ARISTOCRATIE, substantif féminin.

ARISTOCRATIE, substantif féminin.  

A.—  POLITIQUE.  Forme de gouvernement où le pouvoir est entre les mains d'un petit nombre de personnes, en raison de leur naissance, de leur fortune ou de leur qualification : 

Ø 1. Entrez plus avant dans l'histoire de l'Europe; vous verrez les formes sociales, les gouvernemens les plus divers, également en possession de ce caractère de la légitimité. Les aristocraties et les démocraties italiennes ou suisses, la république de Saint-Marin, comme les plus grandes monarchies de l'Europe, se sont dites, et ont été tenues pour légitimes;...

FRANÇOIS GUIZOT, Histoire générale de la civilisation en Europe depuis la chute de l'Empire romain jusqu'à la Révolution française,  1828, page 6. 

PARADIGMES. Aristocratie, oligarchie. « Quand une classe peu nombreuse gouverne dans l'intérêt commun, c'est aristocratie; quand elle gouverne dans le sien propre, c'est oligarchie. » (LAL. 1968). 

B.—  SOCIOLOGIE.  Ensemble des nobles. Aristocratie féodale; aristocratie de naissance; haute aristocratie : 

Ø 2.... comment mieux expliquer à toutes les jeunes filles de l'aristocratie de naissance et d'argent le cas que je faisais d'elles?

VALÉRY LARBAUD, A. O. Barnabooth,  1913, page 362. 

Ø 3. Que cette noblesse française était étrange! Tantôt fidèle, dévouée (...); tantôt insoumise et dressée contre l'état. Pourtant ce n'était pas une caste, une aristocratie fermée, une race à part en France.

JACQUES BAINVILLE, Histoire de France, tome 1, 1924, page 126. 

—  Par extension.  Groupe de personnes constituant une minorité importante par les privilèges, la fortune, la profession, certaines qualités propres. Aristocratie de la fortune (Dictionnaire général de la langue française (ADOLPHE HATZFELD, ARSÈNE DARMESTETER)); aristocratie des lettres (Dictionnaire de l'Académie Française); aristocratie de l'intelligence : 

Ø 4. La nation anglaise tout entière est l'aristocratie du reste du monde, par ses lumières et ses vertus.

GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Considérations sur les principaux événements de la Révolution française, tome 2, 1817, page 410. 

Ø 5. Nos évêques, presque tous nobles, tiennent avec la noblesse; et nous, enfants du peuple, nous sommes avec le peuple; il n'existe donc aujourd'hui que deux partis : les privilégiés et les non-privilégiés, l'aristocratie et le peuple.

ÉMILE ERCKMANN ET ALEXANDRE CHATRIAN, DITS ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, tome 1, 1870, page 261. 

Ø 6. Les négociants et les fonctionnaires marchaient côte à côte; ils se laissaient coudoyer, heurter même et déplacer par de petits employés à la mine pauvre. Les aristocraties, les élites, les groupements professionnels avaient fondu dans cette foule tiède.

JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée,  1938, page 73. 

Ø 7. En France, au siècle dernier, la seule aristocratie qui eut un pouvoir, c'est la grande bourgeoisie industrielle et commerciale (...) Aristocratie austère, la plus secrète qui fût jamais :...

JACQUES CHARDONNE, Le Ciel dans la fenêtre,  1959, page 32. 

—  Par ironie : 

Ø 8. Appartenant à la haute aristocratie du bagne, il n'avait rien révélé sur ses complices.

HONORÉ DE BALZAC, Splendeurs et misères des courtisanes,  1847, page 538. 

SYNTAXE : Aristocratie d'argent, de la banque; —  du coeur, des lumières, du talent; —  bourgeoise, marchande, militaire, nouvelle, raciale. 

C.—  Par métonymie.  Qualités de distinction, de finesse, de supériorité, telles qu'on doit les rencontrer chez les meilleurs représentants de la noblesse : 

Ø 9.... Mme.  la comtesse de Morcerf, qui est la distinction, l'aristocratie, la finesse en personne, hésite un peu à toucher une main roturière, épaisse et brutale : c'est naturel.

ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Cristo, tome 1, 1846, page 789. 

—   [Avec une nuance de dédain] :

Ø 10. Malherbe avait le dédain de tout premier occupant et régnant à l'égard de son successeur immédiat. Il se moquait volontiers, avec l'aristocratie du poëte, de ceux qui disaient que la prose avait ses nombres; il ne concevait pas des périodes cadencées qui ne fussent pas des vers, et n'y voyait qu'un genre faux de prose poétique.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 2, 1842, page 56. 

—  Par analogie.  [En parlant d'un inanimé] :

Ø 11. C'était tout ignoré et c'est tout nouveau en nous, ce sentiment et cette appréciation de la belle ligne d'une plante, de son art et de son aristocratie, pour ainsi dire : car la nature a, comme l'humanité, ses êtres préférés, caressés, auxquels elle donne une beauté spéciale et supérieure.

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal,  1869, page 513. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 1 328. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 2 820, b) 2 714; XXe.  siècle : a) 1 378, b) 957.