APAISEMENT, substantif masculin.

APAISEMENT, substantif masculin. Action d'apaiser, de s'apaiser; état résultant de cette action. A.— [En parlant de personnes privées ou publiques] 1. [En parlant d'une personne, de ses sentiments et passions] a) Apaisement de + substantif marquant un état d'âme. L'apaisement des souffrances, des troubles, de la pensée : Ø 1. Au moment où Victorin écoutait le docteur Bianchon, qui lui détaillait les raisons qu'il avait d'espérer l'apaisement de cette crise, quoique ses confrères en désespérassent, le valet de chambre vint annoncer à l'avocat sa cliente, Mme. de Saint-Estève. HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette, 1846, page 367. Ø 2. Loin que la philosophie enveloppe et assimile sous l'espèce de la notion du beau tout le domaine de la sensibilité créatrice et se rende mère et maîtresse de l'esthétique, il arrive qu'elle en procède, qu'elle ne trouve plus sa justification, l'apaisement de sa conscience et sa véritable « profondeur » que dans sa puissance constructive et dans sa liberté de poésie abstraite. PAUL VALÉRY, Variété III, 1936, page 154. — Rare. Trouver un apaisement à + substantif : Ø 3. Nerval trouvera des instants d'apaisement à un tourment toujours plus dévorant quand, parmi les visions de rêve auxquelles aboutit Aurélia, il aura confondu dans la déesse universelle les femmes qu'il a aimées, quand elle viendra à lui avec les paroles qui complètent enfin celles qui avaient été dites à Lucius : « Je suis la même que Marie, la même que ta mère, la même aussi que sous toutes les formes tu as toujours aimée... » MARIE-JEANNE DURRY, Gérard de Nerval et le mythe, 1956, page 139. b) Emploi absolu : Ø 4. Elle [Lisa] montrait un grand calme repu, une tranquillité énorme, que rien ne troublait, pas même un sourire. C'était l'apaisement absolu, une félicité complète, sans secousse, sans vie, baignant dans l'air chaud. ÉMILE ZOLA, Le Ventre de Paris, 1873, page 895. Ø 5. Laurent reprit haleine. La musique de Cécile ne s'était point interrompue. Elle disait à merveille, mieux que les mots impuissants, la joie qui s'évapore et la douleur qui ne veut pas s'enfoncer dans l'éternité sans avoir connu l'apaisement, la rémission. GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Cécile parmi nous, 1938, page 144. 2. [En parlant de discordes, dissensions] L'apaisement des troubles : Ø 6. Vendredi 24 mars. En dépit des barricades, que je vois faire et perfectionner place Vendôme, un apaisement, une détente. Il ne faut qu'un coup de fusil pour tout changer. Mais à l'heure qu'il est, la situation perd de sa gravité par ce fait que les uns ne sont pas fixés sur ce qu'ils veulent obtenir, les autres sur ce qu'ils veulent accorder. EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1871, page 752. · Politique d'apaisement : Ø 7. Enfin, comme l'excellent M. Parr, consul général britannique à Brazzaville, m'apportait des messages envoyés par M. Eden pour justifier la politique d'apaisement à l'égard de Vichy, je lui dictai une réponse condamnant cette politique avec d'autant plus de vigueur que j'apprenais l'entrevue de Darlan et d'Hitler à Berchtesgaden, la conclusion d'un accord entre eux, enfin l'atterrissage d'avions allemands à Damas et à Alep. CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1954, page 154. · Donner des apaisements. Rassurer par des paroles ou des mesures propres à ramener le calme. Avoir des apaisements. Être rassuré : Ø 8. J'écrivais également au général Pershing pour lui demander le concours de six de ses divisions réservées et lui récrivais quelques jours plus tard en lui donnant les apaisements nécessaires : «... le général commandant la 10e. armée française, qui aura ces divisions sous ses ordres, prendra des dispositions pour les faire agir autant que possible à sa gauche, et je donnerai de mon côté des ordres pour qu'elles soient replacées promptement sous le commandement américain... » MARÉCHAL FERDINAND FOCH, Mémoires pour servir à l'histoire de la guerre de 1914-1918, tome 2, 1929, page 263. Remarque : Sur ces expressions, Dictionnaire des difficultés grammaticales et lexicologiques (Joseph Hanse) 1949 ajoute que le " P. Deharveng, après les avoir dénoncées comme des belgicismes, les a rencontrées dans plusieurs journaux et revues de la France. Il a cité notamment (tome II pages 16-17) : donner des apaisements (Pertinax), donner tous apaisements (Victor Bérard), avoir tout apaisement (Lomheur), avoir tous ses apaisements (Y. de la Brière), donner complet apaisement (Raymond Poincaré) ". B.— [En parlant de la nature et de ses éléments, exprimés sous forme de complément, préposition de] L'apaisement des feuillages, du soir : Ø 9. L'apaisement de la mer était inexprimable. Elle avait un murmure de nourrice près de son enfant Les vagues paraissaient bercer l'écueil. VICTOR HUGO, Les Travailleurs de la mer, 1866, page 393. Ø 10. Il y eut de nouveau un silence soudain, comme si les éléments eussent été plus forts que la guerre, comme si l'apaisement qui tombait du ciel d'hiver que les flocons ne voilaient plus se fût imposé au combat. ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir, 1937, page 807. C.— DROIT. vieux " Acte par lequel on apaisait ou pacifiait une contestation, un débat judiciaire; payement d'une indemnité, extinction d'une créance : l'apaisement de la dette du testateur par les héritiers. " (Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)). Remarque : 1. Noté comme vieux dans Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842, inusité dans DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE ) 1845 et comme ancien dans DICTIONNAIRE DES DICTIONNAIRES (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892. 2. DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845 est le seul à signaler le sens « loisir, gré, volonté » que prendrait apaisement dans la locution familière à votre apaisement, sens qu'il signale comme usité en citant l'exemple " occupez-vous de ce travail à votre apaisement ". STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 407. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 54, b) 452; XXe. siècle : a) 756, b) 987.