Dictionnaire en ligne: DÉSOEUVREMENT, substantif masculin. A.— [L'accent est mis sur la cessation d'activité] Situation ou état, souvent ressenti comme pénible, d'une personne ou d'un aspect d'une personne (coeur, esprit, etc.) privé d'activité. Désoeuvrement absolu; état de désoeuvrement; un soir de désoeuvrement. C'est le désoeuvrement qui fait naître les vices (GÉNÉRAL LOUIS-NARCISSE BAUDRY DES LOZIÈRES, Voyage à la Louisiane et sur le continent de l'Amérique septentrionale, 1802, page 240) : Ø 1. Rue d'Ulm, on traversait cette époque incertaine où, les examens achevés, on en attend les résultats dans un extrême désoeuvrement qui a bien des charmes pour des adolescents naturellement paresseux, mais contraints pendant des années à d'absurdes travaux. PAUL NIZAN, La Conspiration, 1938, page 26. — [Avec complément prépositionnel de ou adjectif possessif précisant la personne ou l'aspect de la personne affecté par le désoeuvrement] Madame Claës sut tromper avec habileté le désoeuvrement de son mari (HONORÉ DE BALZAC, La Recherche de l'absolu, 1834, page 194 ). Le désoeuvrement de trois esprits inoccupés (ALPHONSE DE LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, page 72 ). Un désoeuvrement de doigts inoccupés tapotant sourdement les vitres (GEORGES RODENBACH, Le Règne du silence, 1891, page 111 ). — Par métonymie généralement au pluriel, rare. Période d'oisiveté, de cessation d'activité. Ces désoeuvrements trompés de ma vie, pendant les séjours de mon père et de ma mère à la ville (ALPHONSE DE LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, page 108 ). B.— [L'accent est mis sur la personne qui a cessé son activité et sur divers aspects du sentiment qu'elle éprouve dans sa situation] — [Avec complément prépositionnel de ou adjectif possessif précisant la personne ou l'aspect de la personne affecté par le désoeuvrement] Le désoeuvrement du regard. Désoeuvrement de mon coeur (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Volupté, tome 1, 1834, page 58 ). Il ouvre la fenêtre [Frédéric Mogne] , (...) sort discrètement, promène son désoeuvrement (MICHEL BUTOR, Passage de Milan, 1954, page 18 ). — [Aspects du sentiment] · Sentiment de malaise, de désarroi, d'indécision que dégage, chez la personne, cet état soudain d'oisiveté. Avec ce désoeuvrement de la solitude et de l'attente (...) d'Argenton regardait depuis un moment une troupe de travailleurs (ALPHONSE DAUDET, Jack, tome 2, 1876, page 83 ). Par désoeuvrement, je m'empare d'un écouteur (ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Courrier Sud, 1928, page 59 ). Par métonymie généralement pluriel, rare. Période de découragement, de lassitude, de désarroi. Elle lui avait, autrefois, tenu société pendant bien des soirs, dans les désoeuvrements de son veuvage (GUSTAVE FLAUBERT, Madame Bovary, tome 1, 1857, page 63 ). · Sentiment de déception, de découragement, d'indécision qui a pour conséquence l'incapacité d'agir. Un incroyable désoeuvrement accablait ses épaules (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Ascension de Monsieur Baslèvre, 1919, page 213) : Ø 2. Puis, l'après-midi, dans la salle, c'était une oisiveté languissante, un désoeuvrement traîné de chaise en chaise, une fatigue, une irritation contre tout ce qui l'avait intéressée jusque-là. ÉMILE ZOLA, Le Docteur Pascal, 1893, page 84. · Sentiment d'incuriosité, d'inintérêt, de lassitude, d'ennui (du type romantique), de neurasthénie (qui peut accompagner une activité à laquelle le sujet se livre sans intérêt ni passion). Si cette grande question de la peine de mort ne fût venue jeter une passion intéressante au milieu de tout ce désoeuvrement (JULES JANIN, L'Âne mort et la femme guillotinée, 1829, page 113 ). Remarque générale : Le conplément prépositionnel de indique souvent, non la personne affectée, mais une circonstance de lieu, de temps, de cause, etc. entourant la crise de désoeuvrement. Le désoeuvrement affreux d'une soirée (Alphonse Karr, Sous les tilleuls, 1832, page 174). Le désoeuvrement des villes d'eaux (Guy de Maupassant, Contes et nouvelles, tome 1, Joseph, 1885, page 1007). Le désoeuvrement de la cérémonie imposée (Eugène Melchior, vicomte de Vogüé, Morts, 1899, page 430). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 271. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 264, b) 484; XXe. siècle : a) 480, b) 378.
