Devoir de Philosophie

Cours de Microéconomie : le monopole

Publié le 23/04/2013

Extrait du document

Chapitre 4 STRUCTURES DE MARCHÉ EN CONCURRENCE IMPARFAITE Introduction Quand l'une des hypothèses de la concurrence parfaite fait défaut, la concurrence devient imparfaite. Sauf exception (cf oligopole), les prix et les quantités d'équilibre sur le marché s'écartent alors durablement de ceux de l'équilibre concurrentiel. Si des barrières règlementaires ou technologiques par exemple empêchent d'autres entreprises d'entrer dans un secteur industriel, les firmes présentes peuvent durablement jouir de rentes de situation, rentes d'autant plus importantes que le nombre de firmes est faible. En outre, ce nombre restreint de firmes leur confère un pouvoir d'influence sur le prix, ces dernières peuvent aussi s'entendre pour fixer un prix qui leur soit mutuellement avantageux si elles ne sont que deux. Les caractéristiques de la concurrence seront également modifiées si les produits offerts par les entreprises ne sont pas totalement substituables (exemple de Coca et de Pepsi ou McDonalds et Quick). Chaque producteur détenant un monopole sur sa propre marque (concurrence monopolistique). Même s'il y a concurrence entre les producteurs, les mécanismes sont très éloignés de la concurrence parfaite I/ Le Monopole Le monopole se définit comme une situation de marché où un seul producteur fait face à une infinité de demandeurs. Si cette structure a toujours été combattue par les classiques car elle est source d'un manque d'efficacité pour la société, d'autres économistes à l'image de J.A Schumpeter, lui trouvent certaines vertus puisqu'elle permet aux monopoleurs d'engranger une rente comme récompense du risque pris pour innover. Comment fonctionne-t-il alors ? Est-il une forme inférieure à la concurrence et si oui pourquoi ? A)Le monopole pur Les caractéristiques du monopole Elles sont au nombre de cinq : Les quantités vendues dépendent uniquement du prix et du comportement des consommateurs. Cette absence de concurrence peut être délibérément instaurée ou naturelle. L'unicité de l'offreur n'est pas toujours indispensable, le plus important est que P soit fixé comme s'il n'en existait qu'un seul (cf OPEP). La demande qui s'adresse au monopoleur est celle du marché. Le monopoleur sait que le prix varie lorsqu'il décide de varier Q. - Le monopole peut être temporaire ou sur une partie de la gamme de produits offerts par la firme. 1)Le monopole générateur d'une situation sous-optimale La concurrence parfaite est au c?ur de la théorie de l'équilibre général walrasien. Elle constitue un idéal à atteindre. Le monopole constitue donc une situation dommageable à maints égards. a - La recette du monopole Rappel : Dans le cadre de la CPP, l'entreprise est réduite à sa fonction de production, elle se limite à combiner de la façon la plus efficace possible des facteurs de production de façon à minimiser les coûts. Conséquence des hypothèses de la CPP : hypothèse d'atomicité : signifie que les agents économiques, producteurs ou consommateurs, sont très nombreux et de taille réduite de sorte que les décisions individuelles de chacun ne peuvent influer sur les variables d'équilibre et en particulier sur les prix et les quantités échangées. L'entreprise est donc Price taker, sa seule marge de man?uvre est de déterminer en fonction du prix du marché et de la structure de ses coûts la quantité qu'elle devra produire. * La détermination du prix et des quantités en situation de monopole Le monopole est le seul à produire le bien, il capte donc à lui seul la totalité de la demande. - En CPP, toute la production est vendue du moment que prix = coût marginal. Une entreprise en CPP fait donc face à une courbe de demande horizontale. Cette condition assure l'optimum social c'est-à-dire la maximisation du surplus et des profits des entreprises. - Au contraire, le monopole étant le seul sur le marché à répondre à la demande totale du produit, le prix de vente n'est plus une donnée exogène fixée sur le marché mais dépend des quantités vendues. La demande adressée à l'entreprise sera donc une fonction décroissante du prix. L'entreprise peut modifier le prix du bien, et la demande adressée à la firme en monopole est donc sa courbe de recette moyenne. RM = PQ/Q = P Comme la demande est une fonction décroissante du prix de vente, plus la production augmente, plus le prix diminue. Autrement dit, plus le monopole augmente sa production, plus il doit diminuer son prix (voir ex p 375 manuel). Conséquence : lorsque le monopole augmente la quantité qu'il vend, cela a 2 effets sur sa recette totale : - un effet quantité (à la hausse) L'augmentation de la production fait augmenter la recette totale. - un effet prix (à la baisse) Plus la quantité produite augmente, plus le prix de vente est faible et plus la recette moyenne diminue. Note : la recette marginale peut devenir négative si l'effet-prix domine l'effet quantité : la production d'une unité supplémentaire fait diminuer le prix suffisamment pour faire baisser la recette totale. 