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60 Mon fils est la réincarnation de l'homme que j'ai tué.

Publié le 06/01/2014

Extrait du document

60 Mon fils est la réincarnation de l'homme que j'ai tué. Il me semblait en tout cas que c'était bien ce que Tess venait de dire. J'avais encore la tête sens dessus dessous, comme si c'était moi qui vivais une expérience extracorporelle. C'était absurde. -- Mais de quoi parles-tu ? Ce furent les seuls mots que je réussis à articuler. -- Des choses qu'Alex se rappelle. Les animaux, les scènes dans la forêt amazonienne... Elle ressortit les dessins d'Alex et me les montra, une fois de plus. -- Ces tribus, ces décors. Tout ça vient droit du passé de McKinnon. Il a vécu longtemps dans ces ndroits-là... Elle était essoufflée, les mots se bousculaient. -- Ces plantes. Ce sont des plantes médicinales. Et ce dessin, là... Elle désigna celui où l'on voyait un homme marcher sur un sol orange, brûlant. -- ... c'est la marche sur le feu. McKinnon l'a fait. Je l'ai lu dans une de ses biographies. Puis il y a la fleur u'Alex a dessinée, celle dont sa maîtresse m'a parlé. Alex m'a dit qu'elle était censée guérir les maladies ardiaques, mais qu'on avait compris que c'était dangereux. C'est McKinnon qui a fait cette découverte. J'ai érifié. Il travaillait pour une grande compagnie pharmaceutique. Ils finançaient ses recherches et payaient ses actures, là-bas. Il a découvert que la plante était très prometteuse, qu'elle pouvait être un inhibiteur du holestérol. Mais les tests ont mal tourné, et il s'est brouillé avec ses employeurs, parce qu'ils avaient investi ans cette merveille médicale et qu'ils ne voulaient pas que leurs stock-options implosent. Et tiens-toi bien, Alex m'a parlé d'une altercation avec un dénommé Brooks... Eh bien, j'ai vu son nom sur Internet : c'est un des employeurs de McKinnon ! Bon, en tout cas, c'est pour ça qu'il a laissé tomber les grands groupes et qu'il s'est mis à travailler en indépendant. Alex m'en a parlé. Pas en détail, mais il m'en a dit assez pour m'inciter à creuser. Tout collait. -- Allons, Tess. Regarde les dessins. Ce ne sont pas des preuves photographiques. Ils sont très vagues. Peut-être y vois-tu des choses parce que ça correspond, justement... Il pourrait avoir vu cela à la télé, ou dans National Geographic. Et cette histoire de cholestérol ? Il a peut-être entendu ça au journal télévisé, ou uelqu'un en a parlé devant lui... -- Peut-être... Mais il se souvient de toi, Sean. Tu vois ce dessin ? Elle me tendit celui qui montrait Alex et un homme qui lui faisait face. Elle me regarda, en tapotant du doigt a silhouette sombre. -- Il a dit que c'était toi. Il dit que tu lui as tiré dessus. Elle pointa le doigt sur son front. -- Juste ici. Il m'a raconté toute l'histoire. Exactement ce que tu m'as raconté. Dans le moindre détail. Elle hésita, se tut finalement pendant que j'examinais le dessin, cette fois avec plus d'attention. Et c'était troublant. C'était un dessin de gosse, mais j'y voyais quelque chose. Une vérité brute. Une émotion qui ramenait à ma mémoire cette nuit de fusillade. Il était très perturbant de penser qu'Alex m'avait bel et bien essiné là, dans le labo. Je le voyais avec un regard différent, et ça ne me semblait plus aussi impossible, tout à coup. Pourtant, c'était impossible. -- Il savait, Sean. Pour la femme. Pour son gosse. Il savait, pour le type qui était avec vous, la manière dont il les a tués... Cela me frappa comme un coup de massue. -- Quoi ? -- Il me l'a raconté. Comment ils sont morts. La façon dont il s'est mis en colère, dont il s'est précipité... Il m'a parlé de l'ordinateur portable et du journal, du père Eusebio. Il savait. Il savait tout. Elle avait les yeux brillants. -- Comment pouvait-il savoir tout cela, Sean ? Comment un gosse de quatre ans, qui n'était même pas né, ourrait-il être au courant ? A cela je n'avais aucune réponse. J'avais du mal à saisir les notions de base, sans parler des détails. J'essayai de revenir au début, de repartir de zéro, de trouver une logique à la pure absurdité de ce que Tess venait de me raconter. Je