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n'avaient pas encore assez de sages subtils dont la voix grince comme un crayon d'ardoise !

Publié le 30/10/2013

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n'avaient pas encore assez de sages subtils dont la voix grince comme un crayon d'ardoise ! Et quand je crie : « Maudissez tous les lâches démons qui sont en vous et qui gémiraient volontiers, qui voudraient croiser les mains et adorer « : alors ils crient : « Zarathoustra est impie. « Et leurs professeurs de résignation crient plus fort, mais c'est précisément à eux qu'il me plaît de crier à l'oreille : Oui ! Je suis Zarathoustra, l'impie ! Ces professeurs de résignation ! Partout où il y a petitesse, maladie et teigne, ils rampent comme des poux ; et mon dégoût seul m'empêche de les écraser. Eh bien ! voici le sermon que je fais pour leurs oreilles : je suis Zarathoustra l'impie qui dit : « Qui est-ce qui est plus impie que moi, pour que je me réjouisse de son enseignement ? « Je suis Zarathoustra, l'impie : où trouverai-je mes semblables ? Mes semblables sont tous ceux qui se donnent eux-mêmes leur volonté et qui se débarrassent de toute résignation. Je suis Zarathoustra, l'impie : je fais bouillir dans ma marmite tout ce qui est hasard. Et ce n'est que lorsque le hasard est cuit à point que je lui souhaite la bienvenue pour en faire ma nourriture. Et en vérité, maint hasard s'est approché de moi en maître : mais ma volonté lui parle d'une façon plus impérieuse encore, - et aussitôt il se mettait à genoux devant moi en suppliant - me suppliant de lui donner asile et accueil cordial, et me parlant d'une manière flatteuse : « Vois donc, Zarathoustra, il n'y a qu'un ami pour venir ainsi chez un ami ! « Mais pourquoi parler, quand personne n'a mes oreilles ! Ainsi je veux crier à tous les vents : Vous devenez toujours plus petits, petites gens ! vous vous émiettez, vous qui aimez vos aises ! Vous finirez par périr - à cause de la multitude de vos petites vertus, de vos petites omissions, à cause de votre continuelle petite résignation. Vous ménagez trop, vous cédez trop : c'est de cela qu'est fait le sol où vous croissez ! Mais pour qu'un arbre devienne grand, il faut qu'il pousse ses dures racines autour de durs rochers ! Ce que vous omettez aide à tisser la toile de l'avenir des hommes ; votre néant même est une toile d'araignée et une araignée qui vit du sang de l'avenir. Et quand vous prenez, c'est comme si vous vouliez, ô petits vertueux ; pourtant, parmi les fripons même, l'honneur parle : « Il faut voler seulement là ou on ne peut pas piller. « « Cela ce donne « - telle est aussi une doctrine de la résignation. Mais moi je vous dis, à vous qui aimez vos aises : cela se prend, et cela prendra de vous toujours davantage ! Hélas, que ne vous défaites-vous de tous ces demi-vouloirs, que ne vous décidez-vous pour la paresse comme pour l'action ! Hélas, que ne comprenez-vous ma parole : « Faites toujours ce que vous voudrez, - mais soyez d'abord de ceux qui peuvent vouloir ! « « Aimez toujours votre prochain comme vous-mêmes, mais soyez d'abord de ceux qui s'aiment eux-mêmes - - qui s'aiment avec le grand amour, avec le grand mépris ! « Ainsi parle Zarathoustra, l'impie. - Mais pourquoi parler, quand personne n'a mes oreilles ! Il est encore une heure trop tôt pour moi. Je suis parmi ce peuple mon propre précurseur, mon propre chant du coq dans les rues obscures. Mais leur heure vient ! Et vient aussi la mienne ! D'heure en heure ils deviennent plus petits, plus pauvres, plus stériles, - pauvre herbe ! pauvre terre ! Bientôt ils seront devant moi comme de l'herbe sèche, comme une steppe, et, en vérité, fatigués d'eux-mêmes, - et plutôt que d'eau, altérés de feu ! Ô heure bienheureuse de la foudre ! Ô mystère d'avant midi ! - un jour je