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José de Churriguera (et ses frères) 1625-1725 Le nom des Churriguera connaît une célébrité pour le moins équivoque.

Publié le 05/04/2015

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José de Churriguera (et ses frères) 1625-1725 Le nom des Churriguera connaît une célébrité pour le moins équivoque. Et déjà Jovellanos, qui ne trouvait pas de termes assez méprisants pour qualifier les édifices de style " churrigueresque ", observait que José, membre le plus éminent de la famille, a sans doute été " le moins insensé " de ces artistes qui portèrent leur art à " ce point extrême de corruption où doivent atteindre les calamités publiques, pour que du mal naisse le remède ". Corruption -- et n'est-ce point en effet, paradoxalement, le mot qui convient pour décrire ce style où un décor profus et bruissant prolifère par plaques sur les monuments, comme une somptueuse moisissure ? -- qui s'était répandue, des Pouilles au Mexique, sur toutes les terres d'influence hispanique, et dont le Portail de l'Hospicio Provincial de Madrid, conçu par Pedro de Ribera, discipline de José de Churriguera, et la Sacristie de la Chartreuse de Grenade marquent précisément le point extrême. La critique moderne a restitué à José de Churriguera sa figure véritable, distinguant parmi les multiples réalisations qui lui étaient attribuées jusque-là celles -- très peu nombreuses -- qui lui reviennent en propre. Tandis que son oeuvre se rétrécissait ainsi singulièrement, les autres membres de sa famille -- et d'abord ses deux frères cadets, Joaquin (1674-1724) et Alberto (1676-1750) -- surgissaient de l'ombre où les avait relégués la critique néo-classique, peu soucieuse, dans la lutte qu'elle menait pour im...

« qu'en soient les manifestations, l' œ uvre des Churriguera doit être située dans le contexte général du style “ churrigueresque ” et appréciée un tout. On a souvent rapproché, à juste titre, le style churrigueresque du style plateresque, qui témoigne d'une même indifférence à l'égard des structures et de l'organisation spatiale, d'un goût identique pour le décor “ suspendu ” qui se déploie sur le plan du mur en certains foyers déterminés de la façade, ou prolifère sur les parois intérieures.

Constante de l'art espagnol, retour au décor exubérant et “ baroque ” proscrit par le classicisme herrérien ? Mais le recours aux catégories complémentaires de la structure et du décor, si fondé soit-il du point de vue esthétique, ne nous donne point accès à la signification profonde de l'entreprise churrigueresque, et nous n'apercevons qu'alternance cyclique de formes contradictoires du goût là où il nous faudrait dépasser au contraire ce dualisme pour appréhender cet art — et ceux-là, peut-être, dont on le rapproche — comme un art du seul paraître : la création architecturale commence ici — et s'achève — avec l'habillage d'une forme indifférenciée ou relevant d'une esthétique périmée.

D'où l'expansion si rapide d'un style qui n'en demeurera pas moins figé dès l'origine, masque auquel ne pouvaient être prêtées — pour reprendre, mais sans intention péjorative, le mot de Cean Bermudez — que de nouvelles “ grimaces ”.

La catégorie du masque, si elle nous permet d'analyser l'art churrigueresque sous ses formes les plus exacerbées — lesquelles ne furent point, répétons-le, le fait des Churriguera eux-mêmes —, en définit également la signification historique, et d'abord celle des réalisations de Joaquin et d'Alberto de Churriguera qui renouèrent délibérément, aux Collèges d'Avana et de Calatrava — celui-ci fâcheusement dépouillé de son décor sur l'ordre de Jovellanos —, avec la tradition plateresque dont la ville de Salamanque leur offrait de magnifiques exemples. Obsédée par l'idée de son déclin, comment l'Espagne de la fin du XVIIe et du début du XVIIIe siècle n'aurait-elle pas été moins sensible à l'écart qui la séparait des grandes nations européennes qu'au souvenir de son prestigieux passé ? La vie revenant peu à peu dans le grand corps engourdi, les modèles devaient s'imposer de cet art dont la tradition demeurait vivace dans les milieux provinciaux, et le style churrigueresque proliféra en terre espagnole dans la mesure même où s'établissait à travers lui une relation — qu'on est sans doute en droit de qualifier de magique — avec l'ère des Grandes Découvertes et de l'expansion hispanique (et, de même, le projet de la Place de Salamanque, dont la réalisation fut confiée en 1728 à Alberto, s'inscrit-il explicitement dans la tradition des plazas majores espagnoles). Enfin, ce style témoigne, de la part des artistes et de leurs commanditaires, de la volonté de définir un art aux développements duquel pussent être associés spontanément l'artisanat local, voire les indigènes des possessions d'outre-mer. Et c'est précisément sur cet aspect de l'entreprise churrigueresque que la critique néo-classique s'est montrée le plus sévère.

Peu lui importaient alors les considérations stylistiques : car s'il nous est loisible, aujourd'hui, d'étudier à partir de la catégorie du masque les réalisations de José lui-même — et d'abord le village de Nuevo Bastàn, où les façades imbriquées du palais et de l'église se dressent comme un écran devant des bâtiments sans caractère —, la critique d'un Jovellanos ou d'un Llaguno portait avant tout sur l'orientation de l'activité de cet architecte madrilène (et non salmantin, comme on l'a longtemps cru) qui. »

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