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THÉÂTRE FRANÇAIS de 1920 à 1929 : Histoire: Copeau ET SES FILS

Publié le 01/01/2019

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histoire

Au lendemain de la Grande Guerre, de nombreuses voies de renouvellement sont susceptibles d'attirer les hommes de théâtre français : l’exploration des possibilités de la mise en scène, déjà énergiquement abordées avant guerre par Antoine et utilisées avec de grandes prouesses techniques en URSS et en Allemagne ; la recherche d'un théâtre populaire et politique tel qu'il avait été proposé dans les précédentes décennies par Romain Rolland et Maurice Pottecher et tel que semble l’annoncer la réflexion des intellectuels sur les bouleversements provoqués par la guerre ; la rencontre avec l'avant-garde littéraire que va incarner le mouvement surréaliste et qui est tout de suite perceptible dans les œuvres d'Apollinaire (n’est-ce pas à propos d'une pièce de ce poète, les Mamelles de Tirésias, en 1917, qu'on invente le mot «surréalisme»?).

 

Pourtant, si chacune de ces tendances va ébranler le conformisme ambiant, aucune ne sera assez vivace, assez suivie pour que le paysage théâtral français soit radicalement changé et devienne semblable à celui des pays européens les plus novateurs. Certes, la mise en scène évolue, mais sans prendre le chemin des scènes multiples et d’un nouveau rapport avec le spectateur; sous l'impulsion de Jacques Copeau, elle va vers le dépouillement et l'austérité. Dans la majorité des cas, le théâtre reste dépendant de ses auteurs et de ses acteurs. L'art lyrique et l’art chorégraphique sont, au contraire, beaucoup plus remuants, beaucoup plus Années folles; il n'est donc pas étonnant qu'un jeune poète, Jean Cocteau, soit beaucoup plus proche des musiciens du groupe des Six que des professionnels du théâtre : ses turbulents Mariés de la tour Eiffel sont créés par les Ballets suédois en 1921, avec des musiques d'Auric, Milhaud, Poulenc, Tailleferre et Honegger.

 

Le théâtre populaire a pignon sur rue puisque, en 1920, Firmin Gémier crée à Chaillot le Théâtre national populaire (appellation que Jean Vilar reprendra au même endroit trente et un ans plus tard). Mais ses mises en scène grandioses et mélodramatiques de classiques et de tableaux historiques sont si coûteuses et si malaisées dans cette salle de 5 000 places qu’il préfère vite travailler dans d’autres lieux. Quant au théâtre proprement politique, il se formera un peu plus tard dans l’action ouvrière et syndicale, autour du parti communiste et à partir d’auteurs comme Gorki et Barbusse, avec des animateurs comme Léon Moussinac. L’un de ces groupes de théâtre ouvrier deviendra dans les années trente le fameux groupe Octobre, auquel participeront Jacques et Pierre Prévert.

 

Le théâtre surréaliste se résume à peu d'œuvres et de manifestations, sans doute parce que les ténors du mouvement - André Breton, son chef intransigeant, surtout — ne portent pas de véritable intérêt au langage théâtral. Avant eux, mais en précurseur, Tzara a fait jouer sa pièce dada le Cœur à gaz. galerie Montaigne (Studio des Champs-Elysées), en juin 1921. Aragon (PArmoire à glace un beau soir, 1926), Ribemont-Dessaignes, Philippe Soupault se risquent à de réelles tentatives de théâtre surréaliste, mais loin de la forme originale, uniquement fondée sur le verbe, rejetant totalement l'action, qu'invente un de leurs amis, l'écrivain et poète Raymond Roussel (Locus Solus, décembre 1922, pièce écrite en 1914), trop marginal pour accepter l'étiquette du groupe.

