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« Existe-t-il des limites au pouvoir de révision ? »

Publié le 31/08/2012

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C’est l’article 5, conférant au Président la responsabilité d’assurer « le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’Etat «, qui est venu « blanchir « ce recours gaullien. Il en fait une procédure « exceptionnelle «, car celle-ci enfreint l’article 89, en supposant que les deux chambres aient refusé le projet au préalable.

La réalité du pouvoir de révision est que le Président en a réellement l’initiative car l’initiative parlementaire ne donne que très rarement suite. Il a en outre la possibilité de ne pas donner suite à un projet ayant été approuvé par les deux chambres.

Le Sénat est le second acteur majeur de ce pouvoir de révision, soulevant ainsi la question de sa légitimité.

En effet, il suffit que le Sénat s’oppose pour faire échouer une révision voulue par le Président, le gouvernement et l’Assemblée, alors qu’il n’est qu’une institution isolée, non réformable, non dissolvable et non représentative.

« Dans le cadre des limites temporelles, il peut s’agir d’un délai à respecter avant toute modification afin de laisser le temps à de nouvelles dispositions de faire leurpreuve dans le cas de nombreuses Constitutions, mais pour la France, il s’agit surtout de limites lors de circonstances particulières.En cas d’atteinte à l’intégrité du territoire, l’article 89, instruit par l’expérience du 10 juillet 1940, interdit l’usage de la révision, pour éviter que celles-ci n’aient lieusous pression des évènements. De même, en cas d’intérim de la présidence de la République, la révision est interdite comme le mentionne l’article 7. Par ailleurs, depuis la décision du Conseil Constitutionnel de 1992, la révision de la Constitution est interdite dans le cas de l’application de l’article 16, c’est à direlorsque la Nation, ses engagements ou ses institutions sont menacées, car les pouvoirs consentis alors au Président ont pour objectif de rétablir l’état constitutionnelnormal. Ces assertions marquent bien les mesures prises par les instigateurs (et modificateurs) de la Constitution, par peur d’un renouvellement d’expériences tragiquespassées, de rigidifier les procédures de modifications de la Constitution afin de stabiliser les institutions de la République. 2) Des limites non écrites, dans l’esprit de la Constitution Il existe des limites qui ne figurent pas dans la Constitution, mais s’imposent néanmoins à l’exercice du pouvoir de révision.Marie-Françoise Rigaux les appelle « les limites matérielles déduites d'une interprétation doctrinale ».Autant que la « supraconstitutionalité externe », pour reprendre les termes de Louis Favoreux, comme celle exercée par les normes de droit européen sur les Etatsmembres prime sur les Constitutions nationales, il existe une « supraconstitutionalité interne » qui définit un cadre au champ d’action du pouvoir de révision.Dans le bloc de Constitutionalité par exemple, si un projet de révision engendre un conflit entre deux normes, le juge constitutionnel qui reconnaît une hiérarchieentre une norme constitutionnelle de premier rang et une norme constitutionnelle de degré inférieur, va faire en sorte que la règle de premier rang soit hors d’atteintede la révision.Il existe aussi des principes qui n’ont pas de concrétisation matérielle, donc non formulés par les textes constitutionnels, mais qui ont aux yeux des jugesconstitutionnels une valeur prépondérante sur certaines normes constitutionnelles de second rang. Un certain nombre de thèses déduisent des limites à la révision de l’esprit de la Constitution.

Il n’y aurait alors pas que des limites découlant de dispositionsconstitutionnelles expresses, mais on trouverait des restrictions découlant de l’esprit même de la Constitution ; ce sont les limites « implicites », ou limites «immanentes », déduites de l’esprit de la Constitution.Il y a des dispositions politico-philosophiques à la base de la Constitution, qui en forment son essence.

Le pouvoir de révision ne saurait mettre en cause cesdispositions relatives à l’intangibilité du régime politique.La modification de ces dispositions rimerait dans le cas inverse avec l’effondrement du système politique qui se verrait être substitué par un autre.Le Professeur Georges Burdeau par exemple explique que « l'organe révisionniste ne saurait, sans commettre un détournement de pouvoir, ruiner les basesfondamentales du système politique auquel est liée son existence ». Un certain nombre de restrictions non inscrites dans les textes constitutionnels que les juges constitutionnels traduisent et interprètent, limitent ainsi implicitement etoccultement l’exercice du pouvoir de révision, presque au même titre que le font les limites écrites. II/ La réalité de la pratique et l’interprétation des textes révèlent le pouvoir de révision comme discrétionnaire. A.

