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AILE, substantif féminin.

Publié le 18/10/2015

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AILE, substantif féminin.  

I.—  ZOOLOGIE.  Membre qui permet à la plupart des oiseaux et des insectes et à quelques mammifères de voler : 

Ø 1. Les ailes sont, comme nous l'avons vu, des membres attachés aux parties latérales de la poitrine. Elles sont destinées spécialement au vol. Un ordre entier d'insectes en est privé, les aptères; un autre ordre n'en a que deux, les diptères : mais le plus grand nombre en a quatre.

GEORGES CUVIER, Leçons d'anatomie comparée, tome 1, 1805, page 460. 

Ø 2. De tous les volatiles, ceux dont le vol est le plus curieux et le plus à notre portée sont les insectes. Les uns ont des ailes de la plus fine gaze, comme la mouche : elle exécute toute sorte de vols, et quand il lui plaît, elle s'arrête en l'air, et y devient stationnaire; d'autres, tels que les papillons, ont des ailes couvertes d'écailles fines comme la poussière, et brillantes des plus vives couleurs.

JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature,  1814, page 153. 

Ø 3. Qu'avait donc vu ce condor? (...) L'énorme oiseau s'approchait, tantôt planant, tantôt tombant avec la vitesse des corps inertes abandonnés dans l'espace. (...) Il mesurait plus de quinze pieds d'envergure. Ses ailes puissantes le portaient sur le fluide aérien presque sans battre, car c'est le propre des grands oiseaux de voler avec un calme majestueux, tandis que pour les soutenir dans l'air il faut aux insectes mille coups d'ailes par seconde.

JULES VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, tome 1, 1868, pages 125-126. 

Ø 4. Tout vivant est donc persuadé par sa forme; mémoire et prévision, c'est toujours la même chose que son corps; les deux sont ensemble dans le battement de l'aile d'un oiseau. Toute la forme, les os creux, les muscles, les plumes, le fort et la pointe de l'aile, tout cela exprime une parfaite physique de l'air. Aussi l'oiseau battra des ailes jusqu'à sa mort, toujours attaché à la règle du vol, et encore contre l'exception. Le sentiment de la règle est animal et chevillé au corps; bien mieux c'est le corps lui-même.

ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos,  1923, page 554. 

·    À titre d'aile. En battant de l'aile avec énergie, de manière à accélérer le vol : 

Ø 5.... aussi-tôt qu'il [l'aigle à tête chauve] voit l'aigle pêcheur parvenu à la hauteur de son aire, ce monarque des oiseaux quitte le sien, le poursuit à titre d'aile jusqu'à ce que le pêcheur, convaincu de son infériorité, abandonne sa proie. Alors ce fier antagoniste, les ailes repliées, s'élance comme un trait, et, avec une inconcevable adresse, ressaisit la proie avant qu'elle ait atteint la rivière.

MICHEL-GUILLAUME-JEAN, DIT SAINT-JOHN DE CRÈVECOEUR, Voyage dans la Haute Pensylvanie et dans l'État de New-York, tome 1, 1801, pages 252-253. 

Remarque : À tire d'aile se disait à l'origine en parlant des aigles et des faucons. 

—  Par métaphore.  Avec toute la vigueur et toute la célérité possibles : 

Ø 6. Ici il nous présente l'intelligence humaine comme une chambre obscure percée de quelques fenêtres par où la lumière pénètre, et là il se plaint d'une certaine espèce de gens qui font avaler aux hommes des principes innés, sur lesquels il n'est plus permis de disputer. Forcé de passer à tire d'aile sur tant d'objets différents, je vous prie de supposer toujours qu'à chaque exemple que ma mémoire est en état de vous présenter, je pourrois en ajouter cent, si j'écrivois une dissertation. Le chapitre seul des découvertes de Locke pourroit vous amuser pendant deux jours.

JOSEPH, COMTE DE MAISTRE, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, tome 1, 1821, pages 452-453. 

Ø 7. Sans attendre la réponse d'Eugène, Madame de Restaud se sauva comme à tire-d'aile...

HONORÉ DE BALZAC, Le Père Goriot,  1835, page 70. 

Ø 8. L'inspiration, cette folie de la génération intellectuelle, s'enfuyait à tire-d'aile à l'aspect de cet amant malade.

HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette,  1846, page 200. 

Ø 9.... tandis que les autres musiques, par la multiplicité distincte des thèmes et de leurs modulations, se créent si l'on peut dire peu à peu leur propre espace sonore, l'espace sonore wagnérien nous enveloppe dès le départ, et dès le départ aussi nous sature de son tissu opulent, qui fait songer à un lourd et inusable brocart à l'intérieur duquel alors les thèmes eux-mêmes tantôt fusent et pointent à tire-d'aile comme quelque oiseau, tantôt pèsent, insistent, glissent, s'insinuent. 

CHARLES DU BOS, Journal,  décembre 1927, page 383. 

—   [Chez certains oiseaux terrestres (autruche) ou aquatiques (cygnes, pingouins et manchots)]  Membre dévié de sa fonction première, qui facilite la course ou la natation : 

Ø 10. Cependant, si l'on considère que les oiseaux aquatiques (comme les palmipèdes), que les échassiers et que les gallinacés ont cet avantage sur tous les autres oiseaux, que leurs petits, en sortant de l'oeuf, peuvent marcher et se nourrir; et, surtout, si l'on fait attention que, parmi les palmipèdes, les manchots et les pingouins, dont les ailes, presque sans plumes, ne sont que des rames pour nager, et ne peuvent servir au vol, ce qui rapproche, en quelque sorte, ces oiseaux des monotrèmes et des cétacés; on reconnoîtra que les palmipèdes, les échassiers et les gallinacés doivent constituer les trois premiers ordres des oiseaux, et que les colombins, les passereaux, les rapaces et les grimpeurs, doivent former les quatre derniers ordres de la classe.

JEAN-BAPTISTE LAMARCK, Philosophie zoologique, tome 1, 1809, pages 150-151. 

—  Par extension.  Membrane formant parachute chez certains mammifères et reptiles; nageoire pectorale permettant à certains poissons de se soutenir dans l'air en planant : 

Ø 11. Les poissons qui n'ont point de vessie natatoire ont beaucoup moins de moyens de changer leur hauteur dans l'eau. La plupart restent au fond, à moins que la disposition de leur corps ne leur permette de frapper l'eau de haut en bas avec beaucoup de force : c'est ce que font les raies avec leurs vastes nageoires pectorales, qui portent avec raison le nom d'ailes, puisque le moyen que ces poissons employent pour s'élever, est absolument le même que celui des oiseaux. 

GEORGES CUVIER, Leçons d'anatomie comparée, tome 1, 1805, pages 505-506. 

Ø 12. Les ailes des poissons volans sont assez analogues, pour la structure, à celles du dragon; mais elles sont formées par l'extension des nageoires pectorales, ou de quelques rayons situés au-dessous de ces nageoires. Elles ne fournissent pas non plus à un vol continu. 

GEORGES CUVIER, Leçons d'anatomie comparée, tome 1, 1805 page 517. 

Remarque : Associations fréquentes a) Syntagmes avoir des ailes, battre des ailes, ouvrir, étendre, déployer les ailes; battement d'aile(s), coup(s) d'aile(s), à tire-d'aile(s); b) Opposition paradigmatique aile(s)/ membre(s), pieds; aile/flèche; ailes/rames pour nager, nageoires. 

—  Par métonymie. 

1. Aile singulière. \" Nom d'une espèce de petit oiseau du Paraguay. \" (Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, attestation isolée) 

2. Aile + de + corbeau, mouche, hanneton ou scarabée. De la couleur d'une aile de corbeau, hanneton, mouche ou scarabée : 

Ø 13. Aux nuances vert roseau, emma, gris fumée, flamme de punch, dont nous avons parlé, il faut ajouter les couleurs alezan doré, aile de mouche (sorte de gris) et canelle.

Journal des dames et des modes.  1821, page 488. 

Remarque : Dans cet emploi, aile est invariable. 

—  ART CULINAIRE.   [En parlant d'une volaille préparée pour la table]  Partie charnue allant du haut de la poitrine à la cuisse jointe à l'aile proprement dite : 

Ø 14. Les oies saignées, on les ouvre, on les fend, on les débarrasse de leurs foies, et on les découpe en quartiers : ailes, cuisses, poitrines et carcasses.

JOSEPH DE PESQUIDOUX, Chez nous, tome 1, 1921, page 49. 

