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Le problème politique. — La patrie. — La nation et ses conditions d’existence.

Publié le 12/11/2016

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Il y eut d’abord des contingences historiques, un pouvoir royal héréditaire, imposant une unité d’institutions, obtenant par conquête, dotation, voire par achat, telle région, telle province qui, au cours des siècles, se fondra dans la Nation.

 

Citons quelques passages du célèbre discours d’Ernest Renan (cf. lect.). Une nation, c’est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n’en font qu’une, constituent cette âme... L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage que l’on a reçu indivis ...La Nation, comme l’individu, est l’aboutissement d’un long passé d’efforts, de sacrifices... Le culte des ancêtres est, de tous, le plus légitime : les ancêtres nous ont fait ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritable !) voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale. Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans. le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple....

 

Ainsi, chaque Nation étant une personne morale, autonome, doit avoir le droit pleinement reconnu par les autres nations, d’exister, de se développer selon son génie propre. Il y a une « souveraineté nationale », parfois sourcilleuse, possédant les qualités et les défauts de l’esprit de corps (dont nous avons déjà parlé). Ernest Renan disait encore, et c’était une anticipation courageuse à cette époque : « Les nations ne sont pas quelque chose d’éternel : elles ont commencé ; elles finiront. La confédération européenne (Renan pensait seulement, en effet, aux nations d’Europe) les remplacera probablement.

 

Les théories rationalistes ou volontaristes justifient la société politique par un quasi-contrat reposant sur l’accord tacite des volontés individuelles. La théorie nationaliste attribue à la Nation une existence antérieure à toute volonté des individus : c’est la monarchie qui aurait fait la Nation. Cette dernière théorie a peut-être partiellement raison (contre J.-J. Rousseau et les volontaristes), en ce sens que la Nation, historiquement, ne résulte pas d’une addition de volontés individuelles. Mais elle a tort d’éliminer l’idée d’une « représentation collective ». Elle néglige abusivement la participation,

 

l’adhésion de la conscience individuelle à cette représentation, à cette idée. D’ailleurs Rousseau lui-même ne confond pas absolument la volonté générale avec la somme des volontés individuelles. Il y a, à la fois, immanence et transcendance de la Nation.

 

IV. — LA PATRIE.

 

La Patrie, avons-nous dit, c’est l’aspect sentimental du concept de Nation. On emploie d’ailleurs parfois indifféremment ces deux termes l’un pour l’autre. Dans le Discours de Renan dont nous venons de

1. — DÉFINITIONS.

 

La Nation, c’est une réunion d’hommes, habitant un même territoire et ayant souvent (mais pas toujours) une origine commune. C’est aussi, nous y reviendrons plus loin, un « principe spirituel ».

 

L’État, c’est l’aspect juridique de la Nation. Nation et État ne sont pas deux réalités nettement séparables, bien sûr. Mais l’État, c’est la Nation en tant qu’elle a une organisation politique et qu’elle est pourvue d’un gouvernement.

 

Quant à la Patrie, c’est l’aspect sentimental du concept de Nation, quand on envisage celle-ci comme un sol à défendre, comme un pays à aimer.

II.-LA NATION.-ORIGINES ET CONDITIONS D’EXISTENCE.

 

Le clan primitif (cf. R. Hubert, lect. ; ainsi que Moret et Davy) est une société « politique » en même temps que religieuse, familiale, économique. Société communautaire, indifférenciée, elle ne présente aucune hiérarchie bien nette. Tout au plus y peut-on remarquer un commencement de condensation de la puissance sociale, au profit des sorciers, devins, etc. Il faudra d’autres facteurs pour que l'organisation se précise. Le facteur le plus important, c’est la fixation au sol ; car l’état nomade n’était guère favorable, on le conçoit, à une organisation stable. Ainsi, les puissances totémiques se localisent ; le culte des ancêtres est facilité. Est facilitée aussi la filiation masculine. En outre, des techniques, jusque-là impossibles, naissent et se développent (agriculture, poterie, construction, etc.). Enfin, la fixation au sol favorise l’augmentation en densité des groupes humains. Il y a création du village. Les clans sont les segments élémentaires de la tribu. Peu à peu, on verra se former une unité tribale. Il y aura un chef (de tribu), des conseils de notables, l’embryon d’une fonction juridique...

 

Et les groupements ainsi constitués se traceront en quelque sorte une délimitation plus précise sur le sol qu’ils occupent.

« 234 PHILOSOPHIE MORALE Soit spontanément, soit à l'o ccasion de conflits, de guerres, il advient que les tribus se conf édèrent en peuplades plus ou moins volumineuses.

Alors , les croyances totémiques tendent à s' eff acer.

Le roi, le grand chef est considéré comme un personnage divin.

Il éclipse ou remplace une féodalité de chefs (ou, en tout cas, il se les subordonne).

Il peut être thaumatur ge (conception curieuse par sa longue survivance, puisque, chez nous, elle s'est maintenue -guérison des écrou elles -jusqu'à Charles X!) Qu'est-ce que la peuplade ? C'est une nation diffuse.

Le Soudan, la Guin ée, les Latins et les Grecs avant la création des Cités, les Celtes au moment .

de la conquête romaine, vivaient ainsi en confédérations vaguement centralisées.

A ce moment de l'évolution, le phénomène politique le plus important est le synécisme ( = soudure, adhésion ...

) qui donne naissance aux Cités .

Retenons bien que (en sociolog ie, en histoire) la Cité est aut�e chose qu'une ·ville.

C'est une sorte de capitale et de centre : lieu de réunion consacré pour les cérém onies, religieuses ou autres, pour les grandes transactions commerciales (etc.).

Exemple : Athènes, Rome ...

Il a pu arriver que les nations diffuses (peuplades) ou bien organisées en Cités, cherchent à étendre leur pouvoir, leur influence, -par des guerres, des conquêtes ou simplement par une civilisation supérieure, - comme, par exem ple, l'É gypte du xve siècle av.

J.-C.

D' autres essaiment, colonise nt (Athènes, Corinthe, Tyr, Venise ..

:).

Ainsi se créent des Empire s, sociétés politiques groupées autour d' une puissance dominante, dirigeante ...

Méritent ce nom surtout les Empires qui ont innové ou répandu .une certaine forme de civilisation : Rome, Byzance, les Incas, etc.

Des clans aux Empires (c'est le titre du gros ouvrage de Moret et Davy) il y a donc une loi générale d'expansion et d'u nification croissa ntes.

Mais il y a aussi le phénomène inverse : la dislocation politique.

Les grands Empires, à cause.

même de leur étendue, de leur volume, peuvent à un moment donné se trouver incapables de maintenir leur unité et leur prestige.

Quelques pouvoirs locaux se montrent rebelles à l'a utorité centr ale, soit spontanément, soit à la suite d'infiltrations étrangères.

C'est alors le retour au régime féodal.

III .

-Q U'EST-CE QU'UNE NATION ? Une Nation, au sens moderne du mot, c'est la synthèse de très nombreux éléments de tous ordres.

C'est en vain que des théo'riciens ont cherché à déterminer le fac teur dominant.

Race, langue, configu­ ration du sol, communauté d'intérêt s, religion (etc.) : rien de tout cela, pris isolément, n'est suffisant.. »

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