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LA POLITIQUE : Vie politique française

Publié le 06/11/2011

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Le changement fondamental introduit en onze années de Ve République dans la vie politique française est l'institution d'un système dans lequel le pouvoir repose sur une majorité issue directement, à travers l'élection présidentielle et les élections législatives, du suffrage universel. Ce qui aboutit à rendre le régime politique français d'aujourd'hui comparable à celui de la Grande-Bretagne beaucoup plus qu'à celui des Etats-Unis et, a fortiori, de la France d'avant 1958 ou de l'Italie actuellement.

« d'hostilité, du citoyen français vis-à-vis d'un Etat auquel il demande trop tout en lui don­ nant trop peu.

Laurence WYLIE, dans Village in the Vaucluse, la résume dans l'opposition entre le « nous » et les « ils » malfaisants ex­ térieurs au village : les grosses sociétés, les journaux, le syndicat d'initiative , les Améri ­ cains ou les Russes et, surtout , le gouverne­ ment , ces « ils » qu'il faut accepter comme le temps qu'il fait, parce que « c'est comme cela ».

Attitude qui explique , notamment dans la vie politique locale, l'efficacité des déclara­ tions d'apoliti sme sur les thèmes : « Votez pour moi parce que je ne fais pas de politi­ que », « je suis un gestionnaire et non un homme de parti »...

Un journaliste suédois, Victor VINDE, fai sait part aux lecteurs d'Esprit (256, déc .

1957) de son étonnement devant le rôle considérable que jouent dans le vocabu­ laire politique, en France, les réminiscences historiques; il doutait que les mythes et le vocabulaire abstrait du discours politique tou­ chent leur auditoire, au-delà du cercle des ini­ tiés, de la classe politique : « Lorsque, par exemple, un homme politique français d'au­ jourd'hui, écrit-il, fait appel au pays républi­ cain, cela pouvait avoir un sens en 1880, mais, maintenant que tout le monde est républicain ou démocrate, qu'est-ce que cela veut dire en français moderne ? Pour que la masse croie aux mots, il faut que ceux-ci conservent leur puissance magique, et beaucoup de mots dont se servent les députés ne portent plus au-delà de l'enceinte de l'Assemblée nationale .

Il y a un divorce, au moins linguistique , entre le Par­ lement et l'opinion publique ».

Nicholas WAHL explique les déboires des différents régimes po­ litiques français par leur incapacité à fondre dans une synthèse certes imparfaite, par défi­ nition, mais pratique la thèse de la souverai ­ neté du peuple et l'antithèse du pouvoir de l'Etat, qu'ils ont , au contraire, institutionnali­ sées dans une Assemblée toute puissante et in­ gouvernable face à une administration enva­ hissante et exagérément centralisée.

Deux pou­ voirs, deux mythes, la peur et la nécessité du pouvoir érigés en contraires , dans un « tout ou rien » générateur de conflits , d'excès opposés et alternatifs (cf .

Beer-Ulam-Patterns of Go­ vernm ent.

pp.

278-79).

La présentation la plus systématisée de cette France à la fois bureau ­ cratique et frondeuse a été faite par une équipe de professeurs de science politique de Harvard et publiée en français sous le titre « A la re­ cherche de la France », aux éditions du Seuil, en 1963.

Il serait hasardeux d'avancer qu'aujourd'hui, après onze années de V• République, ces atti­ tudes profondes des Français face à la politique et à leur système politique aient été rempla­ cées par des attitudes totalement nouvelles et tout aussi durables .

Il est clair.

néanmoins, que bien des comportements ont été modifiés à l'initiative, en partie, d'un régime qui rompt avec la tradition parlementaire française.

Bien des querelles du passé, aussi, ont perdu leur charge émotionnelle.

Emeric Deutsch, Denis Lin­ don et Pierre Weill, dans leur très intéressante enquête par sondage sur « les familles politi- ques aujourd'hui en France » (Editions de Mi­ nuit), montrent que les révélateurs tradition­ nels de la gauche et de la droite - lalcité, na­ tionalisation, etc.

- ont presque tous disparu : « il n'existe ...

pratiquement plus ...

, écrivent-il s, de problèmes politiques « témoins » qui per­ mettent de distinguer à coup sftr un électeur de gauche d'un électeur de droite : nous n'avons trouvé aucun thème politique à propos duquel les trois quarts au moins des électeurs se di­ sant de gauche avaient une opinion identique, et les trois quarts de ceux qui se disaient de droite l'opinion inverse » (.op.

cit., p.

26).

Ce qui ne signifie pas que la gauche et la droite aient disparu, au niveau de l'opinion.

La même enquête décèle pour chacune de ces deux gran­ des familles traditionnelles une « propension » à réagir de la même façon devant les problèmes politiques, un « tempérament » politique spé­ cifique, mais qu'il n'y a pas ou plus de fossé infranchissable entre elles, qu'elles se situent sur un « continuum » plutôt que dans deux camps mortellement dressés l'un contre l'autre.

Pour la grande masse des électeurs français, les guerres de religion s politiques sont finies.

Dès lors, si l'on accepte l'analyse de Maurice Du­ verger, un pouvoir majoritaire est possible et l'alternance de deux grandes coalitions partisa­ nes, comme celle des conservateurs et des tra­ vaillistes en Angleterre , devient viable.

Actuel­ lement, toutefois, le premier stade de cette évolution semble seul réalisé.

Depuis novembre 1962, en effet, le gaullisme - avec ses alli és ou ralliés Républicain s in­ dépendants , démocrates chrétiens, voire radi­ caux ou socialistes - détient à l'Assemblée na­ tionale la majorité absolue des sièges de députés .

La cohésion et la discipline de cette majorité fait que, comme en Grande-Bretagne, l'Exécutif est pratiquement sftr de n'être pas censuré au Parlement; la majorité sort directement du suffrage populaire et n'est remise en jeu que devant lui, à l'occasion des référendums, élec­ tions législative s et présidentielles.

Le vote cesse d'être pour le citoyen une profession de foi idéologique et devient entre ses mains un ins­ trument, le moyen pratique de reconduire , de modifier ou de renverser une majorité, une poli­ tique.

En votant NON au référendum du 27 avril 1969, les Françai s ont renversé le général de Gaulle; en élisant à sa place M.

Georges Pom­ pidou, le 15 juin suivant, ils ont élargi la ma­ jorité U.D.R .

et R.I.

à une partie des centristes du P.D.M.; ils ont infléchi la politique du pou­ voir dans un sens plus libéral, plus européen, plus proche de leurs préoccupations quotidien­ nes.

Le passage d'un régime parlementaire à prépondérance de l' Assemblée à un régime mi­ présidentiel, mi-parlementaire, à prépondérance de l'Exécutif ne s 'est évidemment pas effectué sans heurts .

Par habitude les vieux parlemen­ taires tendaient à confondre la démocratie avec l'ancien partage du pouvoir et pensaient, tel Paul Reynaud en octobre 1962, que la sou­ veraineté était au Parlement et pas ailleurs; par peur des habitudes les responsables du nouveau régime tendaient à exagérer la subor­ dination du Parlement au pouvoir exécutif et cherchaient à contrôler l'opinion par le canal. »

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