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En Quoi L'Odyssée Est-Elle Une Épopée ?

Publié le 19/09/2010

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A l’origine de la littérature occidentale, aux environs du VIIIème siècle (avant J-C), on retrouve l’Odyssée écrite par Homère. Cette œuvre, suite de l’Iliade, qui relate l’épisode de la guerre de Troie, est un mélange probable de faits historiques et de mythologie. Nous en étudions la traduction de Philippe Jaccottet, et notamment les chants V à XIII, qui racontent l’arrivée d’Ulysse chez les Phéaciens où il retrace tout son périple avant d’arriver, dix ans plus tard, à Ithaque.  L’Odyssée est souvent qualifiée d’épopée – poème en vers généralement oral -, nous pouvons nous demander en quoi ce terme peut lui correspondre ? Pour cela, nous vérifierons si les principaux caractéristiques de l’épopée sont présents dans l’œuvre : Dans un premier temps, il s’agira d’expliquer ce qu’est le genre épique, pour ensuite observer la présence ou non d’un héros dont on fait l’éloge, puis celle du merveilleux ; et enfin voir s’il y a la présence d’amplification ou d’exagération dans l’histoire.

 

Dans le dictionnaire, lorsqu’on recherche le mot « épique «, on peut tomber sur ces synonymes : « dramatique, élevé, emphatique, extraordinaire, fabuleux, fantastique, grandiloquent, héroïque, homérique, inimaginable, invraisemblable, pompeux, rare «. Pour aller un peu plus loin, on peut rechercher la définition du « genre épique «, et on obtient ceci : « il provoque l'admiration et l'effroi des lecteurs en narrant les exploits guerriers de héros formidables dans un univers hanté parfois de forces surnaturelles. « Le genre épique, c’est aussi un principe de schématisation, avec un héros dont on fait l’éloge, dont on célèbre les exploits après sa confrontation avec une multitude de dangers, et l’idée de deux puissances manichéennes qui se sont font faces. De plus, pour corser les péripéties, on à l’action du merveilleux, de puissances divines qui interviennent pour aider le héros ou au contraire l’empêcher d’atteindre son but. En dehors de l’histoire, on peut également dire de ce genre qu’il est souvent associé à la poésie, puisqu’écrit en vers ; il vise l’amplification en s’aidant de divers procédés. Après cette brève définition, nous pouvons maintenant nous rendre compte des points sur lesquels l’Odyssée peut-être qualifiée d’épopée.

Il n’y a, ici, aucun doute sur la présence d’un héros : Ulysse. On remarque également que c’est un éloge que l’on fait de lui, grâce au vocabulaire mélioratif : « le patient Ulysse «, « ingénieux Ulysse «, « Ulysse l’endurant «, et l’adjectif utilisé le plus souvent : «Ulysse le généreux « ; de plus, Ulysse est également connu pour sa force physique (lorsqu’il bat les Phéaciens au lancer de disque) et pour sa ruse (on le surnomme : « l’homme aux milles tours. «)

Ulysse est également l’image du héros guerrier, dont on retrouve le champ lexical tout au long de l’œuvre : « je pillai Ismaros et massacrai ses défendeurs «, « on combattit en ligne «, « on échangea les coups de lance «, ainsi que « les guerriers qu’il tua «.

Le héros est également représenté par les nombreuses péripéties auxquelles il doit faire face. Ici, nous pouvons observer les différentes péripéties d’Ulysse au long des dix ans qu’il a erré sur la mer : 

 

Chez les Cicones, IX, 1-61 

Chez les Lotophages mangeurs d'Oubli, 62-104 

Les Cyclopes, 105-461 

Dans l’île d'Éole, maître des vents, X,1-79 

Chez les géants Lestrygons, X, 80-132 

Dans Aiaiè, l'île de la magicienne Circé, X, 133-574 

Chez les Cimmériens, pays qui ne voit pas le Soleil : entrée des Enfers (chant XI en entier) 

Retour chez Circé, XII, 1-164 

Passage près des Sirènes, XII, 165-200 

Charybde et Scylla, XII, 201-259 

L'île du Soleil, XII, 260-390

Chez Calypso (fin du récit du voyage d’Ulysse, puisque le premier épisode qu’il a raconté aux Phéaciens est son départ de chez la nymphe)

 

Ulysse possède les caractéristiques typiques du héros de roman épique, c’est un valeureux guerrier, qui défend son honneur et sa famille ; il aura du mérite à rentrer chez lui car il traverse les difficultés avec ruse et intelligence.

