sur un meuble, et Milady voyait avec une joie de démon que la force lui manquerait peutêtre avant la fin du récit. CHAPITRE LVII UN MOYEN DE TRAGÉDIE CLASSIQUE Après un moment de silence employé par Milady à observer le jeune homme qui l'écoutait, elle continua son écit : « Il y avait près de trois jours que je n'avais ni bu ni mangé, je souffrais des tortures atroces : parfois il me passait comme des nuages qui me serraient le front, qui me voilaient les yeux : c'était le délire. « Le soir vint ; j'étais si faible, qu'à chaque instant je m'évanouissais et à chaque fois que je m'évanouissais je emerciais Dieu, car je croyais que j'allais mourir. « Au milieu de l'un de ces évanouissements, j'entendis la porte s'ouvrir ; la terreur me rappela à moi. « Mon persécuteur entra suivi d'un homme masqué, il était masqué lui-même ; mais je reconnus son pas, je econnus cet air imposant que l'enfer a donné à sa personne pour le malheur de l'humanité. « Eh bien, me dit-il, êtes-vous décidée à me faire le serment que je vous ai demandé ? « Vous l'avez dit, les puritains n'ont qu'une parole : la mienne, vous l'avez entendue, c'est de vous poursuivre sur la terre au tribunal des hommes, dans le ciel au tribunal de Dieu ! « Ainsi, vous persistez ? « Je le jure devant ce Dieu qui m'entend : je prendrai le monde entier à témoin de votre crime, et cela jusqu'à ce que j'aie trouvé un vengeur. « Vous êtes une prostituée, dit-il d'une voix tonnante, et vous subirez le supplice des prostituées ! Flétrie aux eux du monde que vous invoquerez, tâchez de prouver à ce monde que vous n'êtes ni coupable ni folle ! « « Puis s'adressant à l'homme qui l'accompagnait : « Bourreau, dit-il, fais ton devoir. « - Oh ! son nom, son nom ! s'écria Felton ; son nom, dites-le-moi ! - Alors, malgré mes cris, malgré ma résistance, car je commençais à comprendre qu'il s'agissait pour moi de quelque chose de pire que la mort, le bourreau me saisit, me renversa sur le parquet, me meurtrit de ses étreintes, et suffoquée par les sanglots, presque sans connaissance invoquant Dieu, qui ne m'écoutait pas, je poussai tout à coup un effroyable cri de douleur et de honte ; un fer brûlant, un fer rouge, le fer du bourreau, s'était imprimé sur mon épaule. « Felton poussa un rugissement. « Tenez, dit Milady, en se levant alors avec une majesté de reine, - tenez, Felton, voyez comment on a inventé un nouveau martyre pour la jeune fille pure et cependant victime de la brutalité d'un scélérat. Apprenez à connaître le coeur des hommes, et désormais faites-vous moins facilement l'instrument de leurs injustes vengeances. « Milady d'un geste rapide ouvrit sa robe, déchira la batiste qui couvrait son sein, et, rouge d'une feinte colère et d'une honte jouée, montra au jeune homme l'empreinte ineffaçable qui déshonorait cette épaule si belle. « Mais, s'écria Felton, c'est une fleur de lis que je vois là ! - Et voilà justement où est l'infamie, répondit Milady. La flétrissure d'Angleterre !... il fallait prouver quel tribunal me l'avait imposée, et j'aurais fait un appel public à tous les tribunaux du royaume ; mais la flétrissure de France... oh ! par elle, j'étais bien réellement flétrie. « C'en était trop pour Felton. Pâle, immobile, écrasé par cette révélation effroyable, ébloui par la beauté surhumaine de cette femme qui se dévoilait à lui avec une impudeur qu'il trouva sublime, il finit par tomber à genoux devant elle comme faisaient les premiers chrétiens devant ces pures et saintes martyres que la persécution des empereurs livrait dans le cirque à la sanguinaire lubricité des populaces. La flétrissure disparut, la beauté seule resta. « Pardon, pardon ! s'écria Felton, oh ! pardon ! « Milady lut dans ses yeux : Amour, amour. « Pardon de quoi ? demanda-t-elle. - Pardon de m'être joint à vos persécuteurs. «