me creusai la cervelle en quête d'une autre explication, pour pouvoir rejeter sa théorie, mais je continuais à buter ontre une chose, une certitude absolue que je ne pouvais pas éluder. Alex ne l'avait pas appris par Michelle. e ne lui avais jamais dit comment McKinnon était mort, encore moins ce qu'avait fait Munro. Et ça ne figurait ans aucun rapport. Corliss y avait veillé. Je regardai Tess. Je sentais que mon esprit partait en vrille. -- C'est impossible... -- Comment pourrait-il savoir, Sean ? Comment, sinon ? Un instant plus tôt, je n'avais pas de réponse. Maintenant je comprenais. Je comprenais le fin mot de l'affaire. -- Navarro n'est pas à mes trousses, dis-je d'une voix durcie par la fureur. Il poursuit Alex. Parce qu'il croit u'Alex est la réincarnation de McKinnon. Parce qu'il veut la formule. Parce qu'il pense qu'Alex s'en souvient eut-être. -- Exactement, renchérit Tess. La cible, c'est Alex. Depuis le début ! Ça collait. Nom de Dieu, ça collait vraiment. Et si c'était vrai... alors, pour une raison bizarre, un motif de taré, de karma de tête de noeud, celui, quel u'il soit, qui décide comment ces choses-là arrivent, celui-là avait fourré l'âme de l'homme que j'avais ssassiné dans le corps de mon propre fils. Oubliez le dessein intelligent. Il n'y avait là qu'un dessein pervers et sadique. Je me laissai glisser sur le sol, m'adossai à l'arbre solitaire. Je me sentais aussi seul que lui. Je n'étais oujours pas sûr d'y croire. C'était trop dingue, trop irréel. Il fallait un sacré acte de foi, et je n'en étais pas ncore là. Mais je ne pouvais pas tout rejeter d'un geste de la main. Pas avec ce que Tess avait déterré. Et si 'était vrai... La pensée qu'Alex voyait son meurtrier à chaque fois qu'il me regardait - moi, son propre père... on, c'était trop horrible. Je cherchai une manière de torpiller la conclusion de Tess, de la mettre en pièces, de a déchiqueter en nanoparticules pour qu'elle ne revienne jamais... Je n'y parvins pas. J'avais l'impression que mon crâne allait exploser, tel un astronaute dont le casque est fêlé. J'aurais référé me trouver dans l'espace, où personne, si l'on en croit certaines affiches de film, ne vous entend hurler. 'avais vraiment envie de m'époumoner. Mais je ne pouvais pas. Pas là. Pas devant Tess, pas en sachant u'Alex, Julia et l'autre agent se trouvaient à côté. Je me contentai de me laisser aller, penchai la tête en arrière t fermai les yeux. Tess se laissa glisser et s'assit à côté de moi. -- Tu penses vraiment que c'est possible ? fis-je au bout d'un moment. Elle laissa passer quelques secondes. -- Je ne sais pas ce qu'il faut croire, Sean. Franchement, je suis déchirée. J'ai envie que ce soit vrai, et 'espère que ça ne l'est pas. Elle me posa la main sur le bras. -- Je voudrais que ce ne soit pas vrai, pour ton bien. Pour le bien d'Alex. Ce serait si... cruel. Si injuste. ne partie de moi me fait des reproches parce que j'ai essayé de savoir. Mais si c'est vrai... on ne peut pas egarder ailleurs. Il faut y faire face, régler le problème pour qu'Alex et toi ayez les relations père-fils auxquelles ous avez droit tous les deux. Elle leva les yeux vers le ciel nocturne. Je suivis son regard. Le ciel me semblait plus vaste, plus infini que amais. -- Et si c'est vrai... Mon Dieu... Cela change tout. Si cette vie n'est pas la fin, si nous avons une chance de evenir... Ce doit être un tout autre débat, et je ne suis pas sûre que nous devons l'avoir maintenant. J'acquiesçai. Certaines choses pouvaient attendre. -- Je dois faire en sorte qu'Alex soit en sécurité, lui dis-je. Si Navarro y croit vraiment, alors Alex ne sera à 'abri que le jour où ce salaud sera hors d'état de nuire. Je dois m'occuper de ça avant tout. Et après... nous errons pour le reste. Il fallait que je trouve Navarro. Et le moment venu, il faudrait que je lui cloue le bec une fois pour toutes. Je e voulais pas que tout cela revienne à la surface. Cela hanterait Alex pendant des années, et lui rendrait la vie rop difficile. Je ne voulais pas non plus que Navarro aille jacasser dans une quelconque cellule de prison et ncite une nouvelle vague de narcos à traquer mon fils comme s'il était leur poule aux oeufs d'or. Il fallait que je mette la main sur El Brujo. A moins qu'il ne me trouve d'abord. 