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Comment expliquer que l'homme n'existe jamais seul ?

Publié le 17/08/2005

Extrait du document

C'est-à-dire chacun, de deux biens, choisira celui qu'il juge être le plus grand, et de deux maux celui qui paraîtra le moindre. Je dis expressément ce lui qui au chois lui paraîtra le plus grand ou le moindre ; je ne dis pas que la réalité soit nécessairement conforme à son jugement. Et cette loi est si fermement écrite dans la nature humaine qu'on doit la ranger au nombre des vérités éternelles que nul ne peut ignorer. Elle a pour conséquence nécessaire que nul ne promettra sinon par ruse d'abandonner quelque chose du droit qu'il a sur tout, et que personne absolument ne tiendra la promesse qu'il a pu faire, sinon par crainte d'un mal plus grand ou espoir d'un plus grand bien. Pour le faire mieux entendre, supposons qu'un voleur me contraigne à lui promettre de lui faire abandon de mes biens où il voudra. Puisque mon droit naturel est limité, comme je l'ai montré, par ma seule puissance, il est certain que, si je puis par ruse me libérer du voleur en lui promettant ce qu'il voudra, il m'est, par le Droit Naturel, loisible de le faire, autrement dit de conclure par ruse le pacte qu'il voudra. Ou bien supposons que, sans intention de fraude, j'ai promis à quelqu'un de m'abstenir pendant vingt jours de pain et de tout aliment et qu'ensuite je voie que j'ai fait une promesse insensée et que je ne puis la tenir sans le plus grand dommage ; puisque, en vertu du Droit Naturel, de deux maux je suis tenu de choisir le moindre, je peux d'un droit souverain manquer de foi à ce pacte et faire que ce qui a été dit soit comme s'il n'avait pas été dit. Et cela m'est loisible, dis-je, suivant le Droit Naturel, soit que, par une raison vraie et certaine, je voie que j'ai mal fait de promettre, soit que par une opinion je croie le voir : dans les deux cas, en effet, que je le voie vraiment ou faussement, je craindrai le plus grand mal et m'efforcerai par tout moyen de l'éviter, comme il est institué par la Nature. De là nous concluons que nul pacte ne peut avoir de force sinon pour la raison qu'il est utile, et que, levée l'utilité, le pacte est levé du même coup et demeure sans force (...).

Analyse du sujet : Le sujet part d'un constat : l'homme n'existe jamais seul. Ce constat n'est pas remis en cause par le sujet (ce qui ne nous empêche pas de le faire si nous en ressentons le besoin). On  nous demande alors d'expliquer ce constat empirique : de fait, on constate que l'homme n'existe jamais seul, mais pourquoi est-ce ainsi ?     Avant de tenter de répondre à la question (il faut bien noter qu'il ne faut jamais répondre à une question philosophique par une énumération de toutes les réponses qui nous viennent immédiatement à l'esprit), il nous faut : 1.    nous demander si le présupposé du sujet est fondé (est-il bien vrai que l'homme n'existe jamais seul ?) ; 2.    nous demander ce que signifie « exister seul «, et en particulier « seul « : nous demande-t-on pourquoi l'homme ne vit jamais sans le reste du monde (animaux, plantes, éventuellement Dieu, etc.) ou pourquoi il n'est jamais « seul au monde «, comme on dit, c'est-à-dire pourquoi il n'existe jamais sans d'autres hommes ? 3.    nous demander ce que signifie expliquer. Avant de ses lancer dans une explication, il est en effet bon de savoir ce qu'est une explication : nous demande-t-on de trouver des causes (naturelles ou historiques), des raisons (psychologiques), etc. ?     Il pourra éventuellement être utile de s'arrêter sur l'utilisation du terme générique « l'homme «. Pourquoi ne pas avoir dit « les hommes « ou « un homme « ? Utiliser le terme « l'homme «, c'est déjà considérer les hommes en tant qu'ils forment un ensemble, une espèce ; ce n'est pas encore considérer qu'ils vivent forcément ensemble, mais c'est déjà ne pas les appréhender comme des entités séparées et indépendantes. C'est considérer qu'il y a une essence commune à tous les hommes, qui fait que tel homme est un homme, au même titre que son voisin. C'est peut-être ce qui fait qu'un homme est homme (le langage, la raison ? le logos en général) qui fait que les hommes n'existent jamais seuls. Que signifie ici « jamais « ? Cela signifie-t-il qu'aucun homme ne vit seul ? qu'un homme ne vit seul à aucun moment de sa vie ? Que, pris dans leur globalité, les hommes ne sont pas seuls sur Terre ? L'utilisation du terme « homme « nous amène à penser qu'il s'agit, dans ce sujet, d'opposer les hommes en tant qu'espèce à d'autres espèces présentes sur la Terre. Ce problème nous paraît cependant nettement plus faible (et moins intéressant) que celui consistant à se demander pourquoi l'homme n'existe jamais seul au sens où il ne vit jamais sans la présence d'autres hommes, problème également posé par ce sujet. Problématisation : De fait, l'homme n'est pas seul sur Terre. Il ne peut donc pas exister sans la présence d'autres espèces. Mais, en admettant que le choix soit possible, l'homme pourrait-il vivre sans d'autres espèces ? Pourrait-il, seul au monde, naître et se conserver ? Cette interrogation nous amènera non seulement à chercher pourquoi l'homme ne peut pas exister sans d'autres espèces vivantes, mais aussi à nous demander si un homme peut exister sans vivre en communauté avec d'autres hommes, c'est-à-dire d'autres membres de son espèce.

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