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Pierre Choderlos de Laclos

Publié le 19/04/2012

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Pierre Choderlos de Laclos naquit à Amiens dans une famille de noblesse récente. En 1759, il entra dans l'armée et mena une vie de garnison en compagnie de son épouse et de ses enfants. Pour se divertir de sa carrière sans éclat de capitaine d'artillerie, il se lança en 1779 dans l'écriture d'un roman épistolaire, Les liaisons dangereuses. L'ouvrage eut un succès retentissant, basé en grande partie sur le scandale qu'il provoqua lors de sa parution en 1782. Roman réaliste, Les liaisons  traitaient du libertinage, jeu de séduction qui divertissait l'aristocratie. Laclos utilisa le procédé narratif des lettres, chacune révélant le caractère de son auteur et son rôle dans le déroulement de l'intrigue. Fort du succès de son roman, dont les réimpressions ne tarissaient pas, le militaire rédigea plusieurs essais. En 1786, il fit paraître dans le cadre d'un concours d'éloquence, sa Lettre à Messieurs de l'Académie française sur l'éloge de M. de Vauban, dans laquelle il critiquait sévèrement les fortifications du célèbre architecte. L'audace de son propos lui valut une pénible affectation à Metz, dont il prit congé en 1788 pour entrer au service du duc d'Orléans. Puis il se rallia en 1790 au Club des Jacobins, dont il rédigea le journal. Mais son ancien soutien au duc lui valut la prison en 1792. Relâché en 1794, il devint général d'artillerie sous Napoléon. A cinquante neuf ans, il fut affecté à l'armée du Rhin, puis à celle d'Italie l'année suivante. C'est là qu'il mourut, en 1803.      

 

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« ment horribles, pouvait naître et prospérer.

L'audace raisonnée dans le mal, l'absence d'hypocrisie dans sa recherche, l'esprit de système tempéré par l'ironie me semblent des caractéristiques émi­ nemment françaises.

Le Français fait le mal en connaissance de cause; il n'y a pas de recoin obscur dans son âme : c'est que le mal, pour ce matérialiste, est une expérience comme une autre, qu'il faut mener à bien par vanité, et qui procure des satisfactions infinies.

Les Liaisons Dangereuses sont peut-être le plus français des romans français.

D'abord c'est un roman du xvme siècle, époque à laquelle ce qu'on appelle le caractère français s'est le plus accusé; ensuite toutes les tendances de ce caractère y sont représentées :férocité, vanité, habileté dialectique, clarté, cynisme, délicatesse, élégance, audace, goût de la trahison.

Les héros du livre, Valmont et la Merteuil, n'ont peur de rien, sinon qu'on se moque d'eux, et il n'y a pas de danger : c'est eux qui font peur.

Leur grand ressort est la vanité ou, si l'on préfère, le désir de la gloire.

Lorsque Valmont s'écrie qu'après avoir séduit et abandonné la vertueuse Tourvel il dira à ses rivaux : « Voyez mon ouvrage et cherchez-en dans le siècle un second exemple! »je ne suis pas tout à fait sûr de son ironie.

Bien entendu, il y a toutes sortes de choses dans cette exclamation : parodie, fausse emphase, prudence (l'expression trop pompeuse d'un espoir en coupe d'avance le ridicule), etc.

Mais la phrase reste écrite; dépouillée de ses artifices, elle signifie que Valmont sc veut le Don Juan français (c'est-à-dire, au xvme siècle, le seul véritable et définitif Don Juan), et que la réputation d'un Don Juan vaut celle d'un César.

Il pense d'ailleurs que la stratégie de l'amour demande autant de calcul, de profondeur, de génie que la guerre.

Il prévoit avec justesse les ripostes de l'adversaire, se sert des sentiments comme d'accidents de terrain, écrit les bulletins de ses campagnes, dirige l'opinion publique.

Il est « homme de séduction » comme d'autres sont hommes d'État et croit fermement qu'il n'y a pas de différence de degré ni de qualité entre posséder des femmes et conquérir des territoires.

C'est là son point faible.

Les guerres décident du destin des peuples; les entreprises de séduction ne portent que sur des individus.

Valmont dépense sans doute autant de génie pour perdre Mme de Tourvel que Frédéric II pour gagner la Silésie, mais qu'on le veuille ou non, au regard de l'histoire, le résultat n'est pas le même.

La vérité, pour parler comme Boileau, c'est que Valmont travaille dans un petit genre, et Frédéric dans un grand.

Valmont est, de plus, tellement possédé par la vanité qu'il doit se faire un mérite supplémentaire de son inutilité historique : c'est le comble du raffinement.

Il y a deux sortes de personnages dans les Liaisons : des personnages actifs et des personnages passifs.

Valmont et la Merteuil sont actifs en ce qu'ils produisent des événements et influent sur l'action.

Cécile Volanges, sa mère, Danceny, la Présidente, la vieille Rosemonde, Azolan, Prévan n'ont pour ainsi dire pas de volonté propre: ce sont les pantins avec lesquels la Merteuil et Valmont s'amusent, la matière avec laquelle sera faite leur gloire; des victimes de l'amour à qui on ne demande pas leur avis.

Ce mot de victime les éclaire, car l'amour est un sacrifice.

Il suffit de voir combien Valmont et la Merteuil sont clairs, logiques, absolus, et combien les autres sont obscurs, peu au courant d'eux-mêmes, perdus, dépassés.

En revanche, le mystère est du côté des héros : la limpidité de Mme de Merteuil, la transparence de Valmont qui n'ignorent rien d'eux-mêmes et n'en laissent rien ignorer, ont quelque chose de parfaitement opaque contre quoi vient buter le cœur du lecteur.

L'excès de logique en matière de sentiment déconcerte tout autant que les cabrioles et les volte-face les plus irrationnelles.

En dernière analyse, Valmont et la Merteuil sont des monstres d'égoïsme et de vanité; ils ne font rien qui n'ait pour ,but le plaisir ou la gloire, et une telle constance, une telle patience, tant d'esprit et de force dépensés pour des résultats si contingents en font des êtres aussi ténébreux dans leur genre que Raskolnikov ou Don Quichotte.

Une chose bien remarquable encore c'est que Valmont et la Merteuil qui ne cessent de faire l'amour, qui sont les personnages les plus voluptueux du livre, en sont aussi les moins charnels.

On dirait que leur corps n'existe pas.

Pourtant, c'est bien pour l'agrément de ce corps que Valmont accumule tant de conquêtes et que Mme de Merteuil emmène ses amants en petite maison;. »

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