2) Comment le monopole maximise-t-il son profit ? Pour maximiser son profit, le monopole doit, comme l'entreprise concurrentielle, égaliser la recette marginale avec le coût marginal. Rappel : La recette marginale correspond à l'augmentation de la recette totale due à la dernière unité vendue. Comme le prix de vente diminue quand les quantités vendues augmentent, la recette marginale est décroissante. Elle est aussi toujours inférieure au prix de vente. Détermination du prix de monopole : - La quantité qui maximise le profit est celle qui égalise le coût marginal avec la recette marginale. Note : dans le cas du monopole on ne parle pas de courbe d'offre étant donné que l'entreprise ne détermine pas la quantité à produire en fonction du prix, mais elle fixe le prix en même temps que la quantité. - Le prix est celui qui correspond aux plans des demandeurs pour cette quantité. Le prix de vente, P (point B) est déterminé en fonction de Q, sur la droite de demande (point A) Donc : Profit = RT - CT ou : (RT/Q - CT/Q) × Q RT/Q représente la recette moyenne soit P CT/Q représente le coût moyen CMT Donc profit = (P - CMT) × Q soit prix - coût unitaire Le profit dégagé par le monopole ou profit « pur « est égal à la recette totale (prix de vente multiplié par les quantités vendues) moins le coût total (coût moyen multiplié par les quantités vendues). 3) Les distorsions de la structure de monopole Pourquoi le monopole n'est-il pas à priori un bon mode d'organisation du marché ? - Tout d'abord le prix fixé est supérieur au coût marginal à la différence de la situation concurrentielle, ce qui va à l'encontre de l'intérêt du consommateur. Si on se réfère à la demande en situation de concurrence (celle qui retrace les plans des consommateurs), l'équilibre socialement efficace se trouverait donc au croisement des courbes d'offre et de demande (l'offre étant représentée par le coût marginal). Le prix serait alors égal au coût marginal et déterminerait la quantité efficace (la plus élevée possible compte tenu des plans des producteurs et des consommateurs). Cependant, le monopole choisit de produire et de vendre la quantité qui correspond à l'intersection des courbes de recette marginale et de coût marginal et produit donc moins qu'en situation concurrentielle. L'équilibre se situe donc à un prix plus élevé avec une quantité échangée moindre On a donc une diminution du surplus du consommateur. Si le marché était en situation de concurrence pure et parfaite, les quantités vendues, seraient supérieures à celles du monopole, le prix de marché, inférieur à celui du monopole, et le profit moins élevé. De même, on peut montrer que le surplus du producteur augmente : La « charge morte « du monopole Cependant, la perte enregistrée par le consommateur n'est pas compensée par l'augmentation du surplus du producteur. Il subsiste une perte sèche : Le bien être social est alors inférieur à ce qu'il aurait pu être. Le monopole présente donc une perte nette pour la société, appelée « poids mort « ou encore « charge morte « et matérialisée par le triangle d'Arnold Harberger. Celle-ci est la mesure de l'inefficience dans l'allocation des ressources ; égale à la diminution nette du surplus total (le surplus du consommateur plus le surplus du producteur) qui résulte d'une limitation de la production au-dessous de son niveau efficient. Par ailleurs, le monopole provoque ce qu'on appelle une dissipation de la rente. En effet la recherche de monopole justifie des stratégies et des dépenses qui sont à déduire de la future rente. Ce gaspillage est aussi à compter dans la perte de bien être social. L'ensemble de ces développements repose sur l'hypothèse que les rendements sont décroissants, et dans ce cas, le monopole a du mal à trouver une justification tant économique que sociale. Pourtant, dans certains cas, les économies d'échelle sont