61 Je ne les ai pas entendus arriver. Il était tard. Vraiment tard, ou vraiment tôt, selon le point de vue. Je ne dormais pas, mais j'étais tellement ans les vapes que je ne pouvais pas dire que j'étais éveillé. J'étais physiquement et mentalement démoli, et le ommeil aurait vraiment été le bienvenu. J'avais un peu dormi. Deux ou trois heures, peut-être. Vers quatre eures et demie, j'avais ouvert les yeux. Julia et Cal, le nouvel agent, faisaient des quarts de deux heures, mais je leur avais proposé de prendre a part. Mon quart démarrait à six heures, et j'étais là, pourtant, en train de contempler le plafond. Peut-être étais-je incapable de me reposer avant d'avoir trouvé une faille dans la théorie de Tess, un moyen de la démolir. Ou peut-être était-ce quelque chose en moi - une ouïe extraordinairement aiguë ou un don pour la perception extrasensorielle - qui me maintenait en éveil, à cause de l'imminence du danger. Tout dépend si on cherche une explication étroitement scientifique ou plus ésotérique (étant donné mes préoccupations du moment). En tout cas j'étais tout juste éveillé, Tess à côté de moi, prisonnier de cette zone vraiment agaçante où l'on est trop fatigué pour réfléchir et trop énervé pour dormir. Je crus entendre un léger craquement, comme un plancher ou un chambranle qui grince. Peut-être Julia, qui allait se faire un café dans la cuisine ? Ou était-ce le quart de Cal ? Je n'étais pas sûr. Julia, je me suis dit. Le silence revint dans la maison. Puis j'entendis un autre craquement, suivi d'un bruit métallique. Du coup, j'étais réveillé pour de bon, mais c'était trop tard. A demi levé, je tendais le bras vers mon revolver quand la porte de notre chambre s'ouvrit à la volée, et deux silhouettes sombres sont entrées dans la pièce. Mes doigts n'ont jamais atteint le Browning. Je sentis la douleur de la piqûre, profonde, dans ma poitrine avant de réaliser qu'un des deux hommes m'avait visé avec son arme - mais ça ne ressemblait pas à un vrai revolver, et le projectile n'était pas une balle. Il avait jailli avec un sifflement, comme le bruit d'une cartouche d'air comprimé, et ce que j'avais dans la poitrine n'était pas la plaie béante provoquée par une balle. C'était une aiguille de huit centimètres, avec une pointe noire à l'extrémité. Je continuai à avancer la main vers mon arme, mais un des visiteurs était déjà sur moi. D'un coup de pied, il écarta mon bras de la table de nuit et me jeta contre le mur. Je vis vaguement Tess en train de s'asseoir sur le lit, et l'entendis glapir quand elle reçut à son tour une aiguille. Je voulus m'éloigner du mur pour rendre ses coups à l'intrus, mais à mi-course mes muscles se transformèrent en compote et je me suis effondré comme une poupée de chiffon. J'étais incapable de bouger le petit doigt. Prisonnier de mon propre corps, j'étais tout juste capable de les regarder aller et venir autour de moi comme si je n'étais pas là. Du coin de l'oeil, je les vis soulever Tess et la porter à l'extérieur de la chambre, et une rage d'une violence que je n'avais jamais ressentie m'emporta soudain. Mes pensées s'envolèrent vers Alex. J'espérais qu'ils lui donneraient une autre drogue, un produit qui ne le laisserait pas conscient comme je l'étais, qui lui épargnerait l'horreur d'assister à cela. Je pensai à Julia et à Cal, espérant qu'ils n'étaient pas considérés comme quantité négligeable, et qu'ils avaient été épargnés. Puis un visage surgit dans mon champ de vision, à l'envers, venu de derrière moi. Un nouveau visage, que je n'avais jamais vu. Mais je sus que c'était lui. Juste là, à quelques centimètres de moi. Et je ne pouvais lever un doigt sur lui, ni lui arracher le coeur. A condition qu'il en ait eu un. Je me contentai de le fixer, au fond dans ma rage silencieuse, hurlant de toute la force de mes poumons dans un silence total, et je pensai aux araignées et aux lézards et au rapport de l'analyse toxicologique qu'on ferait après mon autopsie.