 

Et ce court chapitre du théâtre surréaliste se serait achevé là si, en 1927, trois jeunes écrivains, Antonin Artaud, Robert Aron et Roger Vitrac, ne s’étaient réunis pour fonder le théâtre Alfred-Jarry. Sans grand succès, leur équipe présente des œuvres écrites par chacun d'entre eux, un acte de Partage de midi de Claudel «contre la volonté de l'auteur» (dépeint comme un «infâme traître») et le Songe de Strindberg au cours des trois ans que dure leur aventure. Elle révèle avant tout le talent iconoclaste et juvénile de Vitrac qui, avec Victor ou les Enfants au pouvoir (décembre 1928) notamment, est le seul réel et durable dramaturge surréaliste. Dans Victor, un enfant de neuf ans transforme en jeu de massacre mortel la fête qu'on avait organisée pour son anniversaire. Tout y est cloué au pilori par la jeunesse : la bourgeoisie, la religion, l’armée...

 

Copeau

 

C'est d'un autre mouvement littéraire que vient celui qui va créer et cristalliser le renouveau théâtral français. Avant d’être un homme de théâtre, Jacques Copeau a été directeur de la Nouvelle Revue française, dont il fut l'un des fondateurs. Parmi ses amis, il compte Gide et Martin du Gard, qui écriront quelques œuvres pour le théâtre. Mais, en 1913, il quitte le monde de la littérature pour ouvrir le théâtre du Vieux-Colombier. En 1920, il le rouvre. Il n'y reste que cinq ans et part en Bourgogne, à Pernand, où se constitue un groupe de disciples, les «Copiaux». À Paris, comme après en province, sa philosophie du théâtre s'affirme dans des spectacles et dans des écrits et marque profondément toutes les grandes figures de l’entre-deux-guerres. Elle restera longtemps influente puisque des metteurs en scène comme Giorgio Strehler se référent encore à Jacques Copeau.

 

Dès 1913, Copeau proclame : «Que les autres prestiges s’évanouissent et, pour l'œuvre nouvelle, qu’on nous laisse un tréteau nu.» Ce «tréteau nu» définit à la fois un retour aux sources, en un temps où beaucoup redécouvrent les théâtres traditionnels (des farces du Moyen Âge aux codes asiatiques et à la commedia dell’arte) et une avancée personnelle par rapport aux théories nouvelles du Suisse Adolphe Appia et de l’Anglais Gordon Craig, qui préconisent un rôle nouveau pour l'acteur et pour la lumière dans une scénographie très architecturale. Copeau bannit l’excès de couleur, comme il interdit les débordements du jeu. Il impose un classicisme austère, au service du texte, mais il n'en est pas moins un des novateurs de l'expression corporelle, entraînant ses comédiens et les élèves de son école à la maîtrise du corps, à l'improvisation, jusqu’à l’acrobatie. Sur son «tréteau nu» à plusieurs niveaux, qu’a dessiné pour lui son régisseur, Louis Jouvet, il met en pratique ses idées d’une manière tout à fait aboutie à travers Molière, qu'il monte souvent, et ses contemporains (Vildrac, Romains, Gide); il connaît cependant un échec cuisant avec sa propre pièce, la Maison natale, en 1923.

Les quatre de...

 

Au début des années vingt, quatre jeunes metteurs en scène sont empreints des théories de Copeau. L’un d'eux, Louis Jouvet, est l'un de ses collaborateurs mais il le quitte en 1922 pour devenir directeur de scène à la Comédie des Champs-Elysées. Les trois autres

histoire

« THÉÂTRE FRANÇAIS.

Baty monte en 1927 la Machine à calculer.

© Bibliothèque nationale · Paris· Arc/rives SGED THÉÂTRE FRANÇAIS.

En 1923, Jouvet triomphe avec Knock.

Ci-dessous: le décor, dû à Jouvet lui-même.

© Bibliotlri!que nationale · Paris · Archives SGED les Enfants au pouvoir (décembre 1928) notamment, est le seul réel et durable dramaturge surréaliste.

