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Anna cavala ...

Publié le 20/04/2014

Extrait du document

«Quand j’arrive à la gare de l’Est, j’espère toujours secrètement qu’il y aura quelqu’un pour m’attendre. C’est con. J’ai beau savoir que ma mère est encore au boulot à cette heure- là et que Marc n’est pas du genre à traverser la banlieue pour porter mon sac, j’ai toujours cet espoir débile. » Les personnages de ces douze nouvelles sont pleins d’espoirs futiles, ou de désespoir grave. Ils ne cherchent pas à changer le monde. Quoi qu’il leur arrive, ils n’ont rien à prouver. Ils ne sont pas héroïques. Simplement humains. On les croise tous les jours sans leur prêter attention, sans se rendre compte de la charge d’émotion qu’ils transportent et que révèle tout à coup la plume si juste d’Anna Gavalda. En pointant sur eux ce projecteur, elle éclaire par ricochet nos propres existences. Saint-Germain-des-Prés ! ?... Je sais ce que vous allez me dire : « Mon Dieu, mais c’est d’un commun ma chérie, Sagan l’a fait bien avant toi et telllllement mieux ! » Je sais. Mais qu’est-ce que vous voulez... je ne suis pas sûre que tout cela me serait arrivé sur le boulevard de Clichy, c’est comme ça. C’est la vie. Mais gardez vos réflexions pour vous et écoutez-moi car mon petit doigt me dit que cette histoire va vous amuser. Vous adorez les petites bluettes. Quand on vous titille le c½ur avec ces soirées prometteuses, ces hommes qui vous font croire qu’ils sont célibataires et un peu malheureux. Je sais que vous adorez ça. C’est normal, vous ne pouvez quand même pas lire des romans Harlequin attablé chez Lipp ou aux Deux-Magots. Évidemment que non. Vous ne pouvez pas. Donc, ce matin, j’ai croisé un homme sur le boulevard Saint- Germain. Je remontais le boulevard et lui le descendait. Nous étions du côté pair, le plus élégant. Je l’ai vu arriver de loin. Je ne sais pas, sa démarche peut- être, un peu nonchalante ou les pans de son manteau qui prenaient de l’aisance devant lui... Bref, j’étais à vingt mètres de lui et je savais déjà que je ne le raterai pas. Ça n’a pas loupé1, arrivé à ma hauteur, je le vois me regarder. Je lui décoche2 un sourire mutin, genre flèche de Cupidon mais en plus réservé. 1 loupé : raté, manqué 5Il me sourit aussi. En passant mon chemin, je continue de sourire, je pense à La Passante de Baudelaire (déjà avec Sagan tout à l’heure, vous aurez compris que j’ai ce qu’on appelle des références littéraires ! ! !). Je marche moins vite car j’essaye de me souvenir... Longue, mince, en grand deuil... après je ne sais plus... après... Une femme passa, d’une main fastueuse, soulevant, balançant le feston et l’ourlet... et à la fin... Ô toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais. À chaque fois, ça m’achève. Et pendant ce temps-là, divine candeur, je sens le regard de mon saint Sébastien (rapport à la flèche, eh ! il faut suivre hein ! ?) toujours dans mon dos. Ça me chauffe délicieusement les omoplates mais plutôt crever3 que de me retourner, ça gâcherait le poème. J’étais arrêtée au bord du trottoir à guetter le flot des voitures pour traverser à la hauteur de la rue des Saints-Pères. Précision : une Parisienne qui se respecte sur le boulevard Saint-Germain ne traverse jamais sur les lignes blanches quand le feu est rouge. Une Parisienne qui se respecte guette le flot des voitures et s’élance tout en sachant qu’elle prend un risque. Mourir pour la vitrine de chez Paule Ka. C’est délicieux. Je m’élance enfin quand une voix me retient. Je ne vais pas vous dire « une voix chaude et virile » pour vous faire plaisir, car ce n’était pas le cas. Juste une voix. — Pardon... Je me retourne. Oh, mais qui est là ?... ma jolie proie de tout à l’heure. Autant vous le dire tout de suite, à partir de ce moment-là, pour Baudelaire, c’est foutu4. — Je me demandais si vous accepteriez de dîner avec moi ce soir... Dans ma tête, je pense « Comme c’est romantique...» mais je réponds : 2 décoche : fait 3 crever : mourir 4 foutu : fini

« manteau qui prenaient de l'aisance devant lui...

Bref, j'étais à vingt mètres de lui et je savais déjà que je ne le raterai pas. Ça n'a pas loupé1, arrivé à ma hauteur, je le vois me regarder.

Je lui décoche2 un sourire mutin, genre flèche de Cupidon mais en plus réservé. 1 loupé : raté, manqué 5Il me sourit aussi. En passant mon chemin, je continue de sourire, je pense à La Passante de Baudelaire (déjà avec Sagan tout à l'heure, vous aurez compris que j'ai ce qu'on appelle des références littéraires ! ! !).

Je marche moins vite car j'essaye de me souvenir...

Longue, mince, en grand deuil...

après je ne sais plus...

après...

Une femme passa, d'une main fastueuse, soulevant, balançant le feston et l'ourlet...

et à la fin...

Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais. À chaque fois, ça m'achève. Et pendant ce temps-là, divine candeur, je sens le regard de mon saint Sébastien (rapport à la flèche, eh ! il faut suivre hein ! ?) toujours dans mon dos.

Ça me chauffe délicieusement les omoplates mais plutôt crever3 que de me retourner, ça gâcherait le poème. J'étais arrêtée au bord du trottoir à guetter le flot des voitures pour traverser à la hauteur de la rue des Saints-Pères. Précision : une Parisienne qui se respecte sur le boulevard Saint-Germain ne traverse jamais sur les lignes blanches quand le feu est rouge.

Une Parisienne qui se respecte guette le flot des voitures et s'élance tout en sachant qu'elle prend un risque. Mourir pour la vitrine de chez Paule Ka.

C'est délicieux. Je m'élance enfin quand une voix me retient.

Je ne vais pas vous dire « une voix chaude et virile » pour vous faire plaisir, car ce n'était pas le cas.

Juste une voix. — Pardon... Je me retourne.

Oh, mais qui est là ?...

ma jolie proie de tout à l'heure. Autant vous le dire tout de suite, à partir de ce moment-là, pour Baudelaire, c'est foutu4.. »

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