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Dans quelle mesure l'ONU est-elle efficace ?

Publié le 28/11/2011

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Le 2 septembre 1945, l’armistice entre les USA et le Japon est signé. Il marque la fin de la 2° guerre mondiale. Après 6 ans de conflit et 62 millions de morts, le constat est clair : la SDN (Société des Nations) qui devait assurer la Paix par le dialogue entre les peuples a échoué.

Pour éviter qu’un tel échec se reproduise et que le dialogue entre Nations soit coupé, 51 pays fondateurs dont la France et les USA signent à Rome, le 24 Novembre 1945, la « Charte des Nations Unies ». Ils s’engagent notamment « à préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances ».

Aujourd’hui, 192 pays, soit la quasi-totalité des pays reconnus internationalement ont signé la Charte et font partie de fait de « l’ONU » (Organisation des Nations Unies).

Mais dans quelle mesure cette nouvelle organisation est-elle efficace ?

Dans un premier temps, nous verrons pourquoi l’ONU à les moyens de réussir là où la SDN a échoué, et quelles actions concrètes elle mène.

Puis dans un second temps, il sera détaillé les limites de son action et les causes potentielles d’un nouvel échec.

 

 

L’ONU est avant tout un espace de dialogue et d’échange au sens large du terme. Au sein de la SDN, de nombreux pays étaient absents, dont les USA et la quasi-totalité des nations Africaines (considérées alors comme des colonies et donc absentes des négociations). Lorsqu’un consensus était obtenu parmi les Etat de la SDN, ce n’était donc pas un consensus mondial.

L’ONU a su mieux fédérer les nations du monde : aujourd’hui, 192 Etats y sont représentés et peuvent faire entendre leur voix devant le monde. Faire partie de l’ONU est même devenu une des conditions sine qua non pour exister sur la scène internationale. Un signe de cette réussite : la Suisse en dépit de son principe de neutralité décide de la rejoindre en 2002.

En contrepartie, chaque membre convient d'accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de sécurité. Ainsi par ce principe, et en utilisant uniquement le dialogue, l’ONU est parvenu à construire une base solide à la stabilité mondiale.

Au-delà des échanges entre diplomates, l’ONU a permis à tous ses Etats membres de sortir d’une certaine forme d’isolement dans l’analyse de leur propre situation, tous thèmes confondus : en effet l’ONU, par le truchement de l’outil statistique, édite des documents au niveau mondial sur des thèmes aussi variés que l’environnement, le développement économique, le développement social, …

Le monde dispose ainsi d’une base de données précise, faites avec une méthodologie unique, avec laquelle chaque Etat peut comparer sa situation avec celle de son voisin ; et analyser les mesures mises en place par ce dernier pour résoudre tel ou tel problème.

Afin d’aider les Etats ayant une réelle volonté politique de développement, et leur donner de meilleures perspectives d’avenir, l’ONU dispose de nombreuses agences spécialisées telles que le FIDA, l’UNESCO, l’UNICEF, …

Ces agences jouent un rôle capital, notamment dans le développement de pays parmi les plus pauvres du globe. Ainsi au Mali par exemple, l’UNICEF (United Nations International Children's Emergency Fund) oeuvre depuis plus de 30 ans pour l’amélioration des conditions sanitaires et l’éducation des enfants. Son action a permit de réduire la mortalité des enfants de moins de 5 ans de 37,4% en 1970 à 19,4% en 2008 ; par ailleurs le taux brut de scolarisation qui était de 26% en 1990 est passé à 64% en 2002.

A terme, ces générations mieux instruites et en meilleure santé participeront à l’essor économique et social de leur pays et contribueront à une meilleure stabilité politique de ces régions.