Dans Victor, un enfant de neuf ans transforme en jeu de massacre mortel la fête qu'on avait organisée pour son anniversaire.

Tout y est cloué au pilori par la jeunesse : la bourgeoisie, la religion, l'armée ...

C oPEAU C'est d'un autre mouvement littéraire que vient celui qui va créer et cristalliser le renouveau théâtral français.

Avant d'être un homme de théâtre, Jacques Copeau a été directeur de la Nouvelle Revue française, dont il fut l'un des fondateurs.

Parmi ses amis, il compte Gide et Martin du Gard, qui écriront quelques œuvres pour le théâtre.

Mais, en 1913, il quitte le monde de la littérature pour ouvrir le théâtre du Vieux-Colombier.

En 1920, ille rouvre.

Il n'y reste que cinq ans et part en Bourgogne, à Pernand, où se constitue un groupe de disciples, les .

A Paris, comme après en province, sa philosophie du théâtre s'affirme dans des spectacles et dans des écrits et marque profondément toutes les grandes figures de l'entre-deux· guerres.

Elle restera longtemps influente puisque des metteurs en scène comme Giorgio Strehler se référent encore à Jacques Copeau.

Dès 1913, Copeau proclame : «Que les autres prestiges s'évanouissent et, pour l'œuvre nouvelle, qu'on nous laisse un tréteau nu.>> Ce définit à la fois un retour aux sources, en un temps où �aucoup redécouvrent les théâtres traditionnels (des farces du Moyen Age aux codes asiatiques et à la commedia dell'arte) et une avancée personnelle par rapport aux théories nouvelles du Suisse Adolphe Appia et de l'Anglais Gordon Craig, qui préconisent un rôle nouveau pour J'acteur et pour la lumière dans une scénographie très architecturale.

Copeau bannit l'excès de couleur, comme il interdit les débordements du jeu.

Il impose un classicisme austère, au service du texte, mais il n'en est pas moins un des novateurs de l'expression corporelle, entraînant ses comédiens et les élèves de son école à la maîtrise du corps, à l'improvisation, jusqu'à l'acrobatie.

Sur son «!ré· teau nu» à plusieurs niveaux, qu'a dessiné pour lui son régisseur, Louis Jouvet, il met en pratique ses idées d'une manière tout à fait aboutie à travers Molière, qu'il monte souvent, et ses contemporains (Vildrac, Romains, Gide); il connaît cependant un échec cuisant avec sa propre pièce, la Mais on natale, en 1923.

LEs QUATRE DE ...

Au début des années vingt, quatre jeunes metteurs en scène sont empreints des théories de Copeau.

I.:un d'eux, Louis Jouvet, est l'un de ses collaborateurs mais ille quitte en)922 pour devenir direc­ teur de scène à la Comédie des Champs-Elysées.

Les trois autres fondent leur troupe ou ouvrent leur théâtre.

Charles Dullin, qui a travaillé un moment avec Copeau, puis avec Gémier, reprend le Petit Théâtre Montmartre et le rebaptise l'Atelier, en 1921.

Gaston Baty crée, la même année, les Com2agnons de la Chimère et s'installe bientôt au Studio des Champs-Elysées.

Vannée suivante, le Russe Georges Pitoëff, qui a tenté en Suisse de mettre sur pied une collabo­ ration avec Copeau, répond à l'invitation de Jacques Hébertot et s'installe,_avec sa femme Ludmilla et sa troupe, à la Comédie des Champs-Elysées (il devra, par la suite, souvent changer de théâtre).

Chacun de ces quatre artistes travaille séparément mais le temps va les réunir.

En 1927, ils créent le Cartel où, se référant à Copeau, ils rassemblent leurs moyens d'action pour lutter ensemble contre le théâtre commercial.

Leur union, qui n'est pas une commu­ nion artistique (car chacun a son style, se défend d'appartenir à une école commune), se poursuivra jusqu'à la déclaration de guerre.

