ABUSEUR, substantif masculin.

ABUSIF, -IVE, adjectif.  

A.—  [En parlant d'une coutume, d'un usage, d'un emploi, d'une action, etc.]  Qui constitue un abus : 

Ø 1. En quelque discrédit que soit tombé le mot drame par la manière abusive et tortionnaire dont il a été prodigué dans ces temps de douloureuse littérature, il est nécessaire de l'employer ici...

HONORÉ DE BALZAC, Le Père Goriot,  1835, page 5. 

Ø 2. Il faut la mettre à part pour le souper, car le dîner est un repas indigeste, abusif et superflu que nous supprimerons.

THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 157. 

Ø 3. L'emploi abusif de termes abstraits nuit souvent beaucoup au récit d'une action.

ANDRÉ GIDE, Journal,  1944, page 272. 

Ø 4. Le lendemain, parlant à la radio, je pris le peuple à témoin des exigences abusives que des partisans prétendaient me dicter.

CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, Le Salut, 1959, page 275. 

—  Par extension, rare.  [En parlant d'une chose concrète]  Dont l'usage constitue un abus : 

Ø 5. Heureusement M. de Rênal ne vit point cette nouvelle impertinence, elle ne fut remarquée que de Mme.  Derville, son amie fondait en larmes. En ce moment M. de Rênal se mit à poursuivre à coups de pierres une petite paysanne qui avait pris un sentier abusif, et traversait un coin du verger... [Il] appela son jardinier avec lui à barrer, avec des fagots d'épines, le sentier abusif, à travers le verger.

HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Le Rouge et le noir,  1830, page 56. 

B.—  [En parlant d'une personne ou du comportement d'une personne] :

Ø 6. —  Mais non, à la fin, la créature humaine est née égoïste, abusive, vile. Regardez donc autour de vous et voyez! Une lutte incessante, une société cynique et féroce, les pauvres, les humbles, hués, pilés par les bourgeois enrichis, par les viandards!

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Là-bas,  1891, page 197. 

—  Mère abusive, père abusif. Mère, père qui capte pour soi et de manière exclusive l'affection de ses enfants. 

—  Veuve abusive. Veuve qui exploite à son profit ou arrange selon ses idées la réputation posthume de son époux : 

Ø 7. Demain, plus tard et toujours, les hommes s'inquièteront de la condition des veuves, pour célébrer l'héroïsme des unes, pour stigmatiser les abus que d'autres commettent dans l'administration d'un héritage d'amour ou de gloire. En essayant de classer à leur rang les veuves abusives, je prétends traiter un sujet d'une actualité indéfinie.

ANATOLE DE MONZIE, Les Veuves abusives,  1936, page 12. 

Ø 8.... j'étais avocat à Paris... j'avais une spécialité : les nobles causes. La veuve et l'orphelin, comme on dit, je ne sais pourquoi, car enfin il y a des veuves abusives et des orphelins féroces.

ALBERT CAMUS, La Chute,  1956, page 1482. 

C.—  Vieilli.  Qui abuse, trompeur : 

Ø 9. Je demeurai dans les abusives croyances de l'amour platonique.

HONORÉ DE BALZAC, Le Lys dans la vallée,  1836, page 110. 

Remarque : Sens signalé sporadiquement : Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, Arsène Darmesteter) et DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 93. 

ABUSEUR, substantif masculin.  

Celui qui abuse, qui trompe; séducteur et rapineur : 

Ø 1. Au nouveau Longwodd, Plantation House, chez le gouverneur on voit le duc de Wellington en peinture et le tableau de ses batailles. Une armoire vitrée renferme un morceau de l'arbre près duquel se trouvait le général anglais à Waterloo; cette relique est placée entre une branche d'olivier cueillie au jardin des Olives et des ornements de sauvages de la mer du Sud : bizarre association des abuseurs des vagues. Inutilement le vainqueur veut ici se substituer au vaincu, sous la protection d'un rameau de la Terre-Sainte et du souvenir de Cook; il suffit qu'on retrouve à Sainte-Hélène la solitude, l'Océan et Napoléon.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 673. 

Ø 2. Comment que vous me parlez à présent?... Que c'est moi qui l'ai massacré?... Mais vous avez bu mon garçon!... Ah! vous avez du culot!... Mais vous êtes fous tous alors?... Mais comment... C'est moi que vous venez d'accuser?... Pour ce voyou?... cet abuseur?...

LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit,  1936, page 638. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 2. 

ABUSIVEMENT, adverbe.  

DROIT, GRAMMAIRE et.  par extension, langage courant.  De manière abusive : 

Ø 1.... légende d'après laquelle les hommes de ce temps-là auraient attendu la fin du monde, et, croyant que l'an 1000 ne pouvait être dépassé, auraient, dans une sorte de folie collective, renoncé au travail et à l'effort. On a exagéré, on a généralisé abusivement quelques passages de vieilles chroniques. La vie ne fut interrompue nulle part.

JACQUES BAINVILLE, Histoire de France, tome 1, 1924, page 52. 

Ø 2.... il [Dufour] n'était donc qu'un quelconque déserteur, abusivement utilisé et protégé par un service étranger.

CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Unité, 1956, page 216. 

Remarque : 1. Dans l'exemple suivant, l'adverbe se rattache pour le sens à l'expression abuser d'une femme : 

Ø 3. Il y a accessoirement, du côté de Loth et de ses filles une idée sur la sexualité et la reproduction, avec Loth qui semble mis là pour profiter de ses filles abusivement, comme un frelon.

ANTONIN ARTAUD, Le Théâtre et son double,  1939, page 43. 

2. Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, Arsène Darmesteter) signale un emploi actif vieilli : « de manière à abuser, à tromper ». Aucun exemple dans la documentation. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 28.