si importantes qu'une seule entreprise peut fournir l'ensemble du marché tout en restant plus compétitive que tout autre concurrent Dans ce type d'industries, le monopole peut être plus efficace que la concurrence. Dans quel cas le monopole est-il préférable à la concurrence et comment alors réglementer ce monopole ? B/ Le monopole peut dans certaines conditions être source d'efficacité et de croissance 1) Le monopole temporaire récompense de l'innovation et source de croissance L'objectif des entreprises est de maximiser leur profit. Or paradoxalement, la concurrence parfaite conduit à l'annulation de ceux-ci. La seule manière de conserver cette « rente « est donc de s'extraire de la concurrence. Cela signifie-t-il que le monopole aboutit systématiquement à une moindre efficacité et à une situation sous optimale ? Si les firmes ne peuvent innover sans voir tomber dans le domaine public le fruit de leurs efforts et risques, si elles ne peuvent se démarquer de leurs concurrents en différenciant leur produit, quelle va être leur motivation ?...Car à l'équilibre, le profit (la rente) est nul, ce qui revient à plaider pour un état stationnaire dont personne ne tire avantage et où toute dépenses d'énergie serait gaspillage. Pour Schumpeter, le progrès vient de l'innovation, de la destruction créatrice et de la volonté de l'entrepreneur de dominer le marché. Le monopoleur peut aussi procéder à une discrimination par les prix qui consiste à appliquer des prix différents en fonction des clients et des marchés. Cela provient d'une différence des courbes de demande et d'élasticité-prix selon chaque groupe de demandeur et par la lourdeur de certains coûts fixes. C'est le cas par exemple pour les compagnies aériennes (monopole différencié). De cette manière, même si le surplus du consommateur peut être entièrement capté, l'ensemble de la demande est satisfaite et le profit supérieur à celui de concurrence parfaite. La surveillance de la concurrence doit donc pouvoir faire la différence entre un monopole qui capte la totalité du surplus du consommateur et celui qui résulte de l'innovation et qui est temporaire. Dans ce cas, si l'entreprise vend à des prix trop élevés, elle pourra être concurrencée par un nouvel entrant, on dit dans ce cas que le marché est contestable, et le monopole ne pourra garder sa position que si les prix qu'il pratique sont égaux au coût marginal. 2) L'existence de rendements croissants et le monopole naturel source d'efficacité dans un cadre réglementé ou de concurrence potentielle Le niveau de technologie nécessaire pour produire certains biens explique pourquoi dans certains cas, les marchés ne peuvent comprendre qu'une seule entreprise. Ces situations sont appelées monopoles naturels. Celui-ci apparaît quand les coûts moyens d'une entreprise baissent au-delà de la quantité que le marché est susceptible de demander (la courbe n'a plus la forme d'un U mais d'une grande cuvette). En bref, ils baissent continûment avec l'échelle de production (rendements croissants, économies d'échelle) (voir exemple de la distribution de l'eau, manuel). Une industrie est un monopole naturel lorsqu'une firme unique peut servir le marché à un coût inférieur à celui affiché par 2 firmes. La taille du marché est donc un élément important pour caractériser un monopole naturel. Le monopoleur naturel peut donc en théorie faire la pluie et le beau temps puisque tout entrant est forcément de plus petite taille et aura des coûts plus élevés. IL n'est donc pas inquiété par de nouveaux entrants. Pour autant, cette situation est-elle forcément un obstacle à la croissance ? 3) Comment concilier monopole, performance économique et bien-être ? a)La surveillance de la concurrence potentielle? L'existence d'un monopole naturel dans une industrie est liée à l'état de la technologie. Ainsi, tant que les télécommunications passaient par des lignes de cuivre, le marché conduisait à un monopole naturel. L'avènement de la téléphonie mobile a rompu cette situation. Cela signifie ainsi que les concurrents potentiels ne disparaissent pas pour autant et exercent une fonction de surveillance des prix. Dès que ceux-ci deviennent supérieurs au coût moyen, les rivaux entrent sur le marché. C'est la concurrence potentielle ou la contestabilité des marchés (Baumol). La contestabilité implique des coûts irrécupérables (sunk costs) très faibles sinon nuls, sinon, la « prime « ou l'avantage reste à l'entreprise déjà installée. Celle-ci