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BILLET, substantif masculin.

Publié le 03/11/2015

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BILLET, substantif masculin.  

I.—  Message bref. 

A.—  Message bref, adressé à une personne, réduit à l'essentiel dans son contenu comme dans sa forme. Court billet; billet anonyme : 

Ø 1. Les petits billets de ces dames du grand siècle et du siècle dernier trouvaient moyen d'être à la fois sans beaucoup d'orthographe et du français le plus excellent.

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, tome 2, 1860, page 30. 

1. [Dans le domaine des sentiments, en particulier du sentiment de l'amour]  Billet doux, billet galant, billet d'amour : 

Ø 2. Il faut que tu lui écrives un petit mot d'encouragement... C'est une fameuse belle femme encore, et qu'on ne saurait trop soigner par billets doux quand on approche de seize ans. Les dames sont toujours sensibles à ces attentions, et les récompensent.

PAUL ADAM, L'Enfant d'Austerlitz,  1902, page 370. 

—   Proverbe (vieilli) Le bon billet qu'a La Châtre. Promesse trompeuse (allusion à l'infidélité de Ninon de Lenclos qui s'était engagée à rester fidèle au marquis de La Châtre) (Confer André Theuriet, Le Mariage de Gérard, 1875, page 143). 

—  Par métonymie ou métaphore, langue poétique. Ce billet doux [le papillon] plié en deux cherche une adresse de fleur (JULES RENARD, Histoires naturelles,  1896, page 156) : 

Ø 3. Que ton parfum est doux, ô suave caresse!

Ô bonheur encor chaste et déjà plein d'ivresse!

Oh! ces regards tout pleins de billets doux, ces pieds

Qui se cherchent tout bas, vainement épiés!

THÉODORE DE BANVILLE, Les Cariatides, Les Baisers de pierre, 1842, page 48. 

Ø 4....

Le jaloux n'est plus, dans sa haine,

Rien (...) qu'un billet d'amour (...) aigri.

GERMAIN NOUVEAU, Valentines,  1886, page 92. 

2. [Dans le domaine des relations sociales]  Billet de part (vieux), de faire-part. Avis généralement imprimé annonçant un événement familial, tel que mariage, naissance, décès, etc. Synonyme : du plus usuel faire-part :  

Ø 5. Si un homme de l'houmeau t'arrive pour faire faire son billet de mariage, et que tu le lui imprimes sans un amour avec des guirlandes, il ne se croira point marié, et te le rapportera s'il n'y voit qu'un M., comme chez tes Messieurs Didot, qui sont la gloire de la typographie, mais dont les inventions ne seront pas adoptées avant cent ans dans les provinces.

HONORÉ DE BALZAC, Les Illusions perdues,  1843, page 16. 

—  Par extension, vieilli.  Missive brève annonçant une nouvelle : 

Ø 6. Pour nous (...) l'empire existe, et, sans attendre le proverbe du sénatus-consulte et la comédie du plébiscite, nous envoyons ce billet de faire part à l'Europe : —  La trahison du 2 décembre est accouchée de l'empire. La mère et l'enfant se portent mal. — 

VICTOR HUGO, Napoléon le Petit,  1852, page 53. 

3. Emplois spéciaux.  Avis adressé à une personne. 

a) ARMÉE.  Billet de garde. Imprimé officiel par lequel un militaire de la garde nationale est tenu à aller prendre son service (Confer Louis Reybaud, Jérôme Paturot, 1842, page 163). 

SYNTAXE : Billet de mobilisation (BARRÈS, La Colline inspirée, 1913, page 261); billet d'enrôlement (ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, tome 1, 1870, page 491); billet d'évacuation (BARBUSSE, Le Feu, 1916, page 288). 

b) POSTES.  Billet d'avis (VICTOR HUGO, Correspondance, 1873, page 143 ). 

B.—  Par analogie.  JOURNALISME.  Courte chronique de journal, où le rédacteur, qui généralement signe de son nom, est censé s'adresser à une ou à plusieurs personnes sur un sujet d'actualité : 

Ø 7. —  Le billet de ce pauvre bougre a paru mardi dernier. Savez vous ce qu'il me reproche? Il me reproche d'intervenir sans mandat. Il me reproche de traiter avec arrogance les humbles serviteurs du savoir, sans lesquels, dit-il, comme si je ne le savais pas, nous serions, nous les chefs, des généraux sans troupes.

GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Combat contre les ombres, 1939, page 183. 

Remarque : Attesté dans GLOSSAIRE DES TERMES DE PRESSE  (BERNARD VOYENNE) 1967. 

II.—  Écrit généralement bref attestant un fait ou un droit. 