Les sanctions prévues en cas de dérogation au cadre de la révision octroyant une certaine liberté. Il existe un panel de différentes sanctions théoriquement envisageables, prévues pour contrecarrer l’outrepassement potentiel des limites à la révision d’un des agentsen charge.En effet, aucune limite ne serait contraignante si elle ne faisait l’objet d’une sanction.Les conséquences des sanctions prévues dans le cas d’infraction à une limite ou à une condition de procédure de la révision ne sont pas identiques.

Elles diffèrentdans le degré de la répression.Alors que la violation d’une des limites ne va annuler qu’une partie du projet de révision, la transgression de la procédure prévue va, elle, engendrer la non validitévoir l’annulation totale de la proposition de révision.Il est cependant observé que les sanctions prévues ne sont pas toujours des moyens efficaces pour assurer la conformité de la révision aux normes constitutionnelles.Seule l’invalidation des lois prononcée suite au contrôle constitutionnel est réellement efficient. 1) Des sanctions préventives et des sanctions répressives. Kelsen, dans un article intitulé La garantie juridictionnelle de la constitution prévoit des sanctions pour assurer la conformité des lois ordinaires à la constitution.Il parle de sanctions préventives et sanctions répressives.Les préventives tendent à « prévenir la confection des actes irréguliers » (sous-entendus étatiques).

Le Président peut dans certains cas interrompre la procédure derévision constitutionnelle, lorsque celle-ci est contraire aux limites à la révision.

Ainsi, en 1973 et 1974, le Président ne donna pas suite à un texte pourtant approuvépar chacune des deux chambres.

Il peut par ailleurs, dans certaines circonstances d’irrégularité, refuser la promulgation des lois de révision constitutionnellescontraires à ces limites. Les sanctions répressives, elles, se subdivisent en sanctions personnelles et sanctions objectives.

Pour les sanctions personnelles, il s’agit de la possibilité de mettre enjeu la responsabilité du chef de l’Etat qui a promulgué une loi inconstitutionnelle, et celle de ses ministres qui ont appliqué leur contreseing.Les sanctions objectives s’illustrent, elles, par la nullité et l’annulabilité de la loi constitutionnelle promulguée. Ces mesures, en plus du contrôle constitutionnel, sont pour Kelsen ce qui doit garantir la conformité des lois à la Constitution.Elles sont jugées, qu’elles soient pénales, préventives ou personnelles, pas assez efficace quand elles s’appliquent pour réellement contraindre le pouvoir de révision,qui arrive à contourner les limites. 2) Second bémol : le contrôle de la constitutionnalité. Les limites définies sont inutiles si elles peuvent être ignorées par le pouvoir de révision.

Cette question à propos des limites ouvre sur une interrogation quant à leurréelle effectivité.

Dans l’Etat de droit, le juge constitutionnel est sensé garantir ces normes.Quand le contrôle constitutionnel, qui seul peut invalider les lois, est-il possible ?Le contrôle de constitutionnalité intervient avant la promulgation de la loi.

Il ne peut être demandé que par le Président de la République, le Premier Ministre, lePrésident du Sénat ou celui de l’Assemblée Nationale.

Depuis 1974, un collège de 60 députés ou 60 sénateurs peut en être à l’origine également.

La demande unefois énoncée est transmise au Conseil Constitutionnel, qui va apprécier la conformité de la révision au bloc de constitutionnalité.La question que l’on se pose lors de l’examen de la loi est « la loi de révision constitutionnelle en question est-elle conforme aux dispositions de la constitution quirèglent sa création et en particulier aux dispositions qui lui imposent des limites ? »C’est au juge constitutionnel de savoir comment résoudre un éventuel conflit entre la loi de révision en question et les dispositions de la Constitution organisant sacréation et lui imposant des limites.. »

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