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Commentaire : Conseil d'Etat, section, 3 juillet 1998, « M. Bitouzet », req. N°158192, p.95 – Servitude d'urbanisme et Servitude d'Utilité Publique

Publié le 04/09/2012

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Reconnaissance par le Conseil d'Etat d'une nouvelle exception au principe de non-indemnisation Une exception toute relative de part le fait qu'elle ne constitue pas un retour au droit commun de la responsabilité sans faute en exigeant un caractère exorbitant, plus étroit que le caractère anormal de la responsabilité sans faute Le caractère spécial va également limiter cette exception car il conduira à ne pas indemniser un préjudice résultant du classement d'une zone par un plan d'urbanisme frappant tout les propriétaires de la même façon Introduction de l'équilibre des intérêts en présence, il ne s'agira plus seulement de constater le dommage mais également de le mettre en balance avec l'intérêt général, ainsi l'existence d'un motif d'intérêt public justifiera le plus souvent le préjudice grave La possibilité reste tout de même ouverte si un acte réglementaire frappe un individu de façon spéciale ou si il se produit une modification du règlement antérieur qui pénalise quelqu'un en particulier Etroitesse du principe ici mise en valeur par le rejet de la requête du requérant

« L'exception concernant la modification de l'état antérieur des lieux est sans portée pratique car il est plus qu'improbable qu'une servitude ait de tel effets.

De plus iln'existe aucun exemple de l'application de cette exception dans la jurisprudenceL'exception au titre de l'atteinte aux droits acquis est certes plus étroite mais contrairement à la précédente elle existe.Il existe des cas d'acceptation tel le cas d'indemnisation du dommage résultant des dépenses inutilement exposées par le lotisseur en conséquence de l'autorisation delotissement avant que le qu'un document d'urbanisme ne classe les terrains en zone inconstructible.

Cependant ici la perte de la valeur de ces terrains n'est pasindemnisé (CE, Section, 4 mars 1977, Ministre de l'équipement c/ Consorts Simottel)De plus le juge administratif a souvent aggravé les effets restrictifs de l'article L.160-5 par l'appréciation large de l'imputabilité du dommage à une servitude Une rigidité dorénavant confrontée à l'article 1er du Protocole additionnel de la Cour Européenne des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales Comme devant la Cour Administrative d'Appel le requérant se prévaut ici du fait que l'article L.

160-5 serait incompatible avec l'article 1er du Protocole additionnel« toute personne a droit au respect de ses biens »: protection du droit de propriété énoncée par l'article 1er suivie de l'exigence d' « un juste équilibre entre lasauvegarde du droit de propriété et les exigences de l'intérêt général »Une jurisprudence européenne qui énonce que « dans le cas d'une privation de propriété le juste équilibre implique nécessairement le versement d'une indemnité fixéeà un niveau raisonnable et alors même que le texte ne fait pas mention de cette condition » (CEDH, 8 juillet 1986, Lithgow et autres contre Royaume-Uni)La question est donc ici de savoir si l'article L.

160-5 répond aux exigences européennes. Face à une telle rigueur et à une telle jurisprudence européenne on doit se demander si l'article L.

160-5 n'est pas effectivement en deçà des exigences de la CourEuropéenne des Droits de l'Homme en matière d'indemnisation des dommages causés aux propriétaires par l'instauration de servitude. II- Un principe de non-d'indemnisation des servitudes d'urbanisme qui n'est pas jugé incompatible par un juge administratif qui confirme cependant l'ajout d'unenouvelle exception Face à la rigueur de l'article L.

160-5 et au moyen invoqué par le requérant les juges du Conseil d'Etat ont du rechercher une forme de compatibilité à la normeeuropéenne (A) qui passe par la création d'une nouvelle exception au principe de non-indemnisation qui s'avère cependant elle-aussi très rigide (B). A- L'absence d'incompatibilité radical entre l'article L.

160- 5 et le droit européen La reconnaissance d'une marge d'appréciation pour juger de l'opportunité d'une indemnisation à l'opposé de celle d'un principe absolue d'indemnisation Le juge énonce dès le troisième considérant que les stipulations de l'article 1er « laissent au législateur une marge d'appréciation étendue en particulier pour menerune politique d'urbanisme tant pour choisir les modalités de mise en œuvre d'une telle politique que pour juger si leurs conséquences se trouve légitimées dansl'intérêt général ».

