Devoir de Philosophie

Une intégration exemplaire.

Publié le 11/05/2011

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Nous ne connaissons en toute lumière qu'une seule loi : c'est celle de la constance et de l'uniformité. C'est à cette idée simple que nous cherchons à réduire toutes les autres, et c'est uniquement dans cette réduction que consiste pour nous la science. Ainsi, quand nous étudions les choses qui changent pour découvrir ce qu'on appelle la loi de leurs variations, notre unique objet est de trouver ce qu'il peut y avoir d'uniforme et de constant au milieu de ces choses qui varient. Que si, avec le temps et par un nouvel examen, nous venons à reconnaître que des rapports qui nous avaient paru constants sont eux-mêmes variables, il nous faut faire un nouveau pas : mais notre marche est toujours la même; car alors ce n'est plus dans ces rapports, mais dans quelque autre forme de leur combinaison, que notre esprit va rechercher cette loi de constance qui avait, pour ainsi dire, échappé à ses premières conclusions. Tel est, je crois, le mouvement naturel de l'esprit humain... Ainsi les anciens astronomes, d'après les premières apparences des mouvements célestes, avaient cru naturellement que les planètes décrivaient dans leur cours des cercles parfaits, et qu'elles les décrivaient d'un mouvement uniforme : de sorte que la ligne menée du centre à la planète et sa vitesse angulaire étaient regardées comme constantes. Malgré quelques inégalités que l'observation avait rendues sensibles, cette première loi du mouvement des planètes subsista très longtemps, parce qu'on faisait disparaître à très peu près ces inégalités en essayant de mieux placer le centre de ce cercle parfait qu'on avait imaginé. Mais Képler ayant reconnu, par la comparaison attentive de nombreuses observations, que le mouvement d'une planète se fait, non dans un cercle, mais dans une ellipse, dont le soleil occupe un des foyers, de sorte que le rayon vecteur et l'angle qu'il décrit étaient tous deux variables; et ne trouvant plus ainsi, ni dans ce rayon ni dans cet angle, cette constance qu'on y avait d'abord supposée, imagina de la retrouver dans une quantité nouvelle composée de ces deux-là; et considérant dans cette vue la plus simple qu'on en puisse former, savoir, l'aire du secteur elliptique que trace le rayon vecteur de la planète autour du soleil, il trouva enfin que cette aire était constante, c'est-à-dire toujours la même en temps égal, ou, en d'autres termes encore, que l'aire décrite était proportionnelle au temps écoulé. Cette loi de Képler qui n'était prouvée que par l'observation, Newton la démontra ensuite comme un théorème mathématique qui doit avoir lieu dans le mouvement de tout corps attiré par une force quelconque vers un centre fixe; et réciproquement... ce qui conduit... au principe de la pesanteur universelle. Enfin, vers le milieu du siècle dernier, le chevalier d'Arcy, Daniel Bernoulli et Euler découvrirent presque en même temps, et sous des formes différentes, un théorème plus général, mais qui n'est en quelque sorte que celui de Newton étendu à plusieurs corps qui seraient soumis à la fois à leurs actions réciproques, et à des forces quelconques dirigées vers un même point fixe... En projetant toutes ces aires variables sur un même plan fixe, et les multipliant par les masses respectives des corps, on trouve que la somme de ces projections est constante, et se conserve sans altération, comme dans le cas d'un seul mobile. On voit comment les géomètres, qui démontrent et qui généralisent, ont su s'élever rapidement au principe général des aires dans un système quelconque, et par conséquent dans le système du monde. POINSOT.

 

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