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Les deux jeunes gens éclatèrent de rire en voyant cette figure grotesque.

Publié le 04/11/2013

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Les deux jeunes gens éclatèrent de rire en voyant cette figure grotesque. - Ah ! ah ! vous riez ! dit La Hurière un peu rassuré, vous ne venez donc pas avec de mauvaises intentions ? - Et vous, maître La Hurière, vous êtes donc guéri de vos goûts belliqueux ? - Oui, ma foi, oui, messieurs ; et maintenant... - Eh bien ? maintenant... - Maintenant, j'ai fait voeu de ne plus voir d'autre feu que celui de ma cuisine. - Bravo ! dit Coconnas, voilà qui est prudent. Maintenant, ajouta le Piémontais, nous avons laissé dans vos curies deux chevaux, et dans vos chambres deux valises. - Ah diable ! fit l'hôte se grattant l'oreille. - Eh bien ? - Deux chevaux, vous dites ? - Oui, dans l'écurie. - Et deux valises ? - Oui, dans la chambre. - C'est que, voyez-vous... vous m'aviez cru mort, n'est-ce pas ? - Certainement. - Vous avouez que, puisque vous vous êtes trompés, je pouvais bien me tromper de mon côté. - En nous croyant morts aussi ? vous étiez parfaitement libre. - Ah ! voilà ! ... c'est que, comme vous mouriez intestat..., continua maître La Hurière. - Après ? - J'ai cru, j'ai eu tort, je le vois bien maintenant... - Qu'avez-vous cru, voyons ? - J'ai cru que je pouvais hériter de vous. - Ah ! ah ! firent les deux jeunes gens. - Je n'en suis pas moins on ne peut plus satisfait que vous soyez vivants, messieurs. - De sorte que vous avez vendu nos chevaux ? dit Coconnas. - Hélas ! dit La Hurière. - Et nos valises ? continua La Mole. - Oh ! les valises ! non..., s'écria La Hurière, mais seulement ce qu'il y avait dedans. - Dis donc, La Mole, reprit Coconnas, voilà, ce me semble, un hardi coquin... Si nous l'étripions ? Cette menace parut faire un grand effet sur maître La Hurière, qui hasarda ces paroles : - Mais, messieurs, on peut s'arranger, ce me semble. - Écoute, dit La Mole, c'est moi qui ai le plus à me plaindre de toi. - Certainement, monsieur le comte, car je me rappelle que, dans un moment de folie, j'ai eu l'audace de vous menacer. - Oui, d'une balle qui m'est passée à deux pouces au-dessus de la tête. - Vous croyez ? - J'en suis sûr. - Si vous en êtes sûr, monsieur de la Mole, dit La Hurière en ramassant sa casserole d'un air innocent, je suis trop votre serviteur pour vous démentir. - Eh bien, dit La Mole, pour ma part, je ne te réclame rien. - Comment, mon gentilhomme ! ... - Si ce n'est... - Aïe ! aïe ! ... fit La Hurière. - Si ce n'est un dîner pour moi et mes amis toutes les fois que je me trouverai dans ton quartier. - Comment donc ! s'écria La Hurière ravi, à vos ordres, mon gentilhomme, à vos ordres ! - Ainsi, c'est chose convenue ? - De grand coeur... Et vous, monsieur de Coconnas, continua l'hôte, souscrivez-vous au marché ? - Oui ; mais, comme mon ami, j'y mets une petite condition. - Laquelle ? - C'est que vous rendrez à M. de La Mole les cinquante écus que je lui dois et que je vous ai confiés. - À moi, monsieur ! Et quand cela ? - Un quart d'heure avant que vous vendissiez mon cheval et ma valise. La Hurière fit un signe d'intelligence. - Ah ! je comprends ! dit-il. Et il s'avança vers une armoire, en tira, l'un après l'autre, cinquante écus qu'il apporta à La Mole. - Bien, monsieur, dit le gentilhomme, bien ! servez-nous une omelette. Les cinquante écus seront pour M. Grégoire. - Oh ! s'écria La Hurière, en vérité, mes gentilshommes, vous êtes des coeurs de princes, et vous pouvez compter sur moi à la vie et à la mort. - En ce cas, dit Coconnas, faites-nous l'omelette demandée, et n'y épargnez ni le beurre ni le lard. Puis se retournant vers la pendule : - Ma foi, tu as raison, La Mole, dit-il. Nous avons encore trois heures à attendre, autant donc les passer ici u'ailleurs. D'autant plus que, si je ne me trompe, nous sommes ici presque à moitié chemin du pont Saintichel. Et les deux jeunes gens allèrent reprendre à table et dans la petite pièce du fond la même place qu'ils ccupaient pendant cette fameuse soirée du 24 août 1572, pendant laquelle Coconnas avait proposé à La Mole de ouer l'un contre l'autre la première maîtresse qu'ils auraient. Avouons, à l'honneur de la moralité des deux jeunes gens, que ni l'un ni l'autre n'eut l'idée de faire à son compagnon ce soir-là pareille proposition.

« – Ma foi,tuas raison, LaMole, dit-il.Nousavons encore troisheures àattendre, autantdonclespasser ici qu’ailleurs.

D’autantplusque, sije ne me trompe, noussommes icipresque àmoitié chemin dupont Saint- Michel.

Et les deux jeunes gensallèrent reprendre àtable etdans lapetite piècedufond lamême placequ’ils occupaient pendantcettefameuse soiréedu24août 1572, pendant laquelleCoconnas avaitproposé àLa Mole de jouer l’uncontre l’autre lapremière maîtresse qu’ilsauraient. Avouons, àl’honneur delamoralité desdeux jeunes gens,quenil’un nil’autre n’eutl’idée defaire àson compagnon cesoir-là pareille proposition.. »

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