Il existe donc une certain liberté selon le juge administratif pour juger de l'attribution ou non d'une indemnisationAffaire « Katte Klitsche de la Grange contre Italie », CEDH, 27 octobre 1994, classement du lotissement à construire en zone naturelle à protéger qui fait obstacle àla réalisation complète de l'ouvrage.

La cour estime que le juste équilibre n'est pas rompu car l'interdiction était au début temporaire et n'était pas une interdictionabsolue de construire.La CEDH montre ainsi qu'une servitude administrative ne donne pas systématiquement lieu à une indemnisation, affirmation qui serait cependant le seul moyend'écarter l'article L.

160-5 La réponse donnée par le juge administratif à la question de la compatibilité entre norme européenne et norme interne Il y a deux réponses classiquement admises à cette question qui sont d'une part que la norme interne est compatible et suffit à régler une question de droit, et d'autrepart que la norme est radicalement incompatible et il y a lieu d'en écarter l'applicationIl y a cependant une troisième réponses qui est celle que la règle interne n'est pas en elle-même incompatible avec la norme européenne mais elle ne suffit pas à enréaliser toutes les exigences.

On dit qu'elle est incompatible par défautC'est cette option que choisissent ici les juges du Conseil d'Etat qui après avoir rappelé que l'article L.

160-5 ne posait pas un principe général et absolue déclarentque « cet article ne fait pas obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résultede l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été institué et mise en œuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte unecharge spéciale et exorbitante hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivie ».Les juges déclarent ainsi que l'article L.

160-5 du code de l'urbanisme est compatible avec l'article 1er du Protocole additionnel à la CEDH.Création ici d'une nouvelle exception au principe de non-indemnisation d'une servitude Cette exception nouvellement confirmée en droit interne s'avère en réalité tenir plus du souhait des juges de conserver entre leurs mains la possibilité d'accorder ounon une indemnisation que du souhait de dédommager les propriétaires victimes de servitude. B- La création d'une nouvelle exception motivée par la volonté du Conseil d'Etat de rester le juge du litige des servitudes d'urbanisme Une nouvelle exception au principe qui s'avère finalement elle aussi très étroite Reconnaissance par le Conseil d'Etat d'une nouvelle exception au principe de non-indemnisationUne exception toute relative de part le fait qu'elle ne constitue pas un retour au droit commun de la responsabilité sans faute en exigeant un caractère exorbitant, plusétroit que le caractère anormal de la responsabilité sans fauteLe caractère spécial va également limiter cette exception car il conduira à ne pas indemniser un préjudice résultant du classement d'une zone par un plan d'urbanismefrappant tout les propriétaires de la même façonIntroduction de l'équilibre des intérêts en présence, il ne s'agira plus seulement de constater le dommage mais également de le mettre en balance avec l'intérêt général,ainsi l'existence d'un motif d'intérêt public justifiera le plus souvent le préjudice graveLa possibilité reste tout de même ouverte si un acte réglementaire frappe un individu de façon spéciale ou si il se produit une modification du règlement antérieur quipénalise quelqu'un en particulierEtroitesse du principe ici mise en valeur par le rejet de la requête du requérant Une décision motivée par la volonté des juges d'éviter un quelconque désaccord européen Motivation résidant principalement dans le but d'éviter des condamnations de la France de la CEDHMotivation résidant également dans le but de garder le contrôle de ces litiges et ainsi éviter un contrôle à la base subsidiaire des juges européensUne solution critiquable par une possible difficulté pour les juges de mettre correctement en balance les intérêts en présence Conclusion : On voit donc ici que le juge administratif français, inquiet et conscient que l'article L.

160-5 du code de l'urbanisme souffre d'une très grande étroitesse, fait tout pourconserver ce domaine des servitudes d'urbanismes.

Il est veut en effet éviter une condamnation de l'Etat français et se voir soumis à l'interprétation des juges de la. »

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