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COMMENTAIRE COMPOSE : Oh ! je fus comme fou…, Victor HUGO

Publié le 05/12/2010

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fou

Victor HUGO (1802-1885), célèbre écrivain, dramaturge, poète, homme politique, académicien et intellectuel français est considéré comme l’une des plus importantes figure du XIX siècle. Le 4 septembre 1843, sa fille Léopoldine et son époux se noient dans la Seine. Il s’en suit une période pendant laquelle Victor HUGO n’écrit plus et se consacre à la politique. Exilé en 1853, suite à la publication des « Châtiments « recueil de poème décrivant sa colère et son indignation face au coup d’Etat de Napoléon Bonaparte, il écrit « Les Contemplations « (1855) d’où est tiré le poème « Oh ! je fus comme fou dans le premier moment «. Il y décrit sa réaction et ses sentiments face à la perte de sa fille.

Il s’agira  de montrer l’évolution des sentiments, de l’état de Victor HUGO : de la douleur à la folie en passant par le déni de la réalité des choses.

Nous montrerons tout d’abord que l’auteur exprime une douleur forte qui le mène dans une phase de refus, de déni, pour ensuite étudier comment le poète sombre progressivement dans un état de détresse délirante.

 

Victor HUGO trouve dans l’écriture de ce poème un moyen d’exprimer sa douleur suite à la mort de Léopoldine. Nous montrerons que le poète expose sa souffrance et cherche à provoquer chez le lecteur un élan de compassion pour ensuite réagir, réfléchir à la question et finalement rester dans l’inacceptation la réalité des choses. 

D’abord, la première partie du poème illustre le tourment, l’abattement, la tristesse de Victor HUGO par l’utilisation d’un champ lexical de la souffrance (« pleurai «, « amèrement «, « souffert «, « souffrance «, « malheurs «, « désespoir «). Au vers 3, il attache une part de responsabilité à « Dieu « : l’auteur à besoin d’un responsable or il ne peut s’en remettre qu’à Dieu. Puis on observe une interruption de la narration qui laisse place au discours direct : « Tout ce que j’éprouvais, l’avez-vous éprouvé ? «. Ici le narrateur s’adresse directement au lecteur à l’aide d’une interrogation qui montre déjà que V.H. est face à une réalité qu’il ne peut soutenir. Ce vers montre bien que V.H. cherche à créer un élan de compassion et de  sympathie pour lui, le lecteur s’interroge…  Au vers 6, V.H. va jusqu’à un accès de violence, de mort : « Je voulais me briser le front sur le pavé «, la souffrance est telle que V. H. voudrait se donner la mort pour y échapper. 

Cela le pousse ensuite à se révolter. Le champ lexical de l’horreur (« terrible «, « horrible «, « affreux «, « malheur sans nom «) évoque le choc éprouvé par V.H. lorsqu’il prend connaissance du drame qui le pousse à réagir. Vers 7 à 9, la ponctuation et la répétition des mots « et « et « puis « donne un rythme saccadé au texte pour recréer le cheminement de la réflexion du poète. Les verbes à l’imparfait de répétition («me révoltais «, « fixais mes regards «, « n’y croyais pas«, « m’écriais «) montrent que les pensées de révolte de V.H. l’obsèdent. «Est-ce que Dieu permet de ses malheurs sans nom «, ici l’auteur fait encore allusion à la responsabilité de Dieu. Le verbe permettre a un sens fort : Dieu a-t-il permis que cet accident arrive ? L’auteur pose en réalité la question sans attendre de réponse comme s’il réfléchissait à voix haute.

