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STERNE

Publié le 02/09/2013

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1713 -1768

LAURENCE STERNE naquit en Irlande le 24 novembre 1713. Tristram Shandy devint célèbre en 1759. Laurence Sterne avait donc quarante-six ans. Une nouvelle salade, un jeu de cartes, des chevaux de course portèrent aussitôt le nom de Tristram Shandy. Laurence Sterne, qui avait engendré ce phénomène, par contre coup, connut la gloire. On sait dans quelles circonstances Tristram avait été conçu, le premier dimanche de mars 1718 vers minuit, à l'heure où son père, ponctuellement, devait remonter l'horloge. On sait aussi que ce même père, neuf mois plus tard, fut désespéré quand il s'aperçut qu'on l'avait nommé Tristram au lieu de Trismégiste et que sa lamentation, s'élevant de plusieurs octaves, puis s'abaissant de même, avec l'interjection Hélas!, prit une forme typographique relativement nouvelle à l'époque, plus répandue par la suite, sous le nom de « calligramme «. Tout cela ne devait pourtant pas si mal tourner si l'on considère que Tristram Shandy, deux siècles après sa naissance, est encore célèbre.

Le père de Laurence Sterne était militaire. Soldat philosophe, il eut au siège de Gibraltar, à propos d'une oie, un duel avec un capitaine. Transpercé de part en part, piqué au mur, il eut le courage de demander à son adversaire de bien vouloir essuyer la pointe de l'épée avant de la retirer et fut sauvé grâce à cette précaution. Le jeune Laurence Sterne ne manque pas de souvenirs de vie de garnison, que vont illustrer l' Oncle Tobie et le Caporal Trim. On connaît le dada de l'oncle : l'architecture militaire. L' Oncle Tobie est l'une des plus belles pièces de l'immortelle panoplie de Laurence Sterne.

Son père étant mort des fièvres à la Jamaïque, le jeune Laurence, grâce à la protection d'un cousin, faisait ses études à Cambridge, y prenait le degré de maître ès arts en 1740, et grâce à un oncle, devenait pasteur à Sutton dans le Yorkshire. Ce pasteur aux bizarres sermons fréquentait une abbaye du voisinage qui portait sur la porte la devise de l'abbaye de Thélème : « Fais ce que vouldras. « Les moines s'y appelaient Pantagruel ou l'Oiseau Noir, célébraient Vénus, étaient capables, dit-on, d'administrer l'eucharistie à un singe. C'est là que Sterne trouva pour une bonne part sa vocation ; sophistiqueur de pensées et grabeleur de mots.

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« du corps pour couvrir les défauts de l'esprit ».

En un mot, Yorik ne ratait jamais l'occasion de dire ce qui lui venait à l'esprit, sans fourberie ni malveillance.

Cette filiation, nous la retrouvons, nettement posée dans le Viryage sentimental.

Sterne se trouve à Paris, sans passeport et va confier ses ennuis au comte de B ...

Comme, de son propre aveu, rien n'embarrasse tant Laurence que de dire qui il est, il ouvre le Shakespeare qui se trouve sur la table et y recherche le nom de Y orick.

Sûr quoi il obtient son passeport de M.

le duc de Choiseul, car «un homme qui rit ne saurait être dangereux».

Laurence Sterne aura été le bouffon'.

du siècle de la raison, et aussi longtemps que l'humanité aura conscience qu'elle ne saurait sans sombrer dans la plus noire stupidité se passer de bouffons, Laurence Sterne aura droit de cité.

Sa recette : le principe de l'association des idées qu'il utilise sans vergogne et pousse infine au génie, il l'a trouvé dans le trente-troisième chapitre del' Essai sur l'entendement humain de Locke.

Mais le style de Sterne ne fut pas seulement une attitude.

Nous pouvons en prendre pour preuve ses digressions amoureuses.

Jeune pasteur, il fit la cour à une jeune fille, malade comme lui de la poitrine.

Il put l'épouser en 1741.

De France, alors qu'ils cherchaient tous deux à soigner leurs poumons, il écrivait à son ami Stevenson, créateur de la rabelaisienne abbaye : Sum fatigatus et tegrotius de mea uxore plus unquam.

Contre toutes ses espérances, sa femme devait lui survivre.

Il est le premier à reconnaître qu'il lui faut une dulcinée en tête.

Pour Catherine Béranger de Fourmentelle, dite Kitty, il se voudrait veuf, mais le succès de Tristram Shandy la lui fait oublier et quand la malheureuse va le rejoindre à Londres, il ne lui accorde pas même un rendez-vous.

A cause des lettres de Yorick à Elisa Draper, l'indienne, cette avant-dernière folle passion est plus connue que les autres.

Mais le pauvre Yorick, persuadé que l'amour était le seul moyen d'éviter les basses actions, fut amoureux toute sa vie.

Il eut de plus la larme dix-huitième, diderota et rousseauisa ; bref, il ne fut sauvé que par son humour.

Entre l'idéal et le réel, entre Dieu et l'absurdité de la condition humaine, l'humour jette une passerelle.

Selon que l'esprit appréhende cette situation avec plus ou moins d'amertume, l'humour va du noir au rose.

Sterne choisit délibérément le rose, la bouffonnerie, le sourire.

« Vive la baga­ telle! » Innocence et tolérance.

« Les exercices de ma plume sont comme ceux de mon enfance, quand je courais à cheval sur un bâton.

» L'humour à la Sterne ne va pas sans courage.

Sterne fut malade toute sa vie.

A Londres, le succès, selon les paroles de Garick, lui tourna la tête et lui gâta l'estomac.

A vrai dire, l'agitation londonienne réveilla sa tuberculose.

En I 762 il débarquait à Calais.

A Paris, Tristram est célèbre et Sterne est fêté, notamment par Diderot, jusqu'au moment où il vomit le sang et va se reposer à Toulouse, puis visite Bagnères, Aix, Marseille, Montpellier.

Revenu à Paris, il connaît deux mois de grand amour, retourne à Londres.

De nouvelles hémop­ tysies l'en chassent, il va en Italie, à Milan, Florence, Naples ...

Sa vie est une fuite devant la maladie.

Il avait souhaité mourir seul dans une auberge.

Il mourut selon son vœu, dans un hôtel de Bond Street.

La légende veut que son cadavre ait été volé et vendu à un maître docteur de Cambridge qui le disséqua jusqu'au moment où l'un des assistants s'évanouit en reconnaissant le pauvre Yorick.

Dix ans s'étaient écoulés depuis la parution des deux premiers livres de Tristram Shandy.

Il mourait trois semaines après la parution du Voyage sentimental (février 1768).

Son œuvre était inachevée.

Mais c'est bien ainsi qu'il l'avait conçue : fuyant la fin par tous les moyens.

ANDRÉ BAY 205. »

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