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Dom Juan

Publié le 05/03/2011

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juan

CTE III, scène 2 – Dom Juan, Sganarelle, Francisque.

SGANARELLE. Enseignez-nous un peu le chemin qui meine à la Ville.

LE PAUVRE. Vous n’avez qu’à suivre cette route, Messieurs, et détourner à main droite quand vous serez au bout de la forest. Mais je vous donne avis que vous devez vous tenir sur vos gardes, et que depuis quelque temps, il y a des voleurs icy autour.

D. JUAN. Je te suis bien obligé, mon amy, et je te rends graces de tout mon coeur.

LE PAUVRE. Si vous vouliez, Monsieur, me secourir de quelque aumosne.

D. JUAN. Ah, ah, ton avis est interessé à ce que je vois.

LE PAUVRE. Je suis un Pauvre homme, Monsieur, retiré tout seul dans ce bois depuis dix ans, et je ne manqueray pas de prier le Ciel qu’il vous donne toute sorte de biens.

D. JUAN. Eh, prie-le qu’il te donne un habit, sans te mettre en peine des affaires des autres.

SGANARELLE. Vous ne connoissez pas Monsieur, bon homme, il ne croit qu’en deux et deux sont quatre, et en quatre et quatre sont huit.

D. JUAN. Quelle est ton occupation parmy ces arbres ?

LE PAUVRE. De prier le Ciel tout le jour pour la prosperité des gens de bien qui me donnent quelque chose.

D. JUAN. Il ne se peut donc pas que tu ne sois bien à ton aise ?

LE PAUVRE. Helas, Monsieur, je suis dans la plus grande necessité du monde.

D. JUAN. Tu te moques, un homme qui prie le Ciel tout le jour ne peut pas manquer d’estre bien dans ses affaires.

LE PAUVRE. Je vous asseure, Monsieur, que le plus souvent je n’ay pas un morceau de pain à mettre sous les dents.

D. JUAN. Voila qui est étrange, et tu es bien mal reconnu de tes soins ; ah ah, je m’en vais te donner un Louis d’or tout à l’heure pourveu que tu veuilles jurer.

LE PAUVRE. Ah, Monsieur, voudriez-vous que je commisse un tel péché ?

D. JUAN. Tu n’as qu’à voir si tu veux gagner un Louis d’or ou non, en voici un que je te donne si tu jures, tiens il faut jurer.

LE PAUVRE. Monsieur.

D. JUAN. A moins de cela tu ne l’auras pas.

SGANARELLE. Va, va, jure un peu, il n’y a pas de mal.

D. JUAN. Prens, le voila, prens te dis-je, mais jure donc.

LE PAUVRE. Non Monsieur, j’ayme mieux mourir de faim.

D. JUAN. Va va,] je te le donne pour l’amour de l’humanité. Mais que voy-je là, un homme attaqué par trois autres ? la partie est trop inégale, et je ne dois pas souffrir cette lascheté.

(Il court au lieu du combat.)

Dom Juan, ou Le Festin de Pierre, Molière

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