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Problèmes du roman réaliste et naturaliste

Publié le 08/02/2011

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 Que pensez-vous de ce rôle attribué au roman dans l'esthétique naturaliste : «L'esthétique naturaliste a bousculé les divisions traditionnelles de la littérature, mais n'a pas véritablement réussi à les recomposer ou à les refondre. Sous son influence, le roman, gagnant une nouvelle dimension (en quelque sorte, «transgénérique«), s'est vu confier la mission d'exprimer tous les styles toutes les nuances - de l'histoire à la poésie. Il a conquis la liberté de la science, mais sans en subir les contraintes«. (Alain Pagès, Le Naturalisme, Coll. «Que sais-je ?«, PUF 1989.)    Commentez cette définition du romancier réaliste Duranty (1833-1880) : «Le Réalisme proscrit l'historique, il veut l'étude de notre époque. Il ne déforme rien et, pour cela, il représente le côté social de l'homme. L'artiste a un but philosophique pratique, utile, non divertissant. Dans le vrai utile, il cherche une émotion qui soit un enseignement.«    Étudiez ces lignes de Zola dans son essai sur Le Roman expérimental (1880) : «Le romancier est fait d'un observateur et d'un expérimentateur. L'observateur, chez lui, donne les faits tels qu'il les a observés, pose le point de départ, établit le terrain solide sur lequel vont marcher les personnages et se développer les phénomènes. Puis l'expérimentateur paraît et institue l'expérience, je veux dire fait mouvoir les personnages dans une histoire particulière pour y montrer que la succession des faits y sera telle que l'exige le déterminisme des phénomènes mis à l'étude.«    Commentez cet essai de définition «scientifique« du naturalisme : «Nature, observation, document, enquête, réalité, analyse, logique, déterminisme, tels sont les mots par lesquels Zola explicite le plus souvent le naturalisme. Le vrai ne se constate pas, il s'acquiert et se conquiert par une méthode. On le découvre, par une démarche analogue à celle de l'homme de science, puis on l'expose, sans considération des dogmes ni des rhétoriques. Car, autant que par ce qu'il revendique, le naturalisme se définit par ce qu'il refuse : l'idéalisme mystique, «qui base les œuvres sur le surnaturel et l'irrationnel«, qui admet des forces mystérieuses, en dehors du déterminisme des phénomènes ; l'idéalisme classique, qui étudie «l'homme abstrait, l'homme métaphysique« ; le romantisme, qui nie le réel en lui substituant l'imaginaire et «grandit mensongèrement les personnages« ; le dogmatisme théologique, qui affirme «un absolu païen ou catholique« ; le dogmatisme rhétorique, qui juge au nom des règles, des convenances, de la tradition ; et même le réalisme, s'il doit n'être qu'une copie impersonnelle de la réalité. D'une certaine manière, le discours naturaliste de Zola renoue bien avec l'héritage de l'esprit des Lumières, qui au XVIIIe siècle avait déjà emprunté les objectifs et le langage de la rationalité scientifique pour revendiquer la liberté du jugement et la liberté de la création.« (Henri Mitterand, Zola et le naturalisme, Coll. «Que sais-je ?«, PUF, 1986.)    Qu'en pensez-vous du système romanesque suggéré par Zola dans cette remarque : «Nous estimons que l'homme ne peut être séparé de son milieu, qu'il est complété par son vêtement, par sa maison, par sa ville et sa province ; et, dès lors, nous ne noterons pas un seul phénomène de son cerveau ou de son cœur, sans en chercher les causes ou le contrecoup dans le milieu.« {Le Roman expérimental, 1880.)    Etes-vous d'accord avec cette affirmation d'Yves Chevrel : «Le grand thème naturaliste devient celui d'une interrogation sur le degré d'intégration de l'individu dans la société : comment celle-ci fonctionne-t-elle ? dans quelle mesure façon-ne-t-elle les individus qui y vivent ? comment leur permet-elle de vivre ? comment les accepte-t-elle, les rejette-t-elle, les transforme-t-elle ? quelles sont les normes d'une vie sociale ? autant de questions qui sont constamment sous-jacentes à la littérature naturaliste. Les problèmes peuvent être traités à l'échelle d'une micro-ou d'une macro-société, de l'individu isolé ou d'un groupe solidement uni par des liens professionnels ou autres.« (Le naturalisme, PUF, 1982.)    Commentez cette affirmation de Ph. Van Tieghem : «Sans doute le tempérament foncièrement artiste de Flaubert et des Goncourt a permis la survivance de l'art, et du plus subtil, dans l'œuvre de l'observateur. Mais le naturalisme marque la pointe extrême de la tendance qui donne comme but à l'écrivain le vrai plutôt que le beau. En fait, ce vrai, que tous nos classiques avaient déjà pris comme objet, sera le vrai relatif, non le vrai absolu ; depuis Balzac jusqu'à Zola, l'objet du romancier réaliste, puis naturaliste, sera l'incidence des circonstances sur le fond permanent de l'humanité. On comprend que l'idée de loi scientifique se soit dégagée de la considération de ces rapports.« (Petite Histoire des grandes doctrines littéraires en France, P.U.F.,1946.)    Zola écrit dans la Préface de Thérèse Raquin (1867) qu'il a «voulu étudier des tempéraments et non des caractères«. Indépendamment du problème propre à Thérèse Raquin, vous vous demanderez si l'idéal ainsi formulé par Zola est réalisable et souhaitable.    Illustrez et, s'il y a lieu, discutez cet aspect de l'œuvre naturaliste : «L'œuvre naturaliste est le plus souvent conçue comme l'exploration d'un système, la mise en évidence de ses rouages, de ses règles de fonctionnement - ou, sans doute parce que littérairement plus intéressants, des cas de dysfonctionnement : que se passe-t-il quand le mécanisme se détraque ou se bloque ? quelles sont les causes qui produisent ces écarts, ou, plus simplement, quels sont les facteurs qui permettent le mieux d'attirer l'attention sur eux ? [...] Le naturalisme est en effet partie prenante dans la recherche à laquelle s'évertue la fin du XIXe siècle : la distinction entre le normal et le pathologique. La mise en évidence du pathologique suppose bien évidemment qu'on sache le définir : or ce n'est pas toujours aussi facile qu'on le croyait. Quand et comment devient-on criminel, ou prostituée ?« (Yves Chevrel, Le naturalisme, PUF, 1982.)    Les romanciers naturalistes vous semblent-ils avoir répondu à l'idéal formulé par Huysmans (É. Zola et L'Assommoir, 1877) : «Nous voulons essayer de ne pas faire comme les romantiques des fantoches plus beaux que nature, remontés toutes les quatre pages, brouillés et grandis par une illusion d'optique, nous voulons essayer de camper sur leurs pieds des êtres en chair et en os.«    Illustrez et, s'il y a lieu, discutez cette phrase de Henri Mitterand : «L'influence de la pensée et de la méthode biologiques, manifestes dans le lexique et les images du naturalisme didactique, ont donné au naturalisme romanesque son constituant le plus novateur : la découverte et le dévoilement du corps, dans sa nudité, ses pulsions, ses désirs, ses jouissances, ses désordres et ses folies, sa libido,.« {Zola et le naturalisme, Coll. «Que sais-je ?«, PUF, 1986.)     

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