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AHURISSEMENT, substantif masculin.

Publié le 17/10/2015

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AHURISSEMENT, substantif masculin.  

Action, résultat de l'action d'ahurir, de s'ahurir. 

A.—  [En parlant d'une personne ou d'une collectivité humaine] 

1. Action d'inspirer une forte surprise, état de stupéfaction (marqué surtout par l'expression du visage) qui en résulte : 

Ø 1. Le monsieur décoré et la dame en manteau de fourrure, débarqués le matin du train de Paris, ouvraient des yeux vagues, avaient sur la face l'ahurissement de ces choses brusques, qui les dépaysaient.

ÉMILE ZOLA, Germinal,  1885, page 1223. 

Ø 2. Rouletabille se promenait dans la vie avec cette pensée sans se douter de l'étonnement —  disons le mot —  de l'ahurissement qu'il rencontrait sur son chemin. Les gens tournaient la tête vers cette pensée, la regardaient passer, s'éloigner, comme on s'arrête pour considérer plus longtemps une silhouette originale que l'on a croisée sur sa route.

GASTON LEROUX, Le Mystère de la chambre jaune,  1907, page 97. 

Ø 3. —  Mon cher ami, —  répondit Morhange, —  depuis que je suis réveillé de cet extraordinaire cauchemar qui va de la grotte enfumée à l'escalier aux lampadaires des mille et une nuits, je marche de surprise en surprise, d'ahurissement en ahurissement. Regardez plutôt autour de vous.

PIERRE BENOIT, L'Atlantide,  1919, page 122. 

Ø 4.... à mon étonnement et à l'ahurissement de la classe, on entendit la voix très calme, auguste même de M. Nadaud, qui criait encore après que les rires enfin s'étaient tus.

ANDRÉ GIDE, Si le grain ne meurt,  1924, page 422. 

Remarque : Synonymes : abasourdissement, ébahissement, étonnement, stupéfaction, surprise. 

2. Action de troubler l'esprit, état de bouleversement profond (marqué surtout par le comportement) qui en résulte : 

Ø 5. Le marié, charmant garçon, mais toujours un peu tombant de la lune, hannetonnait là-dedans, poussant l'un ou l'autre dans quelque coin, avec des mains de caresse, vous disant des choses qu'il oubliait de finir et qu'il terminait par un sourire heureux. C'était le plus délicieux spectacle de l'ahurissement, produit par l'amour chez un jeune homme distrait. 

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  mai 1874, page 978. 

Remarque : Synonymes : affolement, confusion, effarement, étourdissement, trouble. Antonymes : calme, impassibilité, imperturbabilité, sérénité, tranquillité. 

3. Péjoratif.  Action de rendre stupide, état de stupeur qui en résulte : 

Ø 6. Je vous écris dans tout l'ahurissement d'une première lecture. Pardonnez-moi mes bêtises si elles sont trop fortes.

GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance,  1861, page 436. 

Ø 7. Je me trouve dans la rue avec une lourde migraine et l'ahurissement que vous laissent les rêves particulièrement idiots.

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine à Paris,  1901, page 190. 

Ø 8. Les représentants les plus avertis du dandysme du Second Empire zozotaient dans les salons : « Avez-vous visité la cour du Grand Hôtel de la Paix, (ce fut son premier nom), avez-vous eu l'occasion de souper dans la salle à manger en rotonde? » Ainsi parle-t-on aujourd'hui d'une croisière en zeppelin ou d'un mariage en costume de scaphandrier. Chaque époque a ses ahurissements. 

LÉON-PAUL FARGUE, Le Piéton de Paris,  1939, page 233. 

Remarque : Synonymes : abêtissement, abrutissement, hébétement. 

B.—  Par extension.  [En parlant d'une valeur, d'une création humaine]  Action de stupéfier, d'abrutir, etc.; état qui en résulte : 

Ø 9. Dès l'époque de Commode et de Dioclétien, vous voyez la sculpture s'altérer profondément (...) l'aigreur, l'ahurissement et la fatigue (...) remplacent la santé harmonieuse...

HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Philosophie de l'Art, tome 2, 1865, page 302. 

Ø 10. Ô bousculade..., ahurissement de toute pensée...!

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Les Dimanches d'un Bourgeois de Paris, 1880, page 206. 

Ø 11. L'éreintement, l'ahurissement, le barbouillage de coeur...

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  10 avril 1890, page 1157. 

Ø 12.... il reste deux clans, le clan libéral qui met le naturalisme à la portée des salons en l'émondant de tout sujet hardi, de toute langue neuve, et le clan décadent qui, plus absolu, rejette les cadres, les alentours, les corps mêmes, et divague, sous prétexte de causette d'âme, dans l'inintelligible charabia des télégrammes. En réalité celui-là se borne à cacher l'incomparable disette de ses idées sous un ahurissement voulu du style.

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Là-bas, tome 1, 1891, pages 11-12. 

Remarque générale : 1. Ahurissement est noté comme familier dans Dictionnaire de l'Académie Française 1878, Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, Arsène Darmesteter), Dictionnaire de l'Académie Française tome 1 1932 et comme populaire dans DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ ) Addenda 1872. 2. Ahurissement est fréquemment accompagné d'un complément de nom, préposition de ou d'une proposition relative Ces compléments expriment tantôt l'origine de l'ahurissement (exemple 1, 6, 7), tantôt les personnes ou les valeurs qu'il affecte (exemple 4, 10, 11, 12). 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 97. 

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