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L'INTERPRÉTATION - textes de références de la notion

Publié le 17/10/2016

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L'INTERPRÉTATION

  1. AUGUSTIN (354-430) : Interpréter les passages douteux de l'Écriture
  2. Thomas D'AQUIN (1225-1274) : Est-ce que la « lettre » de l'Écriture sainte peut revêtir plusieurs sens ?
  3. Baruch SPINOZA (1632-1677) : La méthode dans l'interprétation de l'Écriture
  4. Baruch SPINOZA (1632-1677) : Un exemple : « Dieu est un feu »
  5. Friedrich NIETZSCHE (1844-1900) : Il n'y a que des interprétations
  6. Friedrich NIETZSCHE (1844-1900) : Qui parle ?
  7. Friedrich NIETZSCHE (1844-1900) : Le monde se prête à une infinité d'interprétations
  8. Ludwig WITTGENSTEIN (1889-1951) : Règle et interprétation
  9. Hans-Georg GADAMER (1900-2002) : L'expérience herméneutique comme fusion des horizons
  10. Michel FOUCAULT (1926-1984) : Les signatures du monde
  11. Michel FOUCAULT (1926-1984) : Herméneutique et sémiologie
  12. Paul RICŒUR (1913-) : Interprétation et pluralité des sens
  13. Ronald DWORKIN (1931-) : L'interprétation et le droit

AUGUSTIN (354-430)

Interpréter les passages douteux de l'Écriture

L'homme qui craint Dieu cherche avec soin sa volonté dans les Saintes Écritures. La piété lui inspire la douceur, et l'éloigne de l'esprit de contention. Il prévient par la science des langues tout ce qui pourrait l'arrêter dans les termes et les locutions inconnues. Il acquiert les connaissances nécessaires sur la nature et les propriétés des choses qui servent de comparaisons. Qu'il ait ensuite entre les mains des exemplaires purifiés avec soin de toute erreur, il peut alors entreprendre de discuter et d'éclaircir les passages douteux du texte sacré. Nous allons, autant que nous en sommes capables, lui apprendre à ne pas s'y laisser tromper. Peut-être l'élévation de son génie ou l'étendue de ses lumières lui fera-t-elle mépriser ces règles comme vaines et puériles. Mais enfin, s'il est disposé à recevoir nos instructions, nous lui ferons observer que toute ambiguïté de l'Écriture réside dans les termes propres ou dans les termes métaphoriques.

De la doctrine chrétienne, in Œuvres complètes de saint Augustin, Paris, éd. Raulx, 1866, livre III, chapitre premier.

Thomas D'AQUIN (1225-1274)

Est-ce que la « lettre » de l'Écriture sainte peut revêtir plusieurs sens ?

Objections : 

1. Il semble bien que l'Écriture ne contient pas sous une seule lettre plusieurs des sens ainsi distingués : le sens historique ou littéral, le sens allégorique, le sens tropologique ou moral, et le sens anagogique. En effet, une multiplicité de sens pour un seul passage engendre la confusion, prête à l'erreur et rend l'argumentation fragile. C'est pourquoi une argumentation véritable ne procède pas de propositions aux sens multiples ; bien plus, cela occasionne certains sophismes. Or l'Écriture sainte doit être apte à nous montrer la vérité sans prêter occasion à l'erreur ; elle ne peut donc nous offrir, sous une seule lettre, une pluralité de sens.

2. S. Augustin nous dit : « Cette partie de l'Écriture qu'on appelle l'Ancien Testament se présente sous quatre formes : l'histoire, l'étiologie, l'analogie, l'allégorie », division qui paraît totalement étrangère à celle qui a été rapportée plus haut. Il ne semble donc pas convenable que l'Écriture sainte soit exposée suivant les quatre sens énumérés en premier.

 

« 412179 loi nouvelle elle-même, ajoute Denys, est une figure de la gloire à venir ; enoutre, dans la loi nouvelle, ce qui a lieu dans le chef est le signe de ce quenous-mêmes devons faire.

Donc, lorsque les réalités de la loi anciennesignifient celles de la loi nouvelle, on a le sens allégorique ; quand leschoses réalisées dans le Christ, ou dans ce qui signifie le Christ, sont lesigne de ce que nous devons faire, on a le sens moral ; pour autant, enfin queces mêmes choses signifient ce qui existe dans la gloire éternelle, on a le sensanagogique.Comme, d'autre part, le sens littéral est celui que l'auteur entend signifier,et comme l'auteur de l'Écriture sainte est Dieu, qui comprend simultanémenttoutes choses dans la simple saisie de son intelligence, il n'y a pas d'obstacleà dire, à la suite de S. Augustin, que selon le sens littéral, même dans uneseule « lettre » de l'Écriture, il y a plusieurs sens.Solutions :1.