Certaines agences n’ont pas pour vocation de porter une assistance, financière ou sociale et jouent un rôle d’harmonisation des règlementations et d’audit afin de détecter les problèmes potentiels et d’édicter des normes afin qu’ils ne surviennent pas. C’est le cas de l’OACI (Organisation de l’Aviation Civile Internationale) pour l’aviation ou de l’OMI (Organisation Maritime Internationale) pour la marine ou encore de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) pour l’industrie pharmaceutique…

En éliminant en amont les sources de litiges ou en offrant un arbitrage impartial lorsqu’ils surviennent, L’ONU promeut le développement des économies et permet au Nations d’harmoniser leurs efforts dans des objectifs communs.

Toutes les agences de l’ONU, quel que soit leur domaine de compétence, oeuvrent donc à la construction d’un avenir meilleur pour tous (Charte de l’ONU, article1). Leur multiplication et leur hyperspécialisation permet de traiter plusieurs problèmes de front et d’apporter à chaque la réponse la plus adaptée et efficace possible.

Malheureusement, le dialogue, la recherche de solutions et les recours diplomatiques ne fonctionnent pas toujours. Ce fut une des causes du naufrage de la SDN qui ne disposait d’aucun moyen pour palier à cet état de fait, ni pour faire appliquer ses recommandations.

Pour éviter que les mêmes causes aboutissent aux mêmes conséquences, l’ONU est dotée d’une force armée appelée « Force de Maintien de la Paix des Nations Unies » ou plus couramment : « Casques Bleus ». Elle fut utilisée pour la première fois en 1956 lors de la « Crise du Canal de Suez ». Depuis, elle a été déployée 60 fois et 15 de ces opérations sont toujours en cours.

Cette force représente l’expression ultime de la volonté de Nations Unies et est parvenu, dans la plupart des cas, à ramener la Paix dans les territoires où elle était déployée.

 

 

Malgré tous les moyens et les structures mises en place, les actions de l’ONU sont parfois limitées dans leur action (manque de moyens), voire dans leur intention (gel de la mission par le Conseil de Sécurité ou à cause de pressions externes)

En effet, l’ONU n’est pas une institution supranationale (au-dessus des Etats) mais une institution internationale. Elle est donc la somme des volontés des Etats qui la compose. Si trop peu ou aucun Etat ne souhaite s’investir dans tel ou tel projet, celui-ci ne se réalisera alors jamais.

C’est particulièrement vrai avec les 5 pays membres permanents du Conseil de Sécurité (Chine, Russie, USA, France, Royaume-Uni). En effet ces derniers disposent d’un Droit de Veto qui leur permet de geler toute initiative des Nations Unies. Cela donne à chacun la possibilité de faire passer très facilement son intérêt particulier avant l’intérêt commun.

Pendant la Guerre Froide, L’ONU fut complètement paralysée par les USA et l’URSS qui utilisèrent 242 fois leur droit de Veto en 45 ans.

Plus récemment, lors de la Crise du Darfour, alors qu’un véritable génocide des populations noires avait lieu, la Chine fit usage de son Droit de Veto, afin d’empêcher des sanctions à l’encontre du gouvernement soudanais. Cela afin de préserver ses intérêts économiques dans l’exploitation pétrolière.

Lorsque l’ONU prend des résolutions de sanctions à l’encontre d’un pays, en théorie cela a valeur de lois car tous les pays membres se sont engagés à respecter ces résolutions. En pratique, elles sont purement consultatives et ont été incapables par exemple :

- de rendre son autonomie au Tibet (Résolution 1723, 1961)

- de prévenir la Guerre des Balkans (Résolution 770, 1992)

Conscient que ses résolutions ne sont pas toujours suivies, l’ONU a parfois pris des résolutions… sans contenu. En effet, il est plus facile pour les pays d’adhérer à une résolution lorsqu’elle n’engage à rien ! Ces résolutions n’ont donc qu’un effet d’annonce et ne servent pas tant à faire bouger la communauté internationale qu’à donner à l’opinion mondiale l’illusion d’une réaction des Nations Unies.

