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  Voyons, mes bons amis, ne vaudrait-il pas mieux en rester là !

Publié le 15/12/2013

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  Voyons, mes bons amis, ne vaudrait-il pas mieux en rester là ! Quand un ordre est établi, ça coûte toujours plus cher de le changer. Et si même cet ordre vous paraît insupportable, peut-être pourrait-on obtenir quelques accommodements.   UNE FEMME   Quels accommodements ?   LA SECRÉTAIRE   Je ne sais pas, moi ! Mais, vous autres femmes, n'ignorez pas que tout bouleversement se paye et qu'une bonne conciliation vaut parfois mieux qu'une victoire ruineuse ?   Les femmes approchent. Quelques hommes se détachent du groupe de Diego.   DIEGO   N'écoutez pas ce qu'elle dit. Tout cela est convenu.   LA SECRÉTAIRE   Qu'est-ce qui est convenu ? Je parle raison et ne sais rien de plus.   UN HOMME   De quels arrangements parliez-vous ?   LA SECRÉTAIRE   Naturellement, il faudrait réfléchir. Mais, par exemple, nous pourrions constituer avec vous un comité qui déciderait, à la majorité des voix, des radiations à prononcer. Ce comité détiendrait en pleine propriété ce cahier où se font les radiations. Notez bien que je dis cela à titre d'exemple...   Elle secoue le cahier à bout de bras. Un homme le lui arrache.   LA SECRÉTAIRE, faussement indignée.   Voulez-vous me rendre ce cahier ! Vous savez bien qu'il est précieux et qu'il suffit d'y rayer le nom d'un de vos concitoyens pour que celui-ci meure aussitôt.   Hommes et femmes entourent le possesseur du cahier. Animation.   - Nous le tenons ! - Plus de morts ! - Nous sommes sauvés !   Mais la fille du juge survient qui arrache brutalement le cahier, se sauve dans un coin et, feuilletant rapidement le carnet, y raye quelque chose. Dans. la maison du juge, un grand cri et la chute, d'un corps. Des hommes et des femmes se précipitent vers la fille.   UNE VOIX   Ah ! Maudite ! C'est toi qu'il faut supprimer !   Une main lui arrache le cahier et, tous feuilletant, on trouve son nom qu'une main raye. La fille tombe sans un cri.   NADA, hurlant.   En avant, tous unis pour la suppression ! Il ne s'agit plus de supprimer, il s'agit de se supprimer ! Nous voilà tous ensemble, opprimés et oppresseurs, la main dans la main ! Allez ! taureau ! C'est le nettoyage général !   Il s'en va.   UN HOMME, énorme et qui tient le cahier.   C'est vrai qu'il y a quelques nettoyages à faire ! Et l'occasion est trop belle de ratatiner quelques fils e garce qui se sont sucrés pendant que nous crevions de faim !   La Peste qui vient de réapparaitre éclate d'un rire prodigieux, pendant que la secrétaire regagne modestement sa place, à ses côtés. Tout le monde, immobile, les yeux levés, attend sur le plateau pendant que les gardes de la Peste se répandent partout pour rétablir le décor et les signes de la Peste.   LA PESTE, à Diego.   Et voilà ! Ils font eux-mêmes le travail ! Crois-tu qu'ils vaillent la peine que tu prends ?   Mais Diego et le pêcheur ont sauté sur le plateau, se sont précipités sur l'homme au cahier qu'ils giflent et précipitent à terre. Diego prend le cahier qu'il déchire.   LA SECRÉTAIRE   Inutile. J'en ai un double.   Diego repousse les hommes de l'autre côté.   DIEGO   Vite, au travail ! Vous avez été joués !   LA PESTE   Quand ils ont peur, c'est pour eux-mêmes. Mais leur haine est pour les autres.   DIEGO, revenu en face de lui.   Ni peur, ni haine, c'est là notre victoire !   Reflux progressif des gardes devant les hommes de Diego.   LA PESTE   Silence ! Je suis celui qui aigrit le vin et qui dessèche les fruits. Je tue le sarment s'il veut donner des aisins, je le verdis s'il doit nourrir du feu. J'ai horreur de vos joies simples. J'ai horreur de ce pays où 'on prétend être libre sans être riche. J'ai les prisons, les bourreaux, la force, le sang ! La ville sera asée et, sur ses décombres, l'histoire agonisera enfin dans le beau silence des sociétés parfaites. Silence donc ou j'écrase tout.   Lutte mimée au milieu d'un effroyable fracas, grincements du garrot, bourdonnement, coups de la radiation, marée des slogans. Mais à mesure que la lutte se dessine à l'avantage des hommes de Diego, le tumulte s'apaise et le choeur, quoique indistinct, submerge les bruits de la Peste.   LA PESTE, avec un geste de rage.   Il reste les otages !   Il fait un signe. Les gardes de la Peste quittent la scène pendant que les autres se regroupent.   NADA, sur le haut du palais.   Il reste toujours quelque chose. Tout continue à ne pas continuer. Et mes bureaux continuent aussi. La ville croulerait, le ciel éclaterait, les hommes déserteraient la terre que les bureaux s'ouvriraient encore heure fixe pour administrer le néant ! L'éternité, c'est moi, mon paradis a ses archives et ses tamponsbuvards.

«   UNE FEMME  Quels accommodements ?   LA SECRÉTAIRE  Je nesais pas, moi ! Mais, vousautres femmes, n'ignorez pasque tout bouleversement sepaye et qu'une bonneconciliation vautparfois mieuxqu'une victoire ruineuse ?   Lesfemmes approchent.

Quelqueshommessedétachent dugroupe deDiego.   DIEGO  N'écoutez pascequ'elle dit.Tout celaestconvenu.   LA SECRÉTAIRE  Qu'est-ce quiest convenu ? Jeparle raison etne sais rien deplus.   UN HOMME  De quels arrangements parliez-vous ?. »

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