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ABDICATION, substantif féminin.

Publié le 27/09/2015

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ABDICATION, substantif féminin.  

I.—  Sens propre. 

DROIT.  Renonciation à de hautes fonctions, à l'autorité souveraine. [Se dit aussi en parlant de situations moins importantes, d'une charge d'une qualité, d'un titre, d'un droit]  Confer abdiquer I : 

Ø 1. Le dernier recueil en deux volumes contient une suite de pamphlets, la plupart dirigés contre Buonaparte aux jours de sa chute, de son abdication et de son exil.

ÉTIENNE-JEAN DELÉCLUZE, Journal,  1827, page 375. 

Ø 2. Il s'agissait bien de quelques phrases diplomatiques sur la déchéance, sur l'abdication, sur le traité du 11 avril et du 30 mai, pour arrêter Napoléon!

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 594. 

—  Anciennement. Abdication des droits de cité ou de patrie. Abandon volontaire de ses droits : 

Ø 3. Il était Rousseau de Genève. Il y tenait. « Citoyen de Genève », ç'avait été sa signature chaque fois qu'il avait voulu donner aux hommes l'idée de ce que pouvaient la vertu et la liberté. Genève, par lui, était en train de changer le monde. Et Genève le méprisait. Eh bien! Entre sa patrie et lui-même, le monde choisirait. Cette lettre d'abdication ferait la honte éternelle de Genève.

JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, Grandeur et misère d'un esprit, 1952, page 130. 

Remarque : J. Guéhenno emploie ce mot à propos de Jean-Jacques Rousseau, qui abdiqua ses droits de citoyen de Genève. Il ne semble pas que cet usage appartienne aujourd'hui à la langue commune. 

—  Par extension.  Aliénation des volontés particulières au profit d'une volonté supérieure de type juridique (monarchie, suprématie, usurpation) ou moral (ambitions, vanités, prétentions, amour-propre) (confer II) : 

Ø 4. La monarchie n'est point une préférence accordée à un homme aux dépens des autres; c'est une suprématie consacrée d'avance : elle décourage les ambitions, mais n'offense point les vanités. L'usurpation exige de la part de tous une abdication immédiate en faveur d'un seul : elle soulève toutes les prétentions : elle met en fermentation tous les amours-propres.

BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, De l'Esprit de conquête et de l'usurpation, 1813, page 187. 

Ø 5. Au point de vue politique, il n'y a qu'un seul principe : la souveraineté de l'homme sur lui-même. Cette souveraineté de moi sur moi s'appelle liberté. Là où deux ou plusieurs de ces souverainetés s'associent commence l'état. Mais dans cette association il n'y a nulle abdication.

VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 2, 1862, page 314. 

II.—  Au figuré.  Action de renoncer à une valeur ou à un sentiment considérés comme étant de grand prix. Confer abdiquer II : 

Ø 6.... quand les nuages s'amoncellent, quand toute la fureur de la nature se manifeste, l'homme se sent une énergie intérieure qui peut s'affranchir de toutes les craintes, par la volonté ou par la résignation, par l'exercice ou par l'abdication de sa liberté morale; et cette conscience de lui-même le ranime et l'encourage.

GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, De l'Allemagne, tome 4, 1810, page 138. 

Ø 7. Balzac pensait sans doute qu'il n'est pas pour l'homme de plus grande honte ni de plus vive souffrance que l'abdication de sa volonté.

CHARLES BAUDELAIRE, Les Paradis artificiels, le Poème du haschisch, 1860, page 384. 

Ø 8. Mon appréhension de la vie me ressaisit à la gorge. Mon besoin d'étourdissement, d'oubli, d'abstention, d'abdication reparaît plus puissant que jamais. Je ne me sens aucune volonté, aucune espérance, aucun talent, aucun avenir, aucune audace.

HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal intime,  1866, page 399. 

Ø 9. Ce qu'elle [Manette] avait obtenu de lui [Coriolis] , ce n'avait point été une entière et brusque abdication de ses goûts, de ses instincts, de ses attaches de coeur,...

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Manette Salomon,  1867, page 399. 

Ø 10.... dans les conceptions les plus admirables de Haendel et de Bach, il n'y avait pas la renonciation d'un succès public, le sacrifice d'un effet d'art, l'abdication d'un orgueil humain s'écoutant prier;...

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, À rebours,  1884, page 269. 

Ø 11. Il faut que cette conscience recréée par les mekhitaristes de San-Lazzaro prouve sa force par des sacrifices, par des abdications individuelles au profit de la communauté.

MAURICE BARRÈS, Scènes et doctrines de nationalisme,  1902, page 117. 

Ø 12.... mais il y a, dans le renoncement à la joie, de la faillite et comme une sorte d'abdication, de lâcheté.

ANDRÉ GIDE, Les Nouvelles Nourritures,  1935, page 284. 

Remarque : Le mot est généralement suivi d'un complément de nom introduit par la préposition de; emploi sans complément (exemple 8, 12), il prend une valeur plus générale correspondant à l'emploi absolu du verbe (confer abdiquer II B). 

 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 271. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 553, b) 166; XXe.  siècle : a) 445, b) 323. 

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