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Enfance de Nathalie Sarraute

Publié le 12/09/2006

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sarraute

Enfance est une autobiographie écrite en 1983 par Nathalie Sarraute, née en 1900 et morte en 1999, le passage que nous allons étudier se situe vers le début. Kolia et la maman de la fillette « jouent à lutter « quand Nathalie tente de s’immiscer dans le jeu et se fait alors repousser, plongeant en elle des sentiments néfastes et d’incompréhension. Comment l’écrivain arrive t’elle à retranscrire son souvenir dans toute sa vivacité sans nous mentir ? Quelles sont les enjeux d’un tel souvenir douloureux ? Nous étudierons dans un premier temps le souvenir lui-même, et dans un second temps, les caractéristiques d’un débat intérieur de l’autobiographe. Trois personnages sont présents dans cet extrait. Tout d’abord l’enfant, dans la première personne du singulier, ligne 1 « je sentais «, « j’aimais «, le COI « il m’arrivait « ligne 15. Tout l’extrait est vu à travers elle, à travers Nathalie Sarraute puisque l’on sait qu’il s’agit d’une autobiographie. Le temps de l’imparfait démontre son désir de garder ses illusions. Le champ lexical de l’affection ligne 3 « j’aimais «, « enserres «ligne 47, évoque une douceur enfantine de la part de Nathalie. Ligne 13, « je ne saisissais pas bien ce qu’ils disaient « la négation évoque une candeur, une incompréhension de l’enfant. Cette dernière met en scène dans cet extrait un couple chaleureux et aimant, ligne 18, la métaphore « ce courant chaud « en témoigne. Cette bulle de chaleur et de tendresse est étendu jusqu’à la petite fille, ligne 19 « j’en recevais, moi aussi, comme des ondes «, l’insistance de la première personne et du caractère répétitif du « aussi « le justifient. Le premier évoqué est Kolia, présenté grâce au champ lexical de la douceur, de la tendresse, ligne 3 « une douceur «, « une bonhomie «, ligne 5 « le regard bienveillant «. Ce physique engageant est reflété également par son caractère, ligne 6 « son rire si facile à faire sourdre «. Le rythme ternaire, ligne 1 et 2 « de ses joues arrondies, de ses yeux myopes, de ses mains potelées « ajoute un sentiment d’harmonie. Kolia attire la sympathie par son côté, bon vivant, ligne 3 « une bonhomie « et aucun vocabulaire dépréciatif ne le caractérise. Même lorsque Nathalie évoque son ton « impatient « ligne 9, le mot dépréciatif est atténué par l’adjectif qualificatif « gentiment «. L’adverbe « jamais « suivit de la proposition « de véritable mécontentement « évoquent le côté toujours gentil de cet amant. Cette description positive d’un père qui n’est pas le sien mais qui pourrait l’être est due au fait que ce n’est pas l’acteur de l’acte suivant qui bouleversera l’écrivain. Kolia est amoureux de la mère de Nathalie, ligne 4 « l’air d’admiration […] quand il regardait maman «, il est indiqué comme son mari, ligne 30 « femme et mari sont un même parti « et répété ligne 48. Quand à la mère, elle n’est pas décrite par Nathalie. Celle-ci mentionne uniquement sa jupe, ligne 47, évoquant le côté artificiel. Les phrases qu’elle prononce sont figées, et ne représentent qu’un agacement bien visible. Ligne 30, « laisse donc… «. Elle est uniquement décrite dans ses relations avec Kolia, qui est une relation aimante et avec sa fille qui parait être une relation ambiguë et pas très chaleureuse. Par exemple, ligne 47 « tu enserres de tes bras la jupe de ta mère, et elle se dégage «, l’opposition des deux verbes « enserrer « qui relève de l’affectif et « se dégager « qui relève de l’agressivité démontre une sécheresse de la part de la mère. L’évocation de ce souvenir douloureux est mise en scène de façon originale dans cet extrait, comme dans tout le texte. Il est retranscrit en un dialogue à deux voix, on le remarque grâce aux tirets différents : « je « et « tu «. Nous pourrions nous interroger sur leur identité. Elles ont des points de vue différents qui s’opposent. Ligne 20, « Pourtant « marque une première opposition, ligne 23, le « tu « reprend les derniers mots de la première