« l’affaire. —Navarro n’estpasàmes trousses, dis-jed’une voixdurcie parlafureur.

Ilpoursuit Alex.Parce qu’ilcroit qu’Alex estlaréincarnation deMcKinnon.

Parcequ’ilveut laformule.

Parcequ’ilpense qu’Alex s’ensouvient peut-être.

—Exactement, renchéritTess.Lacible, c’estAlex.

Depuis ledébut ! Ça collait. Nom deDieu, çacollait vraiment. Et sic’était vrai…alors,pouruneraison bizarre, unmotif detaré, dekarma detête denœud, celui,quel qu’il soit, quidécide comment ceschoses-là arrivent,celui-làavaitfourré l’âmedel’homme quej’avais assassiné danslecorps demon propre fils. Oubliez ledessein intelligent. Il n’y avait làqu’un dessein perversetsadique. Je me laissai glisser surlesol, m’adossai àl’arbre solitaire.

Jeme sentais aussiseulquelui.Jen’étais toujours passûrd’ycroire.

C’était tropdingue, tropirréel.

Ilfallait unsacré actedefoi, etjen’en étais pas encore là.Mais jene pouvais pastout rejeter d’ungeste delamain.

Pasavec ceque Tess avait déterré.

Etsi c’était vrai…Lapensée qu’Alexvoyaitsonmeurtrier àchaque foisqu’il meregardait –moi, sonpropre père… non, c’était trophorrible.

Jecherchai unemanière detorpiller laconclusion deTess, delamettre enpièces, de la déchiqueter ennanoparticules pourqu’elle nerevienne jamais… Je n’y parvins pas. J’avais l’impression quemon crâne allaitexploser, telun astronaute dontlecasque estfêlé.

J’aurais préféré metrouver dansl’espace, oùpersonne, sil’on encroit certaines affichesdefilm, nevous entend hurler. J’avais vraiment enviedem’époumoner.

Maisjene pouvais pas.Paslà.Pas devant Tess,pasensachant qu’Alex, Juliaetl’autre agentsetrouvaient àcôté.

Jeme contentai deme laisser aller,penchai latête enarrière et fermai lesyeux. Tess selaissa glisser ets’assit àcôté demoi. — Tu penses vraiment quec’est possible ?fis-je aubout d’unmoment. Elle laissa passer quelques secondes. — Je ne sais pascequ’il fautcroire, Sean.Franchement, jesuis déchirée.

J’aienvie quecesoit vrai, et j’espère queçane l’est pas. Elle meposa lamain surlebras. — Je voudrais quecene soit pas vrai, pour tonbien.

Pourlebien d’Alex.

Ceserait si…cruel.

Siinjuste. Une partie demoi mefaitdes reproches parcequej’aiessayé desavoir.

Maissic’est vrai… onnepeut pas regarder ailleurs.Ilfaut yfaire face, régler leproblème pourqu’Alex ettoi ayez lesrelations père-filsauxquelles vous avezdroittouslesdeux. Elle leva lesyeux versleciel nocturne.

Jesuivis sonregard.

Leciel mesemblait plusvaste, plusinfini que jamais.

—Etsic’est vrai… MonDieu… Celachange tout.Sicette vien’est paslafin, sinous avons unechance de revenir… Cedoit être untout autre débat, etjene suis passûre quenous devons l’avoirmaintenant. J’acquiesçai.

Certaineschosespouvaient attendre. — Je dois faire ensorte qu’Alex soitensécurité, luidis-je.

SiNavarro ycroit vraiment, alorsAlexnesera à l’abri quelejour oùcesalaud serahors d’état denuire.

Jedois m’occuper deçaavant tout.Etaprès… nous verrons pourlereste. Il fallait quejetrouve Navarro.

Etlemoment venu,ilfaudrait quejelui cloue lebec une foispour toutes.

Je ne voulais pasque toutcela revienne àla surface.

Celahanterait Alexpendant desannées, etlui rendrait lavie trop difficile.

Jene voulais pasnon plus queNavarro aillejacasser dansunequelconque celluledeprison et incite unenouvelle vaguedenarcos àtraquer monfilscomme s’ilétait leurpoule auxœufs d’or. Il fallait quejemette lamain surElBrujo. A moins qu’ilneme trouve d’abord.. »

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