 

Dans une épopée, on retrouve également l’action de forces surnaturelles qui agissent sur la vie réelle. L’Odyssée, est un univers qui sort de la réalité, un univers où se développent des effets magiques. 

Il y a tout d’abord la présence de nombreux dieux, qui interviennent quotidiennement dans la vie des humains ; c’est une référence à la mythologie grecque, qui possède des dieux pour un grand nombre de choses de la vie. Par exemple, on retrouve l’intervention du Dieu des dieux : Zeus, ou encore celle d’Athéna (déesse de la sagesse et de la stratégie guerrière), Poséidon (dieu des océans et des mers), Hermès (le messager des dieux), etc. Les dieux sont comme les arbitres du monde humain, ils délimitent le bien et le mal, et aident les humains dans des situations où ils se sentent impuissants. La référence aux dieux donne à l’Odyssée une image historique et moraliste, un modèle à suivre.

Homère a également inscrit dans son œuvre des personnages dérivés d’humains, comme les cyclopes, les sirènes, les nymphes, etc. Ces personnages sont comme des étapes au voyage d’Ulysse. A chaque île qu’il franchit, il rencontre un autre personnage  qui possède sa propre manière de vivre ; ces surhommes sont probablement également issus de la mythologie grecque, et sont ici reconstitués avec tout ce qui les entoure, ce qui est intéressant pour le lecteur qui découvre une sorte de nouveau monde à chaque fois. De plus, ils ont chacun une influence différente sur le voyage d’Ulysse : les sirènes auxquelles il faut résister évoquent la détermination, les vents d’Eole enfermés dans un sac sont un substitut à la boite de Pandore et à la curiosité humaine, les Lotophages montrent l’envie, etc. On a l’impression que chacune de ces créatures représente une tentation humaine et c’est à ce moment que les dieux interviennent pour remettre les hommes dans le droit chemin.

La présence du merveilleux prend une place importante dans l’Odyssée, elle constitue les obstacles aux héros et les aides qu’il peut obtenir. 

 

Une épopée comprend également un grand nombre de procédés servant à amplifier. 

On peut retrouver tout au long du texte des figures d’exagération comme les hyperboles (« va donc errer, souffrant mille morts «), ou une insistance sur le nombre avec l’utilisation du pluriel («mes compagnons «), ou encore des superlatifs superlatif (« les douze plus braves d’entre eux «) et des adverbes d’intensités. 

Ainsi qu’un grand nombre de comparaisons (« comme le poulpe qu’on arrache à sa traite «), de métaphores, et de personnifications (« l’aube quittant le lit du glorieux Tithon « ; « la fille du matin, l’aube aux doigts roses «) qui donnent au roman une dimension personnelle avec des objets inanimés qui sont considérés comme des êtres vivants ; ces procédés aident à relier le merveilleux à l’histoire car ils sont souvent attribués aux dieux ou à leur façon de s’exprimer. 

Ces procédés donnent à l’œuvre une dimension plus orale - les personnes qui écoutent peuvent mieux identifier les choses quand elles sont exagérées-  ils aident à donner de la poésie.

 

L’Odyssée reprend les caractéristiques du registre épique et donc de l’épopée. Ulysse a le rôle du héros, et face à lui des obstacles se dressent. C’est grâce à l’aide du merveilleux qu’il pourra s’en sortir et rentrer enfin chez lui. De plus, l’histoire active le patriotisme grec et l’héroïsme guerrier, et aide le grec à savoir quoi penser et quoi faire pour honorer ses dieux et vivre la vie comme il faut.

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