Mieux que Copeau, ils vont rencontrer ou faire naître les auteurs de leur temps.

Charles Dullin aime les grands classiques et leur démesure, mais il demande à des écrivains amis de les adapter : c'est Jules Romains qui transpose pour lui, d'après Ben Jonson et Stefan Zweig, Volpone, et lui fournit l'un de ses plus grands succès, en 1928.

Il monte Achard et Salacrou, est l'un des premiers à se passionner pour Pirandello.

Après avoir mis en scène en 1922 /a Volupté de l'honneur, il révèle au public français Chacun sa vérité dans un spectacle qui passe pour l'un de ses plus saisissants.

Ga�ton Baty, dont l'association avec Marguerite Jarnois aboutit à une fascinante Mademoiselle Julie en 1925 et à un troublant Premier Ham/er en 1928, s'intéresse aux auteurs dont les tableaux sociaux extirpent les sentiments secrets et l'inconscient.

Il s'attache particulièrement à l'œuvre d'Henri-René Lenormand : le Simoun ( 1920), récit enfiévré mais d'une audace encore perceptible aujour­ d'hui d'une passion entre un colonial et une Arabe, À l'ombre du mal (1924).

Venant de la pratique théâtrale la plus concrète, Louis Jou· vet prend tout en main à la Comédiê des Champs-Élysées.

Pour ses premières mises en scène, il dessine lui-même ses décors, très géomé­ triques et nets, qu'il éclaire d'une lumière intense, sans clair-obscur.

En 1923, il met en scène une pièce de Jules Romains, qui sera l'un des grands succès de sa vie : Knock ou le Triomphe de La médecine, où un médecin, joué par Jouvet lui-même, soumet tout un village aux soins médicaux obligatoires.

C'est, deux siècles après Molière, la charge la plus brutale contre la médecine! Sans rompre avec Jules Romains, dont il.

créera d'autres œuvres, Jouvet passe à Achard et à Crommelynck puis fait une ren­ contre décisive, celle de Giraudoux, dont il monte Siegfried en 1928 et Amphitryon 38 en 1929.

Personne ne s'y trompe : l'accord entre le poète à la prose miroitante, jonglant avec les mythes éternels, et l'homme de théâtre est parfait.

Une collaboration historique commence, incarnée par l'interprétation d'acteurs comme Valentine Tessier.

Georges et Ludmilla Pitoëff touchent Paris en plein cœur avec Saime Jeanne de Bernard Shaw, que Ludmilla interprète de façon bouleversante, en 1925, et lors de nombreuses reprises.

Il faut mettre à l'actif de Georges Pitoëff l'introduction en France d'un style neuf pour jouer les grands Russes (Tchekhov) et les grands Scandinaves (Ibsen, Strindberg) et un goOt actif et sans exclusive des auteurs contemporains (de O'Neill à Claudel).

Devancé par Dullin pour la «découverte>> de Pirandello, il prend sa revanche en montant en 1923 Six Personnages en quêre d'auteur : arrivant par un ascenseur, les acteurs jouent le texte dans un éclairage blafard.

Ainsi mise en relief, la pièce frappe de plein fouet et la représentation fa.it date.

T EXTES D'AFFICHES À Copeau, à ces quatre mousquetaires, et également aux décorateurs qui modifient le climat esthétique des théâtres -Tou­ chagues, Christian Bérard, Cassandre, André Masson, Balthus ...

- reviennent les mérites d'un renouveau qui se situe à la fois hors des institutions, comme la Comédie-Française (elle va bientôt accueillir les metteurs en scène du Cartel, après que l'État refuse de placer Copeau à sa tête), et à l'intérieur du système privé.

Mais, parallèle­ ment, dans ce secteur privé, la tradition de divertissement et de drame social se poursuit, renouant avec l'esprit de l'avant-guerre et s'ouvrant en même temps à de nouveaux écrivains.

De très grands acteurs, Victor Boucher, Jules Berry, Michel. »

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