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Juvénal

Publié le 21/05/2012

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La vie du dernier des poètes satiriques latins reste méconnue. Selon toute probabilité, Decimus Junius Juvenalis naquit à Aquinum dans une famille aisée. Destiné à faire une carrière d'officier sous le règne de l'empereur Domitien, il devint officier de l'armée, sans toutefois acquérir la promotion due à son rang, ce qui l'incita à écrire une satire dans laquelle il proclamait que le favoritisme à la cour réglait la promotion des officiers. A la suite de cela, ses biens furent confisqués et Juvénal fut relégué à Syène, poste frontalier en Haute-Égypte. Il retourna à Rome après l'assassinat de Domitien en 96, sans argent, sans propriété ni carrière, à la merci de la commisération mesquine de la classe aisée pour survivre. Toutefois il semble que sa situation se soit améliorée car il se décrit dans la Satire XI  comme un homme âgé et aisé, propriétaire d'une ferme abritant bétail et serviteurs à Tivoli. A la différence d'Horace, ses textes comptent peu d'allusions autobiographiques. Juvénal écrivit seize Satires, traitant pour la plupart de la vie à Rome sous le règne des différents empereurs, qui déclinent largement ses deux thèmes favoris : la corruption de la société romaine et la folie et la cruauté des hommes. Ses Satires, très peu lues de son vivant et oubliées pendant longtemps, furent redécouvertes au début du Ve siècle et surtout à la Renaissance, où elles connurent un grand succès et furent imitées par d'autres auteurs satiriques dont Boccace et Lord Byron.      

 

« l'équilibre moral.

Nerva fait figure de sage; bons administrateurs, surveillant consciencieusement leurs provinces, humains et justes envers leurs sujets, Trajan et Hadrien achèvent d'asseoir le régime sur une nouvelle classe de sénateurs et de fonctionnaires, Italiens et bourgeois de province, qui, dès le temps de Vespasien, avaient remplacé les serviteurs indignes à la solde de Néron.

Soucieux de leurs responsabilités, imbus jusqu'à la candeur d'idées républicaines, ces hommes forment l'assise d'une société à laquelle on serait plutôt tenté de reprocher l'excès d'affectation qu'elle apporte à louanger la vertu, et son esprit étroitement réactionnaire.

Cela suffit à expliquer que l'œuvre de Juvénal apparaisse, pour ainsi dire, en porte-à-faux sur son époque, et en bonne partie inactuelle.

LE reproche est grave, adressé à un auteur satirique, mais, en fin de compte, l'attitude de Juvénal n'a rien qui doive nous surprendre outre mesure.

Gardons-nous d'oublier d'abord que, si la pro­ pension à la satire est un des traits les plus naturels du caractère latin - Lucilius, Horace, Perse sont, comme Juvénal, des Italiens de bonne souche-, son expression littéraire témoigne presque toujours, dans le choix des thèmes comme dans celui des victimes, d'une circonspection que compensent, plus ou moins heureusement, le mordant des attaques et la brutalité verbale.

Les pouvoirs publics, bien avant Plaute, avaient coupé court à ces violences polémiques contre les puissants du jour où se complaisaient les Athéniens.

Maledica civitas, dit Cicéron, en parlant de sa ville, et ce « vinaigre italien » dont parle Horace, nous le trouvons, certes, qui assaisonne de façon piquante toutes les manifestations de la vie nationale; goût du charivari ct goût du sobriquet expressif, si révélateurs tous deux à la fois de l'esprit méridional ct de la mentalité paysanne, sar­ casmes et quolibets des triomphes, chants fescennins, refrains de noces, goût de l'imitation bouf­ fonne, brocards des orateurs répondent sous des aspects divers au même penchant de la malignité publique.

Cette malignité pourtant avait coûté cher à Na:vius, un des premiers poètes de Rome, qui avait bel et bien été jeté en prison pour avoir attaqué une famille influente.

C'est sans doute la raison pour laquelle nous la trouvons singulièrement assagie dans le théâtre de Plaute, et pour ainsi dire mouchetée, surtout si l'on songe au caractère agressif qu'elle présentait chez un Aris­ tophane.

Si Plaute, en effet, représente sur la scène des travers et des ridicules qui ne sont pas tous à mettre au compte des Grecs, il voile habilement ses leçons sous le couvert de la farce, et s'il agrémente çà et là ses comédies de traits plus directs et de charges dont le caractère romain ne saurait faire aucun doute, la satire reste, en dépit de la vivacité gouailleuse des peintures, assez générale et vague, sans intention bien accusée et plus plaisante que méchante.

Ce n'est pas qu'au­ cune loi de censure ait jamais été édictée, à Rome, contre la comédie, mais, alors que dans la démocratie athénienne le peuple pouvait se laisser moquer sans rien perdre de son pouvoir, et rire de voir rabaisser à l'occasion ceux qu'il avait lui-même élevés, l'aristocratie romaine, jalouse de ses privilèges, ayant besoin de tout son prestige pour gouverner une foule souvent indo­ cile et envieuse, ne pouvait tolérer certaines incartades, et opposait une censure de caste aux audaces des railleurs de tréteaux.

Lucilius, seul parmi les satiriques, se donna le luxe de malmener quelques grands, mais il avait derrière lui des protecteurs puissants; plus tard, Horace - en dépit de quelques velléités de courage -Perse, Pétrone, Martial et Juvénal s'en tiennent plus volon­ tiers à des lieux communs, et surtout prennent grand soin de ne nommer personne.

Dans le cas particulier de Juvénal, la condamnation de certains abus imputables au temps de Néron ou à celui de Domitien ne pouvait que plaire à des princes qui se targuaient de vertu politique, et qui trouvaient, de ce fait, avantage à laisser accabler leurs prédécesseurs.. »

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