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Midi (1858). Leconte de Lisle

Publié le 01/05/2011

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de lisle

Leconte de Lisle, malgré son impassibilité apparente, a vivement senti la poésie symbolique de la Nature. Il a exprimé cette poésie, et ses rapports avec les sentiments de l'âme, dans Midi et dans plusieurs morceaux magnifiques des Poèmes antiques et des Poèmes barbares. Mais on observera qu'il laisse à la Nature son mystère grandiose et troublant, et que son cœur n'y trouve pas, comme celui des romantiques, une consolation ou un apaisement. Sa philosophie de la Nature se rapproche plutôt de celle de Vigny, que de celle de Lamartine ou de Hugo.

 

Midi, roi des étés, épandu sur la plaine, Tombe en nappes d'argent des hauteurs du ciel bleu. Tout se tait. L'air flamboie et brûle sans haleine; La terre est assoupie en sa robe de feu. L'étendue est immense, et les champs n'ont point d'ombre, 5 Et la source est tarie où buvaient les troupeaux, La lointaine forêt, dont la lisière est sombre, Dort là-bas, immobile, en un pesant repos. Seuls, les grands blés mûris, tels qu'une mer dorée, Se déroulent au loin, dédaigneux du sommeil ; 10 Pacifiques enfants de la terre sacrée, Ils épuisent sans peur la coupe du soleil. Parfois, comme un soupir de leur âme brûlante, Du sein des épis lourds qui murmurent entre eux, Une ondulation majestueuse et lente 15 S'éveille, et va mourir à l'horizon poudreux. Non loin, quelques bœufs blancs, couchés parmi les herbes, Bavent avec lenteur sur leurs fanons épais, Et suivent de leurs yeux languissants et superbes Le songe intérieur qu'ils n'achèvent jamais. 20 Homme, si, le cœur plein de joie ou d'amertume, Tu passais vers midi dans les champs radieux, Fuis ! la Nature est vide et le soleil consume : Rien n'est vivant ici, rien n'est triste ou joyeux. Mais si, désabusé des larmes et du rire, 25 Altéré de l'oubli de ce monde agité, Tu veux, ne sachant plus pardonner ou maudire, Goûter une suprême et morne volupté, Viens ! Le soleil te parle en paroles sublimes ; Dans sa flamme implacable absorbe-toi sans fin; 30 Et retourne à pas lents vers les cités infimes, Le cœur trempé sept fois dans le néant divin.

[Poèmes antiques, A. Lemerre, éditeur.)

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble. — Un tableau de la campagne à midi, en été, dans nos régions, — tableau que suivent les conseils du poète. — 1° Quel est le cadre de ce tableau? (Une plaine immense...) la forêt est lointaine...), 2° Dégagez les impressions que laisse en vous ce tableau (une impression de lumière aveuglante : Midi tombe en nappes d'argent..., — une impression de chaleur accablante : l'air flamboie..., la terre en sa robe de feu..., —- une impression de silence, de sommeil : tout se tait; la terre est assoupie...), 3° Le sommeil s'étend-il à tout végétal et à tout être, dans la nature? (Les grands blés dédaigneux du sommeil...) les bœufs blancs bavent et suivent de leurs yeux un songe intérieur...) 4° Faites remarquer, là encore, que Leconte de Lis le se plaît à peindre des animaux ; 5° L'homme n'est-il pas absent du paysage qu'il décrit? Qu'en inférez-vous? 6° Quelle impression produit en vous la fin du poème (les trois dernières strophes) ?

II. — L'analyse de la poésie. — i° Distinguez les deux parties essentielles du poème : a) le tableau : partie descriptive) b) les conseils : partie philosophique ; 2° Quels sont, dans la première partie, les traits caractéristiques du tableau? a) l'assoupissement de la nature; b) deux visions : celle des grands blés, celle des bœufs blancs...) ; 3° Quelles réflexions vous suggèrent ces deux visions ? 4° De quoi êtes-vous particulièrement frappé en lisant la seconde partie? (De ce que la nature n'exerce sur le poète aucune action apaisante et consolatrice. Leconte de Lisle, poète pessimiste, à l'âme douloureuse, aspire au néant, à « la paix impassible des morts «.... La Nature, pour lui, est indifférente à nos joies et à nos tristesses...).

III. — Le style ; — les expressions. — Quels voué paraissent être les caractères distinctifs du style, dans cette poésie? (la pureté..., — l'exacte propriété des termes... : examiner chacun des mots dont se sert le poète pour marquer l'impression de lumière aveuglante, — de chaleur, — de silence, — de sommeil), — la souplesse : faire remarquer que le poète excelle à peindre les formes mouvantes; exemple : Une ondulation majestueuse et lente S'éveille, et va mourir à l'horizon poudreux. 2° Indiquez les deux comparaisons qui se trouvent dans la troisième strophe; 3° Montrez que la seconde comparaison se poursuit dans la strophe suivante; 4° Expliquez les expressions suivantes : Midi, roi des étés (le poète personnifie l'heure de midi), — leurs fanons épais, — suivent de leurs yeux languissants et superbes le songe intérieur...; 5° Commentez ce vers :

Altéré de l'oubli de ce monde agité...;

6° L'examen de ce vers n'est-il pas de nature à vous renseigner sur le caractère du poète?

IV. — La grammaire. — 1° Indiquez les pronoms contenus dans la deuxième strophe; analysez chacun d'eux; 2° Faites l'analyse des propositions contenues dans ce vers :

Et la source est tarie où buvaient les troupeaux.

Rédaction. — Racontez une promenade que vous avez faite dans la campagne au mois de juillet.

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