Introduction Tentons un examen rapide : comment s'appelait donc le peuple qui vivait en France avant qu'il y eût la France ?
Publié le 06/01/2014
Extrait du document
«
défiler
lesunes après lesautres toutes lesfigures lesplus classiques quienformaient lagalerie, pourrevisiter le
tout, mythe aprèsmythe enquelque sorte,etredonner àl’ensemble unsens général différent.
L’enjeu del’entreprise n’estpasmince : ils’agit d’essayer deproposer auxFrançais unehistoire quisoit adaptée à
notre temps.
Detenter ensomme, àl’ombre desgrands historiens, unepremière histoiredeFrance àl’usage des
citoyens duxxie
siècle.
Sans doute quelques-uns trouverontcetteidéeparadoxale.
Pourquoiest-ildonc nécessaire d’ adapter le
passé ?
N’est-il pasfixé une foispour toutes ? Ehbien, non.Rienn’est pluschangeant quelesmondes disparus.
Lepublic
considère souventl’histoire commeunescience exacte.Tousleshistoriens saventàquel point elleestune science
humaine, tellement humaine,soumiseauxobsessions, auxtabous, auxstructures mentalesd’unmoment.
Chaque
époque ainventé safaçon deraconter l’histoire.
Sous lamonarchie d’AncienRégime,parexemple, l’exercice consistait leplus souvent àdétailler lagénéalogie des
rois etdes princes, toutensoulignant aupassage leursvertus surhumaines etleur bravoure : ilaurait étébête de
rater uneoccasion d’obtenir deson souverain unecoquette pension.AveclaRévolution française,lepouvoir
change destructure.
Onétait une monarchie ,
c’est-à-dire unpays dans lequel leseul lienquicompte estcelui
qui liechaque sujetàson roi.En1789, ondevient une nation ,
c’est-à-dire unpays oùlelien principal est
horizontal, unpays oùl’ensemble descitoyens àun moment donnéveutsesentir undestin commun.
Ducoup, on
en vient rapidement àessayer deretailler lepassé selonlemême patron.
Lexixe nationalise allègrement
les
siècles quiprécèdent.
Touslesconflits destemps féodaux, parexemple desbatailles entrepetits roisd’ici etde là,
qui sont cousins, sontrepeints enguerres nationales, commesil’histoire neservait jamaisqu’àannoncer laguerre
de 1870 –ou plus loin, laguerre de1914, même si,jevous leconcède, leshistoriens duxixe
siècle pouvaient
difficilement l’avoirentête.
LaFrance, nouvelle divinitéabsolue, estmise aucentre detout.
Leshéros quipassent
par lesmanuels, lesDu Guesclin oules Jeanne d’Arc,sontrecarrossés en patriotes ,
quitte àpratiquer un
anachronisme consternant,onleverra.
Le
roman national Ainsi,
comme celaseproduit enmême tempsdanslesautres paysd’Europe, sebâtit peuàpeu ceque l’onappelle
« le roman national », cettegrande épopée quivend l’idée denations issuesdufond desâges, possédant chacune
une âme propre, ungénie, unpeuple etsa longue filedehéros fondateurs quinesont qu’à elles –même si,on le
verra àl’occasion, iln’est pasrare quedivers voisins européens sedisputent lesmêmes.
Ce« roman », assenépar
l’école etses manuels, avaitsapuissance : lapreuve, ons’en souvient encore.Etilavait sanécessité, disentses
défenseurs : ilfut fondamental pourfairel’unité delaFrance ! Sansdoute.
Est-ilencore siindispensable
aujourd’hui ?
Je ne lecrois pas.Cette mythologie nationalefinitparpeser trèslourd surl’idée quenous nousfaisons denotre
pays, deson avenir, deses problèmes.
Songezauxréflexes quenous avons tousàl’égard delaconstruction
européenne.
Jene parle pasdelafaçon particulière dontsefait l’Europe aujourd’hui.
Jeparle del’idée plus
générale quiflotte toujours autourdecedébat depuis quel’onparle defaire l’union denotre continent : faut-iloui
ou non aller versplusdefédéralisme etdonc sortir dumodèle national ? PourtouslesFrançais, consciemment ou
pas, laproposition estvécue comme terriblement risquéeparcequ’ilspensent qu’ellenousforcerait àsortir d’un
système danslequel notrepaysatoujours vécu.Malheureusement pourceuxquiledéfendent, ceprésupposé est
faux.
Onvient delevoir –et on l’expliquera pluslonguement danslespages quisuivent –,laFrance n’estune
nation quedepuis peu,etlaplupart desautres paysd’Europe lesont devenus encoreplusrécemment.
D’autres
modèles ontexisté auparavant : pourquoinepourrait-on eninventer denouveaux, aptesàexister après ? Jene dis
pas que cela doitnous pousser àdonner dansl’heure lesclés delaRépublique auprésident delaCommission de
Bruxelles, maisjepense quecela peut nous aider àréviser nosperspectives.
…
Et autres fadaises Revenons
aussid’unmotàceux parquinous avons commencé, « nosancêtres lesGaulois ».
Quoideplus archéo
que
cette phrase ? Vraiment ? Songezplutôtàla façon dontlesjeunes d’aujourd’hui, danslalangue descités,
appellent lesFrançais quel’ondit« de souche » : « lesGaulois ».
Biensûr,l’expression estutilisée avecdérision,
mais onvoit lareprésentation qu’ellecontinue defixer dans lesesprits : ilyaurait donc,danscepays, desdemi-
Français, despasvraiment français–c’est-à-dire lesplus récents –et, d’autre part,de vrais nationaux,
puisqu’eux sont« detoujours », ilsarrivent dufond desâges.
Dèslechapitre quisuit, onconstatera quecette
idée, parfaitement fausse,n’estpassineuve : ellerecoupe pointparpoint cellequiprésida, iln’y apas si
longtemps, àla création decemythe.
D’oùl’importance deledétricoter.
On pourrait donnertantd’exemples quivont dans lemême sens…Onleverra quand onparlera del’importance
politique desfemmes auMoyen Âge,bienméconnue, oudurapport quelessociétés d’hierontentretenu avec.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Le royaume de France Capétiens et Valois (de 987 à 1498) par Jean Favier Professeur à la Faculté des Lettres et Sciences humaines, Rouen L'idée que donne du royaume de France l'examen rapide d'une carte est, pour la fin du Moyen Âge, singulièrement illusoire.
- Dans une lettre à un ami, après un rapide examen de la manière dont l'histoire était comprise avant lui, Augustin Thierry expose sa propre manière de la concevoir et de la traiter. © Tu te rappelles l’enthousiasme que provoqua chez moi la lecture du sixième livre des Martyrs. Ce moment a été décisif pour ma vocation. Je serai historien, mais je veux faire quelque chose de tout à fait nouveau.
- Discutez cette parole d'Anatole France : La science ne se soucie ni de plaire, ni de déplaire : elle est inhumaine. Ce n'est pas elle, c'est 36 INTRODUCTION la poésie qui charme et qui console. C'est pourquoi la poésie est plus nécessaire que la science.
- L’évolution juridique de la démocratie en France Selon Abraham Lincoln la démocratie c’est « le pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple ».
- Droit de vote des femmes en France - INTRODUCTION pour un dossier documentaire