—   Locution familière (ou triviale) Je vous en donne (fais, fiche, flanque, fous) mon billet. Je vous le certifie, je vous l'assure : 

Ø 8.... il y avait du monde à ton service funèbre! C'était pis qu'au convoi de Lafayette (...) j'étais bien fière d'être ta mère, je t'en donne mon billet!

GUILLAUME-VICTOR-ÉMILE, DIT ÉMILE AUGIER, Le Mariage d'Olympe,  1855, III, page 226. 

A.—  ARMÉE.  

1. Billet de logement. Attestation donnant droit à un militaire en campagne d'aller loger chez un habitant désigné (Confer Stendhal, La Chartreuse de Parme, 1839, page 1). 

2. Tirer au billet. Tirer au sort (confer infra C) : 

Ø 9.... Nicolas, en tirant à la milice, prit un billet blanc. Alors, au lieu de numéros, on tirait des billets, blancs ou noirs; les billets noirs étaient seuls pris. Quel bonheur!

ÉMILE ERCKMANN ET ALEXANDRE CHATRIAN, DITS ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, tome 1, 1870, page 82. 

B.—  DROIT COMMERCIAL et FINANCES.  

1. Écrit sous seing privé portant la reconnaissance d'une dette. Escompter, négocier, souscrire un billet : 

Ø 10. Et le facteur ne monte plus.

Sauf, parfois, à la fin du mois, quand les billets qu'on a souscrits chez le notaire tombent à échéance.

JEAN GIONO, Colline,  1929, page 16. 

a) Billet simple. Contrat unilatéral devant être obligatoirement écrit et signé de la main du débiteur. 

b) Billet à ordre. Écrit par lequel le souscripteur s'engage à payer à une autre personne, ou à son ordre, une certaine somme d'argent, soit à vue, soit à une époque déterminée. Billet (payable) au porteur, à domicile, à vue : 

Ø 11. Un billet à ordre, une lettre de change, sont des obligations contractées de payer ou de faire payer une somme, soit dans un autre temps, soit dans un autre lieu. Le droit attaché à ce mandat (quoique sa valeur ne soit pas exigible à l'instant et au lieu où l'on est) lui donne néanmoins une valeur actuelle plus ou moins forte. Ainsi un effet de commerce de cent francs, payable à Paris dans deux mois, se négociera, ou, si l'on veut, se vendra pour le prix de 99 francs; une lettre de change de pareille somme, payable à Marseille au bout du même espace de temps, vaudra actuellement à Paris peut-être 98 francs.

JEAN-BAPTISTE SAY, Traité d'économie politique,  1832, page 299. 

SYNTAXE : Billet de change (vieilli). Promesse écrite de payer à échéance la valeur d'une lettre de change (confer DESTUTT DE TRACY, Commentaire sur l'Esprit des lois de Montesquieu, 1807, page 373). Billet de commerce. « Billet constatant une obligation souscrite par quelqu'un au profit d'un autre » (DG; confer A. DAUDET, Pages inédites de critique dramatique, 1897, page 69). Billets de complaisance. « Effets souscrits sans cause réelle et sans remise effective de valeur, dont l'unique but est de fournir au prétendu bénéficiaire un moyen de se procurer des fonds, en escomptant ce papier fictif » (BARR. 1967). Synonymes : effet de complaisance (confer CAP. 1936, DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (PAUL ROBERT) et LÉAUTAUD, Amours, 1906, page 241). Billet en blanc. Billet « que l'on fait au profit d'une personne dont le nom est laissé en blanc, et qu'on peut remplir d'un nom quelconque » (Dictionnaire général des lettres, des beaux-arts et des sciences morales et politiques (THÉODORE BACHELET, CHARLES DEZOBRY) 1882; confer BALZAC, Correspondance, 1845, page 675). 

2. Billet de banque. 

a) Vieux.  Billet émis par une banque qui était tenue à l'origine de rembourser en espèces, à vue et au porteur la somme inscrite sur le billet (cours légal) : 

Ø 12. De 1798 à 1814, l'Angleterre avait exporté tout son or monnayé, et n'avait jamais été plus riche. Ses billets de banque lui tenaient lieu de monnaie.

JEAN-BAPTISTE SAY, Traité d'économie politique,  1832, page 177. 

Ø 13. Il y avait eu des mois d'agiotage, dont le souvenir est resté légendaire, où des fortunes s'édifiaient en un jour. Tout à coup, l'échafaudage de Law vacilla. Il reposait sur la Compagnie des Indes, communément appelée Mississipi, dont les actions servaient à garantir les billets de la banque de Law, devenue banque de l'état. La baisse des actions entraîna donc celle des billets puis, la baisse de ceux-ci précipitant la baisse de celles-là, ce fut un effondrement.