est en effet en mesure de part sa taille, de mener une guerre des prix (prix = coût marginal). La situation de monopole est donc ici réversible et, si celui-ci perdure, c'est parce qu'il est plus efficace que les éventuels concurrents. Le monopole n'empêche donc pas la croissance. Cependant, certains économistes libéraux pensent que les cas de monopoles réellement « naturels « sont en fait très rares et la concurrence potentielle souvent empêchée par la réglementation ce qui nuit à l'efficacité économique et donc à la croissance. L'exemple le plus souvent cité est celui des compagnies aériennes dont les lignes intérieures, en particulier, n'étaient réputées rentables que pour un seul opérateur, justifiant ainsi les monopoles d'accès aéroportuaires longtemps réservés aux seules compagnies nationales par un argument de monopole « naturel « de réseau. Les résultats encore incertains de la libéralisation des lignes intérieures ne permettent pas cependant encore de trancher. Il existe ainsi des lignes sur lesquelles les prix ont fortement chuté, tandis que sur d'autres un seul opérateur est parvenu à se maintenir. b) L'intervention des pouvoirs publics Puisqu'ils sont techniquement plus efficients que la concurrence (ils produisent à moindre coût), l'Etat doit donc intervenir pour protéger les monopoles naturels. Cela revient en fait à un arbitrage entre efficacité économique et justice sociale. Permettre au monopole de dégager un profit tout en faisant en sorte que le prix soit le plus proche possible de celui de concurrence. - L'Etat peut alors réglementer le monopole en l'obligeant à appliquer un certain tarif. Quelle tarification doit-il alors adopter ? Une tarification au coût marginal est-elle efficace ? Non car si le coût moyen est décroissant, cela signifie que le coût marginal est tout le temps inférieur. Dans ce cas, l'entreprise enregistrerait des pertes (le prix serait inférieur au seuil de rentabilité). En pratique, les pouvoirs publics définissent donc une tarification légèrement supérieure au coût marginal (lire exemple de la fourniture d'électricité p 389). - La propriété publique Au lieu de réglementer, l'Etat peut devenir le « propriétaire « de la firme et l'administrer lui-même. L'existence de certains monopoles naturels qui délivrent des biens et services indispensables (exemple EDF) pose également le problème du prix. Tous les consommateurs devraient y avoir accès à un prix « abordable « (cf. réglementation européenne concernant le service universel). Or, un monopole bénéficie d'une rente, parce qu'il peut tarifer son produit ou son service, à un prix supérieur à celui d'une entreprise en concurrence. Plus largement, les monopoles publics ont vocation à produire des biens publics. Un bien public doit être défini par les deux propriétés suivantes (revoir les biens collectifs). - C'est un bien non rival, c'est-à-dire que les consommateurs ne sont pas rivaux dans sa consommation (par exemple, le fait que je bénéficie de l'éclairage public nocturne, ne prive pas mon voisin d'en bénéficier en même temps). - C'est un bien non exclusif, c'est-à-dire qu'aucun consommateur ne peut être exclu de sa consommation dès lors qu'il est présent sur le territoire national (par exemple, les routes nationales sont un bien public puisque leur accès est gratuit, à la différence de certaines autoroutes pour lesquelles l'usager acquitte un péage). L'impossibilité d'exclusion renvoie à l'absence de prix d'accès au service, ou de toute autre forme de rationnement (file d'attente, tirage au sort, limite d'âge?). Enfin, un bien public pur est soumis à une obligation d'usage (par exemple, la défense nationale est un service public que les anti-militaristes sont obligés de consommer, même malgré eux?). Si les biens publics purs sont produits et financés par l'Etat, il existe cependant une gamme de biens publics mixtes, c'est-à-dire qui ont quelques propriétés de biens publics purs, mais également de biens privatifs, qui ne justifient pas d'une production par un monopole public. L'impossibilité de tarification et/ou d'imposer un paiement conduit inexorablement à l'abandon de ce type de production par le marché alors qu'elle se révèle indispensable au bien-être collectif et donc à la croissance. Le monopole public, capable de dissocier dans le temps et dans l'espace, production, délivrance du service et ressources (impôts) semble donc bien ici la condition d'une plus grande efficacité.

Liens utiles