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Le juge administratif et les normes internationales

Publié le 20/04/2012

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C'est au cours de la 5ème république que la question de la hiérarchie des normes s'est sérieusement posée. En effet, dans l'ordre interne, la question de la supériorité de la constitution puis du bloc de constitutionnalité sur la loi, acte auparavant perçu comme sacrée, issue de la volonté générale, s'est posée avec la création du conseil constitutionnel et la notion de constitution placée au sommet de l'ordre juridique interne. Mais au lendemain de la seconde guerre mondiale on a vu se multiplier les Normes internationales, en particulier avec la création de l'Union Européenne. Si la hiérarchie des normes dans le système interne était claire, l'apparition des normes internationales a complexifié le tout. Le droit international constitue donc une part croissante des normes applicables par le juge administratif. La France est ainsi partie à plus de 6 000 traités et en conclut 200 par an. L'article 55 de la constitution affirme qu'un traité régulièrement signé, ratifié et publié par tous les états partis à une valeur normative supérieure à la loi. Mais les traités ne sont pas les seules normes de droit international. S'il existe la coutume internationale et les principes généraux du droit international, on se concentrera surtout ici sur le droit communautaire dérivé. 

« L'article 55 de la constitution dispose qu'un traité, une fois régulièrement approuvé, ratifié, et réciproquement appliqué par les parties au traité, a une valeur normative supérieure à celle de la loi internet votée par le parlement.

On peut alors facilement imaginer qu'il reviendrait au conseil constitutionnel d'assurer cette hiérarchie.

Il n'en est rien.

En effet dans son arrêt CC 74-54 DC interruption volontaire de grossesse du 15 janvier 1975 le conseil constitutionnel affirme qu'il n'est pas juge de conventionalité.

Dans cet arrêt le conseil considère en effet, étrangement au regard de l'article 55, qu'une loi contraire à un traité n'est pas forcément contraire à la constitution.

Le conseil constitutionnel refusant de faire ce contrôle, il revient aux juridictions ordinaires de faire un tel contrôle.

Si la cour de cassation s'est vite pliée à cela avec son célèbre arrêt Jacques Vabres ou elle reconnait la supériorité des traités sur les lois, l'ordre administratif a été beaucoup plus réticent.

En effet la date charnière est la date à laquelle a été rendu l'arrêt Nicolo, le 20 octobre 1989. Avant cet arrêt, le conseil d'état a mis en place des palliatifs pour éviter de faire ce contrôle.

En effet, il a d'abord refusé d'interpréter les traités et il renvoyait au ministre des affaires étrangères le soin d'apporter du sens à une disposition d'un traité.

Le conseil justifiait cela en arguant ne pas vouloir s'immiscer dans les affaires étrangères de la France.

Mais assez vite, on s'est rendu compte qu'un procès ou l'état était juge et partie contrevenait à l'article 6 de la CEDH.

Le conseil d'état utilisait aussi la théorie de l'acte clair, théorie selon laquelle le juge disait ne pas avoir besoin d'aide à l'interprétation. Le conseil d'état a aussi utilisé les principes de règlements des conflits de normes dans le temps.

Par cette technique le juge administratif a fait passer le traité au dessus de la loi national, non pas au sens de la hiérarchie des normes, mais en revenant au principe de lex posterior derogat priori.

Dans un cas ou la loi nationale est postérieure au traité il revenait au principe de la loi général ne l'emporte pas sur la règle spéciale. Ainsi le juge administratif a évité d'établir une hiérarchie : il arrivait bonnant malant à placer les traités au dessus. Le conseil d'état a donc refusé de voir la vérité de l'article 55.

Dans son arrêt Conseil d'Etat, sect.

1er mars 1968, Syndicat nationale de fabriquant des semoules de France, le juge administratif a refusé d'écarter une loi pour contrariété à une disposition européenne.

Il argumente tout d'abord qui est le serviteur de la loi et non son juge et il considère ensuite qu'il n'a pas à faire le contrôle de constitutionnalité, or la contrariété d'une loi à une disposition européenne viole l'article 55, ce qui est une violation de la constitution. Et c'est jusqu'en 1989 que le Conseil d'Etat va persister contre le conseil constitutionnel, contre la cour de cassation et contre la CJCE qui affirme que les juridictions ordinaires doivent appliquer le droit communautaire (CJCE, 9 mars 1978, société anonyme Simmental). Le revirement a lieu le 20 octobre 1989 (Conseil d'état Ass., 20 octobre 1989, Nicolo) dans le célèbre arrêt Nicolo.

Dans cet arrêt le juge administratif reconnait sa compétence de contrôle de conformité de la loi aux traités.

Mais il est intéressant de noter qu'il ne s'agit pas la d'un arrêt de principe et c'est l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat 16 ans plus tard, Conseil d'Etat, 5 janvier 2005, Deprez et Bayard, dans lequel le juge administratif s'incline devant l'article 55.

Il convient de rappeler, que même si le Conseil d'Etat a enfin céder, le contrôle qu'il opère est plus un contrôle de compatibilité, plus qu'un contrôle de conformité. Peut être convient il de rappeler que la supériorité du droit originaire sur les actes administratifs a tout de suite été affirmé dans l'arrêt du Conseil d'Etat du 30 mai 1952, l'arrêt Kirkwood. Si la question de la hiérarchie entre loi et traité a enfin été tranchée par le juge administratif, celui-ci est beaucoup plus réticent à prendre parti quant au conflit constitution / traité, entre les deux sources supra législatives, au sommet de la hiérarchie.. »

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