JACQUES BAINVILLE, Histoire de France, tome 1, 1924, page 273. 

b) Moderne, en France.  Billet émis exclusivement par la Banque de France et circulant comme papier-monnaie (cours forcé). Billet de mille francs (dix francs), cinq mille (cinquante francs)... : 

Ø 14.... le crédit? Extérieurement, celui-ci apparaît comme quelque chose de fort artificiel : il se ramène à l'inscription de chiffres dans les livres d'une banque et d'un commerçant. De même, l'émission de billets semble n'être qu'une tâche d'imprimeur; on peut même se demander par quel sortilège ces vignettes ont de la valeur.

FERNAND BAUDHUIN, Crédit et banque,  1945, page 9. 

—  Populaire, absolument. Un billet, pour un billet de mille (anciens francs). Cinq cents billets de perles sur le ventre (ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Courrier Sud,  1928, page 47 ). 

C.—  JEUX.  Billet de loterie, de tombola. Petit papier imprimé, portant d'ordinaire un numéro, et attestant le droit de bénéficier d'un tirage au sort. Billet gagnant, billet perdant, bon, mauvais billet : 

Ø 15. Il y avait aussi, formant des carnets à souche, des billets de tombola au profit de la caisse des écoles. Le billet coûtait un franc, le carnet entier vingt-cinq. La plupart des billets avaient été vendus un à un et les souches portaient les noms de gens du quartier.

GEORGES SIMENON, Les Vacances de Maigret,  1948, page 129. 

—  Au figuré. 

·    Par allusion au billet blanc, qui est un billet perdant : 

Ø 16. Le monde des rêves n'est jamais qu'une urne de loterie, où se trouvent, pêle-mêle, d'innombrables billets blancs et des lots sans valeur. On devient soi-même un rêve et un billet blanc lorsqu'on s'occupe sérieusement de ces fantômes.

ALBERT BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve,  1939, page 159. 

·    Par allusion au tirage au sort : 

Ø 17. L'univers est un tirage au sort d'un nombre infini de billets, mais où tous les billets sortent. Quand le bon billet sortira, ce ne sera pas un coup de providence, il fallait qu'il sortît.

ERNEST RENAN, Dialogues philosophiques,  1876, page 70. 

D.—  POLITIQUE.  vieilli. Billet de vote. Synonyme moderne : bulletin de vote. Billet blanc, billet nul (Confer Paul-Louis Courier, Pamphlets politiques, Avertissement du libraire, 1823, page 195 et George Sand, Lélia, 1839, page 417). 

E.—  RELIGION.  vieilli. Billet de confession. Attestation par laquelle un prêtre reconnaît avoir entendu une personne en confession : 

Ø 18. Croyez-moi, il est bien plus simple de faire comme tout le monde : on achète un billet de confession, on entend une messe, et quand on a payé les frais de la cérémonie, on n'y pense plus.

LOUIS MÉNARD, Rêveries d'un païen mystique,  1876, page 181. 

F.—  TRANSPORTS.  Ticket attestant qu'un voyageur s'est acquitté des droits lui permettant d'effectuer un certain parcours. Billet d'autobus, d'avion, de chemin de fer; billet circulaire; billet de congés payés; prendre son billet. 

G.—  SPECTACLES.  Ticket donnant un droit d'entrée dans une salle de spectacles. Billet de concert, de théâtre; billet de parterre. 

SYNTAXE : Billet d'auteur (confer auteur II C 1). Billet de faveur. Billet gratuit ou à prix réduit (confer BALZAC, Les Illusions perdues, 1843, page 434). Billet de service, « Billet d'entrée que les directeurs de théâtre donnent aux artistes dont le nom figure sur l'affiche du jour » (Larousse 19e; confer BALZAC, César Birotteau, 1837, page 246). 

—  Locution figurée, populaire. Prendre un billet de parterre. Tomber : 

Ø 19. Le bruit de la chute d'un corps lourd, tombé sur le carreau de la salle à manger, retentit dans le vaste espace de l'escalier.

—  Ah! Mon Dieu! cria la Cibot, qué qu'il arrive? Il me semble que c'est monsieur qui vient de prendre un billet de parterre!...

HONORÉ DE BALZAC, Le Cousin Pons,  1847, page 157. 

Remarque : Attesté dans Grand dictionnaire universel du XIXe.  siècle (Pierre Larousse), Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965. 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 4 342. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 7 430, b) 9 224; XXe.  siècle : a) 4 834, b) 4 275. 

DÉRIVÉS : Billeton,  substantif masculin.  néologisme.  Forme argotique de billet (sens II F). « Je vais pas perdre mon temps, j'en ai marre moi des manigances... puisque j'ai déjà mon billeton je vais toujours faire ma valise... Demain matin, je me trisserai au premier « dur », à sept heures trente » (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit, 1936, page 324 ). 

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