Monsieur Bergeret a Paris Wallstein, M.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
aux moeurs de la royauté, et que le Parisien était prêt à recevoir son souverain.
La ville de Paris n'est plus du tout républicaine.
Tout va bien, dit Joseph Lacrisse.
Tant mieux, dit madame de Bonmont.
Est-ce que votre père partage vos espérances? demanda M.
de Gromance au jeune secrétaire de la Jeunesse
royaliste.
C'est que l'opinion de Maître Lacrisse, avocat des congrégations, n'était pas à mépriser.
Maître Lacrisse
travaillait avec l'état-major et préparait le procès de Rennes.
Il rédigeait les dépositions des généraux et les
leur faisait répéter.
C'était une des lumières nationalistes du barreau.
Mais on le soupçonnait de nourrir peu de
confiance dans l'issue des complots monarchiques.
Le vieillard avait travaillé jadis pour le comte de
Chambord et pour le comte de Paris.
Il savait, par expérience, que la République ne se laisse pas facilement
mettre dehors et qu'elle n'est pas aussi bonne fille qu'elle en a l'air.
Il se méfiait du Sénat.
Et, gagnant un peu
d'argent au Palais, il se résignait volontiers à vivre en France dans une monarchie sans roi.
Il ne partageait
point les espérances de son fils Joseph, mais il était trop indulgent pour blâmer l'ardeur d'une jeunesse
enthousiaste.
Mon père, répondit Joseph Lacrisse, agit de son côté.
Moi, j'agis du mien.
Nos efforts sont convergents.
Et, se penchant vers madame de Bonmont, il ajouta à voix basse:
Nous ferons le coup pendant le procès de Rennes.
Dieu vous entende! dit M.
de Gromance avec le soupir d'une piété sincère; car il est temps de sauver la
France.
Il faisait très chaud.
On mangea les glaces en silence.
Puis la conversation reprit, faible et languissante, et se
traîna en propos intimes et en observations banales.
Madame de Gromance et madame de Bonmont parlèrent
toilette.
Il est question, pour cet hiver, de robes à la bonne femme, dit madame de Gromance qui regarda la baronne
avec satisfaction en se la représentant alourdie par une jupe bouffante.
Vous ne devineriez pas, dit Gromance, où je suis allé aujourd'hui.
Je suis allé au Sénat.
Il n'y avait pas
séance.
Laprat-Teulet m'a fait visiter le palais.
J'ai tout vu, la salle, la galerie des Bustes, la bibliothèque.
C'est
un beau local.
Et, ce qu'il ne disait point, dans l'hémicycle où devaient siéger les pairs après la restauration du Roi, il avait
palpé les fauteuils de velours, choisi sa place, au centre.
Et avant de sortir, il avait demandé à Laprat-Teulet
où était la caisse.
Cette visite au palais des pairs futurs avait ranimé ses convoitises.
Il répéta, dans la grande
sincérité de son coeur:
Sauvons la France, monsieur Lacrisse, sauvons la France: il n'est que temps.
Lacrisse s'en chargeait.
Il montra une grande confiance et il affecta une grande discrétion.
Il fallait l'en croire,
tout était prêt.
On serait sans doute obligé de casser la gueule au préfet Worms-Clavelin et à deux ou trois
autres dreyfusistes du département.
Et il ajouta, en avalant un quartier de pêche dans du sucre:
Cela ira tout seul.
Monsieur Bergeret a Paris
X 32.
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