« CHAPITRE LVII UN MOYEN DETRAGÉDIE CLASSIQUEAprès unmoment desilence employé parMilady àobserver lejeune homme quil’écoutait, ellecontinua son récit : « Il yavait prèsdetrois jours quejen’avais nibu nimangé, jesouffrais destortures atroces : parfoisilme passait comme desnuages quimeserraient lefront, quimevoilaient lesyeux : c’était ledélire. « Le soirvint ; j’étais sifaible, qu’àchaque instantjem’évanouissais etàchaque foisque jem’évanouissais je remerciais Dieu,carjecroyais quej’allais mourir. « Au milieu del’un deces évanouissements, j’entendislaporte s’ouvrir ; laterreur merappela àmoi. « Mon persécuteur entrasuivid’unhomme masqué, ilétait masqué lui-même ; maisjereconnus sonpas, je reconnus cetairimposant quel’enfer adonné àsa personne pourlemalheur del’humanité. « Eh bien, medit-il, êtes-vous décidéeàme faire leserment quejevous aidemandé ? « Vous l’avezdit,lespuritains n’ontqu’une parole : lamienne, vousl’avez entendue, c’estdevous poursuivre sur laterre autribunal deshommes, dansleciel autribunal deDieu ! « Ainsi, vouspersistez ? « Je lejure devant ceDieu quim’entend : jeprendrai lemonde entieràtémoin devotre crime, etcela jusqu’à ce que j’aie trouvé unvengeur. « Vous êtesuneprostituée, dit-ild’une voixtonnante, etvous subirez lesupplice desprostituées ! Flétrieaux yeux dumonde quevous invoquerez, tâchezdeprouver àce monde quevous n’êtes nicoupable nifolle ! » « Puis s’adressant àl’homme quil’accompagnait : « Bourreau, dit-il,faistondevoir. » – Oh ! sonnom, sonnom ! s’écria Felton ; sonnom, dites-le-moi ! – Alors, malgrémescris, malgré marésistance, carjecommençais àcomprendre qu’ils’agissait pourmoide quelque chosedepire quelamort, lebourreau mesaisit, merenversa surleparquet, memeurtrit deses étreintes, etsuffoquée parlessanglots, presquesansconnaissance invoquantDieu,quinem’écoutait pas,je poussai toutàcoup uneffroyable cridedouleur etde honte ; unfer brûlant, unfer rouge, lefer dubourreau, s’était imprimé surmon épaule. » Felton poussa unrugissement. « Tenez, ditMilady, enselevant alorsavecunemajesté dereine, – tenez, Felton,voyezcomment ona inventé unnouveau martyrepourlajeune fillepure etcependant victimedelabrutalité d’unscélérat.

Apprenez à connaître lecœur deshommes, etdésormais faites-vous moinsfacilement l’instrument deleurs injustes vengeances. » Milady d’ungeste rapide ouvritsarobe, déchira labatiste quicouvrait sonsein, et,rouge d’unefeinte colère et d’une honte jouée, montra aujeune homme l’empreinte ineffaçablequidéshonorait cetteépaule sibelle. « Mais, s’écriaFelton, c’estunefleur delisque jevois là ! – Et voilà justement oùest l’infamie, réponditMilady.Laflétrissure d’Angleterre !… ilfallait prouver quel tribunal mel’avait imposée, etj’aurais faitunappel public àtous lestribunaux duroyaume ; maislaflétrissure de France… oh !parelle, j’étais bienréellement flétrie. » C’en était troppour Felton. Pâle, immobile, écraséparcette révélation effroyable, éblouiparlabeauté surhumaine decette femme quise dévoilait àlui avec uneimpudeur qu’iltrouva sublime, ilfinit partomber àgenoux devantellecomme faisaient les premiers chrétiens devantcespures etsaintes martyres quelapersécution desempereurs livraitdansle cirque àla sanguinaire lubricitédespopulaces.

Laflétrissure disparut,labeauté seuleresta. « Pardon, pardon !s’écriaFelton, oh !pardon ! » Milady lutdans sesyeux : Amour, amour. « Pardon dequoi ? demanda-t-elle. – Pardon dem’être jointàvos persécuteurs. ». »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles