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ALGÈBRE, substantif féminin.

Publié le 21/10/2015

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ALGÈBRE, substantif féminin.  

A.—  [Le plus souvent au singulier]  Branche des mathématiques ayant pour objet de simplifier et de résoudre au moyen de formules des problèmes où les grandeurs sont représentées par des symboles, et d'en généraliser les résultats. Apprendre l'algèbre, savoir l'algèbre (Dictionnaire de l'Académie Française) : 

Ø 1. C'est dans l'école d'Alexandrie que nous trouvons les premières traces de l'algèbre, c'est-à-dire du calcul des quantités considérées uniquement comme telles. La nature des questions proposées et résolues dans le livre de Diophante, exigeait que les nombres y fussent envisagés comme ayant une valeur générale, indéterminée, et assujettie seulement à certaines conditions.

ANTOINE MARQUIS DE CONDORCET, Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain,  1794, page 66. 

Ø 2.... quoique l'algèbre emploie des caractères alphabétiques, ils ne sont pas là comme lettres, mais comme signes. a ne représente pas le son a, mais l'idée d'une quantité connue dont on ne spécifie pas la valeur; x ne représente pas le son x, mais l'idée d'une quantité inconnue; et ax ne représente pas le son ax, mais l'idée de ces deux quantités multipliées l'une par l'autre, etc. Les chiffres et les caractères algébriques sont donc de vrais signes directs des idées; et l'arithmétique et l'algèbre forment une vraie langue ou portion de langue qui s'adresse à la vue.

ANTOINE-LOUIS-CLAUDE DESTUTT DE TRACY. Élémens d'idéologie, 1. Idéologie proprement dite, 1801, pages 335-336. 

Ø 3. On a porté dans la politique, et jusque dans la morale, les procédés et presque le langage de l'algèbre; on se sert de mots abstraits au lieu de lettres; on les combine, et l'on croit s'entendre et s'éclairer, parce qu'on a remué des ombres.

JOSEPH JOUBERT, Pensées, tome 1, 1824, pages 423-424. 

Ø 4.... Leibnitz ne voyait avec raison dans l'algèbre qu'une application particulière de la théorie des combinaisons, et une branche de sa caractéristique universelle ou combinatoire. 

AUGUSTIN COURNOT, Essai sur les fondements de nos connaissances et sur les caractères de la critique philosophique,  1851, pages 584-585. 

Ø 5. Puisqu'une machine à compter est possible, une machine à raisonner est possible. Et l'algèbre est déjà une sorte de machine à raisonner; vous tournez la manivelle, et vous obtenez sans fatigue un résultat auquel la pensée n'arriverait qu'avec des peines infinies.

ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos,  1927, page 736. 

Ø 6. Goethe n'est pas géomètre. Il dit qu'il est « absolument incapable d'opérer par des signes et des chiffres, de quelque manière que ce soit ». Il ne sent pas que l'algèbre est aussi une morphologie, et une génération en quelque sorte organique du nombre, dont elle définit les espèces, les transformations, la structure.

PAUL VALÉRY, Variété IV,  1938, page 114. 

Ø 7. C'était un des épisodes de sa vie les plus ronds, les plus complets, les plus autonomes, et quand il y pensait avec toute l'attention voulue (ce qui lui arrivait d'ailleurs rarement), il voyait bien comment tous les éléments qui le constituaient auraient pu se lier en une aventure qui se serait développée sur le plan du mystère pour se résoudre ensuite comme un problème d'algèbre où il y a autant d'équations que d'inconnues...

RAYMOND QUENEAU, Pierrot mon ami,  1942, page 210. 

—  Par extension.  Traité d'algèbre. L'Algèbre de Bézout (Dictionnaire de l'Académie Française). Acheter une algèbre (Dictionnaire de l'Académie Française tome 1 1932) : 

Ø 8. Hier, en essayant de comprendre les premières pages de l'Algèbre, pour me faciliter les premiers raisonnements, je tirais une ligne et, en la partageant en différentes longueurs, je saisissais à l'instant les calculs numériques. La géométrie et l'algèbre doivent se faciliter l'une l'autre.

JULES MICHELET, Journal,  1820, page 90. 

Remarque : Syntagmes. Algèbre boolienne, booléenne, algèbre de Boole. \" Structure possédant une axiomatique dont les fondements sont dus à Boole. \" (Grand Larousse encyclopédique en dix volumes Supplément 1968). Algèbre linéaire. \" Ensemble des problèmes et des modes de calcul algébrique qui présentent tous le caractère commun d'être linéaires. (Les parties de l'algèbre linéaire connues sous le nom d'algèbre des matrices, d'algèbre des tenseurs, sont indispensables à l'étude de la physique moderne). \" (Grand Larousse encyclopédique en dix volumes).  Algèbre littérale ou spécieuse. \" Toutes les quantités données ou inconnues y sont représentées par les lettres de l'alphabet. L'algèbre spécieuse s'occupe de la recherche ou de l'invention des théorèmes, ou de la résolution et démonstration de toutes sortes de problèmes tant arithmétiques que géométriques. \" (DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845; confer aussi DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ)). Algèbre multilinéaire. Elle \" commence en 1900 avec Ricci et Levi-Civita. Le calcul tensoriel devient à la mode lors de l'avènement de la théorie de la relativité. Les formes différentielles extérieures apparaissent avec les travaux d'Élie Cartan et d'Henri Poincaré. \" (DICTIONNAIRE DE MATHÉMATIQUES  (LUCIEN CHAMBADAL ) 1970). Algèbre numérique ou vulgaire. \" La seule connue des anciens algébristes. Toutes les quantités données sont exprimées en nombres, la seule quantité cherchée par un caractère de l'alphabet. \" (DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845). 

—  MATHÉMATIQUES MODERNE.  

a) Une algèbre. \" Soit K un corps commutatif. On appelle algèbre sur K, ou encore K-algèbre, un espace vectoriel E sur K muni d'une application bilinéaire de E x E dans E. \" (Dictionnaire de mathématiques (LUCIEN CHAMBADAL)1970). 

b) Structure d'algèbre. \" Ensemble des calculs relatifs à une structure algébrique dans laquelle les propriétés des opérations sont définies par un certain nombre d'axiomes; plus particulièrement, ensemble des calculs relatifs à une structure algébrique qui possède au moins deux lois de composition : L'anneau constitue une algèbre. \" (Grand Larousse encyclopédique en dix volumes Supplément). 

—  PHILOSOPHIE.  Algèbre de la logique ou logistique. \" Extension à la logique et à l'expression de toute sorte de pensée d'un symbolisme opératoire analogue au symbolisme algébrique. \" (Dictionnaire de la langue philosophique (PAUL FOULQUIÉ, RAYMOND SAINT-JEAN)). 

B.—  Par analogie.  Mode de pensée ou de langage qui présente, à l'instar de l'algèbre, des caractères de rigueur, d'abstraction ou d'hermétisme : 

Ø 9. Entre deux personnes qui coïncident dans leurs idées philosophiques, et qui s'élèvent à une certaine hauteur, je pense que l'on doit bannir ce langage vulgaire, destiné à combler le vide des idées. Ainsi créant pour la morale une espèce d'algèbre, je vais tâcher de vous rendre mes sentiments sous une expression simple et pour ainsi dire formulique.

HONORÉ DE BALZAC, Correspondance,  1822, page 161. 

Ø 10. Pour qui sait le déchiffrer, le blason est une algèbre, le blason est une langue. L'histoire entière de la seconde moitié du Moyen Âge est écrite dans le blason, comme l'histoire de la première moitié dans le symbolisme des églises romanes. Ce sont les hiéroglyphes de la féodalité après ceux de la théocratie.

VICTOR HUGO, Notre-Dame de Paris,  1832, page 142. 

Ø 11.... j'allais jetant toute ma pensée, toute ma force dans le vide de cet univers insaisissable, qui me renvoyait toutes mes sensations émoussées : la faculté de voir, éblouie par le soleil, celle de désirer, fatiguée par l'aspect de la mer et le vague des horizons, et celle de croire, ébranlée par l'algèbre mystérieuse des étoiles et le mutisme de toutes ces choses après lesquelles s'égarait mon âme;...

AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Lélia,  1833, pages 165-166. 

Ø 12. Quant à Nabuchodonosor III, plus hideux que jamais avec ses grosses moustaches de croque-mitaine inondées de salive et ses mamelles boursouflées, il paraissait abîmé, lui, dans de très profondes algèbres, et, mélancolique, se disant peut-être que rien n'était moins aisé que de faire la loi toujours et partout, il tirait parfois sa jambe gauche luxée ou meurtrie, qui, lente, très lente à se mouvoir, se souvenait sans doute du boulet que, jadis, elle avait traîné là-bas...

LÉON CLADEL, Ompdrailles, le tombeau des lutteurs,  1879, page 288. 

Remarque : Noter la valeur expressive du pluriel : 

Ø 13. La Main Passe n'est sans doute pas le plus parfait des vaudevilles de Georges Feydeau. On connaît des exemples encore plus caractéristiques et plus désopilants de sa verve, (...) de cette algèbre rigoureuse du quiproquo le plus bouffon... (L. Rebatet).

Le Cri du peuple.  6 mars 1941. 

Ø 14. On aurait dit que leurs pensées, comme leurs pas, s'accordaient à nouveau, que, comme de vieux amants, ils n'avaient plus besoin de longues phrases, mais seulement d'une sorte d'algèbre du langage.

GEORGES SIMENON, Les Vacances de Maigret,  1948, pages 47-48. 

Ø 15. Ni en France, ni en Allemagne, ni même en Suisse (car la maladie sévit aussi dans les montagnes), on ne trouve assez de mots, d'expressions, de figures, d'images, de métaphores, de tournures, d'équivalents, de symboles, de formules, de signes et d'algèbres pour capter en leurs mailles cette gluante anguille.

JULES VUILLEMIN, Essai sur la signification de la mort,  1949, pages 132-133. 

C.—  Par extension.  Chose difficile à comprendre. C'est de l'algèbre pour lui (Dictionnaire de l'Académie Française). 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 258. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 378, b) 460; XXe.  siècle : a) 289, b) 353. 

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