ferai d'eux des feux courants et des prophètes aux langues de flammes : - ils prophétiseront avec des langues de flammes : il vient, il est proche, le Grand Midi ! Ainsi parlait Zarathoustra. Sur le mont des oliviers L'hiver, hôte malin, est assis dans ma demeure mes mains sont bleues de l'étreinte de son amitié. Je l'honore, cet hôte malin, mais j'aime à le laisser seul. J'aime à lui échapper ; et si l'on court bien, on finit par y parvenir. Avec les pieds chauds, les pensées chaudes, je cours où le vent se tient coi, - vers le coin ensoleillé de ma montagne des Oliviers. C'est là que je ris de mon hôte rigoureux, et je lui suis reconnaissant d'attraper chez moi les mouches et de faire beaucoup de petits bruits. Car il n'aime pas à entendre bourdonner une mouche, ou même deux ; il rend solitaire jusqu'à la rue, en sorte que le clair de lune se met à avoir peur la nuit. Il est un hôte dur, - mais je l'honore, et je ne prie pas le dieu ventru du feu, comme font les efféminés. Il vaut encore mieux claquer des dents que d'adorer les idoles ! - telle est ma nature. Et j'en veux surtout à toutes les idoles du feu, qui sont ardentes, bouillonnantes et mornes. Quand j'aime quelqu'un, je l'aime en hiver mieux qu'en été ; je me moque mieux de mes ennemis, je m'en moque avec le plus de courage, depuis que l'hiver est dans la maison. Avec courage, en vérité, même quand je me blottis dans mon lit : - car alors mon bonheur enfoui rit et fanfaronne encore, et mon rêve mensonger se met à rire lui aussi. Pourquoi ramper ? jamais encore, de toute ma vie, je n'ai rampé devant les puissants ; et si j'ai jamais menti, ce fut par amour. C'est pourquoi je suis content même dans un lit d'hiver. Un lit simple me réchauffe mieux qu'un lit luxueux, car je suis jaloux de ma pauvreté. Et c'est en hiver que ma pauvreté m'est le plus fidèle. Je commence chaque jour par une méchanceté, je me moque de l'hiver en prenant un bain froid : c'est ce qui fait grogner mon ami sévère. J'aime aussi à le chatouiller avec un petit cierge : afin qu'il permette enfin au ciel de sortir de l'aube cendrée. Car c'est surtout le matin que je suis méchant : à la première heure, quand les seaux grincent à la fontaine, et que les chevaux hennissent par les rues grises : - j'attends alors avec impatience que le ciel s'illumine, le ciel d'hiver à la barbe grise, le vieillard à la tête blanche, - le ciel d'hiver, silencieux, qui laisse parfois même le soleil dans le silence. Est-ce de lui que j'appris les longs silences illuminés ? Ou bien est-ce de moi qu'il les a appris ? Ou bien chacun de nous les a-t-il inventés lui-même ? Toutes les bonnes choses ont une origine multiple, - toutes les bonnes choses folâtres sautent de plaisir dans l'existence : comment ne feraient-elles cela qu'une seule fois ! Le long silence, lui aussi, est une bonne chose folâtre. Et pareil à un ciel d'hiver, mon visage est limpide et le calme est dans mes yeux : - comme le ciel d'hiver je cache mon soleil et mon inflexible volonté de soleil : en vérité j'ai bien appris cet art et cette malice d'hiver ! C'était mon art et ma plus chère méchanceté d'avoir appris à mon silence de ne pas se trahir par le silence. Par le bruit des paroles et des dés je m'amuse à duper les gens solennels qui attendent : je veux que ma volonté et mon but échappent à leur sévère attention. Afin que personne ne puisse regarder dans l'abîme de mes raisons et de ma dernière volonté, - j'ai inventé le long et clair silence. J'ai trouvé plus d'un homme malin qui voilait son visage et qui troublait ses profondeurs, afin que personne ne puisse regarder au travers et voir jusqu'au fond. Mais c'est justement chez lui que venaient les gens rusés et méfiants, amateurs de difficultés :

« Ainsi parlait Zarathoustra.. »

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