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L'Allemagne au XIXe siècle par Alfred Grosser Professeur à l'Institut d'Études Politiques de Paris L'histoire de la France doit tenir compte de Nice et de la Savoie qui l'agrandissent au milieu du siècle, de l'Alsace et de la Lorraine absentes de 1871 à 1918.

Publié le 05/04/2015

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L'Allemagne au XIXe siècle par Alfred Grosser Professeur à l'Institut d'Études Politiques de Paris L'histoire de la France doit tenir compte de Nice et de la Savoie qui l'agrandissent au milieu du siècle, de l'Alsace et de la Lorraine absentes de 1871 à 1918. Mais l'évocation du XIXe siècle suggère d'abord des régimes qui tombent ou qui naissent, des transformations de l'économie et de la société, des conflits d'hommes et d'idées. Ce qui fait question, ce sont les permanences et les changements du contenu. Le contenant n'est pas en cause. Il n'en est pas du tout de même pour l'Allemagne. Les variations, les discontinuités du contenant sont telles, elles influencent à un tel point le contenu - tout en étant influencées par lui - que son appellation même apparaît comme une sorte d'abstraction simplificatrice. " Qu'est-ce que la patrie de l'Allemand ? " interroge un chant célèbre du siècle qui passe pour être celui de l'unité allemande. La réponse n'a jamais été, ne sera jamais simple. Plus simple assurément en 1871 qu'un siècle plus tôt ou qu'un siècle plus tard. Mais même après la cérémonie, grande par ce qu'elle symbolise, étriquée et froide dans sa réalité, qui voit, dans le château de Versailles, signe de la vieille unité centralisée de la France monarchique, le roi de Prusse devenir empereur d'Allemagne, la nature de cette Allemagne demeure ambiguë. En 1815, assurément, il n'y a même pas ambiguïté : l'imprécision est totale et délibérée. La Confédération germanique qui naît de l'Acte du 8 juin n'est certes plus le puzzle infaisable parce que trop morcelé du XVIIIe siècle : la simplification napoléonienne est passée par là, profitant finalement aux plus grands. Mais les trente-huit États qui la composent ne mettent pas grand-chose en commun. Le Bundestag n'est en rien l'Assemblée législative qui portera ce nom à Bonn après 1949. Il s'agit de la réunion irrégulière de soixante-dix délégués de gouvernements décidant comme des ambassadeurs, leurs décisions, fort peu contraignantes pour les États membres de la Confédération, devant de surcroît être conformes, pour pouvoir prendre corps, aux désirs conjoints de la Prusse et de l'Autriche, les deux maîtres d'un ensemble auquel elles n'appartiennent l'une et l'autre qu'en partie. La Lombardie avec Milan est autrichienne, mais extérieure à la Confédération, tandis que la Carniole avec Trieste fait partie de l'assemblage " germanique ". La Poméranie et la Silésie sont au dedans, mais les provinces du royaume de Prusse qui portent le nom de Prusse sont en dehors. Cette Prusse qui vient de s'installer solidement sur le Rhin, dans des régions dont les habitants n'accueillent décidément pas les fonctionnaires prussiens comme des Allemands venant aider des compatriotes à mieux s'organiser. L'Empire que Bismarck a fait naître est autrement plus consistant. Les barrières économiques qui hérissaient les Allemagnes de 1815 sont tombées peu à peu. Le Zollverein, l'union douanière mise en place non sans mal en 1834 entre la Prusse, la Bavière, le Wurtemberg et les deux Hesse, s'est étendu progressivement et, si on excepte les territoires enlevés à la France en 1871, a atteint en 1867, après la défaite de l'Autriche, les limites qui sont celles de l'Empire. Des limites doublement paradoxales du point de vue de la germanité, puisque les Autrichiens se trouvent définitivement exclus (à part la brève période 1938-1945), alors que l'Allemagne impériale inclut des Polonais et des Danois par millions et que même la plupart des habitants germanophones de l'Alsace-Lorraine, " terre d'Empire ", refusent de se considérer comme Allemands. L'organisation du Reich est loin d'être unitaire. La constitution du 16 avril 1871 laisse subsister jusqu'en 1918 vingt-cinq États ayant chacun son propre système politique, depuis le grand royaume de Prusse jusqu'aux trois villes libres du Nord et aux minuscules principautés au style suranné. Les États sont représentés en tant que tels dans une Assemblée, le Bundesrat, où la Prusse détient dix-sept voix sur cinquante-huit et qui jouera un rôle fort limité. Mais il existe désormais une Assemblée nationale élue au suffrage universel, le Reichstag, à vrai dire assez désarmé devant l'institution centrale la plus puissante : l'empereur - qui est nécessairement le roi de Prusse - détenteur du droit de dissoudre le Reichstag et de celui de nommer et de révoquer le chancelier, chef du gouvernement du Reich. La responsabilité gouvernementale devant l'Assemblée ne sera accordée par l'empereur qu'en octobre 1918 - pour mieux rejeter sur les partis politiques la responsabilité de la défaite proche. Ainsi, les élus du peuple ne seront autorisés à occuper le devant de la scène que pour ratifier le désastre : la première République allemande ne se relèvera jamais de cette terrible assimilation de la défaite nationale et de la légitimité parlementaire. Versailles 1919 : les mandataires civils de l'Assemblée constituante réunie à Weimar, après avoir été librement élue sur un pied de complète égalité par les hommes et les femmes d'Allemagne, signent la paix dictée. Versailles 1871 : seuls des généraux, des ambassadeurs, des hauts fonctionnaires entourent le vieux roi auquel deux victoires sanglantes - sur le rival autrichien d'abord, sur l'ennemi français ensuite dont l'affrontement a permis de rassembler les princes encore hésitants - ont donné la couronne impériale. La cérémonie prend valeur de symbole : l'Allemagne est unifiée sous le signe de l'Obrigkeit, de l'autorité née de la vocation naturelle de quelques-uns à détenir le pouvoir. La nation s'incarne dans ses dirigeants. En France aussi, l'idée nationale a été baptisée par la victoire. Mais le cri " Vive la nation ! " qui a retenti à Valmy exprimait la victoire, au sommet d'un État depuis longtemps const...
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