La multiplicité des sens en question ne crée pas d'équivoque, ni aucuneespèce de multiplicité de ce genre.

En effet, d'après ce qui a été dit, ces sensne se multiplient pas pour cette raison qu'un seul mot signifierait plusieurschoses, mais parce que les réalités elles-mêmes, signifiées par les mots,peuvent être signes d'autres réalités.

Il n'y aura pas non plus de confusiondans l'Écriture, car tous les sens sont fondés sur l'unique sens littéral, etl'on ne pourra argumenter qu'à partir de lui, à l'exclusion des sensallégoriques, ainsi que l'observe S. Augustin contre le donatiste Vincent.

Riencependant ne sera perdu de l'Écriture sainte, car rien de nécessaire à la foin'est contenu dans le sens spirituel sans que l'Écriture nous le livreclairement ailleurs, par le sens littéral.2.

Trois des sens énumérés ici par S. Augustin se rapportent au seul senslittéral : l'histoire, l'étiologie et l'analogie.

Il y a histoire, expliqueS. Augustin, lorsqu'une chose est exposée pour elle-même.

Il y a étiologie quandla cause de ce dont on parle est indiquée : ainsi lorsque le Seigneur expliquepourquoi Moïse donna licence aux Juifs de répudier leurs épouses, c'est-à-direen raison de la dureté de leur c œur (Mt 19, 8).

Il y a analogie enfin quand on fait voir que la vérité d'un passage de l'Écriture n'est pas opposée à la véritéd'un autre passage.

Reste l'allégorie qui, à elle seule, dans l'énumération deS. Augustin, tient la place des trois sens spirituels.

Hugues de Saint-Victorrange lui aussi le sens anagogique sous le sens allégorique ; retenant ainsi,dans son troisième livre des Sentences, trois sens seulement : le senshistorique, le sens allégorique et le sens tropologique.0002000018E500001BAF 18DE,3.

Le sens parabolique est inclus dans le senslittéral ; car par les mots on peut signifier quelque chose au sens propre, etquelque chose au sens figuré ; et, dans ce cas, le sens littéral ne désigne pasla figure elle-même, mais ce qu'elle représente.

Quand, en effet, l'Écritureparle du bras de Dieu, le sens littéral n'est pas qu'il y ait en Dieu un brascorporel, mais ce qui est signifié par ce membre, à savoir une puissance active.Cela montre bien que, dans le sens littéral de l'Écriture, il ne peut jamais yavoir de fausseté.Somme théologique, Paris, Cerf, 1985, question 1, article 10.Baruch SPINOZA (1632-1677)La méthode dans l'interprétation de l'ÉcritureUne ambition criminelle a pu faire que la Religion consistât moins à obéir auxenseignements de l'Esprit-Saint qu'à défendre des inventions humaines, bienplus, qu'elle s'employât à répandre parmi les hommes non la charité, mais ladiscorde et la haine la plus cruelle sous un déguisement de zèle divin et deferveur ardente.

À ces maux se joignit la superstition qui enseigne à mépriserla Nature et la Raison, à admirer et à vénérer cela seulement qui leurcontredit ; aussi n'est-il pas surprenant que les hommes, pour mieux admirer etvénérer davantage l'Écriture, se soient attachés à l'expliquer de telle sortequ'elle semble le plus contraire qui se puisse à cette même Nature et à cettemême Raison.

Ainsi en vient-on à rêver que de très profonds mystères sont cachésdans les livres saints et l'on s'épuise à les sonder, négligeant l'utile pourl'absurde ; et tout ce qu'on invente dans ce délire, on l'attribue àl'Esprit-Saint et l'on tâche de le défendre de toutes ses forces, avec l'ardeurde la passion.

Tels sont les hommes en effet : tout ce qu'ils conçoivent parl'entendement pur, ils le défendent à l'aide du seul entendement et de laRaison ; les croyances irrationnelles que leur imposent les affections de l'âme,ils les défendent avec leurs passions.

Pour nous tirer de ces égarements,affranchir notre pensée des préjugés des théologiens et ne pas nous attacherimprudemment à des inventions humaines prises pour des enseignements divins, ilnous faut traiter de la vraie méthode à suivre dans l'interprétation de Pge p. »

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