·    Bouts d'ailes. Plumes à écrire provenant du bout d'une aile d'oie. (Attesté dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Dictionnaire de l'Académie Française 1878, Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, Arsène Darmesteter)). 

—  FAUCONNERIE.  Locution. Monter sur l'aile. \" On dit monter sur l'aile, donner du bec et des pennes, pour exprimer les différentes manières de voler. Monter sur l'aile, c'est s'incliner sur une des ailes, et s'élever principalement par le mouvement de l'autre; donner du bec et des pennes, c'est accélérer le vol par l'agitation redoublée de la tête et de l'extrémité des ailes. \" (Traité général des Eaux et Forêts - Chasses et pêches (JACQUES-JOSEPH BAUDRILLART) 1834). 

—  MYTHOLOGIE. (et, par extension, par allusion à la mythologie).  L'aile est attribuée à un être mythique, à une représentation allégorique... : 

Ø 15. LE GRIFFON 

Lion à bec de vautour avec des ailes blanches, les pattes rouges et le cou bleu.

GUSTAVE FLAUBERT, La Tentation de Saint Antoine,  1874, page 196. 

Ø 16. Je me souviens de Piriac; c'est en face l'île Dumet, une île toute pleine d'oiseaux, et de Guérande aussi. Il doit y avoir dans l'église des bas-reliefs curieux représentant de bons diables à fourches et à ailes?

GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance,  1876, page 326. 

Ø 17.... la Liberté cuirassée d'airain qui fend les airs de ses ailes déployées (...) domine toute l'oeuvre [la Marseillaise, par Rude] ...

AUGUSTE RODIN. L'Art, entreiens réunis par Paul Gsell,  1911, page 98. 

Ø 18. MERCURE. —  Merci. C'est à mes pieds que les autres humains me reconnaissent, aux ailes de mes pieds. 

JEAN GIRAUDOUX, Amphitryon 38,  1929, II, 5, page 117. 

Ø 19. Choisissez de vivre à genoux plutôt que de mourir debout afin que l'univers trouve son ordre mesuré à l'équerre des potences, partagé entre les morts tranquilles et les fourmis désormais bien élevées, paradis puritain privé de prairies et de pain, où circulent des anges policiers aux ailes majuscules parmi des bienheureux rassasiés de papier et de nourrissantes formules, prosternés devant le dieu décoré destructeur de toutes choses et décidément dévoué à dissiper les anciens délires d'un monde trop délicieux.

ALBERT CAMUS, L'État de siège,  1948, page 247. 

II.—  Emplois scientifiques et techniques.  [Par analogie de forme et/ou de disposition, plus rarement de couleur, de mouvement, de fonction]  Chacun des éléments latéraux —  pouvant affecter ou rappeler la forme d'une aile —  qui se déploient symétriquement par rapport à un corps central auquel ils adhèrent ou sont contigus. 

A.—  SCIENCES BIOLOGIQUES et SCIENCES DE LA TERRE.  

1. ANATOMIE HUMAINE.  

a) Chacune des parties similaires disposées symétriquement des deux côtés de certains organes impairs (nez; apophyses : os sphénoïde, thyroïde, Petitérygoïde, etc.) : 

Ø 20. 1) Nombre des os du crâne des mammifères.

Les quadrumanes ont tous les huit os du crâne; mais souvent le sphénoïde est divisé en deux parties, dont l'une forme les ailes orbitaires et les apophyses clinoïdes antérieures, et l'autre les ailes temporales, les apophyses clinoïdes postérieures et la fosse basilaire. (...).

Dans le cochon, le tapir et l'hippopotame, les deux pariétaux ne forment qu'une pièce unique. Leur frontal est double. Le rhinocéros a le pariétal et le frontal doubles; des animaux de cette famille et des deux suivantes reste très-long-temps divisé en deux pièces; l'une forme l'aile orbitaire ou les petites ailes d'ingrassias; l'autre produit les grandes ailes ou les apophyses temporales, qui sont ici beaucoup moindres. Cette disposition est absolument opposée à celle qu'on observe dans l'homme.

GEORGES CUVIER, Leçons d'anatomie comparée, tome 2, 1805, pages 20-21. 

Ø 21.... dans le cheval. Ce cartilage, nommé semi-lunaire par les hippotomistes est analogue à l'inférieur de l'homme, il est aussi formé de deux branches; une, presque parallèle au septum, longue et étroite; l'autre, placée dans l'aile extérieure du nez, courte et presque carrée. Tout le reste de cette aile extérieure n'est qu'un repli de la peau, qui forme d'abord un cul-de-sac, dont la convexité est sensible en dehors et qu'on nomme fausse narine; une fente longue et étroite de la paroi interne conduit dans la narine vraie.  

GEORGES CUVIER, Leçons d'anatomie comparée, tome 2, 1805 pages 662-663. 

Ø 22. Elle [Jeanne] avait, sur l'aile gauche de la narine, un petit grain de beauté...

GUY DE MAUPASSANT, Une Vie,  1883, page 5. 

Ø 23.... elle [une femme] cherchait Damien en aveugle, c'est-à-dire que je voyais battre flaireuses, les ailes de son parfait petit nez...

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Ces plaisirs,  1932, page 24. 

Remarque : Noter l'association syntagmatique de ailes du nez avec battre, s'ouvrir. 

b) Sert également à désigner : 

·    La partie supérieure évasée de l'oreille. (Attesté dans Bouillet 1859, Dictionnaire général des sciences théoriques et appliquées (AUGUSTIN PRIVAT-DESCHANEL, ADOLPHE FOCILLON), 1870, Nouveau Larousse illustré, Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

·    \" La partie latérale de diverses régions du cerveau. \" (Petit Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (PAUL ROBERT)), \" ailes blanches, aile grise du tronc cérébral \" (Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (PAUL ROBERT)). 

·    Ailes du coeur (Dictionnaire des termes techniques d'entomologie (EUGÈNE SÉGUY) 1967, attestation isolée) :  \" fibres musculaires situées au-dessus du diaphragme dans la cavité péricardiale. \" (Dictionnaire des termes techniques d'entomologie (EUGÈNE SÉGUY) 1967, attestation isolée). 

2. BOTANIQUE.  

a) \" On nomme ailes les deux pétales latéraux de la corolle papilionacée, qui représentent en effet assez bien les ailes d'un papillon. Ordinairement ces pétales recouvrent les deux pétales inférieurs, souvent soudés et constituant la carène qui enveloppe les organes sexuels, comme une nacelle (dans le pois de senteur). \" (Dictionnaire général des sciences théoriques et appliquées (AUGUSTIN PRIVAT-DESCHANEL, ADOLPHE FOCILLON), 1870) : 

Ø 24. Des pois de senteurs, pareils à des vols de papillons posés, repliaient leurs ailes fauves, leurs ailes roses...

ÉMILE ZOLA, La Faute de l'Abbé Mouret,  1875, page 1347. 

b) \" On nomme aussi ailes, des lames membraneuses qui se développent dans certains fruits, tels que ceux du frêne et de l'orme. \" (Dictionnaire général des sciences théoriques et appliquées (AUGUSTIN PRIVAT-DESCHANEL, ADOLPHE FOCILLON), 1870) : 

Ø 25. Les graines apparaissent alors, (...) portant chacune une aile latérale faite d'une lame des tissus superficiels de l'écaille.

LUCIEN PLANTEFOL, Cours de botanique et de biologie végétale, tome 2, 1931, page 266. 

c) \" On nomme encore ainsi toutes les membranes saillantes des végétaux disposées aux côtés de la tige, des rameaux, etc. \" (Dictionnaire universel des Sciences, des Lettres et des Arts (MARIE-NICOLAS BOUILLET) 1859). 

—  Ailes d'artichauts. \" On nomme encore aile, chez les Artichauts, les têtes secondaires qui se développent sur la tige de chaque côté et un peu au-dessous de la tête principale; les petites têtes qui se développent sur cette même tige, mais plus bas encore, reçoivent dans le langage vulgaire le nom de poivrades. \" (Élie-Abel Carrière, Encyclopédie horticole, 1862); (attesté dans le Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Nouveau Larousse illustré et Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

d) Branches des arbres en espaliers qui poussent de part et d'autres des branches mères. (Attesté dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Larousse trois volumes en couleurs et Petit DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT)) : 

Ø 26. Aile se dit aussi, dans la culture des arbres fruitiers dirigés en espalier, des parties placées de chaque côté de la tige, d'où les noms d'aile droite ou d'aile gauche qu'on leur donne suivant qu'elles occupent l'un ou l'autre de ces deux côtés.

ÉLIE-ABEL CARRIÈRE, Encyclopédie horticole,  1862, page 13. 

e) Aile de pigeon. \" Nom vulgaire d'un champignon. \" (Nouveau Larousse illustré; autre attestation dans le Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845). 

3. GÉOLOGIE.  Aile d'un pli. Flanc : 

Ø 27. Ce cas est le plus fréquent dans les Alpes, où il a pour conséquence habituelle le laminage et l'amincissement de l'aile renversée ou flanc inverse du pli... 

ALBERT DE LAPPARENT, Abrégé de géologie,  1886, page 399. 

4. ZOOLOGIE.  

a) Embranchement des coelentérés. Aile de mer (Nouveau Larousse illustré; autre attestation dans le Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845); \" nom vulgaire d'un zoophyte, la pennatule. \" (Nouveau Larousse illustré; autre attestation dans le Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845). 

b) Mollusques. 

·    \" On appelle ainsi vulgairement : 1o.  la lèvre de certaines coquilles (l'aile d'aigle); 2o.  diverses coquilles, à cause de leurs couleurs (aile de papillon), ou de leur forme générale (aile de corbeau). \" (Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845); (attesté également dans Nouveau Larousse illustré et Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

·    \" Nom donné aux nageoires de quelques céphalopodes et Petitéropodes, tels que les argonautes et les carinaires. \" (Nouveau Larousse illustré); (attesté dans le Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845 et Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

B.—  ARTS DE LA GUERRE, LUTTES POLITIQUES et SOCIALES, JEUX et SPORTS.  

1. ARMÉE.  

a) [Dans l'armée romaine]  Terme militaire technique qui a présenté plusieurs sens : 

·    \" Dans l'armée primitive, c'est une patrouille de cavalerie chargée de protéger le flanc de la légion. \" (Dictionnaire illustré de la mythologie et des antiquités grecques et romaines (PIERRE LAVEDAN) 1964). 

·    \" Dans l'organisation militaire de la République, ce sont les contingents alliés qui encadrent les citoyens et, dans le combat, prennent place aux deux extrémités de l'armée : d'où leur division en deux sections principales l'ala dextra et l'ala sinistra. \" (Dictionnaire illustré de la mythologie et des antiquités grecques et romaines (PIERRE LAVEDAN) 1964). 

·    \" Les alliés fournissant surtout de la cavalerie, le mot ala prit la signification plus générale d'unité de cavalerie, comme cohorte est l'unité d'infanterie. L'aile comprend de 400 à 500 hommes sous la République et de 500 à 1 000 sous l'Empire. Elle est toujours formée d'hommes de nationalités différentes. \" (Dictionnaire illustré de la mythologie et des antiquités grecques et romaines (PIERRE LAVEDAN) 1964). 

Remarque : Attesté dans Nouveau Larousse illustré et DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ. 

b) [Dans l'armée terrestre ou navale moderne]  Chacune des parties latérales d'une armée en marche ou en ordre de bataille : 

Ø 28. Les frégates se tiennent peu éloignées sur les ailes, tant qu'elles n'ont pas d'ordre de chasser en avant ou en arrière; ou de s'étendre sur les ailes.  

Dictionnaire de marine (JEAN-BAPTISTE PHILIBERT WILLAUMEZ)  1831. 

Ø 29. AMPHITRYON. —  Je les gagne [mes victoires] par l'enveloppement de l'aile gauche avec mon aile droite, puis par le sectionnement de leur aile droite entière par mes trois quarts d'aile gauche, puis par des glissements répétés de ce dernier quart d'aile, qui me donne la victoire.

ALCMÈNE. —  Quel beau combat d'oiseaux! Combien en as-tu gagné, aigle chéri?

AMPHITRYON. —  Une, une seule.

JEAN GIRAUDOUX, Amphitryon 38,  1929, I, 3, pages 36-37. 

Remarque : Associations fréquentes aile droite, aile gauche. Autres syntagmes enveloppement de, par l'aile, sectionnement de l'aile, mouvement des ailes, sur l'aile; déployer les ailes; trois quarts d'aile, quart d'aile. 

—   [Dans le mouvement de conversion d'une troupe]  Aile marchante. Partie la plus éloignée du pivot, celle qui décrit un arc de cercle : 

Ø 30. La 5e.  armée, à l'aile marchante, ne doit en aucun cas laisser l'ennemi saisir sa gauche; les autres armées, moins pressées dans l'exécution de leur mouvement, pourront s'arrêter, faire face à l'ennemi et saisir toute occasion favorable pour lui infliger un échec.

MARÉCHAL FERDINAND FOCH, Mémoires pour servir à l'histoire de la guerre de 1914-1918, tome 1, 1929, page 92. 

—  Par extension.  [En parlant de l'affrontement entre groupes sociaux] .  Groupe offensif doué d'une grande combativité et entraînant les autres à sa suite : 

Ø 31. Aile marchante de la Maçonnerie, qu'elle entraîne aux actions les plus ténébreuses et criminelles, (...) la Sûreté générale, dite « Nationale », commande aux préfets...

LÉON DAUDET, La Police politique,  1934, page 95. 

2. [En parlant de formations sociales, politiques] 

a) Groupement, parti de droite ou de gauche, caractérisé par rapport à un centre dit modéré : 

Ø 32. À qui se plaint que ce ne soit pas sur l'opinion centrale du pays que prenne appui le revirement national : c'est nécessairement « sur l'aile » que se fait un virage. Non point sur les ailes; mais sur une aile spécialement. Une révolution a beau se dire « nationale », elle marque toujours le triomphe d'un parti. 

ANDRÉ GIDE, Journal,  17 octobre 1941, pages 101-102. 

b) Aile droite d'une formation. Groupement des éléments dont l'orientation conservatrice est la plus forte au sein de la formation : 

Ø 33.... M. Hochegourde appartient au groupe le plus avancé de la « Fédération démocratique laïque », dont le programme a sans doute des parties excellentes, mais risquait de nous compromettre un peu vis-à-vis de l'aile droite du parti catholique, dont l'évolution est très lente et qui s'en tient prudemment à la tradition radicale-socialiste, au chauvinisme près.

GEORGES BERNANOS, L'Imposture,  1927, page 394. 

c) Aile gauche d'une formation. Groupement des éléments dont l'orientation progressiste est la plus forte au sein de la formation : 

Ø 34. Thiers, dont l'influence grandissait tous les jours, s'opposait à Gambetta qu'il traitera bientôt de « fou furieux ». Les modérés du gouvernement désavouèrent leur fougueux collègue et le « dictateur » donna sa démission. Le parti républicain allait donc aux élections divisé. Son aile gauche, la plus ardente, compromettait la république par l'idée de la guerre sans fin que rejetait le bon sens du pays.

JACQUES BAINVILLE, Histoire de France, tome 2, 1924, pages 220-221. 

3. JEUX et SPORTS.  

a) JEU D'ÉCHECS : 

Ø 35. Les Blancs cherchent à prendre l'initiative sur l'aile-dame afin de localiser le conflit sur cette partie du front...

Les Échecs, Combat, 19-20janvier 1952, page 3, colonne 5. 

b) [En parlant d'une équipe de football, de rugby, etc.]  Extrémité droite ou gauche de la ligne d'attaque, par opposition au centre. Demi-aile, trois-quarts aile. Joueur placé à cette position dans l'aile droite ou gauche de l'équipe : 

Ø 36. Personnages.

Le demi aile, capitaine de l'équipe troisième de football dans un grand club parisien, 26 ans, 1 mètre 74, 69 kilos.

L'extrême droite Jacques Peyrony, élève de philo au lycée, 17 ans, 1 mètre 71, 62 kilos.

L'arrière Beyssac, vendeur dans une maison d'articles de sport.

Le demi centre Ramondou, étudiant

Le chef jardinier du stade

et

le Feu.

HENRI DE MONTHERLANT, Les Olympiques,  1924, page 359. 

Ø 37.... le Racing jouait avec quatre trois-quarts centre, Gérald et Laurent qui opéraient aux ailes étant, en réalité, des centres.

Rugby, L'Écho des sports, 10 février 1941. 

C.—  ARTS PRATIQUES et BEAUX-ARTS.  

1. ARCHITECTURE.  

a) Partie latérale d'un bâtiment jointe au corps principal soit à angle droit, soit dans toute autre direction : 

Ø 38.... à part deux de ses gendres qui n'habitaient pas l'hôtel, tous les autres avaient là leurs appartements, dans les ailes de gauche et de droite, ouvertes sur le jardin; tandis que le bâtiment central était pris entièrement par l'installation des vastes bureaux de la banque.

ÉMILE ZOLA, L'Argent,  1891, page 94. 

Ø 39. Il continua donc d'errer en cherchant le lieu de l'embarcadère, autour de la longue maison châtelaine aux ailes inégales, comme une église. Lorsqu'il eut contourné l'aile sud, il aperçut soudain les roseaux, à perte de vue, qui formaient le paysage.

HENRI, ALBAN FOURNIER, DIT ALAIN-FOURNIER, Le Grand Meaulnes,  1913, pages 98-99. 

Ø 40. Derrière la tour et parallèlement à la vallée, un second corps de bâtiment venait former avec la façade une équerre régulière. Cette aile, bâtie dans le goût italien, à la manière des palais dont Claude Gelée aime à semer ses paysages, faisait avec la sombre façade un parfait contraste.

JULIEN GRACQ, Au château d'Argol,  1938, page 24. 

Remarque : Associations fréquentes aile droite, aile gauche. 

—  Par analogie : 

Ø 41. Mais ce qu'il fallait admirer, c'était la table. Six chandelles proprement ajustées dans des bouteilles illuminaient une nappe chargée de mets rustiques et d'ustensiles pittoresques; au milieu, un potage fumant; sur les ailes, trois ou quatre variétés d'omelettes; autour, et symétriquement disposées, des chopines d'étain remplies, les unes d'un petit muscat du Valais, les autres de l'eau du glacier.

RODOLPHE TOEPFFER, Nouvelles genevoises,  1839, page 412. 

Ø 42. Il me fallait quelquefois rôder dans toute une aile de Paris...  

JULES VALLÈS, Le Réfractaire,  1865, page 48. 

b) \" Les Grecs donnaient le nom de Petitera (ailes) aux rangées latérales de colonnes isolées qui régnaient le long des murs d'un temple en dedans ou en dehors. Le mot latin ala, qui a la même signification, désignait une partie de la maison romaine (...). Nous appelons quelquefois ailes les bas-côtés de nos églises. \" (Dictionnaire des termes employés dans la construction (PIERRE CHABAT) tome 1 1875). 

Remarque : Selon Dictionnaire de l'Académie Française 1835, 1878, DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ) et Dictionnaire de l'Académie Française tome 1 1932, les anciens appelaient ailes d'un temple, les murs latéraux avec ou sans péristyle : 

Ø 43. Rappelez-vous un moment les vieux monastères ou les cathédrales gothiques, telles qu'elles existoient autrefois; parcourez ces ailes du choeur, ces chapelles, ces nefs obscures, ces cloîtres pavés par la mort, ces doubles sanctuaires remplis de sépulcres.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Le Génie du christianisme, tome 2, 1803, page 346. 

Ø 44. Le portique de l'église Saint-Pierre consistait en trois galeries, l'une appliquée à la face antérieure du bâtiment, et les deux autres formant de chaque côté des ailes saillantes en guise de fer à cheval. 

AUGUSTIN THIERRY, Récits des temps mérovingiens, tome 2, 1840, pages 138-139. 

c) [Dans un théâtre]  De chaque côté de la scène, espace où s'opèrent les mouvements des décors, où circulent les gens de service et où se tiennent les acteurs avant d'entrer en scène : 

Ø 45. On va les [les comédiens] visiter dans leurs loges. « Durant la Comédie, ils observent un grand silence pour ne pas troubler l'acteur qui parle, et se tiennent modestement sur des sièges aux ailes du théâtre pour entrer juste. En quoi ils peuvent se régler sur un papier attaché à la toile, qui marque les entrées et les sorties ». Les Parisiens, vers ce temps-là, ont le choix entre une quinzaine de spectacles par semaine, près de huit cents dans la saison.

ROBERT BRASILLACH, Pierre Corneille,  1938, pages 364-365. 

d) Terme de fortification  \" Sorte de défense formant la partie extrême d'une contre-queue, ou l'extrémité d'un ouvrage à corne, à couronne, à tenaille, etc. L'aile est une défense composée, soit d'une, soit de deux branches (généralement Bard.). \" (Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845); (également attesté dans le Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842, Dictionnaire de la langue française (ÉMILE LITTRÉ), Nouveau Larousse illustré et Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

2. ART CULINAIRE.  \" Partie de la lardoire où se met le lardon pour piquer la viande. \" (Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845); (attesté d'autre part dans le Dictionnaire de l'Académie Française 1878, Nouveau Larousse illustré et Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

3. ARTS GRAPHIQUES.  Ailes(-)de(-)moulin (ou aile de moulin). \" Imposition pour certaines formes d'impression destinées à être mises en retiration sur elles-mêmes et où les pages sont disposées à la façon des ailes de moulin. Après le premier passage, la feuille de papier est pivotée \" d'un demi-tour en son centre pour la retiration dite en ailes de moulin. Ce mode d'imposition est utilisé pour les impressions de modèles en deux couleurs ou pour la réglure des tableaux. \" (Lexique des industries graphiques (RENÉ COMTE, ANDRÉ PERNIN)1963) : 

Ø 46. Lorsqu'on a à imprimer en double un modèle dont le verso doit être blanc ainsi que le feuillet qui l'accompagne, l'imposition se fait en aile de moulin. 

ÉMILE LECLERC, Nouveau manuel complet de typographie,  1897, page 344. 

4. CHORÉGRAPHIE.  Battre, faire des ailes de pigeon. S'élever et exécuter un saut en imitant avec les jambes le battement d'ailes des oiseaux. (Attesté dans Nouveau Larousse illustré, Larousse du xxe.   siècle en six volumes et DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT)) : 

Ø 47.... Leclair, qui avait appris le violon dans sa jeunesse fut d'abord danseur au théâtre de Rouen, puis maître de ballet à Turin. C'est alors qu'il composa quelques airs de danse que l'on trouva charmants, et qu'il abandonna les entrechats et les ailes de pigeon pour se livrer sérieusement à l'étude du violon.

LAURENT GRILLET, Les Ancêtres du violon, tome 2, 1901, page 125. 

5. MODES.  

a) Bord latéral d'un chapeau : 

Ø 48.... les enseignes rutilantes [des hôtels] détonnaient comme l'habit noir et les escarpins d'un maître d'hôtel au milieu des coiffes savoyardes, des vestes de futaine, des feutres de charbonniers à larges ailes.

ALPHONSE DAUDET, Tartarin sur les Alpes,  1885, page 233. 

b) Partie saillante et rigide de quelques coiffures, dont la forme rappelle une aile d'oiseau : 

Ø 49.... il n'y passait pas grand monde [dans la rue] , de temps à autre (...) le collet brodé d'un élève, deux bonnes soeurs en cornettes à ailes...

ALPHONSE DAUDET, L'Évangéliste,  1883, page 32. 

c) Longue et large bande de tissu souple qui orne certaines coiffes et se déploie librement : 

Ø 50. Puis il s'engagea dans une route bordée de haies vives, le long desquelles passaient des femmes de Dinard, droites sous leur large coiffe de batiste aux ailes flottantes. 

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Lys rouge,  1894, page 313. 

d) Fantaisie de plumes : 

Ø 51. Pour parler de façon générale, beaucoup de jais ainsi que d'acier bleui doit orner les chapeaux : j'ai vu des plumes de coq avec paillettes de jais ou d'acier bleui et des feuillages entiers de l'un et de l'autre, enfin des ailes de fantaisie mi-plume et mi-jais et des broderies splendides sur tulle, ces dernières d'un prix relativement très-élevé. Quantité de jolies soies pour garnitures, une entre autres dont j'ignore encore le nom...

