ABRÉVIATION, substantif féminin.

ABRÉVIATION, substantif féminin.  

I.—  Action d'abréger : 

A.—  [Le substantif est suivi d'un complément introduit par la préposition de] 

—  DROIT.  Abréviation du délai, de la procédure  : 

Ø 1. Plus d'instructions, plus d'interrogatoires, (...) Il reconnaissait dans l'abréviation de la procédure les vrais caractères de cette justice salutaire...

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Les Dieux ont soif,  1912, page 258. 

—  MATHÉMATIQUES, LINGUISTIQUE, PSYCHANALYSE : 

Ø 2.... les géomètres (...) ont assez fréquemment, recours à l'artifice inverse, qui est de supposer, pour l'abréviation et la commodité des calculs, une continuité fictive là où il y a réellement discontinuité. Ils n'obtiennent ainsi qu'une approximation des vrais résultats,...

AUGUSTIN COURNOT, Essai sur les fondements de nos connaissances et sur les caractères de la critique philosophique,  1851, page 312. 

Ø 3. Il est plein d'admiration pour la langue chinoise, qu'il dit être faite seulement par le choc des idées, avec la suppression ou la sévère abréviation de toutes les inutilités des langues occidentales.

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  juillet 1892, page 274. 

Ø 4. Ainsi s'expliquerait la « condensation » ou abréviation du contenu latent, le « déplacement », par lequel la charge affective d'une représentation se transporte sur un objet de moindre importance affective, en même temps que celui-ci remplace le précédent,...

PAUL RICOEUR, Philosophie de la volonté,  1949, page 359. 

Remarque : L'abréviation par la suppression (exemple 3) de certains éléments permet la « condensation » au sens où la psychanalyse emploie ce mot (exemple 4), mais peut aussi être responsable d'un autre côté d'une certaine approximation (exemple 2). 

B.—  Spécialement.  Procédé par lequel on obtient une représentation graphique tronquée, mais suffisamment claire, d'un signe plus long. 

—  LINGUISTIQUE.  Mode de réduction des mots savants (techniques, scientifiques, adminitifs) passés dans la langue commune, familière ou populaire : 

Ø 5. Abréviation. On emploie d'ordinaire ce terme pour désigner une réduction graphique (ainsi etc. pour et caetera), en réservant le terme d'abrégement à ce qui est une réduction réelle,...

Lexique de la terminologie religieuse (JULES MAROUZEAU)  1961, page 12. 

Remarque : Certains linguistes emploient le mot abréviation au sens d'« abrégement » : 

Ø 6. Le mode d'abréviation le plus usuel est celui qui ne conserve d'un recomposé que ses deux ou trois premières syllabes : métro (de métropolitain)... stylo (stylographe)...

HENRI MITTERAND, Les Mots français,  1963, page 64. 

—  MUSIQUE.  Procédé de notation musicale consistant à employer des signes spéciaux évitant l'écriture répétée de notes ou séquences de notes identiques : 

Ø 7. La ligne horizontale est un signe d'abréviation [en harmonie] pour remplacer le chiffre... elle indique que l'accord représenté par ce chiffre doit se prolonger sur les diverses notes de basse qui succèdent à celle sur laquelle il était placé.

FRANÇOIS BAZIN, Traité d'harmonie,  1857, page 8. 

—  TYPOGRAPHIE : 

Ø 8. L'abréviation consiste dans le retranchement de plusieurs lettres finales ou médianes remplacées ou non par un point, en une combinaison de chiffres et de minuscules et même de supérieures, et par la substitution de lettres et de signes particuliers.

ÉMILE LECLERC, Nouveau manuel complet de typographie,  1897, page 155. 

II.—  Représentation ou signe obtenu par abréviation. 

—  LINGUISTIQUE, GRAMMAIRE, TYPOGRAPHIE : 

Ø 9. Si on aperçoit de nombreuses lacunes dans les raisonnements de l'empereur, et surtout dans la suite de ses développements, c'est qu'à Sainte-Hélène je consignais en hâte, me fiant sur ma mémoire pour développer en temps opportun, ou bien je me contentais encore d'abréviations, de signes hiéroglyphiques;...

EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 968. 

Ø 10.... elle s'y accoutuma, déchiffra ces caractères, comprit les abréviations et les contractions, sut deviner les tournures et les mots vieillis; et elle finit par lire couramment.

ÉMILE ZOLA, Le Rêve,  1888, page 25. 

Remarque : L'exemple cité pour la typographie sous I B peut également convenir pour illustrer l'emploi II. En musique abréviation désigne également un signe d'abréviation. 

—  PEINTURE : 

Ø 11. Parce qu'il lui est arrivé de synthétiser en abréviations excessives, et parfois un peu gauches, des formes et des mouvements, on a dit sur tous les tons que Puvis de Chavannes ne savait pas dessiner.

ANDRÉ MICHEL, Sur la peinture française au XIXe.  siècle,  1928, page 223. 

Remarque : Dans l'exemple suivant abréviation semble signifier « échantillon incomplet, mais suffisant » : 

Ø 13. M. Yonkind (sic)... a déposé quelques planches... singulières abréviations de sa peinture, croquis que sauront lire tous les amateurs habitués à déchiffrer l'âme d'un artiste dans ses plus rapides gribouillages.

CHARLES BAUDELAIRE, Curiosités esthétiques,  1846, page 293. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 68.