On peut citer encore le cas de la Crise du Darfour en 2004 : alors que le gouvernement soudanais ne faisait rien pour empêcher les massacres, le Conseil de Sécurité de l’ONU (bloqué par la Chine) prend solennellement la Résolution 1564 dans laquelle il s’engage à menacer (seulement) le Soudan s’il persiste dans son attitude... En 2010, soit 6 ans, 22 résolutions et 300.000 morts plus tard, un mandat d’arrêt international est émit contre le Président soudanais. Ce dernier est toujours en exercice aujourd’hui…

Au Nations Unies, comme ailleurs malheureusement, la Paix est une question d’argent. Celui de l’ONU provient pour ¼ de donation d’individus, d’entreprises, de fondations,… Les ¾ restants ont pour origine les pays membres. La somme collectée, sert pour les frais de fonctionnement, mais aussi à payer le matériel et les salaires des personnels sur le terrain. Elle sert aussi à financer les 15 interventions militaires toujours en cours dans le monde.

Or depuis plusieurs années, l’argent manque et l’ONU fonctionne à crédit. La faute principalement à ses Etats membres qui n’ont pas payé leur contribution obligatoire. Ainsi en 2007, 31 Etats sur 192 avaient payé leur contribution à temps. Les USA détenant presque les 2/3 de la dette totale. En 2009, ils ont régularisé leur situation par le versement de $2,2 milliards ce qui correspond à un an de budget des Nations Unies.

 

 

L’ONU est donc trop tributaire du financement des Etats qui la compose. Difficile de demander à un Etat comme l’URSS de donner de l’argent tout en prenant des résolutions de sanction pour son invasion injustifié de l’Afghanistan ; idem plus récemment pour les Etats-Unis et l’Irak. Difficile aussi de mener des actions pour l’éducation lorsqu’on a plus de quoi payer les professeurs.

L’existence du Droit de Veto est aussi un immense frein à l’action de l’ONU. En effet l’expérience montre qu’une action concrète, aussi bien fondée soit-elle, n’a aucune chance d’aboutir si elle va à l’encontre des intérêts particulier d’un des 5 membres permanents.

Est-ce alors un progrès d’amener des populations entières à l’âge adulte, mieux éduquées, en meilleure santé, et les voir mourir dans des conflits ethniques ou interétatiques? (En 2002, $13,5 millions avait débloqués pour des programmes d’aide au Soudan, dont $10,3 millions pour des problématiques de santé)

Ceci dit comme détaillé en première partie, l’ONU obtient des résultats remarquables dans des régions comme l’Afrique sub-saharienne où son action a été et reste déterminante pour y améliorer les conditions de vie et d’éducation. Dans ces régions, les défis importants à venir seront : l’amélioration des conditions sanitaires, la promotion de l’éducation et particulièrement celle des filles et la lutte contre les pandémies, et surtout celle du VIH. Avec ses agences spécialisées, sa connaissance du terrain depuis maintenant plusieurs décennies, et l’importante médiatisation de son action, l’ONU semble bien placée pour surmonter ces défis.

Au niveau de la stabilité mondiale, les Nations Unies restent le « garde fou » et l’arbitre des bonnes pratiques diplomatiques : en émettant un avis positif ou négatif sur les actions des Etats, les Nations Unies n’empêchent peut être pas son occurrence, mais elles ont le pouvoir de discréditer un pays aux yeux du monde, avec toutes les conséquences diplomatiques et économiques que cela entraine.

Par soucis d’image, à l’heure d’Internet et de l’hyper-information, de moins en moins d’Etats accepteront les échanges commerciaux et diplomatiques avec d’autres Etats devenus moribonds par leur attitude belliqueuse ou leur politique irresponsable.

De ce fait, le dialogue diplomatique sera de plus en plus valorisé par rapport à la force armée.

Tant que l’Organisation des Nations Unies permettra ce dialogue, son action ne sera pas inefficace ; mais elle doit avoir le courage de réformer certaines structures et méthodes de décision contre-productives si elle ne veut pas finir paralysée et obsolète.

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