voix, exprimant à nouveau son désaccord grâce au « même «. Avec ses interrogations, comme ligne 37 « crois-tu vraiment ? « ou ligne 44 « et c’est tout ? Tu n’as rien senti d’autre ? «, elle marque son incertitude par rapport aux avances de la première voix. Le temps utilisé pour le « tu « est du présent alors que le temps utilisé pour le « je « est du passé. La première voix se plonge dans son passé alors que la seconde tente de comprendre au moment même. Le « je « emploie un vocabulaire moins recherché que le « tu «, par exemple lorsque chacune raconte à sa manière l’incident. Ligne 28 « j’ai passé mes bras autour d’elle « est un lexique banal alors que la seconde voix, ligne 47 « tu enserres de tes bras « est plus recherché. Cela pourrait évoquer une maturité chez le « tu «, la présence de Nathalie Sarraute adulte. Ces deux voix s’opposent certes, mais elles sont semblables également. Elles ont une même histoire, lorsque le « tu « racontes à nouveau le souvenir du « je «, l’histoire est quasiment identique, de la ligne 44 à 50 par rapport au passage de la ligne 26 à 31. La seconde voix connaît la première par cœur, ligne 23 « ces mots sont restés en toi pour toujours «, elle semble lire en elle. Ces similitudes pourraient refléter le débat intérieur qui se déroule à l’intérieur de Nathalie Sarraute pour comprendre comment ce souvenir l’a-t-il marqué. L’évolution du souvenir se fait grâce à la seconde voix. L’exclusion n’est que très légère au début, ligne 29 « repoussée doucement « n’évoque en aucun cas l’agressivité. Tout est très léger, ligne 34 « ce que j’ai ressenti était très léger «. Pourtant dans la métaphore qui suit « c’était comme le tintement d’un verre doucement cogné « nous pourrions imaginer que c’est une première alerte du sentiment douloureux, de la réalisation de l’enfant. L’enfant n’est plus trop sure d’elle « il m’a semblé « ligne 38, marque cette incertitude. A la ligne 51 pourtant, « C’est vrai… je dérangeais leur jeu «, est le moment ou elle prend conscience pour la première fois de son sentiment d’exclusion. Puis elle est poussée par la seconde voix, qui à la manière d’un interrogatoire, cherche la vérité, ligne 52 « allons, fais un effort « qui a lieu de sermon et ligne 55, « c’est bien, continue… « qui a lieu d’encouragement flatteur. Le moment ou elle atteint la compréhension est ligne 56 « j’étais un corps étranger… «. Les deux voix sont alors pour la première fois d’accord. L’affirmation « oui « ligne 57 en témoigne ainsi que ligne 58 « Tu ne pouvais pas mieux dire «. Tout parait alors clair pour les deux voix mais ligne 62, les deux négations « non, cela je ne l’ai pas pensé « évoquent alors à nouveau un désaccord de la part de la première voix. Ligne 64 « un promontoire qui surgit un instant du brouillard… et de nouveau un épais brouillard le recouvre «, cette métaphore du sentiment que Nathalie Sarraute éprouve explique pourquoi celle-ci a eu autant de mal à s’en souvenir. Ca n’a duré qu’un instant, un infime moment. Ligne 63, « indistinct, irréel « évoque le caractère vague et approximatif du sentiment éprouvé ainsi que les indéfinis « c’est apparu « ligne 64 ou encore « c’est cela « ligne 58. De nouveau, la première voix utilise la négation « Non « ligne 67, et les mots « trop loin « pour marquer son désaccord. Mais la seconde voix ne cède pas, c’est elle qui a la dernière réplique avec le « Si « marquant qui montre la certitude de ce qu’elle avance. L’enfant a entraperçu la vérité « je reste tout près « ligne 68, cette vérité douloureuse d’une exclusion de la mère. Nous retrouvons dans cet extrait, le caractère imprécis et incertain du souvenir. La présence durant tout le passage d’une syntaxe typique de ce roman, les nombreux points de suspension comme ligne 20 « tu te rappelles.. « ou ligne 31 « je me suis écartée… « le confirme. De plus l’importance du langage est également bien marquée dans cet extrait. Le « dicton « est répété trois fois, ligne 30, 42 et 48 « laisse-donc… femme et mari sont un même parti « donnant de l’intensité. Il y a une volonté

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