STÉPHANE MALLARMÉ, La Dernière mode,  1874, page 728. 

e) Ailes de moulin. \" Les chapeaux de nos dames, ceux au moins qu'elles portent en négligé, sont surmontés de grands noeuds que les modistes appellent ailes de moulin, et qui méritent ce nom par leur forme et leur disposition en croix. \" (L'Observateur des modes, 31 mai 1823, page 240). 

f) Ailes de pigeon (...) \" Genre de frisure en usage au xviiie.  siècle et dans la première partie du XIXe.  siècle pour la coiffure masculine, les boucles s'écartant de la tête au-dessus des oreilles et figurant un battement d'ailes. \" (Dictionnaire du costume et de ses accessoires, des rames et des étoffes des origines à nos jours (MAURICE LELOIR) 1961) : 

Ø 52. L'usage de la poudre amena, dans la coiffure des hommes et des femmes, des changemens innombrables. (...) Pendant que les hommes imaginaient les coiffures en fer à cheval, en aile de pigeon, à mille boucles, à la cavalière, les femmes renchérissaient sur un ridicule dont elles voulaient se conserver le privilège.

VICTOR-JOSEPH ÉTIENNE, DIT DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, tome 4, 1813, pages 276-277. 

g) Ailes de moulins. \" XVIIe.  siècle manchettes de dentelles attachées aux manches du pourpoint. \" (Dictionnaire général de la langue française (ADOLPHE HATZFELD, ARSÈNE DARMESTETER), attestation unique). 

6. MUSIQUE.  Aile ou èle. \" Instrument cité par Guillaume de Machaut, qui appartient à la famille des cithares et ressemble à un psaltérion, tendu de cordes verticales, dont tout ou partie affecte la forme d'une aile. \" (La Musique (SOUS LA DIRECTION DE NORBERT DUFOURCQ) tome 1 1965, au mot èle, page 361). 

Remarque : On lit dans GASTOUÉ, Primitifs de la musique française, 1922, page 106 :  \" Le frestel (...) pourrait avoir été une espèce de chalumeau (...) on trouve dans la même acception le mot aile ou èle pour désigner de semblables instruments ... \" 

D.—  TECHNOLOGIES DIVERSES.  

1. AÉRONAUTIQUE.  Organe d'élévation, de support, de propulsion, d'un appareil volant. 

—  En particulier, moderne.  Chacune des surfaces planes fixées de part et d'autre du corps d'un avion et qui assurent son maintien en équilibre : 

Ø 53. De là, pour l'aéronaute, nécessité d'incliner le gouvernail horizontal, la queue de l'oiseau mécanique et les bonnettes latérales, ses ailes planeuses, de manière à ne point sombrer...

GABRIEL DE LA LANDELLE, Éléments d'aviation,  1863, page 223 (LOUIS GUILBERT La formation du vocabulaire de l'aviation 1965 ). 

Ø 54. Il semble que le travail des ingénieurs, des dessinateurs, des calculateurs de bureau d'études ne soit ainsi, en apparence, que de polir et d'effacer, d'alléger ce raccord, d'équilibrer cette aile, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus une aile accrochée à un fuselage, mais une forme parfaitement épanouie, enfin dégagée de sa gangue, une sorte d'ensemble spontané, mystérieusement lié, et de la même qualité que celle du poème. Il semble que la perfection soit atteinte non quand il n'y a plus rien à ajouter, mais quand il n'y a plus rien à retrancher.

ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Terre des hommes,  1939, pages 169-170. 

—  Par métonymie. Les Ailes. Les avions et les aviateurs. Les Ailes françaises (Dictionnaire encyclopédique Quillet 1965, attestation unique). 

Remarque : Certaines locutions, employées proprement pour les oiseaux, sont reprises dans le domaine de l'aviation : 

Ø 55. Voilà qui intéresse singulièrement Jacques L'Aumône, car il est lui-même ingénieur et travaille à plusieurs inventions sensationnelles. (...). Il phosphore, il rupine à bloc et un jour brraoumm il eurêkate ça y est il a trouvé. Il a trouvé quoi? Mais tout simplement le plus lourd que l'air. Le premier il traverse la Manche, le premier il assure la liaison Paris-New-York, le premier il fait le tour du globe d'un seul coup d'aile.

RAYMOND QUENEAU, Loin de Rueil,  1944, pages 45-46. 

Ø 56.... Et, cette nuit j'entendais le ronron des avions alliés qui repassaient très haut dans le ciel, retour de leur mission de destruction. Ils n'en finissaient pas. Il devait y en avoir beaucoup. Je ne sais pourquoi Aix était leur centre de ralliement, où ils tournaient longtemps en rond avant d'aller rejoindre leurs bases à tire-d'aile, en Afrique du Nord, en Sicile et peut-être déjà en Italie méridionale ou en Corse.

BLAISE CENDRARS, Bourlinguer,  1948, page 298. 

Ø 57. Une centaine d'avions déploieront leurs ailes dans le ciel de la péninsule.

CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, Le Salut, 1959, page 228. 

2. AGRICULTURE.  Partie latérale d'un soc de charrue : 

Ø 58.... la pointe dite « carrée fixe » est constituée par un épaississement à section carrée de l'extrémité de l'aile du soc.  

TONY BALLU, Machines agricoles,  1933, page 51. 

3. ARMES et ARMURERIE.  

a) \" Évasement en forme d'éventail des parties extérieures des genouillères et des cubitières d'armure. \" (Dictionnaire du costume et de ses accessoires, des rames et des étoffes des origines à nos jours (MAURICE LELOIR) 1961); (attesté dans Nouveau dictionnaire illustré et Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

b) \" Ce mot est encore appliqué aux expansions saillantes de certaines armes, lances, bourdonnasses, masses d'armes, etc. \" (Nouveau Larousse illustré; attesté d'autre part dans le Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842 et Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

c) \" substantif féminin pluriel. Terme de chevalerie. Plaques oblongues ou carrées, représentant les armoiries de l'écu du chevalier et attachées sur chaque omoplate de la cotte de mailles ou de la cuirasse en fer plain. \" (Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, seule attestation). 

4. ARTS ET MÉTIERS.  

a) \" Le tourneur appelle ailes des pièces de bois plates et triangulaires qu'on attache transversalement à l'une des poupées du tour, afin de pouvoir tourner des cadres ronds. \" (Dictionnaire de technologie (DE CHESNEL) 1857); (attesté dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Nouveau Larousse illustré-Larousse trois volumes en couleurs). 

b) \" Bande de plomb servant à maintenir les losanges de verre dans les panneaux des vitraux. \" (Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

5. AUTOMATIQUE.  Partie de la carrosserie qui recouvre les roues et fait office de garde-boue. Aile(s) avant, arrière, aile(s) droite(s), gauche(s) : 

Ø 59. Champcenais, presque malgré lui, passait le bras par la fenêtre de la voiture pour toucher l'épaule du chauffeur et l'obliger à faire attention. Il imaginait l'aile de l'auto cognant un homme, le renversant; et aussitôt un resserrement de la foule sur la voiture, un grondement, des cris, l'auto poussée de côté vers le fleuve, basculée dans l'eau avec ce qu'elle contenait.

LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, Le 6 octobre 1932, pages 169-170. 

·    Prendre un virage sur l'aile. Prendre un virage à vive allure. 

6. BÂTIMENT.  

a) Ailes de cheminée. \" Les parties du mur dossier élevées de chaque côté d'une souche de cheminée, soit d'aplomb, soit en pente pour lui donner plus de force. \" (Dictionnaire des termes employés dans la construction (PIERRE CHABAT) tome 1 1875); (attesté dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845). 

b) Aile d'une cornière, d'un fer profilé (Larousse du XXe.  siècle en six volumes). \" Partie constitutive du fer, aux extrémités de l'âme qui est la partie moyenne. \" (Larousse du XXe.  siècle en six volumes); ( attesté également dans Larousse trois volumes en couleurs) : 

Ø 60. Pour [les chapeaux de chevalement] (...) qui comprennent des cales ou une âme en bois, les prix [de la série] comprennent les entailles et arrondis des ailes des fers. 

E. ROBINOT, Vérification, métré et pratique des travaux du bâtiment, tome 2, 1928, page 33. 

c)  (...) les ailes d'une fiche (Dictionnaire de technologie (DE CHESNEL) 1857), \" sont [en serrurerie] de petits morceaux de fer à charnières qui soutiennent et font mouvoir des portes, des fenêtres et des volets brisés \" (Dictionnaire de technologie (DE CHESNEL) 1857); (attesté dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, DICTIONNAIRE DES TERMES EMPLOYÉS DANS LA CONSTRUCTION  (PIERRE CHABAT) tome 1 1875 et Nouveau Larousse illustré). 

d) Ailes de lucarne (Larousse du XXe.  siècle en six volumes), \" [en maçonnerie] parties qui reposent sur les chevrons. \" (Larousse du XXe.  siècle en six volumes); (attesté d'autre part dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, DICTIONNAIRE DES TERMES EMPLOYÉS DANS LA CONSTRUCTION  (PIERRE CHABAT) tome 1 1875 et Nouveau Larousse illustré). 

e) Ailes de mouche (Dictionnaire des termes employés dans la construction (PIERRE CHABAT) tome 1 1875) :  \" 1o mouvements de sonnette en forme de branche de bascule (...); 2o les ancres des têtes de cheminée en brique; 3o espèces de scellements très-fendus. \" (Dictionnaire des termes employés dans la construction (PIERRE CHABAT) tome 1 1875). 

Remarque : Selon DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, l'expression ailes de mouche désigne des \" clous qui servent à attacher une latte, Petites tiges en fer que l'on pose dans le pigeonnage des tuyaux de cheminées pour les consolider. \" 

f) Aile de poutre. \" Renforcement d'équerre aux deux extrémités de l'âme de la poutre. \" (Dictionnaire technique du bâtiment et des travaux publics (MAURICE BARBIER, ROGER CADIERGUES) 1963) : 

Ø 61. [pour un pont roulant] (...) il faut (...) fixer des bandes de cuivre isolées sous les ailes des poutrelles... 

RENÉ CHAMPLY, Nouvelle encyclopédie pratique, tome 4, 1927, page 35. 

g) \" Charpentes formant cintre, qui soutiennent la partie postérieure d'une toiture et l'unissent à la flèche. \" (Larousse du XXe.  siècle en six volumes; attesté d'autre part dans Nouveau Larousse illustré). 

7. CORDERIE.  \" Les ailes du touret sont de petites planches qu'on place en croix pour retenir le fil sur le touret presque rempli. \" (Dictionnaire de technologie (DE CHESNEL) 1857). 

8. FILATURE.  \" Instrument employé au dévidage de la laine, du coton ou du fil. \" (Nouveau Larousse illustré);  attesté d'autre part dans DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ. 

9. HORLOGERIE.  \"... on donne le nom d'aile à la dent de la pièce appelée pignon... \" (Dictionnaire de technologie (DE CHESNEL) 1857). 

10. MARINE.  

a) Aile de l'archipompe. \" Nom donné à l'espace qui sépare chacun des côtés de l'archipompe de la muraille du navire. \" (Nouveau glossaire nautique (AUGUSTIN JAL)); (attesté dans Nouveau Larousse illustré). 

b) Aile de dérive. \" La semelle ou Aile de Dérive, ou simplement Dérive, est fixée par une cheville à la préceinte du navire qui la porte. Elle tourne autour de cette cheville (...) lorsqu'elle est à l'eau, elle s'enfonce profondément, et offre sous le vent —  car c'est naturellement de ce côté que doit être la semelle —  un grand moyen de résistance au navire, et par conséquent diminue beaucoup la dérive qu'il y aurait dans les routes autres que celle du vent arrière. Il y a une semelle à tribord et une autre à bâbord. On n'applique ces Ailes de dérive qu'aux bâtiments à fonds plats. C'est surtout en Hollande qu'on se sert de cet auxiliaire pour la navigation au plus près. \" (Glossaire nautique (AUGUSTIN JAL) 1848, au mot semelle);  (attesté dans Nouveau Larousse illustré, Larousse du xxe.  siècle en six volumes, Larousse trois volumes en couleurs et DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965). 

c) Aile de passerelle. \" Plate-forme latérale, prolongeant la passerelle vers l'extérieur. \" (Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, attestation isolée). 

d) Aile de pigeon. \" Nom d'une petite voile triangulaire qu'on grée à l'extrémité supérieure des mâts; elle remplace quelquefois le Papillon, qui est une petite voile carrée. \" (Nouveau glossaire nautique (AUGUSTIN JAL)); (attesté dans Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842, Nouveau Larousse illustré, Larousse du xxe.   siècle en six volumes et DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965). 

e) Aile de la cale. \" La partie de la cale la plus éloignée du plan vertical passant par la quille. Elle suit le contour intérieur de la carène, de chaque côté du navire. Les portions du chargement ou de l'arrimage qui sont le long du bord dans la cale sont aux ailes de la cale. \" (Nouveau glossaire nautique (AUGUSTIN JAL)); (attesté dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Nouveau Larousse illustré, Larousse du xxe.   siècle en six volumes et DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965). 

Remarque : Selon PETIT DICTIONNAIRE DE MARINE  (ROBERT GRUSS) 1952 et DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965, aile se dit aussi du côté d'un entrepont. 

f) \" Yacht de régate de 7,10 mètres \" (Dictionnaire encyclopédique Quillet, 1965, attestation unique). 

11. MÉCANIQUE.   [Dans un certain nombre de mécanismes]  Parties planes et larges disposées symétriquement autour d'un axe central. 

a) Chaque pale, chaque branche de l'hélice d'un navire, d'un avion ou de mécanismes tels que les propulseurs ou les turbines : 

Ø 62. Lorsque le propulseur (...) possède plusieurs ailes ou branches, chacune est formée (...) par (...) des surfaces hélicoïdes distinctes dont les génératrices sont disposées symétriquement autour de l'axe. 

LOUIS MARCHIS, Leçons sur la navigation aérienne,  1904, pages 609-610. 

Ø 63. L'arbre de l'hélice, vissant dans l'onde inerte ses quatre ailes frémissantes, ébranlait toute cette grande nef d'une rumeur perpétuelle, mais plus sourde encore.

PIERRE MILLE, Barnavaux et quelques femmes...,  1908, page 252. 

b) Chaque pale, rayon ou châssis de la roue d'un moulin à vent ou à eau, des roues de soufflants... : 

Ø 64. Le poisson, comme je l'ai dit, se gouverne avec ses nageoires, et il rame avec sa queue, à laquelle il donne un mouvement d'ondulation qui le porte en avant; ce mouvement se décompose dans l'eau, comme celui du vent sur les plans inclinés du cerf-volant qu'il élève en l'air, et des ailes du moulin à vent qu'il fait tourner. Peut-être réussirait-on à employer le cours d'une rivière pour faire tourner une roue à pales obliques, plongée dans l'eau perpendiculairement à son courant : il y a apparence qu'il la ferait circuler, comme le cours de l'air fait tourner les ailes inclinées du moulin à vent;...

JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature,  1814, page 192. 

Remarque : Le syntagme aile de moulin, utilisé ici dans son sens propre, est repris figurément dans d'autres techniques. 

12. PÊCHE.  Ailes de filet de pêche (Traité général des Eaux et Forêts - Chasses et pêches (JACQUES-JOSEPH BAUDRILLART) 1827). \" Ce sont des bandes de filet qu'on ajoute aux côtés des filets en manche. \" (Traité général des Eaux et Forêts - Chasses et pêches (JACQUES-JOSEPH BAUDRILLART) 1827). 

13. PONTS ET CHAUSSÉES.  

a) Ailes d'une chaussée.  \" les deux côtés en pente d'une chaussée, séparés par la rangée de pavés du milieu qu'on appelle tas. \" (Dictionnaire des termes employés dans la construction (PIERRE CHABAT) tome 1 1875). 

Remarque : Attesté dans le Dictionnaire universel de la langue française (Louis-Nicolas Bescherelle) 1845, Nouveau Larousse illustré, Larousse du XXe.  siècle en six volumes et Larousse trois volumes en couleurs où l'on trouve : \" aile de pavé ou de chaussée \". Dictionnaire de technologie (de Chesnel) 1857 donne également : \" ailes de pavé \". 

b) Aile(s) de pont. \" Mur soutenant les berges d'une rivière ou d'un fleuve pour protéger les culées d'un pont contre le courant de l'eau, le choc des péniches ou de tout corps flottant ou entraîné. \" (Dictionnaire technique du bâtiment et des travaux publics (MAURICE BARBIER, ROGER CADIERGUES) 1963); attesté dans Larousse trois volumes en couleurs et Petit DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT)).  \" Par ailes de pont, on désigne l'élargissement pratiqué sur les culées, pour faciliter les abords du pont. \" (Dictionnaire de technologie (DE CHESNEL) 1857); (attesté dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Nouveau Larousse illustré, Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, Arsène Darmesteter), Larousse du xxe.  siècle en six volumes, Dictionnaire de l'Académie Française tome 1 1932 et DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT) 

Remarque : Noter que la même expression désigne 2 choses sensiblement différentes. 

c) Mur en aile. \" Aile (mur en) : mur de soutènement prolongeant le nu d'une culée avec jonction continue et non anguleuse. \" (Dictionnaire technique du bâtiment et des travaux publics (MAURICE BARBIER, ROGER CADIERGUES) 1963) : 

Ø 65.... il faut raccorder les culées avec ce dernier [le remblai] . On peut le faire, soit au moyen de murs en retour, soit au moyen de murs en aile.

CHARLES BRICKA, Cours de chemin de fer,  1894, pages 140-141. 

III.—  Emplois métaphoriques plus ou moins usuels, plus ou moins familier ou argot. 

A.—  Argotique ou populaire. 

1. Aile. Bras : 

Ø 66. —  Mademoiselle, voulez-vous accepter mon aile. (...)

—  Prends mon aile, s'y te touche, je le crève.

CHARLES VIRMAÎTRE, Dictionnaire d'argot fin-de-siècle,  1894, page 6. 

2. Voleuse à l'aile : 

Ø 67. [Une femme, feignant de se tromper, prend votre bras par derrière.] Votre compagne est une voleuse à l'aile (l'aile ou l'aileron, c'est le bras du pante)!

HOGIER-GRISON  (PSEUDONYME COLLECTIF), Les Hommes de proie, Le Monde où l'on vole, 1887, page 282. 

3. Avoir un coup dans l'aile. Être ivre. 

4. Aile de pigeon. \" Vieux camarade. \" (Charles-Louis Carabelli, [Langue populaire] ). 

B.—  Locutions diverses plus ou moins usuelles ou familières. 

1. Locution  où l'aile est symbole de mouvement, d'élan, de rapidité, d'épanouissement, de réussite, de vie. 

a) [En parlant d'une personne]  Avoir des ailes. Se mouvoir avec facilité, être leste, rapide : 

Ø 68.... Séphora court à la fenêtre juste à temps pour voir Christian II franchir le perron d'un air vainqueur. Il plane, il a des ailes.

ALPHONSE DAUDET, Les Rois en exil,  1879, page 426. 

b) [Le complément d'attribution est une personne, un animal]  Donner des ailes à. Faire courir rapidement : 

Ø 69. Dans ce moment, un char paroît à l'extrémité de la plaine. Penchée sur les coursiers, une femme échevelée excite leur ardeur, et semble vouloir leur donner des ailes.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Martyrs ou le Triomphe de la religion chrétienne, tome 2, 1810, page 104. 

·    La peur donne des ailes : 

Ø 70. Tiens, Berniquet, qui se sent voué à la prison, a choisi le couvent : il se fait novice! Pour voler vers Dieu, la peur donne des ailes.

HENRI DE MONTHERLANT, Demain il fera jour,  1949, I, 2, page 712. 

c) [En parlant d'une personne, d'une collectivité]  Voler de ses propres ailes. Agir sans le secours, sans la protection d'autrui : 

Ø 71. Et si cela pouvait être, cet homme que nous n'aurions tenu qu'à l'aimable état de chrysalide, pour voler de ses propres ailes, il lui eût fallu sortir du cocon de sa pensée?

ANDRÉ BRETON, Les Manifestes du Surréalisme,  1930, page 121. 

—  Rare.  [En parlant d'une chose] :

Ø 72. Lorsque l'oeil, se confiant à ses premières habitudes, aux leçons qu'il a reçues du tact, commence à voler de ses propres ailes, et va saisir la couleur à l'extrémité des rayons où la main avait déjà rencontré la résistance, cette impression simple et isolée de couleur suffit pour effectuer dans le centre cérébral la détermination ou l'idée de résistance, associée par une constante répétition;...

MARIE-FRANÇOISE-PIERRE GONCTHIER DE BIRAN, DIT MAINE DE BIRAN, De l'Influence de l'habitude sur la faculté de penser,  1803, page 75. 

2. Locution  où aile a la même valeur, mais qui suggèrent par ailleurs une idée d'empêchement, d'obstacle. 

—   [En parlant d'une personne, d'une entreprise, d'une idée]  Avoir du plomb dans l'aile. Être sérieusement touché : 

Ø 73. Mardi 30 août. Gambetta a décidément du plomb dans l'aile et les popularités ne se refont pas plus que les virginités.

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  août 1881, page 126. 

Ø 74. Un équilibre, dans la paix, est-il seulement concevable, avec les éléments actuels? L'idéal démocratique a du plomb dans l'aile.

ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, page 898. 

—  En avoir dans l'aile. [En parlant d'une personne]  Être malade, subir un revers, un échec; être amoureux : 

Ø 75. Voici mon frère, dit-il à l'amazone... Traitez doucement le pauvre garçon; il en a dans l'aile depuis un certain jour qu'il vous a vue au Louvre.

PROSPER MÉRIMÉE, Chronique du règne de Charles IX,  1829, page 98. 

·    Par extension : 

Ø 76. Enfin, cette chère Commission en a dans l'aile.

Le Figaro.  3 juillet 1888 (L. LARCHEY, Dictionnaire historique d'argot, Nouvaau supplément, 1889, page 4 ). 

—  En donner dans l'aile. Rendre amoureux : 

Ø 77. C'est une magicienne, aimable petit Brettinoro; une ensorceleuse, une Circé, une Manto, que la charmante qui m'en a donné dans l'aile. Elle laisse reposer sur mon visage son regard de Cynthie égarée au royaume des Ondines, et voilà ma gueuse d'âme qui me quitte, qui s'en va, qui s'enfuit je ne sais où, telle une somnambule.

OSCAR VLADISLAS DE LUBICZ-MILOSZ, L'Amoureuse initiation,  1910, page 44. 

—  Baisser l'aile. Être triste, fatigué, découragé. 

—  Battre des ailes, de l'aile. Chercher à s'élancer, à s'élever, à se réaliser sans y parvenir : 

Ø 78. Et de même que sous ses doigts [de Désirée] les petits oiseaux morts retrouvaient un semblant de vie, ses illusions, ses espérances mortes elles aussi (...) battaient encore des ailes de temps en temps avec un effort mêlé d'angoisse et l'élan d'une résurrection.

ALPHONSE DAUDET, Fromont jeune et Risler aîné,  1874, page 239. 

·    Battre de l'aile. Être en difficulté : 

Ø 79.... son personnel [de Ferry] (...) haïssait Clemenceau, lui prêtait les pires noirceurs et, pour son journal qui battait de l'aile, des combinaisons malpropres.

LÉON DAUDET, La Vie orageuse de Clemenceau,  1942, page 56. 

·    Ne battre que d'une aile. Avoir perdu de sa vigueur, de son crédit, de sa prospérité : 

Ø 80. À partir de ce moment, la fabrique ne battit plus que d'une aile; petit à petit les ateliers se vidèrent, chaque semaine un métier à bas, chaque mois une table d'impression de moins. 

ALPHONSE DAUDET, Le Petit Chose,  1868, page 10. 

Ø 81. Alors, un beau jour, on entend dire : —  Vous savez... Gontran; je viens de le revoir. Il est fichu.

Depuis huit jours, il ne battait plus que d'une aile. Il répétait : « Je sens, je sens que je m'en vais. » Pourtant on espérait encore. Mais c'en est fait.

ANDRÉ GIDE, Les Nouvelles Nourritures,  1935, page 294. 

—  Arracher, brûler, casser, couper, rogner les ailes. 

·    Arracher, brûler, casser, couper, rogner les ailes à quelqu'un. Lui retrancher de ses richesses, de son autorité, de son pouvoir, de son assurance. 

·    Arracher, brûler, casser, couper, rogner les ailes à quelque chose Lui ôter tout pouvoir, tout élan : 

Ø 82. Mais les échevins sont là; ils rognent les ailes au génie sous prétexte d'alignement.

LOUIS REYBAUD, Jérôme Paturot à la recherche d'une position sociale,  1842, page 243. 

Ø 83. Ne craindra-t-il pas, s'il ne casse les ailes à ses idées, d'épouvanter les éditeurs prudents, les journaux timides?

JULES VALLÈS, Le Réfractaire,  1865, page 23. 

Ø 84. Notre âme a peur... peur de banni!

Elle recule devant la mort et plus encore devant la vie. Elle redoute tout ce qui lui ôte l'espérance, tout ce qui la limite, l'emprisonne et l'étouffe, tout ce qui lui coupe les ailes. Or la vie détruit tous ses rêves et la mort lui fait regretter la vie.

HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal intime,  10 avril 1866, page 236. 

—  S'arracher, se brûler, se casser les ailes, griller ses ailes : 

Ø 85. —  (...) Elles s'inclinent devant Dieu comme des herbes qu'un vent presse, sans malice, sans trouble, sans beauté. Elles se tiennent pour peu remarquables et savent qu'elles ne doivent quelque valeur qu'à leur effacement devant Dieu.

—  Alissa! m'écriai-je, pourquoi t'arraches-tu les ailes?

ANDRÉ GIDE, La Porte étroite,  1909, page 570. 

Ø 86. Je suis sûre que sous votre gravité de jeune quakeresse, vous êtes toute prête à vous brûler les ailes comme un petit insecte éphémère, à la première bougie venue...

JEAN ANOUILH, La Répétition ou l'Amour puni,  1950, III, page 87. 

—  Gagner de l'aile : 

Ø 87. Le fait est que Chambre, Sénat, ministres gagnent de l'aile et laissent bravement à la Cour de Cassation le soin de nous tirer d'affaire. Messieurs Dupuy et Freycinet ont les pouvoirs nécessaires, mais n'en veulent pas user. La Cour de Cassation n'a qu'un devoir douteux : à elle d'en faire usage pour sauver d'embarras les députés qui n'osent prendre un parti, les ministres qui n'osent agir.

GEORGES CLEMENCEAU, Vers la réparation,  1899, page 501. 

—  Laisser une aile, ses ailes. Être diminué : 

Ø 88. Les idéalistes comme nous doivent n'approcher de ce feu-là qu'avec beaucoup de précautions. Nous y laisserions presque toujours notre tête ou nos ailes.

ERNEST RENAN, Souvenirs d'enfance et de jeunesse,  1883, page 194. 

Ø 89.... je veux que dans huit jours le Paris-Bonheur révolutionne la place (...) la lisière bleu et argent sera connue d'un bout de la France à l'autre... Et vous entendrez la plainte furieuse de nos concurrents. Le petit commerce y laissera encore une aile.

ÉMILE ZOLA, Au Bonheur des dames,  1883, page 47. 

—  Traîner l'aile. Être en difficulté : 

Ø 90. Tante Alix était bien. Eugène traînait l'aile.

HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal intime,  23 septembre 1866, page 463. 

—  Vouloir voler sans avoir d'ailes, avant d'avoir des ailes; n'avoir pas l'aile assez forte. Entreprendre une chose au-dessus de ses forces. 

3. Locution  dans lesquelles l'aile est symbole de protection. 

—  Être sous l'aile de, s'abriter sous l'aile de, vivre sous l'aile de : 

Ø 91. Ce nouvel état, de vivre sous l'aile de sa mère, défrayé de tout, et dans une insouciance de petit garçon, fut de son goût. Il ne demanda qu'à le conserver. Il le conserva vingt ans.

HENRI DE MONTHERLANT, Les Célibataires,  1934, page 758. 

—  Prendre sous son aile, couver de ses ailes, couvrir de ses ailes, garder sous ses ailes, mettre sous son aile : 

Ø 92. Voilà encore un ennui qui va vous arriver; car je m'adresserai encore à vous pour mille soins fraternels et paternels; vous avez pris les Contemplations sous une de vos ailes; voudrez-vous prendre les Petites épopées sous l'autre?

VICTOR HUGO, Correspondance,  1857, page 276. 

4. Locution  dans lesquelles l'aile —  que l'on enlève —  représente un profit. 

—  Vieux. Tirer pied ou aile de (ou à) quelque chose, de quelqu'un, rapporter ou emporter pied ou aile de quelque chose En tirer ou en rapporter quelque avantage : 

Ø 93. Chacun se lance; non : à la cour, on se glisse, on s'insinue, on se pousse. Il n'est fils de bonne mère qui n'abandonne tout pour être présenté, faire sa révérence avec l'espoir fondé, si elle est agréée, d'emporter pied ou aile, comme on dit, du budget, et d'avoir part aux grâces.

PAUL-LOUIS COURIER, Pamphlets politiques, Lettres au rédacteur du \"Censeur\", 1819-1820, page 33. 

Ø 94.... cette grande dame vient me demander quelque chose qui dépend de moi uniquement (...); j'ai toujours pensé que l'arrivée de ce neveu m'en ferait tirer pied ou aile.

HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, La Chartreuse de Parme,  1839, page 230. 

Ø 95. J'ai appris à Fontainebleau qu'il y avait à Londres une serre admirable... Si je l'avais su plus tôt, j'aurais essayé de vous en rapporter pied ou aile.

PROSPER MÉRIMÉE, Lettres à Madame de la Rochejacquelein, 1870, page 159. 

—  Tirer une plume de l'aile à quelqu'un, arracher une plume à l'aile de quelqu'un. Lui extorquer quelque chose : 

Ø 96.... ça faisait vingt-cinq mille. Une affaire superbe! De toutes les façons, Muffat la [Rose Mignon] lâchait; c'était un joli tour de force [pour son mari] d'avoir tiré cette dernière plume de son aile.

ÉMILE ZOLA, Nana,  1880, page 1344. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 6 432. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 9 961, b) 13 098; XXe.  siècle : a) 8 234, b) 6 883. 

 

Forme dérivée du verbe \"ailer\"

 ailer

AILER, verbe transitif.  

1. Néologisme, au figuré, rare.  Donner des ailes : 

Ø 1. J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades

Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.

—  Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades

Et d'ineffables vents m'ont ailé par instants.

ARTHUR RIMBAUD, Poésies, Le Bateau ivre, 1871, page 130. 

Ø 2. Auprès de ces tristesses désenchantées, de quel rayonnement se nimbait le beau visage de mon amie! Le voeu que j'avais fait de lui donner tout l'amour de ma vie ailait mon coeur où foisonnait la joie; d'indistinctes ambitions déjà tout au fond de moi s'agitaient, mille velléités confuses; chants, rires, danses et bondissantes harmonies formaient cortège à mon amour...

ANDRÉ GIDE, Si le grain ne meurt,  1924, page 453. 

2. [Plus fréquemment à la voix passive, dans les constructions ailé par et ailé de]  Comme muni d'ailes. 

a) [Ce qui aile est une chose concrète] :

Ø 3.... Hemerlingue, poursuivant sa pensée, montra le monument ailé des quatre cours par les draperies, les mains tendues de ses sculptures...

ALPHONSE DAUDET, Le Nabab,  1877, page 121. 

Ø 4. Un bai-cerise, au crâne d'engoulevent, vaste bête ailée de crins bleus, mordit [pendant cette charge au galop] son cheval de file.

GEORGES D'ESPARBÈS, La Guerre en sabots,  1914, page 127. 

Ø 5. Certains petits supplices volontaires, entre l'oreille et l'épaule (...) amendaient les tourments qu'enduraient la même région et le misérable petit dos, ailé d'omoplates saillantes...

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Gigi,  1944, page 117. 

b) Au figuré.  [Ce qui aile est une entité abstraite] :

Ø 6. Croyez-moi, la sagesse est une chose vaine;

C'est le mal d'un autre âge, et plus tard vous l'aurez!

Mais maintenant, jeune homme, oh! sans attendre, ouvrez,

Ouvrez à vos désirs ailés d'impatience

Les portes de la vie où de vivre on commence;...

HENRI MURGER, Les Nuits d'hiver, À un adolescent, 1861, page 157. 

Ø 7.... comme ailé par le rêve, il [A. Daudet] partait vers un de ces mirages qui faisaient de la moindre causerie un perpétuel enchantement.

LÉON DAUDET, Alphonse Daudet,  1898, page 30. 

Ø 8. Je marchais à grands pas, tout ailé par l'espoir de ma prochaine délivrance,...

ANDRÉ GIDE, Journal,  1918, page 649. 

—  Néologisme. Entre-ailer. Croisement de entremêler et ailer : 

Ø 9. Mais quand tu dis : « Je viens! » quelle cloche de fête

Fit bondir le sommeil attardé sur ma tête;

Quelle rapide étreinte attacha notre sort,

Pour entre-ailer nos jours d'un fraternel essor!

Ma vie, elle avait froid, s'alluma dans la tienne,

Et ma vie a brillé, comme on voit au soleil

Se dresser une fleur sans que rien la soutienne,

Rien qu'un baiser de l'air, rien qu'un rayon vermeil...

MARCELINE DESBORDES-VALMORE, Élégies,  1859, page 14. 

 

 

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