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ACRIMONIE, substantif féminin.

Publié le 04/10/2015

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ACRIMONIE, substantif féminin.  

A.—  Vieilli. 

1. MÉDECINE.  vieux.  Âcreté corrosive. L'acrimonie du sang, des humeurs, d'une substance agissant sur le corps : 

Ø 1. Souvent l'altération de la lymphe se manifeste par une acrimonie singulière des humeurs, par des éruptions rongeantes, par des tubercules cutanés, par des excoriations ulcéreuses, d'un caractère opiniâtre et féroce. Dans ces circonstances, l'irritation des extrémités sentantes des nerfs est extraordinaire; le système tout entier est dans un état d'inquiétude, plus ou moins violent. Suivant le degré de cet état, il se développe des appétits, il se forme des habitudes de différentes espèces. Le degré le plus faible ne produit qu'une excitation incommode; il en résulte une certaine âpreté dans les idées...

PIERRE CABANIS. Rapports du physique et du moral de l'homme, tome 1, 1808, pages 466-467. 

2. Dans la langue commune : 

Ø 2. Il avait avalé plus d'un quarteron de tabac à fumer... [fait inouï] , introduire en si grande quantité dans son estomac, une substance qui, par son acrimonie, ne peut avoir que de funestes effets.

FRANÇOIS VIDOCQ, Mémoires de Vidocq, chef de la police de sûreté, jusqu'en 1827, tome 3, 1828-1829, page 407. 

Remarque : Au sens propre, la valeur sémantique de acrimonie est très proche de celle de âcreté (confer rongeant, opiniâtre, féroce dans l'exemple 1, funeste dans l'exemple 2). Ce sens est enregistré par tous les dictionnaires du XIXe.  siècle Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, Arsène Darmesteter), le déclare vieilli et DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT ) peu usité, sans indication sur son emploi. Encore mentionné dans Larousse du xxe.  siècle en six volumes (acrimonie des humeurs), il est absent dans Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, Larousse trois volumes en couleurs, Pet IT DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT), et DICTIONNAIRE DU FRANÇAIS CONTEMPORAIN  (JEAN DUBOIS. 

B.—  Au figuré.  [S'applique à une personne, à son caractère, à sa conduite, et particulièrement à ses paroles...]  Aigreur qui est ou qui paraît méchante, blessante : 

Ø 3. Vous avez fait à la monarchie légitime une guerre assez rude, vous lui avez porté des coups assez éclatants pour être généreux après la victoire. Aujourd'hui, l'adversaire est désarmé et à terre, et votre vers incisif le poursuit encore. Dès le début de votre pièce, vous montrez votre haine terrible pour cette famille que l'exil frappe pour la troisième fois. Vous leur faites vos sanglants reproches avec la même acrimonie et le même fiel que s'ils étaient encore sur le trône.

HONORÉ DE BALZAC, Correspondance,  1831, page 518. 

Ø 4. Public exécuteur, il [Juvénal] a peu d'harmonie, 

Mais de la bile à force et de l'acrimonie.

AMÉDÉE POMMIER, Crâneries et dettes de coeur,  1842, page 63. 

Ø 5. Cet empoisonnement mutuel de la vie de chacun par chacun est une des choses qui me répugnent le plus dans notre société. Et ceux qui devraient l'exemple de la réserve et de la charité, sont souvent encore plus dénigrants que tous les autres. « Ne jugez pas, afin de n'être pas jugés. » —  On suspecte, incrimine, noircit les actes et les intentions avec une mauvaise joie que pour ma part je trouve hideuse. L'acrimonie vigilante, les insinuations perfides, les commentaires fâcheux, les inventions gratuites, la commisération hypocrite et toutes les variantes de ce Protée qu'on appelle la méchanceté abondent, pullulent à tous les étages et dans tous les cercles de cette ville acide.

HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal intime,  11 février 1866, pages 129-130. 

Ø 6. Elles avaient l'acrimonie facile des filles, mais aussi le manque absolu de toute rancune...

GEORGES MOINAUX, DIT GEORGES COURTELINE, Le train de 8 h 47,  1888, page 173. 

Ø 7. Je regardai Anne. Elle considérait Elsa avec calme, détachement, comme elle regardait les mannequins qui présentaient ses collections ou les femmes très jeunes. Sans aucune acrimonie. Je l'admirai un instant passionnément pour cette absence de mesquinerie, de jalousie.

FRANÇOISE SAGAN, Bonjour tristesse,  1954, page 147. 

—  Par extension, au pluriel.  Paroles blessantes ou sujets de discorde : 

Ø 8. Après avoir réfléchi, Gérard s'écria : « ce Montaigne est un misérable! » Tout le temps du dîner, il éclata en telles acrimonies contre le sceptique, que Giraud lui demanda la raison de sa colère subite.

JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Aventures de Mademoiselle Mariette, 1853, page 220. 

Remarque : 1. En ce sens, il est souvent en association avec fiel (exemple 3), méchanceté (exemple 5), rancune (exemple 6), mesquinerie, jalousie (exemple 7), colère. Par opposition à âcreté, acrimonie n'a pas, au sens figuré, la même vigueur; il désigne plutôt un trait de caractère permanent, un état d'esprit :  \" Acrimonie désigne une disposition constante à l'âcreté, tandis que âcreté peut s'appliquer à ce qui se fait sentir actuellement ou vient de se faire sentir. \" (DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ) ). 2. Syntagmes fréquents : avec acrimonie (exemple 3), sans acrimonie (exemple 7). 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 33. 

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