Pour qu’enfin, cette réflexion le conduise au déni total de la triste réalité. Le vers 9 : « Et je n’y croyais pas, et je m’écriais : Non ! «, ici la négation qui se trouve accentuée par le contre rejet témoigne de l’inacceptation de l’auteur de la mort de sa fille. La ponctuation est expressive marque la colère de V.H. Les vers 12 et 13 confirment cette idée de déni : « Il me semblait que tout n’était qu’un affreux rêve «. Ici il paraphrase le cauchemar par « affreux rêve «, un peu comme s’il allait se réveiller de ce cauchemar, cette sorte de vision irréelle. « Elle ne pouvait pas […] « et « Que c’était impossible […] «, ces deux débuts de vers illustrent parfaitement l’inacceptation  de l’auteur. V.H. affirme ici un fait, il était impossible que sa fille lui eut été retirée. 

La douleur immense que ressent le poète est donc bien à l’origine de l’inacceptation de la réalité, le déni qui est la seconde étape du deuil.  

 

Dans ce poème, V.H. se refuse à accepter l’inacceptable. Et c’est cette phase de refus qui va être le déclencheur de sa folie. Nous nous attacherons d’abord à montrer l’agitation mentale du poète tout au long du poème pour étudier l’expression de la folie du poète. 

D’abord ce poème frappe par l’apparition successive et de manière discontinue de plusieurs sentiments, émotions : le choc, la douleur, la colère, le déni et enfin la folie du poète. Et cette foule de sentiment autant que l’alternance du discours indirect au direct illustre bien l’agitation mentale du locuteur. La présence de réflexion inachevée, sans conclusion (« Est-ce que Dieu permet de ces malheurs sans nom / Qui font que dans le cœur le désespoir se lève ? «) contribue aussi à confirmer cette idée. Par ailleurs on retrouve deux polyptotes (« [...] dont l’âme a souffert ma souffrance, « ; « Tout ce que j’éprouvais, l’avez-vous éprouvé ? «) figure de répétition qui, associée avec la répétition des mots « et « et « puis « et à la ponctuation donnant un rythme saccadé au texte, contribue à montrer un V.H. perdu, confus.

Ensuite ce poème, surtout la fin, marque l’apparition de la folie hallucinatoire de l’auteur. Le locuteur rentre dans un délire hallucinatoire auditif et visuel dans lequel Léopoldine est vivante. Les deux verbes conjugués à l’imparfait aux vers 14 et 16 (« je l’entendais rire « et « j’allais la voir «) confirment tout à fait cette idée d’hallucination auditive et visuelle. Puis on observe un saut de ligne, entre les vers 16 et 17, qui sépare le début du poème du quatrain final. Ce procédé stylistique marque une coupure avec la réalité, cette coupure est d’ailleurs accentuée par un passage au discours direct et au système du présent dans le quatrain final (« elle vient «, « elle est « présent simple ; « j’ai dit «, « a parlé « passé composé ; « Tenez «, « laissez-moi «  présent de l’impératif) alors que presque tout le reste du texte est écrit au système du passé. La forte ponctuation, les phrases exclamatives et les coupures irrégulières de ce quatrain donnent un rythme saccadé au texte illustrant la forte émotion à laquelle V.H. est soumis. Dans ces derniers vers, le locuteur essaye de convaincre le lecteur de la présence de sa fille dans la maison, il s’adresse directement au lecteur, qui ne partage pas son hallucination et donc sa vision des choses, et tente de le persuader : « Tenez ! voici le bruit […] «, « Attendez ! elle vient ! «, « Car elle est […] dans la maison «. Les deux derniers mots « sans doute « montre bien que le locuteur hallucine, imaginant sa fille Léopoldine vivante dans la maison. 

 

On a donc bien montré que ce poème était un moyen, pour V.H. d’exprimer sa douleur suite a la mort de sa fille. Une souffrance qui débouche dans une phase de déni et de détresse hallucinatoire illustrant en quelque sorte le titre du poème « Oh ! Je fus comme fou… «. 

Finalement, l’écriture de ce poème est un moyen pour V.HUGO de supporter le décès de sa fille et d’évoquer sa fille dans tous les sens du terme. V.HUGO rend vie à Léopoldine grâce aux poèmes parlant d’elle qu’il a écrits. On peut même penser que la simple lecture du poème immortalise sa fille : Léopoldine.

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